Entre déconfinement des corps et déconfinement des esprits, le maillon essentiel de l’entreprise

Melkom Boghossian
Reputation Squad
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3 min readJun 1, 2020

Pour les entreprises, la fin d’une mise entre parenthèses

L’annonce récente du gouvernement, selon laquelle le chômage partiel des salariés ne sera désormais financé qu’à 85% par la collectivité pour un montant total d’environ 70% du salaire net, marque un seuil symbolique pour les entreprises : c’est celui de la fin de leur mise entre parenthèses par la puissance publique. À compter des prochaines semaines, elles auront à nouveau à procéder à des arbitrages dans le domaine particulièrement sensible de la gestion de leurs employés, que le gouvernement avait souhaité temporairement soustraire aux fluctuations du monde privé, et dont la place grandit de jour en jour sur la scène médiatique comme dans les préoccupations des Français.

Si elle place un nouveau poids sur les entreprises, cette annonce dresse également la première pierre vers leur inévitable retour à la manoeuvre dans l’orientation et la redynamisation d’un monde économique mis à mal par le confinement. L’Etat amorce peu à peu la fin de son régime d’omniprésence organisée, qui avait défini ces derniers mois. À mesure que s’effacent progressivement les manifestations de son intervention, qu’elles soient des subventions, des normes d’exception ou des efforts d’orientation directe de l’économie, les entreprises devront se réhabituer à endosser le rôle moteur qui les a toujours définies et dont elles pourraient avoir été partiellement déshabituées par une soudaine réduction de leur horizon aux opérations de maintien et de survie.

Une opinion publique restée en arrière du déconfinement effectif

La reprise économique, qui concentre peu à peu autour d’elle représentations médiatiques, espoirs et angoisses, entre dans une phase où elle ne sera plus exclusivement guidée par la main du gouvernement : désormais, c’est aussi aux individus et entreprises de s’en emparer. L’opinion publique, elle non plus, ne pourra pas ouvrir la voie vers le rebond en opérant par elle-même le déconfinement mental qui doit suivre le déconfinement des corps. Afin de retrouver ses marques, elle aura besoin que soit présenté devant ses yeux un monde renouant avec l’activité, monde qui sera construit par la somme des initiatives prises à l’échelle des entreprises, grandes ou petites, alors qu’elles sortent de la torpeur pour réinsuffler de l’énergie à l’économie du pays, qui est aussi une partie du tissu de la société au sens large.

Les entreprises pourraient donc se retrouver dans une position qui leur demandera de prendre les devants pour poser les jalons de la reprise en termes concrets : remise en mouvement des personnes, restauration de moments de vie temporairement oubliés, retour progressif à la communauté entre collaborateurs comme avec les clients… Sur ce terrain, les sociétés françaises les plus emblématiques seront toutes désignées pour jouer un rôle prééminent, alors que se tourneront vers elles tous les regards en quête d’une première image de ce qui se dessine pour les mois à venir, non pas simplement en termes d’emploi et d’opportunités économiques, mais aussi en termes de vie, de cohabitation, d’horizons.

La reprise s’annonce à rythmes multiples

Dans ces circonstances, l’attentisme et la paralysie prolongée infligeront des dégâts aux entreprises qui les choisiront comme au pays lui-même, qui aura besoin pour sortir du sommeil de la stimulation et de l’énergie continuelles d’entités prêtes à jouer le jeu du rebond au sens plein, c’est-à-dire de s’emparer de la reprise, de l’incarner et de tracer un chemin dans lequel d’autres pourront s’engouffrer derrière elles. Des positions de “meneur” et de “suiveur” apparaîtront inévitablement dans cet environnement, et pourraient affecter le capital d’image des sociétés sur le long terme, dans la mesure où elles donneront les premiers signes auxquels on reconnaîtra celles qui sont capables de se projeter vers l’avenir, par opposition à celles qui pourraient s’être durablement engluées dans un présent récessionnaire.

Les signes de la projection vers l’après et de l’envie de reprise se manifestent ces derniers jours à plusieurs échelons : optimisme des investisseurs, consentement des gouvernements à relâcher les contraintes, scientifiques eux-mêmes parfois moins réticents à évoquer de possibles effets saisonniers… Pour aider public et employés à se saisir de ces quelques signes annonciateurs et à y ajuster leur état d’esprit pour adhérer eux aussi à la dynamique naissante de reprise, l’action des entreprises sera dans les mois qui viennent le maillon essentiel.

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