Que sont des données d’OIF “exploitables” et pourquoi est-ce important?

Brad Mulley
Resource Extraction Monitoring
6 min readJan 14, 2021
OIF en mission en République du Congo

L’Observation Indépendante des Forêts (OIF) évolue…

À la base, l’OIF vise à fournir des informations objectives et exploitables sur l’exploitation forestière et d’autres secteurs qui y sont liés.

Ces informations sont essentielles pour lutter contre la dégradation illégale des forêts et la déforestation.

Par exemple, les mesures du côté de l’offre et de la demande telles que le Plan d’Action de l’UE sur l’application de la législation forestière, la gouvernance et les échanges commerciaux (FLEGT) et le Règlement sur le Bois de l’Union Européenne (RBUE) visent à exploiter le pouvoir du marché du commerce du bois pour lutter contre l’exploitation forestière illégale.

Pour que cette lutte soit efficace, il y a besoin d’informations sur les risques associés aux exportations et importations de bois. Les Observateurs Indépendants (OI) sont essentiels pour répondre à ce besoin. D’autrepart, les OI, en particulier les programmes dirigés par les organisations nationales de la société civile (OSC), fournissent des informations pour contribuer à la réforme des politiques, améliorer les relations entre la société civile et le gouvernement, et renforcer les droits des communautés.

La valeur des informations produites par les OI explique pourquoi les bailleurs internationaux continuent de soutenir leur développement et leur expansion. Dans le bassin du Congo, par exemple, un financement consistant de l’UE, du DfID (maintenant FCDO) et d’autres bailleurs a conduit à une expansion de l’OIF, qui a commencé avec les ONG internationales Global Witness et REM il y a deux décennies.

Il existe maintenant des dizaines d’organisations de la société civile qui mettent en œuvre des programmes d’OIF dans la région. Des centaines de membres de la communauté locale s’engagent également davantage dans l’OIF via des réseaux d’alerte.

Non seulement il y a plus d’OI, mais ils se renforcent aussi institutionnellement en s’organisant en plates-formes régionales et nationales telles que la Plateforme Africaine de l’Observation Indépendante (PAOI).

Les OI s’associent également à des organisations internationales comme le World Resources Institute et Rainforest Foundation UK pour développer de nouveaux outils tels que l’Open Timber Portal (OTP) et le Forest Link afin d’améliorer la manière dont les informations d’OIF sont collectées et communiquées aux décideurs.

… mais il est nécessaire de produire des informations plus exploitables

Des institutions plus fortes, un engagement plus large de la société civile et de nouveaux outils sont tous des signes que l’OIF est en plein essor. Et nous pouvons nous attendre à ce que la demande de données d’OIF augmente à mesure que les politiques de réduction de la déforestation importée gagnent du terrain, comme nous le constatons déjà au Royaume-Uni et dans l’UE.

Cette demande doit être satisfaite avec des informations exploitables afin de maximiser l’impact de l’OIF sur l’amélioration de la gouvernance forestière.

Cependant, sur la base d’un examen de milliers d’entrées de données dans l’OTP, de commentaires des principaux décideurs y compris des acheteurs de bois de l’UE, et de notre propre expérience de mise en œuvre et d’appui des programmes d’OIF depuis plus d’une décennie, il semble que les données d’OIF pourraient être plus exploitables.

Qu’est-ce qu’une information OIF “exploitable” ?

Dans le contexte de l’OIF, les informations exploitables sont :

Des informations sur les illégalités forestières et les problèmes de gouvernance difficiles à ignorer, mais faciles à défendre

Si les acheteurs de matières premières, les certificateurs tiers, les décideurs politiques, les services étatiques de mise en application de la loi et d’autres acteurs ne peuvent pas justifier l’inaction, félicitations, vous avez fourni des informations exploitables.

Alors, comment rendre l’information difficile à ignorer ?

  1. Donner du sens, pas seulement des données
  2. Suivre les meilleures pratiques de collecte de données
  3. Rendre l’information facile d’accès

Donner du sens

Les gens comprennent le sens, pas les données. Imaginez, par exemple, que vous alliez chez le médecin pour des tests. Le médecin vous envoie les résultats sous forme de données brutes : nombre de globules blancs, taux de fer dans le sang, etc. Que faites-vous ? Vous appelez le médecin et dites « Je ne comprends pas ce que tout cela signifie, est-ce-que je suis en bonne santé? ».

Imaginez maintenant que vous, l’OIF, êtes le médecin et que l’acheteur de matières premières dans l’UE soit le patient. Vous devez expliquer à votre patient la signification des données afin qu’il puisse agir. En d’autres termes, lui dire s’il existe des risques liés à la légalité, à la gouvernance, à l’environnement et/ou aux droits de l’homme. Les données existent uniquement pour appuyer votre alerte de risque, tout comme les données sur le nombre de globules permettent de tirer des conclusions sur votre santé.

Meilleures pratiques de collecte de données

Étant donné que le sens est dérivé des données, la manière dont les données sont collectées détermine l’exactitude et, en fin de compte, la valeur du sens.

Les meilleures pratiques évoluent constamment et varient selon le lieu, les missions organisationnelles et d’autres variables. Mais il existe quatre meilleures pratiques généralement acceptées dans la communauté OIF.

🔢Etre précis : fournir des détails sur les quantités, les emplacements, les délais, les acteurs impliqués et d’autres variables pertinentes

⚖️Connaître la loi : avant toute enquête, comprendre les responsabilités, obligations et droits légaux de toutes les entités impliquées

📐Trianguler les preuves : ne pas se fier à une seule source. Plus les sources sont diverses, plus l’observation sera difficile à ignorer ou à réfuter

🛣️Suivre les preuves : s’adapter là où les preuves peuvent mener afin de découvrir les problèmes sous-jacents, qui sont souvent plus importants que les problèmes immédiats

Rendre l’information facile d’accès

Les données et leurs significations dérivées n’ont d’impact que si les utilisateurs finaux peuvent facilement y accéder. Le sens est déjà donné dans les rapports OIF sous forme d’analyses, de recommandations et de conclusions. Mais elles sont parfois inconsistantes et pas toujours facile à digérer, surtout pour le profane.

Réalistiquement, lire et comprendre un rapport OIF de plus de 30 pages, souvent dans une langue étrangère, n’est pas faisable pour la plupart des gens

D’où l’existence de l’Open Timber Portal (OTP). L’OTP permet aux OIF de communiquer des informations exploitables directement aux acheteurs de matières premières de l’UE et à d’autres parties prenantes dans un format accessible.

Alors quoi faire maintenant?

En termes simples, pour optimiser leur valeur ajoutée, les OIF doivent réorganiser leurs stratégies et méthodologies avec un objectif central en tête : fournir des informations plus exploitables. Cela ne nécessitera pas de changements radicaux dans les budgets ou le personnel. Mais il faudra du temps pour tester et adapter différentes approches et outils pour que cela se réalise à grande échelle. REM est là pour stimuler la transition vers une OIF avec un plus d’impact à l’échelle mondiale.

A propos de Resource Extraction Monitoring (REM)

REM s’attaque de front à la mauvaise gouvernance. Nous différons des ONG conventionnelles en ce que REM établit des partenariats formels avec les gouvernements des pays producteurs de matières premières forestières à risque. Nous avons mis en œuvre des programmes d’OIF mandatés par les gouvernement au Cameroun, au Congo et en RDC entre 2005 et 2013, où nous avons documenté les illégalités et problèmes de gouvernance, renforcé l’application de la loi et les politiques, soutenu la conception et la mise en œuvre de systèmes d’assurance de la légalité FLEGT et renforcé les capacités des OI nationaux qui continuent de mener des programmes à ce jour.

Notre travail actuel vise à aider la communauté OIF à maximiser les impacts positifs de leur travail. Cela comprend un appui au développement de l’OTP, la co-mise en œuvre d’enquêtes pour tester de nouvelles méthodologies et technologies et susciter des débats et des discussions au sein de la communauté.

Vous pouvez en savoir plus sur le site de REM

--

--

Brad Mulley
Resource Extraction Monitoring

Twenty years of experience trying to improve forest governance, primarily in West and Central Africa.