Faisons de la neutralité carbone un objectif commun…réussi

Clement Georget
Riverse
Published in
6 min readJun 14, 2022

On parle souvent des risques de greenwashing autour de la neutralité carbone sans trop prendre le temps de revenir sur les raisons pour lesquelles cette expression a pris la place dans notre vocabulaire. Je reviens dans cet article sur :

  • Pourquoi la neutralité carbone fait débat ?
  • D’où ça vient ?
  • A quoi ça sert ?
  • Comment je m’y prends ?
  • Comment ne pas tomber dans le greenwashing ?

Pourquoi c’est un débat ?

Miracle de la communication, ces dernières années ont vu fleurir les promesses de neutralité carbone de grandes entreprises et les produits neutres en carbone dans les rayons, ce qui nous laisserait penser que tout le monde s’est finalement aligné avec les objectifs mondiaux.

Labels existants sur la neutralité carbone des produits

Mais pourquoi le dernier rapport du GIEC montre-t-il que les émissions de CO2 continuent d’augmenter ? C’est que la problématique n’est pas si simple.

Soyons clair dès le début, scientifiquement la notion de neutralité carbone n’a de sens qu’au niveau planétaire. Et elle signifie qu’on se trouve dans un état d’équilibre entre les émissions anthropiques et la séquestration par les puits de carbone.

Mais alors, à quoi bon définir la neutralité carbone sur une échelle inférieure à celle de la planète (pays, région, entreprise, produits…) ?? Pour permettre à tout le monde de mesurer son influence sur la trajectoire globale sur laquelle nous devons s’inscrire, mais pour cela il faudra se mettre d’accord sur les façons de partager cette échelle.

L’accord de Paris, le début de la course

Avant de regarder comment s’aligner sur cette trajectoire, prenons le temps de préciser d’où vient le terme. La notion de neutralité carbone à l’échelle planétaire apparaît d’abord dans les programmes des nations unies avec les ODD, mais c’est en 2015 lors de la COP de Paris que les diplomates inscrivent clairement le terme « net-zero » dans les textes.

Soit l’idée que la société humaine ne pourra plus émettre à moyen terme plus de gaz à effet de serre (GES) que ce que la planète est capable d’absorber. En français, cette expression est (maladroitement) traduite par neutralité carbone, notion qui pourrait exclure les autres GES. La loi climat, heureusement a bien pris en compte la totalité des gaz à effet serre et définit ainsi « un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre ».

Quand en 2018, le rapport du GIEC appuie sur la nécessité d’initier le freinage du réchauffement climatique, la notion de neutralité se généralise finalement. Aujourd’hui, il est un peu tard pour s’opposer frontalement à ce terme maintenant qu’il s’est répandu. Même s’il n’en reste pas moins maladroit scientifiquement de parler de neutralité carbone à une autre échelle que l’échelle planétaire, mieux vaut aider à encadrer son utilisation et lutter contre l’abus de celui-ci.

Stratégie Nationale Bas Carbone — x2 les puits de carbon /5 les émissions

Comprendre son impact, se positionner

Alors oui, il y a clairement une dissonance cognitive à voir émerger des revendications individuelles alors que l’objectif est global. Car cette notion ne prendra de sens qu’une fois qu’on aura réussi à diviser par 5 les émissions actuelles et multiplier par deux nos puits de carbone. Ce qu’on ne fera pas seul chacun dans son coin mais en s’organisant pour que chacun puisse y jouer un rôle.

Les standards émergent pour répondre à ce besoin de cohérence, et mieux accompagner ceux qui souhaitent être en ligne avec les objectifs fixés.

  • la Net Zéro Initiative de Carbone 4 et soutenue par l’ADEME, préconise dans son pilier B d’aider à la décarbonation des autres et dans son pilier C de financer l’augmentation des puits de carbone
  • Net-Zero standard de SBTi propose de compenser l’intégralité des émissions résiduelles avec des crédits carbone de projets de séquestration de qualité
  • ISO 14068 en cours de développement propose d’associer au carbon management plan, une compensation complète des émissions résiduelles du produit, service, évènements ou entreprise qui veut être neutre en carbone, en finançant des projets dont la certification suit les standards internationaux sur le sujet (comme ICROA)
Décliner l’action mondiale à l’échelle de l’entreprise, Net-zero initiative

Alors comment faire pour se lancer dans la neutralité carbone ?

Tous ces standards établissent le protocole à suivre pour bien faire :

  1. Faire un bilan complet des émissions directes et indirectes de son activité (produit ou process)
  2. Établir un plan de réduction efficace de ces émissions et le respecter année après année
  3. Avoir une contribution efficace à hauteur des émissions résiduelles au travers de moyens financiers (investissement ou achats de crédits carbone) dans des projets qui permettent la réduction, l’évitement ou la capture efficace de gaz à effet de serre

Ce genre de plan permet à chacun de savoir où il se situe sur sa contribution à la trajectoire de neutralité globale. Il permet de donner de la visibilité en interne ou externe sur la cohérence par rapport aux objectifs collectifs fixés.

Les entreprises doivent contribuer à la transition et s’engager dans des plans ambitieux de décarbonation et neutralité carbone. Les initiatives “bas-carbone” doivent passer à l’échelle pour que l’on réussisse les objectifs, pour en donner quelques exemples :

Attention au greenwashing !

En fait, il y a trois erreurs à ne pas commettre pour ne pas tomber dans le greenwashing de la neutralité carbone (cf la note de l’ADEME sur le sujet) :

  1. Ne pas omettre les émissions indirectes. C’est le sujet le plus compliqué quand on aborde la mesure carbone d’une entreprise, d’un service ou d’un produit. La règle à respecter pour ne rien oublier est de comptabiliser les émissions de tout ce qui est indispensable pour que cette entité existe
  2. Contribuer financièrement à la hauteur de toutes les émissions résiduelles. Certaines entreprises qui se disent neutre en carbone ont la fâcheuse tendance à oublier le fameux scope 3 dans leur stratégie de contribution, c’est pourquoi il faut faire un bilan complet pour avoir une compréhension fine de son impact.
  3. Choisir des projets de qualité. Il n’est pas toujours facile de s’y trouver dans la jungle de projets dont les prix varient entre 2€ et 700€/tCO2eq. Pour garantir un impact et rester en ligne avec vos valeurs, chez Riverse on recommande souvent de choisir des projets en lien avec votre activité et pas trop loin de vos implantations géographiques.

Oui la notion de neutralité carbone pour une entreprise, un produit ou autre, n’est pas scientifiquement correcte mais les standards nous guident sur la trajectoire commune que nous devons à tout prix réussir. Il est important de s’engager dès maintenant sur cette trajectoire et contribuer activement à la transformation de notre système !

Pour aller plus loin :

--

--

Clement Georget
Riverse
Editor for

Co-founder @Riverse | Climate conscious & solution enabler