La contribution carbone volontaire, kesako?

Ludovic Chatoux
Riverse
Published in
8 min readMar 7, 2022
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Introduction : ce que vous allez apprendre dans cet article

Le marché des crédits carbone, c’est notre dada.

Si l’on est convaincus de sa nécessité pour la transition environnementale, on a également conscience des questions et doutes qu’il soulève. Du moins, on remarque les sourcils qui se froncent dans un premier temps chez les personnes à qui l’on en parle au quotidien.

Nous avons donc eu envie de vous partager quelques unes des leçons que nous avons apprises en travaillant sur le sujet depuis des mois (au delà du son de Marco Mouly que l’on a trouvé assez doux dans les Rois de l’Arnaque). Dans cet article vous apprendrez :

  • Ce qui différencie les quotas carbone des crédits carbone volontaires, et pourquoi ces derniers sont essentiels à la transition environnementale
  • Les raisons de la mauvaise presse (justifiée) de la compensation carbone, liée au greenwashing
  • Ce qu’il y a derrière un mécanisme vertueux de contribution carbone
  • Mais surtout : Le lien entre Yannick Noah, les arbres et la transition environnementale

I. La différence entre quotas carbone régulés et crédits carbone volontaires

Le marché EU-ETS (pour Emissions Trading Scheme) a été créé en 2005 par l’Union Européenne pour réguler les émissions de gaz à effets de serre (GES) des installations industrielles de plus de 20MW, représentant environ 50% des émissions de l’UE. Concrètement, un plafond d’émissions de GES est imposé aux installations concernées, et les entreprises s’échangent des quotas carbone en fonction de leur niveau réel d’émissions par rapport à ce seuil : celles polluant moins que le plafond vendent des quotas à celles le dépassant, avec 1 quota correspondant à 1 tonne de CO2e à laquelle le mécanisme de marché fixe un prix selon les variations d’offre et de demande.

Le marché des crédits carbone volontaires n’est lui pas (encore) régulé. Des entreprises (ou individus) peuvent acheter des crédits émis par des porteurs de projets bas-carbone, avec un crédit carbone toujours équivalent à 1 tonne de CO2e évitée ou séquestrée dans un puits de carbone.

Si ce mécanisme de transaction de crédits carbone volontaire se fait vertueusement et non en lieu et place d’actions de réduction qui doivent être mises en oeuvre avant tout dans l’entreprise, c’est un formidable catalyseur de la transition environnementale : il permet de financer le développement des solutions de réduction et de séquestration de GES requises pour lutter contre le réchauffement climatique, et combler ainsi une partie du trou béant d’investissements nécessaires à la transition environnementale (3500 milliards de $ requis par an à l’échelle mondiale selon le BCG, soit 6 fois les investissements actuels).

Source : BCG

Les entreprises achetant ces crédits carbone volontaires le font généralement dans le but d’agir sur leur empreinte environnementale et pour communiquer dessus. Cela doit être la quatrième étape d’une stratégie environnementale d’entreprise, et venir après 1) la mesure de son empreinte (scopes 1 à 3), 2) la fixation d’objectifs de réduction en ligne avec une trajectoire +1.5°C, et 3) la réduction des émissions de GES partout où on le peut.

Les 5 étapes d’une stratégie environnementale d’entreprise

II. La descente aux enfers de la compensation carbone

Le problème, c’est que la compensation carbone est généralement mal faite, et se focalise sur des projets agro-forestiers, souvent dans des pays en développement et à bas coût.

En 2020 en France, près de 3/4 des crédits carbone achetés concernaient des projets forestiers, et plus de 90% provenaient de projets en Afrique, Amérique du Sud et Asie (alors même que l’enjeu de décarbonation concerne avant tout les économies les plus développées), pour une moyenne de prix du crédit carbone à 4.5€.

Qu’est ce qui est inquiétant derrière cela?

1. Planter des arbres ne nous sauvera pas

Pour diverses raisons, les projets forestiers ne peuvent être la solution miracle du problème auquel notre société fait face:

2. Compenser à bas coût, et non réduire

Au delà des arbres, le reproche principal fait aujourd’hui à la compensation carbone, de manière pertinente, est que de nombreuses entreprises l’utilisent à (très) mauvais escient.

  • En substitution d’actions de réduction : dans la bataille du budget des entreprises, il est tentant de se tourner vers l’achat de crédits carbone très peu onéreux (4.5€ par crédit carbone volontaire en 2020 en moyenne en France, alors que le prix réel d’une tonne de carbone devrait se diriger vers les 250€ selon la stratégie nationale bas carbone) plutôt que de s’attaquer au problème épineux et plus coûteux de transformer sa chaîne de production pour réduire effectivement ses propres émissions
  • Sans lien avec son activité et donc son empreinte environnementale : dans la majorité des cas, l’activité d’une entreprise n’a pas de lien avec la plantation d’arbres (vous pouvez évidemment passer au point suivant si vous travaillez pour l’Office National des Forets). Dés lors se pose la question pour toute entreprise : si j’achète des crédits carbone forestiers, ai-je réellement un impact là où je le devrais ? Nous avons notre idée, nous vous laissons vous faire la vôtre.
  • Pour détourner l’attention par une communication déceptive sur son impact environnemental : ici, l’exemple de Total et de ses forêts en Afrique, justement pointé du doigt par le chercheur Alain Karsenty, est l’illustration de nombreux autres cas que nous ne citerons pas ici par souci de concision (pour ne pas dire dépit). “Dis moi ce sur quoi tu communiques, je te dirai qui tu es”.

3. Un manque de transparence qui conduit à des scandales et un manque de confiance

Pour en finir avec les travers de la compensation carbone, et avant de finalement vous montrer la lumière au bout du tunnel, évoquer le sujet de la transparence nous semble important.

De nombreux intermédiaires se positionnent aujourd’hui sur la chaîne de la compensation entre un projet bas carbone et l’individu ou l’entreprise qui achète le crédit carbone : labels, mandataires, vérificateurs, brokers, et enfin vérificateurs de labels et de vérificateurs.

Illustration de la chaîne de valeur de la compensation carbone volontaire

La conséquence de cette forêt d’intermédiaires (sans mauvais jeu de mot)? Une importante perte de la valeur rétribuée au porteur de projet bas-carbone, d’abord, et une opacité terrible entre les deux extrêmes de la chaîne qui a pu conduire à de nombreuses fraudes et scandales, surtout. Conduisant in fine et à juste titre à une perte de confiance en ce mécanisme de crédits carbone volontaires.

III. Sortir des affres du greenwashing : redonner à la contribution carbone la place qu’elle requiert

Face à l’enjeu environnemental , il est nécessaire de sortir du piège de la compensation pour greenwasher et d’instaurer un mécanisme vertueux qui apporte une réponse efficace au niveau d’investissement colossal requis pour la transition : ce mécanisme est celui de la contribution à la neutralité carbone.

C’est ce modèle que nous construisons avec Riverse, en s’appuyant sur des principes forts :

  • Réduire, puis contribuer : nos entreprises clientes n’achètent des crédits carbone qu’en complément d’un bilan carbone et d’actions de réduction, pour avoir un impact sur les émissions résiduelles qu’elles ne contrôlent pas encore. Comment fait-on pour s’assurer de cela? En nous appuyant sur les méthodologies de référence sur ces sujets, telles que les normes ISO, Science Based Targets, ou Bilan Carbone©
  • Des projets liés à l’activité, dans tous les secteurs à enjeux : la contribution prend selon nous tout son sens si elle est liée à l’activité de l’entreprise, visant à réduire indirectement son scope 3 d’émissions dans une logique d’insetting plutôt que d’offsetting. Si vos affaires impliquent par exemple du transport de marchandises, nous vous proposerons des projets visant à décarboner le fret maritime. Nous sélectionnons des solutions impactantes dans les 7 secteurs à enjeux de la stratégie nationale bas carbone, et notre travail est de vous aiguiller vers celles qui sont les plus pertinentes pour vous
  • Communiquer honnêtement : nous poussons à nos clients des modules de communication complets sur l’ensemble de leur stratégie environnementale, afin d’engager honnêtement leur écosystème autour de leurs actions
  • La transparence, partout : de nos méthodologies de certification à notre registre de transactions de crédits carbone, tout ce que nous faisons se fait de manière parfaitement transparente, pour restaurer la confiance en ce marché
  • Le coût réel de la transition : nos crédits carbone ont un prix qui reflète les efforts nécessaires au déploiement des solutions de la transition, dont l’intégralité est rétribué à nos porteurs de projet pour maximiser leur impact. Pour les entreprises acheteuses, cela permet d’instaurer un juste coût du carbone sur leurs activités et d’ainsi se préparer pour le monde de demain. Nous nous rémunérons par une commission additionnelle au prix de vente, clairement communiquée
  • Et enfin, les six principes communs à tous les crédits carbone : nos crédits sont mesurables, vérifiés par des tierces parties externes, additionnels, uniques, intègrent le risque de non permanence et comportent des co-bénéfices, tel que recommandé par l’ADEME et autres standards de référence internationaux

Nous détaillerons prochainement dans un nouvel article les dessous de notre sélection de projets et de notre méthodologie de certification de crédits carbone, mais souhaitions aborder le sujet ici pour insister sur la mission que nous nous sommes fixés avec Riverse : rassembler entreprises et porteurs de projets bas-carbone, pour accélérer le financement et le déploiement de solutions à fort impact social et environnemental pour rendre notre société fortement durable.

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