Et le réveil sonne. Ça change la donne.

Aurore Barron
Scribe
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4 min readAug 22, 2018
“A macro shot of the petals on a pinkish white flower.” by Francesco Mazzoli on Unsplash

Quand soufflent les tempêtes dans mon corps, je pourrais stopper la Terre. Autant de nuits et d’insomnies après, je suis là. Las. En proie à l’incompétence de mes pensées. Egarée. Je traverse les rues. Désertes, surpeuplées, intempestives.

Tant de gens. Pourtant. Un arrêt s’impose.

Tant de solitude. Nous autres individus que nous sommes, tiraillés par les tourments d’une vie, d’un fil sans suite, nous tentons l’accroche. Impair, pair et repère de nos égos. À ce jeu, nous nous pensons vainqueurs. Mais nous nous rendrons vite compte que ce n’est qu’un mode exécutoire d’une symbiose illusoire. Vient le jour de la dilettante. Supprimé, effacé, bâclé.

Et puis tu es là. Là le drame ?

Très bien. Essayons autre chose.

/

Cette sensation infinie qui m’ébranle au saut du lit.

C’est un voile qui se glisse sur mes épaules et m’habille pour la journée. La nuit, Elle vient sans crier gare. Me réveille. Peur panique. Tu sais, avant j’arrivais à dormir sans peine. En ce moment c’est pas la même. J’avais peur de rien. Juste du vide. En ce moment c’est moi le vide. Moins évident.

Elle me laisse sans répit. Infatigable, Elle reste endormie jusqu’à cet instant où… Ton regard m’apparait dans un songe. Oui je sais, ce n’est pas faute de vouloir oublier. Ce n’est pas faute d’avoir essayé. Mais mes pensées se dirigent encore, imperturbables, sur toi. Ça me fatigue tu sais. Me voilà en proie à mon propre moi.

Disparait. Elle réapparait.

Elle s’anime la coquine. Elle s’affole cette grande folle. Elle se tortille au creux du ventre. Joue avec mon cœur. Déjà qu’il était pas très téméraire, alors là je t’en parle pas, c’est n’importe quoi. Il sait même plus dire je t’aime.

Par contre, Elle, je la sens bien, Elle me remonte le long du dos, vient effleurer mes épaules. Première secousse en vue d’une catastrophe, que je n’arrive pas à retenir. Mais, incorruptible, Elle poursuit sa lente ascension. Elle demeure un temps. Au fond de ma gorge. Elle sert encore plus fort. Elle arrive à point nommé. Pour me faire exploser. Elle en perd pas une pour s’exprimer.

Le réveil sonne.

La voilà, la sale solitude qui m’abîme, me lancine.

Je ne puis demeurer plus longtemps dans ces draps sans croire que t’es là. Il y a de ça un mois. Un an ? Avenant. Au contrat. Que nous avons oublié. Déchiré. Et malencontreusement jamais entamé.

C’était peut-être trop. Ou peut-être n’était-ce pas assez. Te l’entendre dire m’aurait suffie. Violent. Néant. Du coup, après coup, c’est Elle qui m’a envahie. Elle est venue faire pansement sur mon cœur béant. Mais maintenant Elle me colle à la peau, Elle s’est entichée de mes maux. Je n’arrive plus à m’en dépêtrer, de cette saleté.

Ah bah c’est simple, je me la coltine partout. Dans les draps, où nos rêves avaient pour habitude de passer la nuit. Dans les matins, du quotidien, où nos regards faisaient lever les aurores. Sur les corps des hommes, où je crois reconnaitre tes lèvres qui me sublimaient. Dans les trains, où nos sourires défilaient, dans l’espoir de se retrouver. Dans les verres d’alcool, où les paroles des autres se cognent contre les parois, vides. Y résonnent alors seulement le bruit de nos silences. Dans la musique, où nos corps se rencontraient et s’émerveillaient. Et des fois, elle me suit même à l’autre bout du monde, sur une autre parcelle de Terre. Elle est partout. Elle est tenace. Elle laisse toujours sa trace.

Mais le jour où je l’ai vue dans le regard des autres. J’ai compris. Ce n’est pas toi le problème. Nous nous la traînons, dans le dos de nos relations. Tu vois, j’aurais jamais cru te dire ça un jour, mais… Merci. De me l’avoir présentée.

Hier, elle s’accrochait. Aujourd’hui, c’est moi qui la décroche. Au lieu de me battre contre l’innommable, j’apprends désormais à la nommer. Ça prend du temps. Mais je tiens bon. S. Comme solstice. O pour oiseaux. L pour lueur. I comme hier. T je me tais. U c’est pour Ursule. D car c’est seulement des fois. E pour eux.

L’idée ne m’avait jamais effleurée de pouvoir l’accepter. Histoire de voir ce pourquoi je la fuyais tant. Tous ces cris d’appel, laissés sans réponse. J’ai décidé de la regarder en face pour mieux la faire frémir. J’appellerai ça le Stratège de la controverse.

Ah et puis j’ai failli oublier.

Je ne songerai plus à ton nom. Pardon. J’ai changé de ton.

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Aurore Barron
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