De parallèle en parallèle

Une remontée de la Norvège de plus de 1000 kilomètres

Semelles sans frontières
11 min readMar 16, 2017

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Repartis pour une grande et nouvelle étape en direction du nord. Les cartes IGN et les atlas norvégiens sont ouverts : ça y est la route nous attend une fois de plus. Nous dessinons notre itinéraire selon nos envies et notre curiosité, mais toujours en gardant une part de surprise et d’aventure. Cette fois-ci, le trajet va être long car nous décidons de traverser la moitié de la Norvège pour rejoindre la ville de Bodø, qui se situe à plus de 150 km au-dessus du cercle polaire arctique.

Étude du trajet

Convainquants et sûrs d’eux, les Norvégiens nous conseillent de longer la côte pour remonter leur pays, formée d’une suite de fjords aussi beaux les uns que les autres. Ayant pris connaissance de la difficulté du trajet en suivant la côte, nous décidons de passer par l’intérieur du pays. En suivant la route principale, nous augmentons nos chances de trouver des couchsurfings, d’être pris en stop et d’explorer des paysages plus variés. Nous nous donnons 1 mois pour ce voyage.

600 km : de Førde à Oppdal

Nous devrons donc traverser les régions montagneuses du centre de la Norvège, le parc national du Dovrefjell (territoire du bœuf musqué) tout en suivant la seule voie rapide du nord : la E6. Cette dernière, qui nous mènera aux grandes villes du nord, traversera le cercle polaire arctique et nous conduira vers la côte pour rejoindre la ville de Bodø. C’est un trajet en stop d’environ 1200 km qui nous attend, mais le mot d’ordre est step by step.

Quoi de mieux au réveil ?

La première nuit en dehors de la maison bleue est à Skei, chez Em notre Couchsurfeuse. Nous y dormons juste une nuit et nous partons au matin tôt car ce soir le rendez-vous est à Oppdal, au milieu des montagne à 350 km au nord est de Skei. Mais juste après le départ, notre première automobiliste nous indique que la route par le nord est bloquée du fait de la neige et qu’il faut la contourner par le sud. Nous étudions la carte et admettons que ce soir nous ne pouvons pas rejoindre les montagnes. Le détour par le sud nous rallongera de plus de 200 km et ces deux distances accumulées sont impossibles à réaliser en une journée.

Le plan est donc de trouver un lieu pour dormir à mi-chemin. A la nuit tombée, nous arrivons à Dokka, petit village perdu dans une forêt de sapins et plongé dans un tapis de neige épais.

Quelques moments piqués sur la route

Le thermomètre indique -6°C et nous nous mettons en recherche d’un toit où passer la nuit. C’est Ola, un monsieur d’environ 70 ans qui nous sauvera la mise. Nous avons frappé à sa porte et après quelques minutes de discussion sur le pourquoi du comment nous sommes arrivés dans ce village, Ola nous offre son canapé-lit pour passer notre première nuit en toc à porte (expression du voyage). Cette expérience des plus inattendues, pour lui comme pour nous, s’est couronnée d’une belle soirée à partager nos histoires et nos cultures.

C’est sous un beau ciel bleu que nous réempruntons la route des montagnes pour rejoindre la ville d’Oppdal. Une belle neige fraîche est tombée cette nuit et les déneigeuses sont sur le pied d’œuvre. Nous avons fait la plus grande partie du voyage avec Tommy, un militaire de réserve. Les montagnes et les paysages désertiques défilent sous nos yeux. C’est dans un village pittoresque habité par des trolls au pied des Dovrefjell, que nous avons fait une petite pause café et gaufres à la confiture de baies sauvages. Merci pour ce petit réconfort.

Traversée du Drovrefjell avec Tommy

En fin de journée nous aperçevons les pistes de ski illuminées d’Oppdal. C’est une station connue et réputée pour les Norvégiens. Ici, on y pratique le ski alpin bien sûr mais surtout le ski de fond : un des sports les plus populaires de Norvège. Tore, notre couchsurfeur d’Oppdal, nous propose de nous emmener sur les pistes avec ses amis. Why not? Nous ne sommes pas venus en Norvège pour faire que du stop et des rando !

Les chaussures de ski en place et le bonnet sur le tête, nous voilà fin prêts. Première étape de 8 km additionnée d’une deuxième de 16 km le lendemain. On retiendra que le ski de fond, c’est de beaux paysages et une ambiance calme et reposante au milieux des montagnes, mais que définitivement c’est pas pour nous ! Jamais en faisant un sport on s’est autant ramassés sur les pistes. Dès que tu prends un peu de vitesse, soit 12 km/h, tu es sûr de tomber (surtout si Quentin est devant toi) et tu n’as que ta tête et des dents en guise de frein. Bref un sport à pratiquer dès l’âge de 3 ans comme tous les norvégiens ou alors avoir un bon entraînement !

Tout schuss 🎿

500 km : de Oppdal à Mosjøen

Après ce très bon séjour à Oppdal (mais fatiguant !), notre hôte nous a emmenés dans la troisième plus grande ville de Norvège : Trondheim. Notre passage dans la ville a duré 3 nuits et 2 jours et a été assez mouvementé. Nous avons pu découvrir les joies d’une nuit sauvage passée dehors à vadrouiller entre les seuls lieux ouverts de la ville comme la gare, le Burger King ou les réceptions d’hôtels. Le tout en étant courbaturés à mort à cause du ski. Décidés à ne pas recommencer le lendemain, nous choisissons de passer la nuit dans une auberge de jeunesse (notre première nuit payée du séjour) où nous avons pu recharger les batteries et apprécier le confort d’un bon lit au chaud. Ayant eu peu de réponses de Couchsurfing, on aura eu peu de temps pour profiter de la ville. Ville plaisante malgré tout avec notamment le canal qui la traverse entre les docks réhabilités et la cathédrale de Nidaros, très impressionnante et plus grand lieu de culte en Norvège.

Trondheim sous différentes couleurs

La prochaine destination n’était pas si lointaine : Steinjker, seulement à deux heures de route que nous avons malheureusement dû faire en bus, après avoir attendu 4h à la sortie de Trondheim. Nous y avons été accueillis par Anne, très chaleureuse et attentionnée, dans un petit hameau à l’écart de la ville. Ce village restera pour nous l’un des moments les plus symboliques et une grande étape de notre voyage.

La raison est simple : par une soirée plutôt froide et un temps clair et dégagé, nous sommes partis dehors regarder le ciel. Quelques secondes après, nous étions comme des gamins, à courir pour aller chercher un endroit idéal pour l’admirer. Notre première aurore boréale était au-dessus de nous. Un spectacle incroyable et pourtant bien réel. Nous avons trouvé une clairière dégagée de toute pollution lumineuse et d’arbres. Tout autour de nous, à 360°, se déroulait cette attraction magique avec cette lueur verte qui se déployait dans le ciel. Les capturer dans nos appareils photo où les admirer directement, le choix n’était pas si simple. Bientôt, un cercle rouge orange très intense se formait et dansait à la manière d’un feu de cheminée qui semblait nous réchauffer dans la nuit très froide. Pendant près de deux heures, nous avons profité de ce spectacle et en avons pris plein les mirettes. Nous sommes rentrés dans la nuit plein d’admiration et de rêves en espérant retrouver ces northern lights très bientôt !

Big up à Anne et au ciel de Steinkjer

Trois jours plus tard, nous avons repris la route direction Grong, un petit village toujours plus au Nord. On nous répète souvent que plus nous nous dirigeons vers le nord, plus les norvégiens sont chaleureux. Et il s’avère que c’est vrai, nos hôtes sont tous très accueillants, attentionnés et heureux de partager avec nous leur quotidien pour quelques jours. Nos rencontres se déroulent au rythme des soirées à échanger sur nos cultures, à profiter des paysages et à toujours s’émerveiller face à cette nature sauvage et fascinante. Nous continuons de rencontrer un tas de personnes passionnantes avec qui nous créons du lien.

Soupe norvégienne en bonne compagnie

Une de nos rencontres, Cathrine, est employée dans un parc animalier et nous a proposé d’aller y faire une visite. Ni une ni deux, nous sommes face à la faune typique norvégienne : loups, gloutons, élans, rennes, lynx, et renards polaires. Un plaisir de découvrir ces animaux étrangers à nos régions de France et de les côtoyer de si près. Plus nous avançons, plus nous voyageons au gré de nos rencontres en se passant du Couchsurfing comme ce fut le cas à Trofors. A Mosjøen également, où nous avons passé la nuit dans l’ancienne école d’une de nos hôtes, Brit-Agnes.

Merci pour la visite Cathrine !

300 km : de Mosjøen à Bodø

La journée qui suit fut également très spéciale pour nous : nous partions de Mosjøen pour espérer nous rendre à Røkland en passant par Mo i Rana qui est la ville la plus proche du 66° parallèle, à savoir le cercle polaire arctique. Nous trouvons des conducteurs pour nous y emmener et la traversée de ce parallèle fut courte mais véritablement symbolique. Plongés dans le froid et sous un vent puissant, la route se découvre sous les roues de la voiture tandis qu’autour, il n’y a rien. La neige et la glace ont envahi les lieux alors que les arbres les ont fui, tel un No man’s land. Les seules présences ici sont celles d’un petit musée délimitant le cercle polaire et les quelques voitures traversant la route. Aller au-delà du cercle polaire arctique représente quelque chose pour nous, comme un objectif atteint.

On va où ?
No man’s land au 66e parallèle

Nous arrivons à destination aux alentours de 18h30 et attendons notre hôte, Per Arne qui vit et travaille dans une ferme avec son fils. Même si nous partons le lendemain seulement, nous avons pris le temps de les découvrir et d’échanger avec cette petite famille hyper accueillante (encore une !). Ils font tourner une entreprise familiale avec plus de 500 moutons dans une ferme toute rénovée et en profitent pour nous la faire visiter. En tant que bon norvégien, ils possèdent aussi des motoneiges et nous proposent d’essayer. Pas très amateurs de sports mécaniques mais tout de même curieux (on ne pouvait pas quitter la Norvège sans en faire), on grimpe sur l’engin plutôt puissant (un modèle pouvant atteindre 200 km/h !) et testons la bête. Très simple d’utilisation mais bien trop puissant pour des novices comme nous, une simple pression nous fait décoller. Comme ils nous l’ont expliqué, une bonne maîtrise nécessite beaucoup d’entraînement et d’adaptation pour être à l’aise avec le bolide. Mine de rien, ce fut une bonne expérience ! Nous repartons ensuite en direction de la dernière ville continentale avant longtemps, Bodø.

J’vous dépose ?

Ironie du sort, comme si nos voisins nous manquaient, nous avons rendez-vous chez Loïc, un Luxembourgeois étudiant en Belgique et son colocataire Sébastien, belge. Parler français est un vrai plaisir, surtout quand le thème tourne autour de la bière. Impossible d’y échapper malgré la fatigue, nos hôtes nous emmène boire “juste un verre’’ histoire de découvrir les quelques bars du coin. Les verres se remplissent et le portefeuille s’allège par la même occasion. La vie nocturne de Bodø se dévoile et nous passons de bar en bar, l’heure tourne fieu, même si cela ne nous a pas empêché de chanter du Brel !

Coucher de soleil sur le port de Bodø

Je crois que les Norvégiens se souviendront de ces 4 francophones, venus mettre un peu de vie dans leurs bars. Retour à 4h30 du matin : nous qui voulions nous coucher tôt, c’était loupé. On retiendra avec plaisir qu’il ne faut jamais croire un Belge quand il te dit ‘’on va juste boire un verre’’.

Le bateau nous attend à 16h30 au port de Bodø. Pas grand monde à bord, beaucoup de touristes évidemment et quelques backpackers. Nous sommes reposés et surtout déterminés à poser le premier pied sur ces soit disantes îles paradisiaques. Le bateau démarre, nous sommes aux premières loges pour voir les vagues s’agiter en dessous de nous et la terre peu à peu s’estomper dans le paysage lointain. Bientôt, nous sommes encerclés par la mer tandis que le rythme de la houle devient de plus en plus forte. Les 4 heures de traversée commencent, arrivée prévue à 20h.

Au final, il nous aura fallu 18 jours pour traverser la Norvège du sud au nord sur 1400 km tout en prenant notre temps et en profitant du pays. A bientôt !

Dès que le vent soufflera je repartira ⛵

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