Suis-je riche si je ne sais rien faire de mes dix doigts?

Magali Lanselle
Sikana
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2 min readNov 13, 2017

Faire les choses soi-même est un besoin qui revient clairement à la mode.

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A 33 ans, j‘ai le sentiment d’être le fruit d’une génération manipulée qui a progressivement refusé en masse la moindre activité manuelle (professionnelle ou non). En décidant d’opposer arbitrairement les activités manuelles à toute activité intellectuelle, cette génération s’est progressivement déracinée et a engendré des enfants n’aspirant qu’à un avenir professionnel fait de management et de dématérialisation où le service est roi. La sur-consommation est progressivement devenue un objectif, une finalité, l’expression de la réussite.

Dans cette ère du pratique et de l’immédiat, tout service peut alors faire l’objet d’un business car faire faire par quelqu’un d’autre c’est s’affranchir de toute activité manuelle, c’est pouvoir se permettre de ne pas avoir à le faire soi-même.

Ne rien avoir besoin de savoir faire soi-même devient alors statutaire.

Tous les savoir-faire basiques deviennent alors monnayables à prix d’or.

Sauf que, ce qui au départ semble être un choix, et même, un privilège devient progressivement une lacune. Cette nouvelle forme de pauvreté a concouru à engendrer une population d’assistés effrayés par le simple fait de planter un clou ou de changer un fusible. On ne choisit plus de ne pas faire, on ne sait plus faire ni à qui demander autour de soi car l’entraide (gratuite de fait) s’est perdue par la même occasion.

Les artisans auraient tort de se priver de faire jouer les lois du marché en tarifant à la hausse leurs savoirs-faire si précieux pour qui s’est volontairement défendu de les pratiquer.

Restent alors tous ceux qui ne savent pas faire mais qui n’ont pas les moyens de faire faire et qui progressivement bien que n’étant pas en situation avérée de précarité, ne vivent plus dignement.

Pour les bobos, le Do It Yourself intervient comme un acte militant et libérateur. Réaliser la moindre chose soi-même est si exceptionnel que cela mérite d’être largement porté à la connaissance de tous.

Pour les plus démunis, accéder aux plus basiques des savoir-faire devient une nécessité pour vivre dignement chez soi.

On comprend alors que démocratiser les savoir-faire c’est lutter contre l’assistanat et la dépendance.

Inciter, inspirer et accompagner les plus démotivés à se lancer ne serait-il pas l’unique moyen de réellement s’enrichir?

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