Retail luxe & e-commerce : mythe ou réalité?

Vincent Pradoux
SmileConsulting
Published in
4 min readJun 4, 2019

Fort d’une croissance de 6% à 8% en valeur en 2018 notamment accentuée par les consommateurs asiatiques et l’essor du e-commerce (Reuters), le secteur du luxe est peu affecté par la crise économique.

Le canal e-commerce a longtemps été boudé par les marques de luxe qui ne voyaient pas comment transcrire une expérience haut de gamme au travers d’un site web. Cette place inoccupée a permis l’essor de pure player (Farfetch ou Mytheresa, Matches) vers 2008 qui ont réussi avec le temps à affiner le cocktail lucratif du e-commerce et du luxe.

Comment ces sites ont-ils réussi à répondre aux attentes des utilisateurs? Des utilisateurs particuliers, habitués à une expérience haut de gamme, propre au secteur du luxe. Nous vous proposons ici, une rapide analyse de ces succès.

Une navigation mobile massive

Le secteur du luxe digital transcende les statistiques moyennes dans le domaine du e-commerce (dont un tiers des transactions étaient réalisées sur mobile en 2017). D’après une étude menée par Content Square sur un panel d’utilisateurs de sites de luxe, le mobile représente 65% du trafic . Côté revenus, il est fort à parier qu’il dépassera bientôt la barre des 40% et détrônera le desktop dans les années à venir. Cette utilisation est soutenue par les retailer qui proposent tous des versions mobiles responsive et des applications dédiées iOS et Android.

Des utilisateurs peu consommateurs de contenus

Un fait assez édifiant ressort de l’étude de Content Square: les utilisateurs vont à l’essentiel. En effet, avec une moyenne de 8,3 pages vues en 2 min par session sur mobile, on peut se demander si les utilisateurs passent réellement du temps sur les pages de contenu?

Et bien, selon les études, on peut affirmer que non…

Sur mobile, la page liste représente presque la moitié des pages vues et du temps passé. Quant à la page produit, elle représente près d’un tiers du temps de session. Les pages inspirationnelles et la homepage respectivement 5% et 8%. Autant dire que ces pages ne sont pas la priorité pour les mobinautes. Lorsque l’on connaît le coût de production de ces types de pages, on peut se demander si le jeu en vaut la chandelle? Peut-être vaudrait t-il mieux utiliser une partie de ce budget dans l’optimisation des pages clés à savoir liste, produit et checkout!

Certains l’ont bien compris, Farfetch par exemple propose vraiment très peu de pages inspirationnelles. Mytheresa prend le même virage, en intégrant tout de même subtilement des contenus en tête de ces pages liste. C’est encore plus flagrant chez Net-à-porter, le seul site à proposer des listes à trois colonnes, un parti pris fort entre abondance et confort de lecture. A l’inverse, Matches et 24 Sèvres misent tous les deux sur de nombreux contenus inspirationnels très qualitatifs.

UX innovante ou standard ?

Le mythe du site disruptif recréant une ambiance immersive et collant à l’image de marque s’estompe au fil des années. Il suffit de naviguer sur les sites des poids lourds du secteur comme Farfetch, My Theresa, Net à porter, Matches ou 24 Sèvres, petit poucet Français propulsé par LVMH en 2017 pour s’en rendre compte.

Capture page produit mobile responsive — de gauche à droite : Matches, Net-a-porter, 24S

On constate que les codes couleurs sont très similaires : noir et blanc. Si on prend l’exemple de la page produit, la structure de la page est presque identique : marque, titre produit, carrousel images, variants, CTA, informations complémentaires, cross-sell, rien de très novateur.

24 Sèvres se démarque tout de même de ses concurrents, avec une ergonomie et un design plutôt disruptif, marqués par une absence de burger menu et de carrousel produits. Volonté d’imposer un ADN différenciant ou manque de maturité, au regard de l’âge du site, il est fort probable que dans les années à venir la page produit tend à se rapprocher de celle de ses concurrents.

Capture page produit mobile responsive — de gauche à droite : Farfetch, My Theresa

Pour finir, le réel défi est de créer une expérience homogène avant, pendant et après l’achat afin de fidéliser les clients. Car aujourd’hui, la majeure partie des ventes dans ce secteur est poussée par les opérations commerciales, relayées à grand coup de campagne d’acquisition.

Luxe + e-commerce = ❤

Le luxe et le e-commerce sont bien une réalité où certains mythes historiques (notamment les idées reçues sur le secteur) s’estompent avec le temps.

Le luxe et le e-commerce font bon ménage

De fait, le secteur retail luxe dans le e-commerce a de beaux jours devant lui au regard des projections statistiques. En 2019, avec une moyenne de 7% des ventes réalisées en ligne, elles devraient représenter un quart des ventes en 2025 (Bain & Co.).

Les parcours utilisateurs ne sont pas révolutionnaires

L’imaginaire voudrait que les utilisateurs de sites de luxe passent une bonne partie de leur temps sur les pages de contenus inspirationnels, avec un fort de taux de revisite et réachat. Cette catégorie d’utilisateur représentant dans les faits 1% des internautes, il est temps de démonter ce mythe.

Les attentes des utilisateurs des sites de luxe sont principalement les mêmes que celles des autres secteurs, avec cependant quelques particularités : qualité de service irréprochable, et un besoin de ressentir l’ADN du luxe au niveau du parcours d’achat.

Dans le futur, les principaux défis à relever seront globalement similaires aux autres secteurs à savoir:

  • Rapidité de chargement des pages
  • Expérience fluide, rapide et pertinente
  • Développement cross-border et international

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