#critique ciné 5 La Favorite, Yórgos Lanthimos comme on l’aime

Fable en plusieurs chapitres, La Favorite signe le retour réussi de Yórgos Lanthimos. A noter que le long-métrage s’inspire d’un contexte réel : l’Angleterre de la fin du XIIXème siècle qui avait à sa tête la reine Anne, également reine d’Ecosse. Le réalisateur n’était pas forcément attendu dans le genre du film historique. Mais il aime s’essayer à différents styles, avec pour point commun un ton toujours dramatique. En 2017, il tentait, avec La mise à mort du cerf sacré (2017), le thriller psychologique, avec ce principal défaut que la psychologie des personnages n’ était pas très explorée. Elle l’est davantage dans La Favorite, qui donne à voir un vrai combat de femmes. Le petit château anglais, lieu de l’action, donne de la matière au sens esthétique du grec, qui sauvait La Mise à Mort du cerf Sacré. De haut en bas, s’étalent les attributs des époques royales : tapisseries, bibelots et dorures. La Cour, rétrécie à une vingtaine de nobles et un parlement qui se divise sur les suites de la guerre avec la France, s’adonne à des jeux absurdes : courses de canards, lancer de tomates… Tandis que les hommes jouent et se chamaillent, Lady Sara tente de gouverner le pays. Elle tire profit de son intime complicité avec la reine Anne à son profit et tente de faire accepter par la souveraine instable et dépressive ses propres décisions. Un jour, sa cousine arrive et lui demande de l’aide. Quelques années auparavant, Abigail a été déchue de son titre de Lady, par son père qui l’a bradée aux jeux. Elle est prête à tout pour retrouver son rang et obtenir la place de Favorite. D’apparence innocente et serviable, elle jouera de tous les tours pour éloigner Lady Sara et lui ravir le premier rôle. La reine Anne, Lady Sara et Abigail, jouées par Olivia Colman, Rachel Weitz et Emma Stone sont trois femmes de caractère, trio fort du film. L’humour si particulier de Yórgos Lantimos, son sens du grotesque, qui font de The Lobster (2015)un bijou, sont ici retrouvés. La Favorite — loin d’être un énième film historique dans le royaume anglais — se révèle remarquable et brillant d’originalité.