L’épreuve du circuit pro de surf à Hossegor retirée du calendrier de la WSL

Laurent
Surf Culture
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19 min readJul 26, 2020

Pas d’épreuve en 2020 à Hossegor dans les Landes, crise sanitaire oblige, et une rétrogradation de cette manche du Championship Tour à partir de 2021 avec une épreuve (Challenger Series) en Nouvelle-Aquitaine en Octobre.

© WSL

Jeremy Flores restera donc à jamais comme le premier français et le dernier vainqueur du Quiksilver Pro France qui s’est tenu pour sa dernière édition en Octobre 2019 sur le mythique spot de la Gravière à Hossegor.

Cette épreuve du Quiksilver Pro France sous ce nom depuis 2002 (anciennement Rip Curl Pro Landes / Rip Curl Pro Hossegor de 1987 à 2000) aura connu 32 éditions (1987 à 2000 puis 2002 à 2019) depuis 1987 avec une seule année d’annulation (en 2001 avec les attentats à NY). Initialement organisée à la fin Août en pleine période estivale, la compétition a basculé dans les années 2000 sur une programmation automnale fin Septembre/début Octobre.

Sur ces 32 éditions, l’australien Mick Fanning l’aura remporté 4 fois, les américains Kelly Slater et Andy Irons 3 fois et 3 fois également pour le brésilien Gabriel Medina.

Hossegor est reconnu dans le monde entier pour la qualité de ses beachbreak (vague de sable) et ses spots de La Nord, la Gravière, les Culs Nuls n’ont rien à envier à certains spots hawaïens, offrant notamment des tubes magiques.

L’édition du QuikPro 2012 restera dans les annales de ce sport, la vidéo de Quiksilver qui revient sur cette édition que beaucoup considèrent comme l’une des plus belles (avec celle de 2019 soyons chauvin !) avec la victoire de Kelly Slater et l’avènement du jeune John John Florence et à voir ci-dessous :

Et pour revivre la fin de l’édition 2019 avec la prestation époustouflante de notre surfeur hexagonal Jérémy Flores, c’est à revoir ci-dessous :

(Edit Octobre 2020) La Fédération Française de Surf a mis en ligne sur sa chaîne YouTube cette interview de Jérémy Flores.

L’interview exclusive en intégralité que nous a accordée Jérémy Florès à l’occasion de la date anniversaire de sa victoire historique au Quiksilver Pro France le 11 octobre 2019

C’est par une annonce, très attendue et maintes fois repoussée, ce Vendredi 17 Juillet 2020 que la ligue de surf professionnelle, la WSL, a communiqué sur plusieurs aspects : à la fois la fin de la saison 2020, le format de la saison 2021 de transition et la saison 2022 avec sa vision cible.

Toutes les principales annonces à retrouver sur la page dédiée sur le site de la WSL ci-dessous

Le nouveau calendrier 2021 avec un début de Tour à Hawaï en Novembre/Décembre 2020 (léger décalage entre l’épreuve féminine à Maui et l’épreuve masculine à Oahu) et une fin à Tahiti en Août/Septembre 2021 (avec le retour des femmes sur la vague de Teahupoo). Puis les “WSL Finals” en Septembre 2021 dans un lieu encore non dévoilé…

  • Shiseido Maui Pro presented by ROXY: Maui, Hawaii | November 25 — December 6, 2020
  • Billabong Pipe Masters: Oahu, Hawaii | December 8–20, 2020
  • MEO Pro Portugal: Peniche, Portugal | February 18–28, 2021
  • Corona Open Gold Coast presented by Billabong: Queensland, Australia | March 18–28, 2021
  • Rip Curl Pro Bells Beach: Victoria, Australia | April 1–11, 2021
  • Margaret River Pro: Western Australia, Australia | April 16–26, 2021
  • Oi Rio Pro presented by Corona: Saquarema, Brasil | May 20–29, 2021
  • Surf Ranch Pro: California, USA | June 10–13, 2021
  • Quiksilver Pro G-Land: Indonesia | June 20–29, 2021
  • Corona Open J-Bay: South Africa | July 7–19, 2021
  • Outerknown Tahiti Pro: Teahupo’o, Tahiti | August 26 — September 6, 2021
  • The WSL Finals: Location TBD | September 8–16, 2021

Côté sponsors, on notera que le Tahiti Pro après avoir longtemps été sponsorisé (jusqu’en 2017) par Billabong puis année sans sponsor en 2018 et avec Hurley (Nike) en 2019 passe désormais sous la dénomination Outerknown Tahiti Pro. Pour rappel, Outerknown est la marque de surfwear de Kelly Slater.

Le groupe Boardriders (Quiksilver, Roxy, Billabong) sponsorise quant à lui 3 des 10 épreuves du Championship Tour, 2 sous marque Billabong et 1 sous marque Quiksilver (Hawaï, Gold Coast en Australie et G-Land en Indonésie)

La grande nouveauté à partir de cette saison 2021 est le système de play-offs baptisé “THE WSL FINALS” avec les 5 surfeurs du classement du Championship Tour qui s’affrontent suivant la règle décrite ci-dessous.

Et pour 2022, toujours 10 events (hommes et femmes) avec une 11ème compétition sous forme de play-offs et une saison coupée en 2 avec une réduction de surfeurs dans l’élite la 2ème partie de la saison

L’organisation entre le Championship Tour, les Qualifyings Series (QS) et les Challenger Series (CS) à partir de 2021

Avec tous ces changements et pour permettre malgré tout aux surfeurs de faire quelques compétitions même amicales d’ici la fin de l’année, la WSL organise (sous réserve des évolutions positives de la situation sanitaire) pour cette fin 2020 un événement baptisé “THE WSL Countdown” qui comprend une épreuve au Surf Ranch sur vague artificielle en Californie en Août 2020 et 2 “coupes” baptisées l’Euro Cup of Surfing avec une épreuve française sur la côte basque et une épreuve au Portugal ainsi que l’Australian Grand Slam of Surfing avec 2 épreuves en Australie sur les spots de Gold Coast et de Margaret River.

L’épreuve française aura lieu à Anglet au Pays basque français du 23 au 25 Septembre 2020 (probablement sur le spot de la Chambre d’Amour), plus d’infos ci-dessous

Mais, revenons-en maintenant à l’analyse du pourquoi de l’arrêt de l’épreuve du CT à Hossegor. Et d’abord, une info importante. S’il y aura bien une épreuve dite “Challenger Series” en Octobre 2021 en France, le lieu de la compétition n’est pour le moment pas encore connu. Cette épreuve, ne comptera donc plus pour la course au titre de champion.ne du monde mais pour la montée sur le CT, avec moins d’internationaux de renom, verra en revanche bon nombre de surfeurs français présents ce qui permettra de voir sur nos plages aquitaines de beaux exploits on l’espère tricolores.

Tous les surfeurs au-delà de la 22e place (messieurs) et 10e place (dames) de la saison régulière du CT et les Top QS seront conviés. Les pensionnaires du QS et les CT français devraient tous se retrouver dans la région pour cette compétition (Fédération Française de Surf)

Hossegor, ville hôte du Challenger Series 2021, aucune certitude !

C’est dans une interview à France Bleu Gascogne que Cheyne Bradburn, responsable Marketing & Event à la WSL Europe déclare à propos des villes candidates.

“Il y aura certainement des villes au Pays Basque, en Gironde et dans Les Landes. On est en discussion avec les institutions concernées “

Bref, Lacanau en Gironde, Seignosse ou Capbreton, les voisines landaises ou encore Anglet ou Biarritz les spots basques pourraient également se montrer candidates à l’organsiation de cet event de la WSL. Vu la claque que se prend Hossegor en rétrogradant de division, on peut espérer que la ville réussisse à sauver un événement international de surf.

Décision devant être prise en Septembre/Octobre 2020 visiblement.

(Edit Déc.2020) le calendrier à jour de la WSL

© WSL

Du coup, si on revient à la question qui agite le landerneau surfistique néo-aquitain à savoir :

Pourquoi Hossegor a été supprimé du circuit pro ?

Je vois 4–5 facteurs déterminants qui sont en fait les acteurs de cette décision que je vais tenter d’exposer ci-dessous

  • 1- La ligue de surf professionnelle (WSL — World Surf League)

C’est le principal décisionnaire, celui du final cut. Le calendrier 2021 est plus resserré qu’auparavant avec des épreuves étalées entre Nov/Déc et Sept. Le calendrier 2021 comporte 3 épreuves en Australie, 2 aux USA, 2 en Europe (Portugal et Tahiti), 1 en Indonésie, 1 au Brésil et 1 en Afrique du Sud ainsi qu’un lieu mystère pour les WSL Finals.

Voici ce qu’a déclaré la WSL sur la décision de l’arrêt de l’étape landaise du circuit pro :

« Les améliorations apportées au CT 2021 ont commencé avec le calendrier des finales WSL, entraînant des ajustements ultérieurs à certains lieux du Tour. En raison du timing optimal des vagues, le Championship Tour n’inclura plus Hossegor. Toutefois, la WSL, en partenariat étroit avec Quiksilver et Roxy, s’est engagé dans la région et se réjouit d’accueillir un important événement des Challenger Series en France en 2021. »

Mais privilégier une épreuve en vague artificielle (Surf Ranch qui appartient capitalistiquement à la WSL) vs une épreuve mythique comme celle d’Hossegor est difficilement entendable pour les fans notamment. 3 épreuves en Australie vs oublier la capitale européenne du surf, là-aussi, il y a matière à débattre !

Faire un calendrier n’est pas chose simple et si pendant longtemps l’épreuve d’Hossegor a eu lieu fin Août depuis déjà pas mal d’années, l’épreuve se déroule à l’Automne généralement début Octobre permettant de bénéficier de conditions de vagues optimales.

(Edit 05/11/2020) Dans une interview pour l’Eurosima, Francisco Spinola , le boss de la WSL en Europe revient sur les raisons de la suppression de l’épreuve landaise du calendrier du CT. En raison du choix de concentrer l’année de compétitions entre Décembre/Janvier et Août avec une date de play-offs en Septembre, il n’y avait plus d’event sur Sept/Oct. période réservée en général aux épreuves européennes (françaises et portugaises).

(Edit du 26/10/2020) Dans une interview sur beINSports, Jeremy évoque aussi le “[…] le surf, c’est quand même très anglo-saxon, les australiens, les américains ont vraiment beaucoup de pouvoir dans le surf, et c’est vrai que les français, les européens, on passe vraiment après […].

  • 2 — Le sponsor de l’épreuve à Hossegor à savoir le groupe Boardriders (Quiksilver en sponsor de l’épreuve masculine et Roxy pour l’épreuve féminine)

Même si encore une fois la WSL a été maître à bord, il est évident que le sponsor de l’épreuve, le groupe Boardriders avait malgré tout son mot à dire !

Comme vu plus haut, le groupe Boardriders est déjà sponsor de 3 des 10 épreuves du circuit 2011 : le Billabong Pipe Masters à Oahu, le Maui Pro présenté par ROXY à Maui, le Quiksilver Pro G-Land en Indonésie et l’étape de la Gold Coast, présentée par Billabong en Australie. Une 4ème étape engendrait vraisemblablement un coût important ? Autre fait intéressant, 2 des 3 épreuves que sponsorisent le groupe sont sous marque Billabong (amusant quand on sait que c’est Quiksilver qui a racheté Billabong).

extrait du communiqué de presse de Boardriders

L’annulation du CT 2020 en raison du COVID-19 et les changements apportés au CT 2021 ont eu pour effet de raccourcir la saison à venir de manière substantielle. Ces décisions prises par la WSL entraînent ainsi l’annulation de l’épreuve se tenant à Hossegor pour l’année 2021.

Forts d’une grande implication sur le territoire français et fiers de l’importance du surf français sur la scène mondiale, Quiksilver et ROXY ont travaillé de pair avec la WSL pour maintenir une épreuve sur les plages de l’hexagone. Les deux célèbres marques de surf sponsoriseront un évènement de la Challenger Series (CS) en Nouvelle Aquitaine, à l’automne 2021.

Garry Wall, Directeur Général pour Quiksilver s’exprime : « Nous sommes très heureux et soulagés d’avoir pu travailler avec la WSL pour garantir un évènement de classe mondiale sur les plages françaises. Nous vivons tous une période changeante et incertaine, mais notre engagement envers la France et, plus généralement envers l’Europe, demeure. »

Emilie Souvras, Directrice Générale pour ROXY note : « L’ampleur du portfolio de Boardriders nous permet de continuer d’apporter notre soutien à grande échelle, ce qui est fantastique. Cela se traduit par des évènements internationaux mais aussi par le sponsoring et le soutien offert aux merveilleux athlètes qui y participent. »

plus d’infos également dans cette interview d’Emilie Souvras pour le magazine en ligne BoardSport Source

Côté sportif, il y a eu quelques réactions notamment de Jérémy Florès, surfeur français le plus concerné à plusieurs titres. Originaire de la Réunion, il vit principalement à Tahiti mais une partie de l’année à Hossegor. Surtout, c’est le dernier vainqueur en date du Quiksilver Pro et son principal sponsor depuis tout jeune, c’est Quiksilver.

Le surfeur français Jérémy Flores lors d’un échange avec l’ancien Global Digital Brand Manager de Quiksilver nous montre son amertume profonde de cette décision peu compréhensible. Impossible en effet de ne pas penser dans ces moments là à l’ancien CEO de Quiksilver Pierre Agnes, décédé en mer en Janvier 2018 et dont on se dit qu’une telle décision n’aurait sans doute pas existé de son vivant. La reprise en main par les équipes australiennes et américaines au dépend de l’Europe dans le groupe Boardriders ont fait changé le centre de gravité de cette entreprise dont les sièges européens sont situées à St Jean de Luz pour Quiksilver/Roxy et à Hossegor pour Billabong (fermé depuis).

Jeremy détaille un peu plus son ressenti dans un post Facebook

Ma grosse déception est bien sure l’annulation du Quik pro France en étape du world tour 😔 Ce nouveau calendrier ne laissait malheureusement pas beaucoup de choix à Quiksilver. L’étape en plein hiver n’aurait pas eu la même saveur. En revanche l’épreuve se déroulera en tant que QS challenger series. C’est pas mal pour la communauté local !

et dans un commentaire publié sous son post

A lire aussi quelques unes de ses déclarations dans le journal L’Equipe et relayé dans cet article de la Fédération Française de Surf

Dans l’excellent podcast “Impact Zone Surf Podcast” consacré à la carrière de Nicoals Dazet, ancien directeur marketing chez Quiksilver, on voit que Quiksilver a eu un poids important dans les discussions avec la WSL et qu’il était difficile de se passer de l’oreille attentive du plus gros sponsor des épreuves du championnat du monde. Nicolas Dazet évoque la période de Pierre Agnes et qu’à ce moment là et il était “le gars le plus influent du business du surf dans le monde” c’est possible que Quik ait perdu en influence depuis… A écouter vers 2h24min

Jérémy évoque aussi la disparition de l’épreuve landaise vers 1h47min. Il indique avoir contacté la WSL et avoir essayé de convaincre la ligue de ce mauvais choix. “Vous êtes en train de tuer le surf français et le surf européen” Le choix du calendrier a rendu compliqué une épreuve française avec des dates qui ne correspondaient pas.

  • 3 — Côté territoires locaux et institutions sponsors de l’événement : la ville d’Hossegor, la communauté de communes Maremne Adour Côte-Sud, le département des Landes, la région Nouvelle-Aquitaine et d’autres instances comme la fédération française de surf basée à Hossegor

Ces territoires n’ont visiblement pas été associés à la décision et ont appris l’information en même temps que le grand public. Un conseil municipal se tenait quelques heures après l’annonce de la WSL pour la commune de Soorts-Hossegor et aucun commentaire n’a été fait sur le sujet.

Pour le directeur de l’’office du Tourisme d’Hossegor, Jérôme Lacroix, interviewé dans Le Parisien

“La vague d’Hossegor est l’une des plus belles du monde, pourquoi est-elle sortie de la compétition ? c’est un coup dur d’autant plus qu’une des nouvelles épreuves se fera… dans une piscine à vagues. C’est un gros budget qui disparaît localement également en terme de perte dans les retombées médiatiques. Pendant le championnat, on accueillait 250 journalistes du monde entier et des milliers de gens sur la plage, c’est l’équivalent de la première division, aucune autre épreuve n’attirera autant de monde”

Pour Guillaume Mangiarotti, le propriétaire de l’Hôtel de la Plage à Hossegor, “Grâce au championnat, on faisait un petit mois d’août en octobre

On peut regretter que la région (ci-dessous le tweet de la vice-présidente en charge du tourisme) ne semble là-aussi apprendre la nouvelle qu’au dernier moment alors qu’elle aurait dû faire du lobby (les rumeurs circulant depuis plusieurs semaines sur la fin du Quikpro à Hossegor)

Du côté du département des Landes, un communiqué a été fait et c’est vrai que le QuikPro début Octobre permettait aux stations balnéaires de la côte Sud des Landes de prolonger leur saison et d’étirer jusqu’à Octobre la période touristique.

“C’est avec regret que nous apprenons le retrait du l’épreuve de surf Quiksilver Pro France du futur calendrier 2021 du Championship Tour, resserré entre janvier et aôut. Au-delà de son intérêt sportif, cette étape du championnat du monde constitue un événement populaire, emblématique du territoire et qui accompagne la fin de la saison touristique sur la côte sud des Landes. Si la crise sanitaire a accéléré la mise en place de cette réforme initialement envisagée en 2022, nous regrettons une concertation tardive sur cette décision qui exclut la France métropolitaine du championnat du monde. D’ores et déjà, nous sommes mobilisés au côté de la WSL Europe pour que, dès 2021, un nouveau format d’événement soit proposé autour du surf, et de ses dimensions sportive, environnementale, culturelle et économique”

C’est un signal négatif pour l’industrie du surf pourtant très présente en Aquitaine Sud et qui génère de nombreux emplois et une économie importante dans la région. Cette visibilité avec un événement d’envergure mondial générait indéniablement des retombées importantes en local et c’est réellement dommage que les acteurs locaux n’aient pas été associées à cette décision à leur juste place.

Cf mon commentaire sur Twitter ou celui d’Olivier également

La Fédération Française de Surf ou deux de ses partenaires comme le Ministère des Sports ou l’Agence Nationale du Sport n’ont pas, à ma connaissance, commenté officiellement le sujet (même si la fédé a relayé les news mais sans prendre position). Pour la Fédération, en recherche de partenaires avec notamment la perspective des JO de Paris 2024, c’est clairement un mauvais signal qu’envoie la ligue de surf professionnelle en ne sélectionnant plus l’épreuve métropolitaine dans son calendrier élite.

Pas de commentaire non plus chez Eurosima, le cluster européen de l’industrie de la glisse lui aussi localisé à Hossegor.

  • 4 — le choix de Tahiti par Paris 2024

J’ai suivi avec passion et un fort intérêt la compétition “saine” que ce sont livrées les villes françaises pour l’organisation de l’épreuve de surf pour les JO de Paris 2024. Si assez vite, une compétition néo-aquitaine entre les 3 villes emblématiques de la culture surf française (Lacanau en Gironde, Hossegor dans les Landes et Biarritz dans les Pyrénées-Atlantiques) a fait sens avec des rebondissements cependant(alliance envisagée entre les basques et les landais puis candidatures isolées), la candidature surprise en fin de sélection de Tahiti a étonné. Ce choix aura été très politique, cf cette information dans le journal LesEchos.

“La possibilité d’associer un territoire d’outremer à la fête et de faire des JO “les Jeux de toute la France”, un critère qui avait rapidement séduit l’Etat, ont raconté des membres du conseil d’administration à l’AFP” LesEchos

Si la vague de Teahupoo surtout à cette saison est magnifique et qu’elle offrira de somptueuses images, elle représente aussi de part son éloignement beaucoup de contraintes pour les organisateurs, les athlètes, pour les fans métropolitains et pour les locaux compte tenu du site très sauvage et peu adapté pour un événement de cette nature. La vague tahitienne est une vague de récif qui casse au large contrairement à la vague d’Hossegor par ex. qui est une vague de sable / beachbreak et qui permet au public de voir évoluer les surfeurs tout près d’eux.

En choisissant le spot de Teahupoo contre les vagues girondines, landaises ou basques, la France a envoyé un signal fort aux instances internationales du surf. Pour la France, la vague de son pays pour représenter Paris24 c’est la vague de Teahupoo à Tahiti.

Pour la WSL au moment de façonner son nouveau calendrier, elle a ainsi remis l’épreuve tahitienne au calendrier féminin ce qui permettra aux surfeuses de s’entraîner sur cette vague pendant quelques années en condition de compétitions avant l’épreuve olympique à l’été 2024 ce qui est une très bonne chose.

Mais l’annulation du CT de l’épreuve d’Hossegor peut aussi être lu à cette lumière du choix français pour les JO de Paris 2024…

Si courant du second semestre 2020 en pleine réflexion de pistes d’économies, le choix de Tahiti a pû être questionné, la raison politique d’associer l’outre-mer aux JO l’a emporté sur toute autre considération.

  • 5 — le sponsoring au global

Il est loin le temps où les sponsors se battaient pour être présent sur l’épreuve d’Hossegor

Ci-dessous mon tee-shirt de l’édition de 1996 du Rip Curl Pro Hossegor remportée cette année là par Kelly Slater qui sera champion du monde la même année. Des grands médias (TV, radio, presse locale) couvraient l’événement. On est en plein âge d’or de l’industrie surf en France.

Une décennie plus tard, le QuikPro affiche là encore de gros sponsors médias et des marques grand public (Samsung, Evian, Wanadoo)

France Télécom mais surtout Orange (disclaimer : mon employeur) sera partenaire majeur pendant 4 ans de l’épreuve landaise du Quik Pro de 2008 à 2011 puis via la marque Sosh pendant 3 ans de 2012 à 2014.

Victoire de l’australien Mick Fanning en 2010
Victoire de Kelly Slater en 2012
© Surf Session

Orange sponsorisera également Jérémy Flores (ici au QuikPro en 2011)

Bref, après les périodes fastes des années 1990 puis 2000, la crise de l’industrie surf début des années 2010 a eu raison de bon nombre de contrats de sponsoring.

Côté surfwear, l’industrie s’est complétement redessinée ces derniers mois. Rachat de Billabong par Quiksilver (qui a été en chapter 11 aux US), le groupe Boardriders appartenant au fonds Oaktree. Rip Curl, l’autre grand nom australien s’est fait racheté par une marque outdoor néo-zélandaise Kathmandu. Volcom (Kering) a été revendu de même qu’Hurley qui appartenait à Nike.

Samsung a par exemple été partenaire majeur de la WSL de 2014 à 2016 avec un très gros budget. Il n’y a plus aujourd’hui de partenaire de ce niveau là côté WSL, ci-dessous la liste des partenaires et sponsors de la WSL

Côté Fédération Française de Surf, il y a eu récemment 2 nouveaux partenaires, la Banque Populaire et plus récemment en ce début 2020 la marque Dacia (groupe Renault)

La Banque Populaire qui avait d’ailleurs réalisé un joli film publicitaire fin 2019 avec du surf dedans ;)

Et côté Dacia, c’est pour le moment assez timide…à part ce post FB de la Fédé

Conclusion : une décision de la WSL concernant la suppression de l’épreuve landaise du circuit pro qui répond officiellement à une logique de calendrier resserré. Un pouvoir plus fort des continents américains et australiens vs européens. Un sponsor principal Quiksilver qui a été plus ou moins contraint. Des instances locales qui n’ont pas été mises dans la confidence et qui n’ont pas joué de leur lobby. Une décision de Paris 2024 de choisir le site de Teahupoo par rapport à une vague aquitaine envoyant un signal contradictoire vu de la WSL. Et enfin une industrie surfwear qui souffre et des sponsors beaucoup moins nombreux qu’il y a quelques décennies.

Et pour se consoler, revivez le best-of de la finale du QuikPro 2019 avec la victoire de Jeremy Flores, le dernier surfeur à avoir remporté le QuikPro France.

[update Octobre 2020] La Fédération française de surf a mis en ligne en Octobre 2020 une interview de Jérémy Flores qui revient 1 an après sur cette journée mémorable pour l’histoire du surf français

Dans ce 3ème volet, Jérémy Flores revient sur le choix de la WSL de supprimer l’épreuve d’Hossegor du clandrier du Championship Tour

extraits

« C’est fini, cette ambiance, tout ça, pendant toutes ces années, avec les Andy Irons, les Kelly Slater, ma victoire mais beaucoup plus de souvenirs de fous, c’est terminé, ça m’a attristé, ça m’a rendu fou, j’aurai préféré 10x défendre mon titre »

« C’est beaucoup de politique malheureusement, c’est dommage, c’est triste, cette épreuve, elle faisait rêver beaucoup de gens, toute la région, aider énormément de commerçants, pour un jeune, ça fait rêver de voir tes idoles »

« Y’a des décisions qui se font où je peux pas trop me permettre de dire ce que je pense réellement sans avoir d’ennuis, parce que c’est comme ça que ça se passe aujourd’hui, mais je suis dégoûté, je suis triste, pour moi c’est incompréhensible »

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Laurent
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