La french touch du code

Cartographie des talents du numérique

Tariq KRIM
Tariq’s Thoughts

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“Nous façonnons nos outils, et ceux-ci à leur tour, nous façonnent”
Marshall Mc Luhan, “Pour comprendre les médias” 1964

Quand Fleur Pellerin m’a confié une mission de cartographie des talents du numérique, en marge du projet Paris Capitale du numérique (devenu depuis French Tech), je n’ai pu m’empêcher de penser à cette phrase prophétique de Marshall Mc Luhan.

Quand on parle de talents du numérique, on pense souvent à nos chercheurs, à nos entrepreneurs, à l’ensemble des structures qui ont été créées pour susciter l’innovation. On mesure notre influence, notre “empreinte numérique” par le nombre de brevets, le volume du Crédit Impôt Recherche ou les montants investis — pas toujours de manière avisée, dans la technologie.

Mais les véritables héros de cette révolution numérique sont les développeurs.

Ce sont eux qui “façonnent” nos outils, eux qui écrivent à coup de lignes de code le monde de demain.

Aux États Unis, ils sont reconnus, célébrés, mis en valeur. Partout des initiatives sont lancées pour permettre aux enfant d’apprendre, dès le plus jeune âge, les bases de la programmation, ou pour pousser plus de femmes à se lancer dans le code.

Les plus grands succès de ces dernières années Google, Facebook, Microsoft, eBay, Apple, Dropbox, Twitter et tant d’autres ont été créés par des développeurs.

A l’heure où le logiciel dévore le monde, la question a dépassé le simple cadre de la technologie pour devenir un enjeu stratégique mondial.

La France, malheureusement, n’a jamais su valoriser sa communauté de développeurs. Souvent méprisés, ils n’accèdent jamais aux postes de décision, au sein de l’Etat ou des grandes entreprises. Considérés comme des exécutants, ils ne sont jamais impliqués dans la stratégie. Stratégie qu’ils sont souvent les seuls à même de mettre en oeuvre.

Quand aux États-Unis, on valorise l’expérience des développeurs, avec le titre de “senior developer”, en France, s’ils souhaitent avoir des responsabilités, ils doivent renoncer au monde du code.

Et le résultat est là : la France accumule les bourdes technologiques, les projets sans queue ni tête et les gaspillage en millions et parfois même en milliards : Chrorus, Louvois, Dossier médical personnel, et sûrement bien d’autres que nous ne connaissons pas encore. Pire : elle n’a pas de vision technologique pour sa politique industrielle, ni de projet politique capable de s’appuyer sur ses développeurs pour se réinventer dans le monde numérique.

Pourtant, en France comme à l’étranger, nos développeurs ont été au coeur des projets technologiques les plus innovants.

Quand j’étais dans la Silicon Valley, la rumeur était que derrière chaque projet cool, il y avait un Frenchie, pas très loin.

Pour Netvibes et Jolicloud, j’ai eu la chance de réunir deux équipes technologiques exceptionnelles de niveau mondial, capables à deux reprises de tenir tête à Google sur le plan technologique.

Cloud, sécurité, architecture, big data, formats de vidéo et de musique, logiciels libres d’infrastructure, drones, jeux videos, cinéma, plate-formes : le talent français s’exprime à tous les étages et dans tous les compartiments du numérique.

Comme dans la musique, il existe une French Touch du logiciel, une patte, une certaine dose d’irrévérence dans le code français.

C’est pourquoi j’ai décidé de consacrer cette mission à mettre ces talents en lumière. J’ai proposé de dresser, en annexe de la mission qui m’a été confiée, une première liste non exhaustive de 100 développeurs marquants en France, même s’ils opèrent a l’étranger. Une illustration de notre savoir faire et de notre talent dans ces domaines, mais surtout une opportunité de mettre en avant des gens avec des parcours, des prises de risque ou des choix technologiques qui sont souvent inconnus du grand public.

La liste sera forcément incomplète et il est possible qu’il y ait certains manques. C’est pour cela que je l’ai faite circuler parmi les développeurs que je connais et admire pour qu’ils m’aident à la compléter. Je mettrai également en place un Wiki afin de permettre à ceux qui le souhaitent de m’aider à la faire vivre et continuer ce travail de mieux faire connaitre les contributions de nos développeurs.

Je forme le voeu que le gouvernement s’appuie sur ces talents et la communauté des développeurs pour faire de notre pays, l’autre nation du code.

Je compléterai donc cette liste avec quelques propositions qui vont dans ce sens.

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