Barcelone : mille start-up tech pour booster la Catalogne ?

Christophe Greuet
TechUpfr
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7 min readNov 1, 2017

Alors que la Catalogne revendique son indépendance, quel rôle pourra jouer l’écosystème tech dans son poids économique ? Un cabinet international dresse un bilan en demi-teintes, présentant toutefois des facteurs encourageants.

Alors que les affrontements font rage entre pro et anti-indépendantistes de la Catalogne, qu’en est-il de l’écosystème tech de Barcelone, principal théâtre des manifestations ? C’est ce qu’a voulu savoir le cabinet international Startup Genome, qui analyse la vigueur du milieu économique des start-up tech dans plus de soixante métropoles réparties sur une trentaine de pays. Les analystes publient des résultats globalement optimistes dans un récent rapport titré “Barcelona Startup Ecosystem Report : The Heart of Catalonia’s Entrepreneurial Powerhouse” (téléchargement gratuit sur cette page), même si de nombreuses faiblesses y sont encore soulignées.

Les principaux acteurs de l’écosystème tech de Barcelone. (Infographie originale : Apiumhub, septembre 2017)

Selon Startup Genome, Barcelone abrite un écosystème global d’environ mille start-up, dont la valorisation globale s’élève à 6,2 milliards de dollars. Un chiffre toutefois en deçà des autres métropoles européennes, dont la moyenne dépasse les 1 700. Ce n’est donc pas encore suffisant pour classer Barcelone dans le Top 20 des écosystèmes tech mondiaux établi par le même cabinet dans l’édition 2017 de son rapport annuel “Global Startup Ecosystem Report”, tout en le qualifiant “aux portes du classement”. Sur le plan local, le cabinet note que “56% des capitaux investis en Espagne dans les start-up le sont en Catalogne”.

Un écosystème attractif en Europe du Sud

La “startup heatmap” de Barcelone, qui montre l‘attrait d’une métropole pour les fondateurs des autres pays européens. (Infographie : Startup Heatmap Europe)

De son côté, le rapport “Startup Heatmap Europe 2016”, établi par l’European Startup Initiative, qui analyse l’attractivité des différentes métropoles européennes pour les créateurs de start-up, souligne que Barcelone est, avec Lisbonne, l’écosystème le plus attractif d’Europe du Sud.

En termes de mentions dans les médias internationaux (analysées grâce aux références notées sur Google, Wired, Techcrunch, The Next Web et Mashable), les start-up barcelonaises arrivent quatrièmes du classement global, avec 162 votes. Loin derrière les leaders attendus Berlin (351 points) et Londres (347), mais à près du triple du score de Paris, qui ne totalise que… 61 votes.

La bâtiment abritant Pier 01, en bordure du port de Barcelone.

Pier 01, un campus start-up géant lancé en 2016

Barcelone abrite un réseau important de structures publiques et privées soutenant l’écosystème : une centaine d’incubateurs, accélérateurs, investisseurs et organismes gouvernementaux ont été dénombrées par Startup Genome.

Le logo de Pier 01.

Un réseau tracté par Pier 01, l’équivalent à dimension locale du Cambridge Innovation Center ou de Station F. Cette importante structure a été lancée le 9 juin 2016 par l’organisation à but non lucratif Barcelona Tech City (BTC), dans le bâtiment historique de la ville Palau del Mar. Il y occupe 7 500 des 10.000 mètres carrés, et abrite plus de 70 start-up et 1 000 employés. Le bâtiment réunit un campus de start-up, des lieux de coworking, services communs et plusieurs espaces dédiés à des conférences et showcases. BTC a investi trois millions et demi d’euros dans la construction et la rénovation du bâtiment.

La Smart City, le secteur qui tracte l’économie tech

Selon le rapport, trois secteurs d’activité tech sont particulièrement représentés à Barcelone. Premier d’entre eux, la Smart City, dont l’activité représente 3% du PIB total de la Catalogne. 270 sociétés spécialisées sont basées dans la région, dont 51 dans le domaine des objets connectés. Des chiffres qui ont amené la ville à être élue en 2015 Global Smart City par le cabinet d’études Juniper Research. Barcelone organise également l’un des principaux salons au monde du domaine, le Smart City World Congress, qui réunit en novembre plus de 17 000 participants et 421 intervenants venus de 120 pays, pour son édition 2017.

Deux autres secteurs sont particulièrement actifs au sein des start-up de la métropoles. La biotech, tractée par la présence du géant catalan de la pharmacie Grífols, représentée dans le classement Fortune 2000, et près de cent centres de recherche. L’une des start-up barcelonaises les plus en vue du secteur est AELIX Therapeutics, qui a levé plus de 11 M$ depuis début 2016, et a débuté en septembre 2017 son premier essai thérapeutique pour un vaccin expérimental contre le virus HIV.

La vidéo de présentation de la start-up barcelonaise Social Point.

Troisième secteur le plus représenté : les jeux vidéo. La Catalogne abrite en effet un quart des sociétés espagnoles du secteur (120 sociétés), et y réalise 42,5% des ventes du pays, soit un total de 256 M$. Les jeux vidéo ont permis à Barcelone d’afficher en février 2017 l’un de ses plus gros exits, avec le rachat de l’éditeur de jeux mobiles Social Point par le géant américain Take-Two (éditeur de la licence GTA), pour un montant de 276 M$.

A noter toutefois que le plus gros rachat enregistré à Barcelone concerne une start-up de la mode et du luxe, Privalia, rachetée en avril 2016 par le leader du secteur, le groupe français Vente-Privée, pour un montant proche de 560 M$.

Des atouts mais encore beaucoup (trop) de faiblesses

Selon le rapport, plusieurs facteurs montrent la bonne santé de l’écosystème tech barcelonais, et une capacité certaine à se développer dans les années à venir. Ainsi, la ville présente un montant global d’investissement satisfaisant sur les start-up early-stage, avec 222 M$ en 2016, certes loin derrière le leader Berlin (qui dépasse le milliard de dollars), mais loin devant Londres (seulement 45 M$). L’écosystème attire les fonds étrangers, puisque 53% des montants investis lors des premiers tours de table proviennent de structures non-locales.

Les start-up barcelonaises peinent toutefois beaucoup à devenir des acteurs globaux. A cela, plusieurs raisons : le nombre d’entrepreneurs visant un marché mondial (38% environ) y est encore trop faible derrière d’autres écosystèmes internationaux. Seuls 9,9% des clients des start-up barcelonaises se situent par ailleurs à l’extérieur du continent européen, un des taux les plus faibles au monde. A cela s’ajoute la très faible attractivité de l’écosystème pour les entrepreneurs (160 pour une moyenne globale de 300) et des start-up (10 pour une moyenne globale de 83).

Le milieu tech peine également à développer ses start-up une fois passée la phase d’amorçage, qui présente souvent des montants trop faibles par société financée (220 000 $ en early-stage et 3,9 M$ en series A). Un fait en partie dû à la trop faible attractivité du secteur tech auprès des investisseurs nationaux et internationaux, encore trop peu nombreux à y “mettre leurs billes”.

Les étrangers et les femmes peu représentés

Parmi l’une des principales raisons avancées par Startup Genome à la difficile internationalisation des start-up barcelonaises, le nombre très faible de fondateurs de structures venus de l’étranger. Ainsi, seul un créateur de start-up sur dix n’est pas issu du tissu local, contre une moyenne de 19% au niveau global. Les femmes, quant à elles, ne représentent que 14% du nombre de fondateurs de start-up, légèrement derrière la moyenne globale de 16%.

A consulter : la Barcelona Startup Map, qui fournit de nombreuses informations sur les start-up locales à partir de leur localisation dans Barcelone.

Le hub French Tech Barcelona regroupe une cinquantaine de start-up

Créé en avril 2016, le hub French Tech Barcelona a été lancé sous la houlette de Laurent Renard, CEO de la start-up Toro Development, qui édite un porte-monnaie électronique. La ville a été, après Londres, la seconde métropole internationale à recevoir un label officiel French Tech.

Selon le site officiel du mouvement, une cinquantaine de structures en font partie, tandis que son groupe LinkedIn regroupe 270 abonnés à ce jour. Le hub ne bénéficie d’aucun soutien de l’Etat, mais dispose d’un directeur à plein temps, grâce au soutien financier de la Chambre de Commerce française de Barcelone.

Plus d’infos sur le communiqué officiel du lancement.

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Christophe Greuet
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