Le Rôle de ma Vie, aussi drôle qu’émouvant

Histoire de changer des méga blockbusters de l’été, un film bientôt sur les écrans propose une parenthèse émouvante au délire estival des invasions de robots de l’espace ou de singes dopés aux antibiotiques. Touchant et drôle, Le Rôle De Ma Vie trouve sa force en adaptant à un scénario plus mature, sans doute plus universel aussi, différents éléments ayant fait le succès de Garden State (premier film du même réalisateur sorti en 2004). Comme on vous le disait dans cet article, un peu plus de 50 000 fans ont mis la main à la poche pour financer ce second long-métrage signé Zach Braff. Ça fait pas mal de monde à satisfaire… L’équipe réunie autour de ce projet financé dans sa plus grande partie via Kickstarter n’avait donc pas trop intérêt à se planter. Les Trois Doigts de la Main ont pu voir ce film en avant-première et voici en quelques lignes et sans spoilers, pourquoi ce film mérite d’être vu (et écouté !).

Contrairement à ce que l’on aurait pu espérer, il ne s’agit pas du Garden State de la décennie. Si l’émotion est clairement au rendez-vous (il ne faut pas exclure de verser une petite larme ici et là pendant les 1h47 que durent le film) l’aspect narratif et le comique (voire l’absurde) du scénario prennent souvent le pas sur la portée dramatique des événements dépeints. Reprenons le scénario en main une seconde justement. Le héros (qui est plutôt un anti-héros d’ailleurs) se nomme Aidan Bloom. Milieu de trentaine vivant à Los Angeles, marié avec 2 enfants, il continue de s’accrocher à son rêve de devenir un comédien renommé, allant d’auditions en auditions, mais en vain. Sa femme (Kate Hudson) doit prendre en charge, seule, les finances du foyer. Cet équilibre précaire se retrouve bouleversé lorsque le père d’Aidan se voit diagnostiqué une rechute dans son cancer et cesse de fournir l’aide financière à laquelle toute la petite famille était habituée. Tristesse pour Aidan bien sûr, incertitudes et questionnements (Suis-je un loser ? un fils indigne ? un mauvais partenaire dans mon couple ? etc) et donc nécessité de réexaminer les décisions l’ayant mené à ainsi vivre au crochet de sa famille. Pas plus de détails ne sont ne sont nécessaires pour identifier quelques grands thèmes du film. La perte imminente d’un proche, les difficultés quotidiennes liées au couple, à la parentalité, à la vie professionnelle et à l’imbrication de tous ces aspects de la vie que nous connaissons tous, directement ou indirectement, mais aussi les interrogations sur un hypothétique sens de la vie, une quête de spiritualité. C’est ce coté universel du film, le fait qu’il soit accessible à tous qui le différencie de Garden State qui, lui, touchait au cœur certes mais un plus petit nombre de par la complexité des situations et des troubles sentimentaux et familiaux qui y étaient décrits.

S’il paraît plus facile pour le spectateur lambda de s’identifier à Aidan Bloom qu’à Andrew Largeman (le personnage central de Garden State), il ne faut pas se laisser porter à croire que ce nouveau film de Zach Braff ne serait pas une véritable production indépendante comme avait pu l’être son premier film. Le financement participatif via Kickstarter lui a permis de conserver la liberté artistique dont il avait besoin. Pas de final cut, de montages, d’équipes techniques ou de “ pré-casting “ imposés par des producteurs hollywoodiens. Sur les 6 millions de dollars qu’ont coûté le film à produire de l’écriture à la projection en salle, plus de 3 millions ont été “ donnés “ par des fans de l’acteur-scénariste-réalisateur. Un tournage intense en 5 semaines, en équipes réduites et surtout en budget réduit a permis à des acteurs classés mainstream comme Kate Hudson, Josh Gad ou Ashley Greene de se frotter, comme s’ils revenaient à leur tout début de carrière , à un cinéma “ petit budget “. C’est ainsi qu’habitant normalement à Atlanta, Pierce Gagnon, le jeune acteur jouant le fils d’Aidan Bloom a été logé avec sa maman chez Zach Braff le temps du tournage, tandis que Kate Hudson a dû choisir des vêtements dans sa garde robe personnelle pour le tournage.

Au niveau de la bande originale, Zach Braff tient ses promesses et nous embarque dans un voyage indie folk aussi savoureux que pouvait l’être la BO de Garden State en son temps. The Shins, révélés il y a 10 ans par le premier film de Braff, reprennent du service pour notre plus grand plaisir et proposent l’excellent titre “ So Now What “. Idem pour Paul Simon qui figurait déjà sur la BO de Garden State. D’autres grands noms du son Folk / Indie Folk contribuent à enfoncer le clou. Radical Face et The Head and the Heart sont particulièrement notables, mais il y a aussi d’autres bonnes surprises que l’on vous laissera découvrir en salle à partir de ce mercredi 13 aout, ou alors dès aujourd’hui dans nos playlists Spotify.

Le Rôle de ma vie, c’est un peu comme un carrefour de la vie. Une croisée des chemins. C’est l’illustration de ces moments souvent difficiles de la vie qui nous mettent un bon coup de pied aux fesses alors que l’on ne s’y attend pas. L’occasion pour ceux qui en ont la présence d’esprit de se remettre sur de meilleurs rails. Le tout sous la forme d’une production indépendante avec une bande originale indie/folk magnifique qui épouse une photographie soignée. Sans être aussi poignant et bouleversant que pouvait l’être Garden State, Le Rôle de ma Vie reste très bon dans son genre. Un film qui sait appuyer sur les boutons de l’émotion et du rire, et même un peu sur ceux de la réflexion et de l’introspection. Un bon 8/10 !

Originally published at https://www.lestroisdoigtsdelamain.com on August 11, 2014.

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