Gender diversity is the new growth

Agathe
The Galion Project
Published in
10 min readDec 5, 2018

De nombreuses études démontrent le lien entre la mixité homme/femme des entreprises et leur croissance. Convaincu de ce rapport de cause à effet, The Galion Project met à la disposition des entrepreneurs de la Tech le Gender Agreement, un outil pour les aider à instaurer un meilleur équilibre hommes/femmes dans leurs équipes à travers 45 solutions simples et concrètes définies avec les membres du Galion.

Conférence de lancement Galion Gender Agreement le 5 décembre 2018 dans les locaux de Comet Meetings.

Pas une fatalité

Les femmes ne représentaient en 2017 que 33% des emplois dans le numérique et 9% des dirigeantes de start-up en France. Une absence alarmante, au moment où le numérique structure l’économie et la société du futur.

L’absence de femmes dans le numérique n’est pourtant pas une fatalité : d’Ada Lovelace, qui contribua à l’invention du code, à Margaret Hamilton, conceptrice du programme embarqué de la mission Apollo pour la NASA, en passant par Hedy Lamarr, star d’Hollywood et inventeure du wifi, les femmes ont joué un rôle fondamental dans le numérique. Elles restent d’ailleurs très présentes dans un secteur assimilé à du secrétariat amélioré jusqu’aux années 80.

L’avènement du micro-ordinateur change la donne : l’informatique entre dans les foyers et devient l’apanage des « geeks », élite de la contre-culture popularisée par des films comme « War Games ». Les femmes désinvestissent alors le secteur — ou en sont détournées. Dans l’imaginaire collectif, le numérique est, depuis, incarné par des figures comme Mark Zuckerberg, Bill Gates ou Steve Jobs et par une culture de « brogrammers » excluant les femmes.

Cette absence des femmes est pourtant due à des facteurs sociétaux, rappelle Frédéric Bardeau (Simplon) : « la cyberculture est très masculine mais c’est culturel : en Chine, en Inde ou en Iran, il y a plus de développeuses car la communication autour des sciences informatiques n’est pas genrée. »

Un enjeu de performance… mais pas seulement !

Or l’équilibre hommes/femmes dans la Tech porte d’énormes enjeux.

Un enjeu de performance, selon de multiples études. Celle de Mac Kinsey « Women Matter 2016 » démontre que la parité génèrerait 200MA$ de PIB supplémentaire en 2025 en Europe de l’ouest. L’étude de The Boston Consulting Group « Why women owned startups are a better bet » conclut que les entreprises fondées par des femmes sont plus profitables que celles fondées par des hommes.

« Women Matter 2016 » Mac Kinsey

Un enjeu de recrutement : le secteur de la Tech est menacé par une pénurie de 750 000 postes à horizon 2020, selon la Commission européenne. Comment alors se priver de 50% des talents ?

Un enjeu de performance sociale : un rapport de l’Institut des Politiques Publiques de 2015 conclut que les hommes bénéficient autant que les femmes des conséquences de la féminisation d’une entreprise : amélioration du climat social, de la satisfaction au travail et de la confiance en l’entreprise…

Un enjeu d’innovation : « Il faut autour de la table des personnes différentes pour régler des problèmes différents », souligne Céline Lazorthes (Leetchi/MangoPay). La diversité — de genres, mais aussi de cultures, de langues…- est une forme d’intelligence collective qui renforce la créativité. Le risque majeur d’une entreprise est d’avoir une vision monolithique des utilisateurs, des marchés, des produits et des organisations, et « pour résoudre des problèmes humains ou business, il faut des points de vue et des angles différents » analyse Jean-Baptiste Rudelle (Criteo).

Enfin — et surtout — c’est un enjeu sociétal majeur : à l’heure de la révolution digitale, les femmes doivent, comme les hommes, participer à la conception des usages, biens et services de demain pour éviter le syndrome de l’airbag, dont les premiers modèles, conçus pour des hommes d’1,80m, ne protégeaient pas les femmes, ou les outils de reconnaissance vocale qui n’entendaient pas les voix féminines.

Mais avant tout, « la féminisation de l’entreprise relève de ses valeurs. On croit dans un monde à l‘image de notre communauté : mixte », rappelle Frédéric Mazzella (BlaBlaCar).

Un sujet prioritaire dès la création

Une croissance saine reposant donc aussi sur un équilibre hommes/femmes, le sujet n’est pas un luxe réservé aux entreprises déjà matures.

Mais si l’enjeu est évident, la concrétisation reste difficile.

C’est pourquoi la féminisation doit constituer une priorité dès la création de l’entreprise, sous peine de la pénaliser en instaurant un retard impossible à rattraper. D’autant qu’une masse critique de 30 à 40% du sexe opposé est nécessaire pour impacter durablement les codes, la culture, l’ambiance, l’environnement de travail d’une entreprise.

Approche holistique et culture inclusive

Le premier enjeu, pour l’entreprise, est de se distinguer de codes culturels masculins de la Tech, qui sont au mieux inadaptés, au pire excluants pour les femmes… voire sexistes, et constituent pour elles un repoussoir naturel.

Une évidence : cette culture doit avant tout être respectueuse. Cela relève de la responsabilité des fondateurs, car « le poisson pourrit par la tête », insiste Michel Athenour (Autrement). L’équipe dirigeante doit montrer une tolérance zéro pour les remarques déplacées ou dévalorisantes sur les personnes ou leurs compétences : le silence vaudrait validation. Et l’entreprise doit être organisée pour qu’en cas de problème, les femmes trouvent naturellement à qui parler à la direction.

2e point : l’entreprise doit diffuser une culture de l’égalité, en adéquation avec les deux sexes, dans la forme comme dans le fond. Identité graphique, positionnement, messages, rituels, langage, événements : tout doit signifier aux femmes qu’elles seront dans un environnement pensé pour elles comme pour les hommes.

L’enjeu est crucial car « la culture d’une entreprise peut l’empêcher de grandir : c’est le cas d’Uber », rappelle Jérémy Clédat (Welcome to the jungle).

Etre volontariste dans les recrutements

C’est un fait : recruter des femmes dans la Tech est difficile.

« La féminisation des équipes se fait rarement d’elle-même », souligne Jean-Baptiste Rudelle (Criteo), « il faut se montrer volontariste pour atteindre ses objectifs ». Dénicher les profils féminins, surtout techniques, est un travail de fourmi qui passe par une chasse précise sur linkedin, la mobilisation du réseau des équipes tech et l’investissement de chasseurs. Mais aussi une adaptation à la cible : ne pas genrer le vocabulaire des annonces, organiser des événements autour de produits ou projets plus féminins… Tout cela exige plus d’efforts, voire d’argent, mais s’avère payant à terme.

Alternative à la recherche du profil idéal : la formation. Pour élargir le pool de recrutement des développeurs, Benoît Charles-Lavauzelle et Fabrice Bernhard ont étendu chez Theodo leur recherche aux femmes ingénieures, et transforment ensuite les compétences par la formation.

Mais surtout… les femmes attirent les femmes. Céline Lazorthes en témoigne : « il n’y a pas plus tech que mon métier, et pourtant on a 66% de femmes dans le directoire, 33% dans le top management… et 26% dans l’équipe IT, ce qui est énorme. Pourquoi ? Parce que je suis CEO femme et que ma CTO est une femme. » Les collaboratrices doivent donc être visibles, notamment lors des entretiens d’embauche.

Le congé maternité : pas un problème si…

La question de la féminisation des entreprises se cristallise souvent autour du congé maternité : l’enfant n’est même pas conçu qu’il est déjà un obstacle à la carrière d’une candidate…

C’est pourtant un faux problème, réagit Tatiana Jama (Selectionnist/VisualBot) : « si une entreprise ne peut pas se passer de quelqu’un pendant 6 mois, c’est qu’elle n’est pas scalable. Il faut arrêter de voir le congé maternité comme un problème, c’est une opportunité : de cristalliser la fidélité et de multiplier l’efficacité. »

Cela permet en effet à l’entreprise d’optimiser son organisation et, pour les équipes, de monter en compétences. À 2 conditions cependant :

  • une annonce de la grossesse au plus tôt, pour organiser sereinement l’absence de la collaboratrice.
  • L’information ou, mieux, la participation de la collaboratrice à l’organisation et la répartition de ses tâches en son absence.

Créer le plus d’adhérence possible

L’arrivée d’un enfant est un moment charnière pour fidéliser les collaborateurs… des deux sexes.

C’est un moment professionnellement fragilisant pour une femme, où il va lui falloir lâcher prise et affronter ses peurs : de perdre son job, de voir diminuer son influence, de n’être plus indispensable… Un congé maternité qui se passe bien crée un lien durable entre l’entreprise et la collaboratrice.

C’est d’autant plus profitable pour l’entreprise qu’« il n’y a pas plus organisé ni efficace qu’une femme qui revient de congé maternité : c’est une machine de guerre ,» selon Fred Potter (Netatmo). Le désengagement est bien une question de personne, et non d’enfant.

Le congé paternité fait quant à lui toujours débat. Pour certains, il relève des choix personnels du collaborateur et non de la responsabilité de l’entreprise. Pour d’autres, à l’instar de Dan Gomplewicz (Armis), c’est une évidence: « pour avoir une égalité hommes/femmes il faut allonger le congé paternité. C’est aussi une façon de se différencier. »

L’aide à la parentalité, en revanche, comme toute mesure aidant les salariés à concilier leurs vies professionnelle et personnelle, fait l’unanimité : c’est la preuve concrète de l’investissement de l’entreprise dans le bien-être de ses salariés et l’illustration de ses valeurs. Télé-travail, autonomie d’organisation, horaires de réunion, mais aussi crèches d’entreprise sont autant de moyens de créer le plus d’adhérence possible… et le plus de friction à la démission.

Objectiver salaires et promotion

Bien sûr, l’équilibre hommes/femmes passe aussi par une égalité salariale. Pourtant, à temps de travail et métiers équivalents, les femmes gagnent encore 12,8% de moins que les hommes selon le ministère du Travail, et l’écart se creuse sur les salaires les plus élevés.

Selon Carole Walter (MonsieurDrive), « les femmes demandent moins de salaire et d’augmentation que les hommes et sont pénalisées ensuite par les congés maternité. C’est un biais qu’il faut identifier et corriger. »

Comment ? D’une part à travers une revue annuelle des salaires, avec une vigilance particulière aux congés maternité pour qu’ils ne creusent pas un écart irrattrapable. D’autre part en objectivant les augmentations : interdiction de négocier, et des augmentations suivant une grille préétablie. Une façon de neutraliser le manque d’agressivité des femmes dans la négociation salariale.

Idem pour les promotions, car la féminisation n’est réelle que quand les femmes intègrent le top management. Une politique de discrimination positive serait non seulement illégale, mais aussi contre-productive : cela « laisserait entendre que leur succès a moins de valeur que celui des hommes. Il faut plutôt changer les conditions qui les empêchent de réussir », souligne Jérémy Clédat.

La réponse : « On a formalisé les critères de promotion car quand on grandit, il faut formaliser, ne serait-ce que pour aider les managers » explique Thierry Petit (Showroomprivé). Une façon de maîtriser les biais et d’empêcher que seuls les plus revendicatifs soient promus.

Confiance et role-models

Mais l’objectivation n’empêche pas les biais : « Tout le monde, hommes et femmes, juge plus durement les femmes. Y compris elles-mêmes dans les processus d’auto-évaluation. Il faut avoir ce biais en tête au moment des évaluations » analyse Jean-Baptiste Rudelles. Auto-censure et sentiment d’imposture ont en effet un impact à tous les niveaux : recrutement, promotion, salaires…

Pour Fany Pechiodat (My little Paris/Seasonly), « le sujet des femmes c’est la confiance. Il faut leur dire que c’est un muscle, que ça se travaille. » A l’entreprise de les accompagner pour qu’elles gagnent en confiance et osent briguer des postes à responsabilité. Cela implique de sensibiliser les managers au sujet lors des formations au management, pour qu’ils sachent verbaliser l’auto-censure et favoriser une prise de conscience de la collaboratrice.

Formations d’empowerment ou coachings individuels sont aussi un bon moyen de dépasser l’auto-censure, pour les hommes comme pour les femmes d’ailleurs. Mais les résistances sont parfois fortes et la confiance n’est pas transférable. Il faut mettre en avant des éléments très factuels de réussite pour convaincre de ses compétences quelqu’un qui doute de soi.

Autre élément déterminant pour permettre aux femmes de se projeter dans la réussite : les role-models. Les prises de parole publiques, dans des événements Tech type Best of Web ou WebDays, sont importantes pour faire émerger des role-models Tech. Idem pour le partage d’expérience, que préconise Alix de Sagazan (AB Tasty) : avoir une femme CEO, qui partage les étapes de la confiance en soi, les aide à projeter leur ambition.

Mais les créer et les faire évoluer prend du temps. « Les quotas sur les boards ont été une révolution », note Jean-Baptiste Rudelle. « Les femmes ont un rôle important à jouer, par exemple dans le management des équipes techniques qui rassemblent plutôt des profils d’experts. Mais c’est très long de former une génération de managers. »

« L’entreprise est un endroit où on peut recréer la société et ainsi la rendre plus juste », conclut Céline Lazorthes. C’est pourquoi il y a pour les entreprises urgence à passer à l’action.

The Galion Project invite les entrepreneurs, en signant le Gender Agreement, à s’engager dans la construction d’une croissance saine, basée sur une vision du monde partagée par les femmes comme par les hommes.

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Agathe

Bibliographie

· « Code : debugging the gender gap », documentaire de Robin Hauser Reynolds

· Etude Mc Kinsey Women Matter 2016 : « reinventing the workplace to unlock the potential of gender diversity »

· Etude BCG/Mass Challenge « Why women-owned startups are a better bet » juin 2018

· Etude BCG « How diverse leadership teams boost innovation » janvier 2018

· « 10 lessons » First Round Capital (2015) http://10years.firstround.com

· Observatoire des inégalités : https://www.inegalites.fr/Les-inegalites-de-salaires-entre-les-femmes-et-les-hommes-etat-des-lieux

· Rapport IPP n°12 « Féminisation et performances économiques et sociales des entreprises », décembre 2015 — Thomas Breda. Etude réalisée dans le cadre d’une convention entre l’IPP et le Secrétariat d’Etat chargé des Droits des Femmes.

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Agathe
The Galion Project

CEO & Founder @TheGalionproject. French Think Tank for ambitious entrepreneurs.