Le travail hybride n’est pas un problème à résoudre

Benoit Hurel
The Ready
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7 min readAug 23, 2022

C’est une occasion d’expérimenter.

Définir le travail hybride est un défi complexe. Ceux qui en doutent encore n’ont qu’à se référer à la douleur, au marasme et aux volte-face que même les organisations les plus innovantes éprouvent actuellement en essayant de mettre en œuvre des stratégies de travail hybride. Une partie de l’inconfort et de la confusion provient du fait que lorsque nous sommes confrontés à des niveaux élevés de désordre, de taille et de volatilité, il n’y a pas de réponse unique. Les solutions miracles et les remèdes miracles n’existent tout simplement pas. Pour aggraver les choses, la plupart des organisations abordent le travail hybride à partir d’une fausse dichotomie, en se demandant : “Devrions-nous imposer une politique à tout le monde ou laisser les gens faire ce qu’ils veulent ?”

Ne nous méprenez pas, nous comprenons combien il est tentant d’essayer le déploiement d’une solution unique qui fonctionnera pour l’ensemble d’une fonction, d’une division ou d’une organisation. Cette tentation est particulièrement forte lorsque nous avons besoin que les gens prennent des décisions basées non seulement sur leurs propres besoins et préférences, mais aussi sur les besoins et préférences de leur équipe, des autres équipes et de l’entreprise dans son ensemble. Si chacun prend des décisions en fonction de ses intérêts personnels et professionnels, qui veille à la santé de l’organisation ?

Le problème est que lorsque nous sommes aux prises avec un système complexe — comme un ensemble d’équipes, chacune travaillant sur des défis différents dans des contextes différents — une seule et même approche n’est pas suffisante. La mise en œuvre d’une solution unique appliquée à tous les contextes risque d’empêcher la plupart des équipes de travailler de manière optimale pour elles et leurs objectifs. Si vous diluez une solution unique pour éviter de perturber l’une des équipes, vous vous retrouverez avec une solution qui aura des effets bénéfiques et un impact limités.

Mais il y a une bonne nouvelle : Ces choix — que ce soit mettre en œuvre une politique universelle ou laisser la décision aux individus — ne sont pas les seuls disponibles. Il existe une troisième voie qui mérite d’être explorée et qui s’appelle l’expérimentation en équipe distribuée.

Par “distribuée”, nous entendons des équipes réparties dans toute l’organisation et menant diverses expérimentations. Par “expérimentation”, nous entendons l’acte de faire une supposition éclairée (ou une hypothèse) sur ce qui fonctionnera pour un défi donné dans un contexte donné. Par exemple, une équipe dont les membres travaillent de manière indépendante pourrait essayer de travailler à distance, à l’exception d’une rétrospective bihebdomadaire en présentiel, tandis qu’une équipe dont les membres collaborent quotidiennement pourrait essayer de se réunir en présentiel trois jours par semaine.

Essentiellement, “l'expérimentation par équipe distribuée” signifie que de nombreuses équipes tentent différentes expériences pour déterminer ce qui les aidera à relever un défi commun, tel que le travail hybride.

Cette approche présente de multiples avantages. Premièrement, elle permet aux équipes de se doter des moyens de réussir dans leur contexte. Ensuite, elle permet aux équipes distribuées d’expérimenter et d’apprendre en se concentrant sur un défi spécifique auquel l’ensemble de l’organisation est confrontée. Cela signifie que vous pouvez rapidement déterminer ce qui fonctionne, où cela fonctionne et comment vous adapter si jamais cela ne fonctionne plus.

Rappelez-vous cependant qu’il n’existe pas de solution unique dans un système complexe ; l’objectif final de l’expérimentation en équipe distribuée n’est pas de trouver une solution à l’échelle de l’entreprise. En revanche, l’objectif final est de permettre aux équipes de trouver ce qui fonctionne pour elles, tandis que l’ensemble de l’entreprise acquiert des connaissances sur les différentes approches.

Le travail hybride est particulièrement propice à l’expérimentation, car presque personne ne l’a encore maîtrisé. Si votre organisation est comme la plupart des autres actuellement, il n’existe pas de statu quo stable et hautement fonctionnel en matière de travail hybride que vous risqueriez de perdre. Et les enjeux sont incroyablement élevés, car les approches inefficaces du travail hybride peuvent anéantir la productivité et frustrer les employés. L’expérimentation en équipe distribuée implique de partager avec les employés à la fois le pouvoir de décider de leur mode de travail et la responsabilité de le développer par eux-mêmes. Cette approche est importante, car le travail hybride est appelé à durer. L’expérimentation en équipe distribuée est donc l’occasion d’inverser le scénario et de faire du travail hybride une opportunité pleine de sens plutôt qu’un défi épineux qui vous s’impose à vous.

Prêt à tenter le coup ? Voici les étapes à suivre :

1) Créer les paramètres pour les expérimentations.

Décidez de ce qui est attendu de chaque équipe et des contraintes dans lesquelles elle doit travailler. Voici une première série de paramètres à prendre en compte :

  • Chaque équipe s’engage à mener au moins une expérimentation visant à tester une réponse à cette problématique : Comment pouvons-nous utiliser le travail à distance et le travail en présentiel pour avoir le plus grand impact positif sur le travail de notre équipe, sur notre entreprise et sur notre qualité de vie ?
  • Chaque expérimentation doit être terminée dans les quatre semaines.
  • Chaque équipe s’engage à remplir une Fiche de Conception de l’Expérimentation d’Équipe de Travail Hybride et à la publier dans un endroit partagé où toutes les autres équipes peuvent la consulter.
  • Chaque équipe s’engage à partager publiquement avec le reste de l’organisation (a) ce qu’elle a appris et (b) ce qu’elle va essayer ensuite.

Conseil de pro : Une bonne contrainte agit comme un garde-fou pour aider tout le monde à avancer dans la même direction et atténuer les risques inacceptables tout en laissant aux équipes une grande marge de manœuvre pour explorer, être créatif et s’adapter.

2) Décidez quelles équipes réaliseront les expérimentations.

  • Option 1 : Demander à des “équipes pilotes” volontaires de concevoir et de mener des expérimentations dans le cadre des paramètres convenus. Si vous voulez que l’essai soit vraiment sans risques, demandez à une seule équipe de réaliser une expérimentation et de partager ce qu’elle a appris.
  • Option 2 : Proposer à un panel d’équipes de concevoir et de réaliser des expérimentations dans le cadre des paramètres convenus et demander à ces équipes si elles sont d’accord (le panel peut inclure seulement quelques équipes ou toutes les équipes).
  • Option 3 : Mandater (ou proposer et obtenir le consentement) que toutes les équipes conçoivent et réalisent des expérimentations selon les paramètres convenus.

Conseil de pro : Choisissez une option qui corresponde à la rapidité avec laquelle votre organisation veut progresser dans ce domaine. Si la capacité de fonctionner en mode hybride est une priorité absolue et que les équipes sont déjà relativement habiles à tenter de nouvelles choses, les options 2 ou 3 sont judicieuses. Si vous souhaitez réduire les perturbations liées à l’expérimentation, l’option 1 est un bon choix. N’oubliez pas que vous pouvez toujours commencer par l’option 1, puis évoluer vers l’option 2 ou 3 au fil du temps.

Conseil de pro : si vous n’êtes pas en position d’organiser l’expérimentation sur plusieurs équipes, vous pouvez tout de même suggérer cette approche à votre équipe.

3) Soutenir les équipes, selon les besoins, pendant qu’elles conçoivent et réalisent leurs expérimentations. Ce soutien peut se traduire par :

  • Fournir le soutien d’un facilitateur aux équipes qui ont besoin d’aide pour concevoir leur expérimentation.
  • Partager une vision plus large des facteurs (tels que la stratégie de votre organisation et la façon dont les autres équipes travaillent) afin d’éclairer la conception des expérimentations.
  • Fournir un “soutien aérien” aux équipes qui mènent des expérimentations, afin que les autres secteurs de l’entreprise ne bloquent pas passivement les progrès d’une expérimentation et ne fassent pas pression pour maintenir les anciennes méthodes de travail.

4) Faciliter les conversations entre les équipes qui ont mené des expérimentations pour faire le point sur ce qui a été appris.

Une rétrospective ou un “User Experience Fishbowl” sont d’excellentes options de format pour ce type de conversation.

5) Rendez les idées et les leçons apprises accessibles à toutes les équipes.

Sortez des sentiers battus pour celui-ci. Les courriels et les documents Word sont acceptables, mais si vous laissez chaque équipe communiquer ses idées dans son propre style (par exemple, un document, un jeu de diapositives, une vidéo ou un enregistrement audio), les informations seront plus riches. Idéalement, ces idées seront également facilement consultables, afin de pouvoir y faire référence à l’avenir.

6)Identifier les prochaines étapes. Ces étapes pourraient inclure :

  • Exécution d’une nouvelle série d’expérimentations.
  • Ajuster les politiques interéquipes en fonction des enseignements tirés.
  • Aider les équipes qui travaillent en étroite collaboration à conclure des accords partagés sur la manière dont elles souhaitent collaborer.

Si le travail hybride est un excellent candidat pour cette approche, la vérité est que l’expérimentation en équipe distribuée est très efficace pour presque tous les défis complexes, qu’il s’agisse de gérer une crise, de bouleverser votre secteur ou de favoriser une culture de travail plus saine. La mise en place de politiques, de procédures opérationnelles standard et de règles de plus en plus globales a tendance à rendre les organisations de plus en plus fragiles et lentes (bureaucratie, qui sait ?), alors que l’expérimentation en équipe distribuée et l’adaptation aux contraintes peuvent les rendre plus résilientes. Et de nos jours, avec l’incertitude et la volatilité qui atteignent des sommets, la résilience est le nom du jeu pour les organisations qui espèrent non seulement survivre, mais aussi prospérer.

Si vous cherchez de l’aide pour concevoir votre propre approche de travail hybride, nous serions ravis de vous entendre !

The Ready est un partenaire de design et de transformation organisationnelle qui vous aide à découvrir une meilleure façon de travailler. Nous travaillons avec certaines des organisations les plus grandes, les plus anciennes et les plus inspirées du monde pour les aider à éliminer la bureaucratie et à s’adapter au monde complexe dans lequel nous vivons tous. Pour en savoir plus, abonnez-vous au podcast Brave New Work (en anglais) et à l’infolettre Brave New Work Wednesdays (en anglais), lisez notre livre (en anglais, mais bientôt en français) ou contactez-nous pour discuter (en français ou en anglais, comme vous préférez ;-) ) de la manière dont nous pouvons aider votre organisation à développer des méthodes de travail mieux adaptées à votre réalité actuelle.

Zoe Donaldson a contribué de manière significative à cet article.

Auteur: Alastair Steward

Article original en anglais Hybrid Work Isn’t a Problem to Solve (08.07.2022)

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Benoit Hurel
The Ready

Partner @ The Ready — Designer de Transformations d’Organisations