Quel nouveau business pour les objets connectés ?

Nicolas Bariteau
The ThinkBlog

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En un peu plus de dix ans, les technologues ont prédit la généralisation des objets connectés jusqu’à leur omniprésence. Mais les entreprises et les états sont-ils prêts à accueillir des milliards d’objets connectés à Internet ?

Qu’est-ce que l’Internet des objets (Internet of Things) ?

Les industries technologiques se préparent à cet Internet des objets où tout élément physique de notre environnement quotidien intègre un micro-ordinateur. Ces artéfacts collectent et transmettent des données sur leur environnement et nous donnent de nouveaux moyens de le maîtriser.

Selon David Blaauw, qui dirige un laboratoire à l’Université du Michigan qui développe des micro-ordinateurs pas plus grand que cette lettre « o » :

Il y a de nombreuses façons de les dénommer, mais il y a peu de doutes que nous soyons en train de voir émerger un nouveau type d’ordinateur.

Un des éléments clefs de leur émergence est la disponibilité de composants miniaturisés peu onéreux que vous retrouvez déjà dans votre smartphone. Moins ils sont chers, plus il est possible d’augmenter le nombre et le type d’objets connectés, comme une brosse à dent, une fourchette, une canalisation, ou une poubelle. A Berkeley, l’Université de Californie, des chercheurs ont même réussi à créer des ordinateurs de la taille d’une tête d’épingle permettant de collecter des données au coeur du cerveau et de les transmettre à travers le crâne. L’idée étant d’intégrer le corps humain dans ce réseau d’objets connectés.

Un objet connecté est-il vraiment intelligent ?

Tout cela pourrait vous paraître extravagant, voire dément. Avons-nous réellement besoin d’une tasse à café intelligente ou d’un navigateur Web sur un réfrigérateur ? Nombre de ces inventions peuvent sembler folles.

Par exemple, sur Amazon, un internaute ayant trouvé un « egg minder », un objet connecté qui vous alerte sur votre smartphone lorsque approche la date de péremption d’un oeuf présent dans votre réfrigérateur, pour la modique somme de 78$, a laissé l’avis “Fantastique produit. Je n’aurai plus à me faire des cheveux gris en m’inquiétant pour mes oeufs.”

Chaque jour, de nouvelles combinaisons de capteurs ajoutent des fonctionnalités inédites à certaines de ces machines combien même il n’y aurait pas d’applications qui lui correspondent. Depuis 2007, par exemple, chaque nouvelle voiture vendue aux Etats-Unis a une puce dans les pneus qui mesure la pression et envoie des données vers le système embarqué de la voiture par radio. Une voiture embarque désormais en moyenne 60 microprocesseurs, selon le Centre pour la recherche Automobile, et l’électronique embarqué compte pour 40% du coût de fabrication d’une voiture.

Qui bénéficiera en premier lieu de ce nouveau business ?

L’Internet des objets est particulièrement important pour les entreprises qui vendent les équipements réseaux, comme Cisco Systems. Plein d’enthousiasme, Cisco a prédit que 50 milliards d’objets pourraient être connectés aux réseaux de communication dans les six prochaines années, loin des 10 milliards de téléphones mobiles et ordinateurs aujourd’hui. L’autre acteur qui bénéficiera de cette évolution est l’industrie des semi-conducteurs et ses 300 milliards de dollars. Toujours selon David Blaauw,

Chaque fois qu’il y a eu un nouveau type d’ordinateur, son revenu total a dépassé celui des précédents. Si cette tendance se confirme, cela signifie que l’Internet des objets connaîtra une croissance plus importante que la technologie précédente.

Mais chaque avancée possède son lot de peines aussi. De grandes sociétés telles Intel sont déjà chahutées avec l’émergence rapide des smartphones. Ses puces puissantes et énergivores en ont été exclues. Il en est de même pour Microsoft. Maintenant ces deux groupes, et bien d’autres, essayent de trouver la combinaison gagnante de logiciel, interfaces et processeurs adaptés à cette nouvelle donne.

Ces sociétés technologiques ne sont cependant pas les seules à devoir rester aux aguets. Les produits ordinaires devenant connectés, leurs fabricants devront intégrer des éléments dont les logiques économiques leur sont étrangères. C’est une chose de fabriquer des chaussures, c’en est une autre de fabriquer des chaussures qui communiquent. Ces produits ordinaires pourraient s’avérer précieux en devenant le support de nouveaux services. Marshall Van Alstyne, un professeur de la Boston University, n’affirme pas autre chose en déclarant : “Vous pourriez vous rendre compte que les données sont plus créatrices de valeurs que les chaussures”.

Quel nouveau business émergera lorsque les objets seront connectés ?

Thermostat Nest — Nest Labs

Nest Labs, inventeur d’un thermostat intelligent connecté à Internet, en est l’un des pionniers. Nest, qui a été racheté par Google en janvier 2014 pour 3,2 milliards de dollars, a bouleversé l’activité de ses rivaux fabricants de thermostat. Maintenant que son réseau de thermostats géré et contrôlé à distance est en place avec plus d’un million de clients, l’entreprise commence à offrir des services aux compagnies d’électricité pour réguler les consommations d’énergie. Les jours de forte chaleur, il peut désactiver les climatiseurs de manière sélective afin de maîtriser la demande.

Nest multiplie les partenariats avec Mercedes, Jawbone, Whirlpool

Le développement de services par Nest n’en n’est encore qu’aux prémices, mais un jour, grâce à quelques bits envoyés à travers le réseau, l’entreprise mettra une centrale électrique ou deux hors service. Est-il dans ces conditions étonnant que cette année, dans sa lettre annuelle aux actionnaires, Jeff Immelt, CEO de General Electric, le plus grand fabricant du monde, ait dit aux investisseurs que « chaque entreprise industrielle sera une société de logiciel.” ?

Nous faisons rentrer la planète dans l’ordinateur. Toujours plus d’ordinateurs.

Gordon Bell, un chercheur de Microsoft et un pionnier de la première révolution informatique, pense que personne ne sait encore quelle forme d’informatique prendra l’Internet des objets. Mais il affirme que ce n’est pas surprenant. L’importance de l’ordinateur puis du smartphone n’est apparue qu’après leur développement. Selon lui, l’expression « Internet des objets » permet de faire comprendre que :

la majeure parti de notre monde fera partie du réseau. C’est ce qui est en train de se passer. Nous faisons rentrer la planète dans l’ordinateur. Toujours plus d’ordinateurs.

Originally published at www.nicolasbariteau.com on September 8, 2014.

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Nicolas Bariteau
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Fondateur deNB Consulting — Conseil et formation en stratégie marketing digitale. Curieux insatiable