Être le premier Product Designer dans son entreprise : retour d’expérience

Julien Hillion
The Design Crew
Published in
6 min readJun 4, 2019

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Félix Lepoutre est Product Designer chez Lydia. Après avoir effectué ses études à l’école de Design Nantes Atlantique, il s’envole à New York pour y effectuer 2 stages chez Red Antler & l’ancienne app mobile Enquire. Depuis plus de 4 ans, Félix est le seul Product Designer de Lydia et dans cet interview il nous parle de son expérience liée à ce type de configuration.

Peux-tu te présenter brièvement et nous expliquer quel aspect de ton travail tu affectionnes le plus ?

J’ai 28 ans et je suis Product Designer chez Lydia. J’ai toujours travaillé dans le mobile, j’en ai très vite fait une spécialité bien qu’il puisse m’arriver de travailler sur des produits web. J’apprécie particulièrement les problématiques liées au Product Management, à savoir la gestion d’un projet de bout en bout et trouver des solutions à la fois bénéfiques pour l’utilisateur et le business.

En plus de cela, j’affectionne particulièrement la collaboration avec les développeurs ainsi que la phase d’analyse du parcours de conversion suite à la mise en production d’une fonctionnalité, avec des outils tels que Amplitude. Voir les moments où un utilisateur quitte un parcours précis m’aide à déceler des frictions et à savoir sur quoi itérer en priorité.

Quand tu es arrivé chez Lydia il y a bientôt 5 ans, tu étais le premier Product Designer (et tu es toujours le seul aujourd’hui !) : quels sont les principaux challenges liés à cette configuration ?

Le plus gros défi, c’est clairement de rester efficace et rigoureux bien que sur une même semaine il peut m’arriver de jongler avec une dizaine de projets différents. Je peux difficilement avoir un unique focus sur une longue période chez Lydia.

Mais sinon, être le premier Product Designer c’est finalement devoir préparer un terrain sain pour en accueillir d’autres. Je m’efforce dès aujourd’hui à avoir de bons réflexes niveau organisation, comme si on était plusieurs, afin d’anticiper au mieux une future collaboration. Notamment sur ces quelques sujets :

  • L’alimentation continue d’un UI kit iOS et Android

L’idée est de transformer un maximum de nos propres composants en symboles Sketch pour éviter que mes futurs collaborateurs Product Designer réinventent la roue à chaque fois. Ca fera gagner du temps à tout le monde y compris aux développeurs. Attention cependant à ne pas être trop rigide sur l’usage d’un UI kit, cela peut brider la créativité : n’ayez jamais peur de créer de nouvelles choses.

  • L’organisation et nomenclature des fichiers

C’est assez important d’être rigoureux sur ce point afin de facilement trouver ce qu’on cherche, et donc encore une fois gagner du temps. Je connais certaines personnes qui vont plus loin avec le nommage des calques et artboard dans les fichiers Sketch mais personnellement c’est loin d’être mon cas.

  • La gestion de l’archivage

Mon dossier “Mocks” du screenshot précédent contient les versions à jour des écrans. Le bon réflexe est de garder les versions obsolètes dans le dossier “Archives”. Tout ça dans le but de permettre aux nouveaux arrivants de consulter ce qui a déjà été fait, pas fait, savoir ce qui a marché ou non.

  • Répertorier ses propres principes en matière d’UX

Je fais au mieux pour maintenir à jour un document à mesure que nous validons, au sein de l’équipe Production, des principes forts relatifs à l’expérience utilisateur. C’est une sorte de liste de commandements, souvent courts, qu’il faut connaître par coeur dès lors qu’on manipule l’interface Lydia. C’est la première chose que lira la prochaine recrue en Design Produit. Exemple de principe qui figure dans notre liste : “Never let a call to action alone, always offer a second exit option to the user”.

À tes débuts, comment était perçu le Design chez Lydia ? Et comment as-tu pu insuffler une Design Culture ?

Quand on candidate en tant que premier Product Designer dans une boîte, les entretiens sont aussi importants côté candidat afin de questionner l’équipe et bien cerner leurs valeurs du Design. Hélas, le terme Design est souvent mal utilisé ce qui nous décrédibilise assez vite, nous, Designer. La faute notamment aux émissions de déco dans lesquelles on entend des “c’est Design” à tout-va pour décrire quelque chose de joli, ou encore au produit Dribbble qui a créé une véritable obsession du “beau” par rapport au “fonctionnel” chez les personnes qui recrutent des Product Designer.

Concernant Lydia, j’ai vite ressenti que Design était synonyme d’expérience utilisateur optimale, intuitive et plaisante (parfait donc, mais pour être honnête, je sortais d’école en arrivant donc je n’étais pas encore si exigeant à ce niveau). Cependant, quand une équipe grossit beaucoup, il se peut qu’une partie ne soit pas forcément alignée avec ces valeurs et associe le design à l’aspect purement visuel.

Il faut alors prendre le temps pour changer les choses, éduquer, évangéliser dans le but de transmettre une bonne vision du Design et, potentiellement, arriver à insuffler une culture Design forte où chacun participe. Cela peut passer par des actions relativement simples comme :

  • Prendre un maximum la parole

En utilisant votre outil de communication interne pour partager du contenu dont le Design est associé à l’aspect fonctionnel ou encore par le biais de présentation orale. Par exemple, nous avons récemment mis en place des présentations What I do at Lydia où chacun raconte librement son métier et ses missions du quotidien à l’ensemble de l’équipe. C’est le genre d’occasion idéale pour faire porter sa voix.

  • Présenter ses maquettes en noir et blanc

Selon la maturité de votre audience sur le sujet, il peut être très efficace de présenter son travail avec des maquettes ne comportant aucun aspect graphique (couleur, icônes, ..) dans le but d’orienter les retours et les conversations sur ce qui est important à savoir l’expérience.

Au début, le designer est souvent un exécutant, que ce soit de flyers, de templates d’email, d’interfaces, de présentations… mais rarement d’expériences. Comment as-tu procédé pour passer à autre chose ?

En effet, je rejoins les rangs de Lydia fin 2014 en tant que Product Designer. À ce moment là, je suis junior : mes objectifs sont donc de faire mes preuves en répondant bien et vite à n’importe quel besoin (UI, illustration, flyers, icônes, goodies..) et de rapidement consolider les fondamentaux, c’est-à-dire le mobile, la conception UI et la réflexion UX. Environ deux ans plus tard, j’ai réussi à faire de la conception d’interface mobile une évidence auprès de mon manager et peux m’atteler à des sujets plus importants liés au produit et prends plus de responsabilités.

L’étape suivante, pour être davantage impliqué sur la partie produit, est selon moi de bien maîtriser le secteur d’activité (la fintech dans mon cas), la concurrence et enfin s’assurer de bien connaître les enjeux business de l’enterprise à chaque instant (ex : monétisation ? acquisition ?)

Et après 3 ans chez Lydia, pour enfin me consacrer à 100% sur la partie produit et surtout consolider notre image de marque sur le marché, j’ai décidé de recruter un Brand Designer ✌️

Pour terminer, aurais-tu un conseil pour tous les designers qui sont seul dans leur entreprise ?

Ne pas travailler dans son coin, tirer profit un maximum de tous ses collègues, de tout département : l’équipe technique, le service client, le marketing… Chacun va challenger votre travail avec une expertise et une vision différente. Ceci est très bénéfique à la fois pour vous et pour le produit.

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