La Bible et la révolution de la lecture

PEG
Theo-drama
Published in
2 min readMay 29, 2017

La Bible est un texte étrange. Peut-être un des plus étranges qui existent. Il existe souvent des détracteurs qui objectent qu’un texte qui parle de batailles à l’Âge de Bronze, de métaphores, de poésie, de proverbes, puisse être pertinent aujourd’hui.

Une des premières choses à savoir au sujet de la Bible — et de beaucoup d’autres textes — est qu’il nous arrive de l’autre côté de la révolution de la lecture.

Quelle révolution ?

Nous ne sommes pas sans avoir que l’invention de l’imprimerie (ou plutôt de l’imprimerie à caractères amovibles) a eu un grand impact sur le coût d’impression des livres et donc, par ricochet, sur de grands pans de la culture.

Un qui est trop souvent ignoré est la manière dont nous lisons (et donc écrivons). Avant la révolution, un lecteur éduqué lambda ne possèderait que peu de livres ; il les lirait donc plusieurs fois, plus d’une dizaine de fois, au cours d’une vie. Après la révolution, les livres devinrent une profusion, et le fait de lire un livre plus d’une fois est une exception, plus la norme.

Cette réalité de la lecture change aussi la réalité de l’écriture, car tout écrivain (c’en est un qui vous parle) panse à son lecteur en écrivant. Lorsqu’on écrit en sachant — même de manière implicite, sans l’avoir théorisé — que son lecteur aura le choix entre des milliers de livres, et qu’il ne vous lira au mieux qu’une fois, on écrit de la manière la plus directe, la plus accrocheuse, la plus limpide possible.

Lorsqu’au contraire on écrit pour être lu dix, vingt fois au cours d’une vie, on écrit de manière différente. On écrit de manière complexe, métaphorique, de manière à multiplier les couches de sens, et ainsi rendre une relecture (et re-re-relecture) attentive au fil d’années profitable.

Lorsqu’on s’intérroge sur l’étrangeté, ou l’hermeticité, de la Bible, il faut se rappeler qu’on ne la lit pas de la manière dont le lecteur auquel avait pensé ses auteurs l’auraient lue.

Ce billet n’a rien à voir directement avec la théologie — ce que je viens de dire sur la Bible, je l’aurais pu le dire aussi facilement au sujet de Platon. Pour les grands textes classiques, il faut avoir une attitude de lecture différente, beaucoup plus humble, beaucoup plus réceptive, car ces livres nous parlent d’une manière que nous sommes moins habitués à pratiquer.

Et ça, c’est peut-être le début de la prière…

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