L’Ascension, la Foi poussée jusqu’au bout

PEG
Theo-drama
Published in
4 min readMay 26, 2017

Dans la doctrine catholique, on dit que la foi n’est pas “irrationnelle”, elle est “supra-rationnelle.” Elle ne va pas à l’encontre de la raison, elle la dépasse.

Ça peut sembler un peu vague, mais l’analogie avec une relation d’amour montre ça très clairement. Si on veut épouser quelqu’un, il faut de la raison : il faut qu’on soit compatibles psychologiquement, il faut partager des valeurs et des projets. Mais en même temps, qui peut nier que l’amour va au-delà de la raison ? Et comme la foi, dans l’amour, il y a un élément de pari, de confiance, de saut dans le vide, que nous devons tous faire. L’amour authentique incorpore la raison, mais en même temps la dépasse et la transcende ; c’est en ce sens qu’il n’est pas irrationnel, puisqu’il ne va pas à son encontre, mais est supra-rationnel. Le sentiment qu’on appelle parfois amour mais qui s’exprime à l’encontre de la raison, je l’appellerais passion ; ce n’est pas de l’amour authentique, c’est, au choix, des hormones, du narcissisme, de l’inconscience… mais je n’appellerais pas ça de l’amour authentique — ou en tous les cas, il est à distinguer de la sorte d’amour dont je parle.

Pareil avec la foi : la foi doit avoir un socle de raison. C’est la raison qui nous indique que les réalités sensibles ne font qu’appeler leur propre dépassement, que nous sommes orientés vers une transcendance qui toujours nous appelle, qu’il y a une réalité suprême qui est Bien, Beauté et Vérité absolues. Mais c’est la foi qui nous fait reconnaître en Jésus Christ l’incarnation de cette réalité suprême qui vient à notre rencontre. Et à ceux qui rétorqueraient que la raison est le seul moyen d’accéder à la vérité, on leur répondra qu’il n’y a rien de plus irrationnel que de refuser de reconnaître les limites de la raison ; c’est la raison elle-même qui nous pousse à la dépasser.

Bon jusqu’à présent c’est la base.

Quel rapport avec la Fête de l’Ascension ? Même si tout ce que je viens de dire est vrai, parfois la foi catholique nous pousse jusqu’au bout de nous, nous pousse dans un abandonnement qui va aux limites, qui peut plus ressembler à l’amour “folie” qu’à l’amour “authentique” dont je parlais.

La Soeur carmélite Ruth Burrows, un de mes maîtres spirituels, racontait cette parabole sur la foi (je paraphrase) : on te dit de grimper en haut de la colline et de creuser et que tu y trouveras un trésor. Tu grimpes, et tu creuses, et c’est difficile, et après de nombreux efforts, au lieu d’un trésor, tu trouves un morceau de charbon. Regarde le morceau de charbon entre tes mains boueuses : je te dis que tu as trouvé le trésor, que c’est une pépite d’or massif. Crois-tu au Fils de l’Homme ?

Ça serait quand même bien pratique si Jésus n’était pas remonté au Ciel après sa Résurrection ! Même s’il ne nous disait plus rien, on pourrait quand même faire notre Thomas, aller toucher son corps toujours glorieux après deux mille ans, mettre nos doigts dans ses plaies.

La chose à se rappeler au sujet de l’Ascension c’est que ce n’est pas le départ de Dieu de la Terre, mais un changement de la modalité de sa présence. Avant de partir, Jésus dit qu’il nous enverra l’Esprit Saint, qui est autant Dieu que Jésus. Et puisque Jésus ne veut que notre bien, il ne le fait pas par hasard. Il pense qu’il est mieux pour nous d’avoir l’Esprit Saint, invisible, inodore, incolore, que le Jésus ressuscité des évangiles, visible, tactile, qui parle. Vous trouvez vraiment, vous, dans votre vie de tous les jours, que l’Esprit Saint est super actif dans vos vies ? A choisir entre avoir l’Esprit Saint en vous, pour répondre à vos questions, pour vous orienter, pour vous motiver, et avoir le Jésus ressuscité des évangiles, vous choisiriez quoi ?

Tu as cru parce que tu as vu, mais heureux celui qui croit sans avoir vu. Heureux celui qui croit sans avoir vu ! Toi et moi, nous sommes mieux lotis que Thomas, que Pierre, que Paul, qui ont vu Jésus en “direct”, en “live”, en chair et en os. Et c’est vrai. D’abord parce que beaucoup ont vu Jésus en direct et n’ont pas cru. Ensuite parce que, effectivement, il nous faut voir cette “absence” de Jésus comme une chance, cette chance d’aller plus loin dans la foi, sans béquilles, sans tricher, seuls face au Grand Mystère.

Une chance ? Vraiment ? Euh…

Crois-tu au Fils de l’Homme ?

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