Tout pour la France
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11 min readSep 7, 2016

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Entretien avec le journal Nos Chasses

Monsieur le Président, quelle est votre relation à la nature et à la chasse en particulier ?

Comme vous le savez, je suis un urbain. Je ne prétends pas avoir une culture cynégétique approfondie. Pourtant, lorsque j’ai rencontré des chasseurs au travers de mes responsabilités, à l’Intérieur, à l’Economie et surtout à l’Elysée, c’est cette passion pour la nature qui m’a d’abord séduit. J’ai vite compris que j’avais en face de moi des femmes et des hommes qui étaient avant tout des écologistes ruraux pragmatiques, capable de dialoguer avec les agriculteurs, les forestiers et les élus locaux pour favoriser une écologie de bon sens qui tienne compte des réalités humaines et économiques. C’est ce qui m’a plu. Les valeurs rurales que les chasseurs défendent sont des valeurs fortes de notre société française. Je refuse l’aplanissement des cultures, ce n’est donc pas pour oublier la place de la chasse dans l’histoire de notre pays. Le droit de chasser librement fait aussi partie des acquis de la République.

Mais je dois vous avouer que ma relation à la chasse et aux chasseurs est aussi due à mon entourage, en particulier au sein des Républicains où j’ai créé un secrétariat national dédié. J’ai toujours compté des chasseurs parmi les membres des cabinets ministériels, y compris à la Présidence de la République. Mais je dois reconnaître qu’aujourd’hui, entre les parlementaires et les professionnels avec qui je travaille au quotidien, je suis entouré de chasseurs passionnés avec qui je parle de nature, de ruralité et donc de chasse.

Quelle image avez-vous du chasseur ?

Le chasseur est avant tout une personne passionnée de nature, et vous le savez, j’aime les gens de passion. Je ne suis pourtant ni dans la nostalgie, ni dans la caricature. En 20 ans, les chasseurs ont pratiqué une formidable modernisation de leurs pratiques. Tous ceux qui aiment parcourir la campagne peuvent en témoigner car le grand gibier est présent partout en abondance, car il est bien géré. Le comble est que maintenant les chasseurs sont de plus en plus souvent accusés d’être trop protecteurs de la faune sauvage, par des agriculteurs et des forestiers, en raison des dégâts causés.

Le chasseur a donc aujourd’hui une bien meilleure image qu’il y a 20 ans et que cela va en s’améliorant grâce aux efforts des fédérations départementales notamment en matière de sécurité, d’information du public et d’éducation à la nature. Je veux d’ailleurs rendre hommage à tous ces bénévoles qui œuvrent au quotidien, département par département, pour l’entretien des espaces, la transmission d’une connaissance de la nature et la perpétuation d’une forme de lien social.

Lorsque vous étiez Président de la République, vous avez lancé le Grenelle de l’environnement et vos ministres de l’Ecologie se sont appliqués à en exclure le monde de la chasse. La Table ronde chasseurs-protecteurs qui a duré 2 ans et qui était censée compenser notre mise à l’écart n’a pas été comprise notamment par les chasseurs de gibier d’eau. En conséquence, votre possible retour aux affaires inquiète certains chasseurs. Pouvez-vous les rassurer ?

Le Grenelle de l’Environnement était un choix politique qui s’imposait car nous avions beaucoup de retard dans de nombreux domaines comme les transports, l’eau ou les déchets. Avec le recul, je pense que vous aviez toute votre place à l’intérieur du processus. Très souvent, les pêcheurs comme les chasseurs sont les meilleures vigies de la nature parce qu’ils sont sur le terrain 12 mois sur 12. Les 78 millions d’heures de bénévolat par an que les chasseurs consacrent au maintien de la biodiversité et à l’aménagement des territoires sont la meilleure preuve de la part que vous prenez quotidiennement dans la défense de la nature.

Vous avez parlé récemment de la tyrannie des minorités, un mal français qu’il faut solutionner. Les chasseurs souffrent de la tyrannie imposée par les écologistes politiques et les ONG environnementales qui revendiquent le monopole de la défense de la nature. Comment comptez-vous les aider ?

Nous ne pouvons plus continuer à faire du politiquement correct en ayant peur de déplaire à des minorités qui savent mieux que d’autres utiliser les tribunes médiatiques, les réseaux sociaux et quelques personnalités comme porte-parole. Les occupations de sites revendiquées par ces groupes écologistes extrémistes qui bloquent des projets économiques indispensables ne sont plus acceptables car c’est un véritable déni de démocratie. Pour cela, il faut mettre fin aux monopoles de fait que s’arrogent certains écologistes. Il faut donc revoir de fond en comble la représentation dans le domaine de l’environnement, en fonction de la représentativité réelle. Cela permettra aux fédérations nationales des chasseurs et des pêcheurs de retrouver enfin la place et l’influence qu’elles méritent.

La chasse est un pan important de notre histoire et de notre culture. Vénerie, tenderie, gluau, chasse de nuit dans des installations déclarées… Tout ceci ne mériterait-il pas d’être classé au Patrimoine Mondial de l’UNESCO comme la fauconnerie ?

Un classement à l’UNESCO est-il la meilleure façon de défendre la chasse ? Aux chasseurs de le dire, mais en tout état de cause, je préfère que les moyens soient focalisés sur le développement et la connaissance de la pratique cynégétique. Le vrai défi pour l’avenir de la chasse est celui de la transmission. Pourquoi ? Parce que la chasse est tout à la fois une tradition respectable et un atout considérable pour une gestion durable des espaces. Elle est aussi une réalité associative qu’il faut préserver avec son organisation fédérale unique en Europe, ses associations spécialisées et ses 75 000 associations locales.

La chasse est enfin et aussi une filière économique qui pèse 3,6 milliards d’euros par an, avec plus de 27 000 emplois non-délocalisables. Elle a même pour caractéristique rare de ne rien coûter à l’Etat, de lui rapporter et d’assumer une contribution financière de plus de 70 millions d’euros pour maintenir une police de la chasse et de la nature. D’ailleurs à l’occasion de la dernière loi sur la biodiversité, une tentative d’OPA sur les recettes générées par les chasseurs a été conduite par la majorité socialiste, aidée des écologistes, au travers de la création de cette Agence Française pour la Biodiversité. Elle a échoué grâce à une mobilisation des élus Républicains au Sénat et à l’Assemblée nationale.

Les chasseurs de migrateurs, attaqués en permanence depuis 30 ans par les cynégétophobes, vivent dans l’angoisse du lendemain. Comprenez-vous leur ras-le-bol et leur colère lorsqu’ils savent que les oiseaux qu’ils n’ont pas le droit de chasser en février sont détruits par milliers en Hollande ?

Lorsque j’étais à l’Elysée, j’ai fait en sorte que les chasseurs de gibier d’eau, et en particulier d’oies, puissent chasser le plus longtemps possible en février, dans le cadre de la jurisprudence du Conseil d’Etat. Et j’ai suffisamment dialogué avec les responsables cynégétiques pour prendre conscience que l’on ne peut plus continuer comme cela. Qui peut m’expliquer que l’on puisse détruire des centaines de milliers d’oies aux Pays-Bas et que la chasse soit interdite en février en France, alors que, de l’avis de nombreux experts, l’espèce se porte mieux et commet encore des dégâts considérables.

Ma priorité sera que l’on retrouve la raison et que l’on arrête d’encombrer les tribunaux administratifs alors que les connaissances scientifiques et le bon sens doivent prévaloir pour une gestion équilibrée des populations d’oiseaux. Je l’ai dit très clairement aux chasseurs picards lors de ma visite à la maison de la chasse de la Somme, il y a quelques semaines.

C’est la même chose pour les chasses traditionnelles qui font l’objet de polémiques médiatiques depuis 30 ans. Je souhaite que l’on se batte au niveau européen pour adapter les règles des dérogations, aujourd’hui trop rigides. Elles pourraient faire l’objet d’un suivi scientifique précis et encadré de la part des fédérations départementales, département par département, dans des espaces géographiquement délimités.

Le nouveau cheval de bataille des anti-chasse, après les espèces, les modes de chasse et les dates, est d’exclure les chasseurs des milieux. Comment comptez-vous éviter cela ?

Pour faire court, je vous dirais qu’il faut que les pouvoirs publics arrêtent de financer des associations dont le seul fonds de commerce est de conduire des contentieux juridiques contre les chasseurs ou les agriculteurs, les projets de développement. Dans les régions, avec l’alternance, c’est déjà le cas et les subventions sont réduites de façon considérable dès lors que l’argent n’a pas été utilisé correctement. La volonté de tout empêcher ou au moins de tout compliquer est de plus en plus mal vécue par nos compatriotes. Il faudra y mettre fin en 2017.

Sur le point qui consiste à revendiquer le partage de l’espace en excluant les chasseurs, ces mêmes idéologues doivent avoir oublié l’existence du droit de propriété. De plus, ils sous-estiment sans doute qu’une bonne communication entre tous les usagers de la nature dans un département règle presque tous les problèmes de cohabitation.

Les populations de loups, probablement sous-estimées, sont en pleine expansion et remettent en cause un mode de vie pastoral dans nos montagnes. Voyez-vous un rôle pour les chasseurs dans la gestion de cette espèce ?

Au nom de quelle logique une espèce menacée et protégée hier, qui se développe et prolifère aujourd’hui, ne devrait pas être gérée et régulée. Il faut mettre un terme à cette culture du cliquet qui veut qu’une espèce protégée doit toujours le rester, sans tenir compte de la réalité et des derniers relevés scientifiques. La souplesse et la prise en compte des nuisances doivent être évaluées périodiquement, sans dogme ni tabous. C’est le cas aujourd’hui pour le loup, dont le développement met en péril le pastoralisme dans nos montagnes. Je serai toujours aux côtés des bergers, car c’est l’économie montagnarde qui est menacée.

Concernant le rôle des chasseurs, j’écoute l’avis des professionnels de terrain. Il paraît évident que la régulation du loup sera beaucoup plus efficace si les chasseurs sont associés lors des chasses en battue ou à l’affût. Toutes les expériences conduites jusqu’à ce jour dans les départements concernés le confirment. Mais il faut mettre un terme à l’instabilité juridique qui empêche très fréquemment cette régulation en négociant, là encore, de nouvelles règles européennes.

Parmi les 78 millions d’heures de bénévolat que les chasseurs donnent aux territoires, les piégeurs font beaucoup. Ils sont les victimes d’attaques incessantes et pourtant rendent de nombreux services aux agriculteurs, aux collectivités et aux citoyens en régulant « les nuisibles ». Qu’envisagez-vous de faire pour faciliter leur action de service public ?

Ma volonté politique dans ce domaine sera que l’on passe enfin d’un climat de défiance permanent à l’égard du monde de la chasse et de ses pratiques à un contrat de confiance. Les chasseurs n’ont plus à prouver leur utilité dans la gestion de la faune sauvage dans nos régions. En 2008, j’ai souhaité que le rôle de « protection de la nature » soit reconnu par la loi aux fédérations de chasse. Alors je veux être clair. Je ferais ce qui est nécessaire, y compris en modifiant le cadre règlementaire, pour que cessent ces blocages. Les fédérations départementales des chasseurs sont là pour être les garantes des bonnes pratiques de chasse et de régulation et je souhaite leur donner encore plus de pouvoirs dans un vrai contrat de confiance avec l’Etat. C’est dans ce cadre que les piégeurs, qui sont indispensables, retrouveront une place.

Pour beaucoup de chasseurs, l’Europe est synonyme de contraintes de plus en plus fortes. La Directive Oiseaux est la source du plus grand nombre de contentieux pour la chasse au gibier d’eau et pour les chasses traditionnelles. Il y a t-il un espoir de ce que côté-là ?

L’Europe ne peut plus continuer comme avant et cela ne concerne pas seulement la chasse, mais toutes les politiques européennes. Il faut refonder l’Europe et celle pour laquelle je me battrais avec détermination devra redonner de la subsidiarité aux Etats. Par exemple, la directive Oiseaux devra être revue. Je le ferai sans état d’âmes car on ne défend plus le maintien de la biodiversité et la gestion des espèces avec un outil juridique vieillissant, sans tenir compte des progrès de la connaissance scientifique.

Concernant la directive européenne sur les armes, sa réforme ne doit pas se tromper de cible en s’en prenant aux chasseurs et aux tireurs sportifs plutôt que de lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée. J’ai porté en 2012 une réforme des armes, votée dans un climat de consensus sur tous les bancs du Parlement, en étroite concertation avec le monde de la chasse. Cette réforme sanctionne plus durement les trafics, sans pénaliser les utilisateurs légaux à savoir les chasseurs. Cette réforme doit servir d’exemple au plan européen.

Les ONG environnementales et certaines Fondations de protection animale redeviennent de plus en plus anti chasse au niveau national alors que dans de nombreux départements les partenariats sont nombreux et efficaces.

Il est nécessaire de rebattre les cartes et de mettre fin aux postures d’un autre temps. Je ne rêve pas d’un nouvel accord Chasseurs Protecteurs comme la Table ronde l’avait un moment imaginé, en marge du Grenelle de l’Environnement. Les temps ont changé et il faut mettre en place les bons outils avec des partenaires constructifs et non polémistes.

L’exemple le plus concret est l’engagement que j’ai pris comme président des Républicains avec les présidents des fédérations départementales des chasseurs lors des élections régionales de 2015. Je souhaitais que des chasseurs soient élus dans les Conseils régionaux afin que la chasse soit au cœur des politiques régionales. L’engagement a été tenu et des accords sont déjà en cours avec des présidents de régions comme Laurent Wauquiez, Christian Estrosi, Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand. Pour la région des Hauts de France, c’est maintenant que le président de la Fédération des chasseurs de l’Oise qui préside la Commission environnement. A la différence de ces partis politiques qui se proclament défenseur de la chasse en campagne pour mieux s’afficher en réalité aux côtés des mouvements les plus anti-chasse de France, les Républicains ont tenu leurs engagements. Il n’y a pas de double discours.

La chasse souffre de la tutelle du Ministère de l’Environnement. Quel Ministère faut-il pour la chasse ?

Je sais que cette tutelle est une source de tensions pour la gestion de la faune sauvage et celle de la chasse. Je pense que cette tutelle est trop étroite pour vous et ne permet pas à la filière cynégétique de se développer et d’être un atout pour nos territoires ruraux. C’est pour cette raison que je suis favorable à ce que la chasse ait comme tutelle principale le ministère de l’Agriculture et de la Forêt.

Mais cela n’est pas suffisant, car la chasse concerne beaucoup d’autres compétences ministérielles comme l’Ecologie sur les espèces, l’Intérieur sur les armes et la sécurité, l’Education avec la sensibilisation à la nature, le Budget, la Justice et bien d’autres ministères qui s’occupent de votre quotidien. Pour conduire les actions interministérielles indispensables, il faudra qu’à Matignon comme à l’Elysée un conseiller soit dédié à ces enjeux ruraux qui souvent sont transversaux. Je ne veux plus que la chasse soit la variable d’ajustement des ministres de l’Ecologie et de l’Agriculture, mais un atout majeur de notre nouvelle politique rurale. Cela passera par une réforme de l’organisation de l’Etat avec pour objectif la suppression des instances environnementales inutiles, un renforcement des pouvoirs du préfet sur ces agences. La nouvelle Agence Française pour la Biodiversité n’échappera pas à une évaluation de son utilité et de son positionnement. Il en sera de même pour le renforcement des missions de police judiciaire de la nature au sein de l’Office national de la chasse.

Peut-on espérer qu’un jour un chasseur soit ministre de l’Ecologie ?

Cela me paraît tout à fait possible aujourd’hui, mais vous m’accorderez qu’une telle nomination nécessitera sans doute de prendre en compte aussi d’autres critères dans le choix de cette responsabilité ministérielle. Ce qui est certain c’est que ce ministère comme celui de l’Agriculture ne doit pas être occupé par un ministre qui soit défavorable à la chasse. Le prochain gouvernement de la France et la prochaine majorité parlementaire auront le devoir, dans un délai court, de proposer les réformes qui permettront aux chasseurs de retrouver cette liberté attendue pour vivre pleinement cette passion nature, et conduire le vaste plan Marshall en faveur de la ruralité que j’appelle de mes vœux face à l’abandon de nos campagnes.

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