Ce que les entrepreneurs ont à vous apprendre

Emma France
unicorner co
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5 min readJun 22, 2016

Il y a quelques mois, Emmanuelle Duez intervenait au LH Forum pour remettre en question quelques idées reçues sur les “jeunes”. Vous voyez n’est-ce pas : ces énergumènes Y et Z si difficiles à comprendre pour les entreprises. La fondatrice du Boson Project parlait alors de « l’obsolescence programmée des compétences ». Les métiers pour lesquels on aura besoin de jeunes formés dans cinq ans n’existent pas encore… Voilà de quoi donner du grain à moudre aux conseillers d’orientation.

Certes, les étudiants, les parents et les recruteurs voient encore les diplômes comme un Graal. Mais dans un contexte où la demande de compétences évolue plus vite que les programmes scolaires, comment repenser la formation au-delà du diplôme ?

L’avenir des entreprises dépend de cette question.

Compétences et compétitivité : pas besoin d’avoir fait dix ans de latin pour savoir que les deux mots sont étymologiquement liées. Les deux viennent du verbe “competere” qui veut dire “chercher à obtenir ensemble” mais aussi “se rencontrer”, “s’accorder”, “convenir”. Sur des marchés toujours plus concurrentiels, recruter des femmes et des hommes qualifiés, les faire évoluer et les garder dans l’entreprise est un défi stratégique et pas seulement RH. La survie d’une entreprise dépend de toutes les forces vives et compétentes qu’elle peut solliciter.

Trois remèdes contre “l’obsolescence programmée de compétences” :

La formation continue va jouer un rôle croissant et de plus en plus d’entreprises se positionnent sur ce marché. Depuis quelques années, on entend parler de MOOC, de SPOC, de LMS… autant d’acronymes qui montrent à quel point le besoin de “mise à jour” des connaissances est important. L’américain Udacity a même mis en place des systèmes de “Nano-Degrees” pour valider des micro-compétences.

Le deuxième remède doit trouver sa place au sein même de l’école. Dans un article pour WISE, l’initiative pour l’éducation de la Qatar Foundation, Ma Darlene Damm montre ainsi qu’il s’agira avant tout de développer les capacités sociales et l’intelligence émotionnelle des élèves. Ces clés indispensables leur permettront de développer leur capacité d’adaptation et de construire leur personnalité.

La troisième action est dans la continuité de la précédente : il s’agira de créer des relations de confiance avec un réseau. Les jeunes diplômés d’aujourd’hui n’auront pas la carrière linéaire de leurs parents. A défaut de structure comme celle d’une entreprise hiérarchisée, il faudra créer du lien en permanence au sein d’écosystèmes pour aller chercher à l’extérieur les ressources, les opportunités et les conseils indispensables pour son travail.

Les entrepreneurs, ces précurseurs de nouvelles méthodes d’apprentissage

D’après une enquête réalisée en mars 2015, un jeune sur deux dit vouloir entreprendre. Mais quand on connait le taux de survie des startups, on conviendra que ce n’est pas un calcul économique rationnel. Si les jeunes investissent leur temps comme leurs parents investissent leur argent, on est très loin d’un Livret A !

Nous avons aussi fait ce choix mais la raison était avant tout un état d’esprit. Il n’y a pas de recettes toute faites sur ce que doit être ou non un entrepreneur. Mais à force d’en côtoyer et de les écouter, on peut voir un savoir-être particulier : entreprendre, c’est savoir qu’on ne sait rien et pourtant avancer quand même. C’est être suffisamment curieux pour poser des questions en permanence : à un mentor, à ses utilisateurs, à d’autres entrepreneurs, à son avocat… Et c’est être assez humble et malin pour s’entourer de gens meilleurs que soi.

“L’art de la réussite consiste à savoir s’entourer des meilleurs.”

John Fitzgerald Kennedy

Tous les jours, les entrepreneurs font l’expérience de la solitude par le fait même qu’ils ne sont pas attachés à une structure. Ils doivent sans cesse développer des compétences qu’ils n’avaient pas la veille et souvent, pour cela, aller chercher des conseils auprès de leur réseau.

Cette interconnexion permanente à un réseau est la clé de leur compétitivité : elle leur permet de se former continuellement, d’acquérir des capacités relationnelles indispensables et de faire des nouvelles rencontres, qui sont autant d’opportunités pour recruter ou faire du business… et continuer de développer son réseau. Bref, un beau cercle vertueux.

Les entrepreneurs que nous rencontrons nous disent souvent : “Oui, je fais des mises en relation. Pourquoi ? Parce que j’aime aider comme on m’a aidé(e), je n’attends rien en retour, c’est juste une question de Karma…”

Oubliez la carrière, soignez votre karma…

C’est aussi notre réseau qui nous a recommandé le livre d’Adam Grant, Give and Take. C’est un livre à lire absolument et qui va complètement changer votre vision du succès professionnel. L’auteur met en avant trois types de personnalités dans le monde professionnel : les takers, les matchers et les givers. Les takers créent des relations et font du réseau mais ont tendance à agir de façon très intéressée. Les matchers cherchent en permanence a équilibrer la balance de la réciprocité : s’ils vous aident, ils considéreront que vous leur devez quelque chose et si vous les aidez, ils se sauront recevables. Les givers eux, seront toujours prêts à vous aider, de façon totalement désintéressée et sans considérer que vous leur devez quelque choses.

C’est précisément parce que le « networking » n’est pas pour eux une question de se faire voir ou valoir, mais question de créer de vraies relations afin d’aider les personnes qui les entourent, que ces profils ont de la valeur. Vous pouvez écouter Adam Grant pour mieux vous en convaincre :

C’est un enjeu fort également pour tous les actifs qui cherchent à se reconvertir, voire à retrouver un travail. Le réseau est effectivement une source d’opportunités non négligeable, mais il faut savoir bien le gérer. Sans apprentissage, un networking mal maîtrisé peut facilement perdre de son utilité. Et là aussi, c’est souvent une question de karma. Savoir écouter et rendre service, même en position où l’on est celui qui a besoin d’aide, c’est soigner son aura et ainsi mettre toutes les chances de son côté pour que l’on pense à vous quand l’occasion se présentera de vous rendre service. Pas toujours évident, certes, mais en tout cas, tout cela s’apprend.

En résumé, pour progresser comme un entrepreneur, il s’agit avant tout d’investir dans son karma. C’est un investissement long-terme qui vous permettra d’apprendre sans cesse de votre entourage. La première étape consiste à investir dans votre réseau, à commencer par aider les autres. Vous serez surpris, comme nous l’avons été plus d’une fois, de voir les belles opportunités qui se présenteront à vous.

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Emma France
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