Un an après son exclusion du FN, que devient donc Jean-Marie Le Pen ?

Le 17 novembre 2016, la justice validait l’exclusion de Jean-Marie Le Pen du Front national, un parti qu’il a lui-même créé et dont il reste le leader historique. Depuis, l’homme à l’oeil de verre, s’il a quelque peu disparu des radars, continue à travailler dans l’ombre. Mais que fait donc celui qu’on surnomme “le Menhir”?

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4 min readNov 16, 2017

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CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / GETTY IMAGES

Par Matthieu Carlier, journaliste à upday France

“Je n’ai jamais considéré le maréchal Pétain comme un traître. L’on a été très sévère avec lui à la Libération.” De saillies tendancieuses en procès pour injures racistes, Jean-Marie Le Pen n’en est pas à son premier scandale. C’est un peu son image de marque. Pourtant, son éloge du régime de Vichy, sur BFMTV et dans le journal d’extrême-droite Rivarol, ne passe pas. Au point que même au sein de son propre parti, la colère gronde : le 20 août 2015, la haute autorité du Front national (FN) décide de son exclusion. Il y a un an, jour pour jour, la justice entérinait cette décision.

Et l’homme le plus polémique du Morbihan n’aura de cesse de s’ériger contre sa mise au ban, qu’il qualifiera de “trahison”, de “honte”, et que d’autres considéreront ni plus ni moins comme un véritable parricide pour un Front national en plein ravalement de façade. Après un tel traumatisme, autant politique que sentimental, on ne s’étonnera pas de voir Jean-Marie disparaître du paysage politique. Même s’il est toujours député européen à ce jour, sa visibilité a été réduite à peau de chagrin.

Mais le Breton a la tête dure. Six mois après son exclusion, et avant même qu’elle soit entérinée par la loi, Jean-Marie Le Pen crée les Comités Jeanne (ou Comités “Jeanne, au secours !”) et rassemble ses fidèles dans l’ombre. “C’est-à-dire beaucoup de monde”, déclare Lorrain de Saint-Affrique, secrétaire général des Comités.

L’union des patriotes

Alors les Comités Jeanne, kézako ? Disons que la seule différence entre un parti politique et les Comités, c’est le nom. En avril dernier, le Pen et son équipe réunissent une tablée de 200 personnes dans une auberge du Rhône. But avoué : trouver des candidats pour les législatives, en juin. Qu’on se le dise, Jean-Marie Le Pen et ses ouailles se présenteront bien aux élections face… au Front National (manoeuvre pour le moins surprenante puisque Le Menhir soutient sa fille lors des élections présidentielles).

La page d’accueil du site internet des Comités Jeanne (DR/Comités Jeanne)

Mais d’après une lapalissade célèbre, l’union fait la force. Par conséquent, les Comités ont besoin de soutien. Un soutien qu’ils comptent obtenir au plus vite, quitte à s’allier les énergumènes les plus polémiques et ouvertement xénophobes du paysage politique français. Dès le 3 octobre 2016, Le Pen se rend aux dix ans de la revue identitaire Synthèse nationale (grande amatrice du pro-nazi belge Léon Degrelle, ancien combattant de la SS-Wallonie). A ses côtés, du beau monde : Alain Escada, chef de file des cathos intégristes de Civitas, Carl Lang, du Parti de la France, le chef de file des identitaires de la Ligue du Midi Richard Roudier, et même… le chef skinhead Serge Ayoub.

Semi-camouflet

Dès le début de l’année 2017, un accord est signé entre les Comités Jeanne, le Parti de la France et Civitas, qui se présenteront sous une bannière identitaire commune aux législatives. D’autres groupuscules les rejoindront les mois suivants. Si le cartel espère rassembler 200 à 300 candidats, ils seront 156 à le rejoindre pour le rendez-vous électoral de juin sous l’étiquette “L’union des patriotes”. Et malgré la mobilisation, aucun des candidats de l’union ne dépassera les 2 ou 3% des scrutins.

Depuis ce semi-camouflet, Le Pen semble opérer dans l’ombre et oeuvrer à une réhabilitation au sein du FN. En septembre, il adresse une lettre ouverte aux cadres du parti (dont, rappelons-le, il est toujours président d’honneur). Selon lui, un une marche arrière s’impose, “un retour aux fondamentaux”. Depuis son exclusion, argue-t-il, “ la direction du Front national prenait l’initiative d’une scission grave et se mettait en situation de crise.” Il prône une amnistie des exclus.

Pour l’heure, sa main tendue n’a pas été saisie par le FN, qui continue son opération relooking. Mais depuis cet été, Marine Le Pen accumule les déboires : démission de Florian Philippot après le “couscousgate”, levée d’immunité parlementaire pour avoir posté des photos de Daech sur Twitter, déboires fiscaux liés à son micro-parti… Comme on dit, les chiens ne font pas chats.

Et sinon, Jean-Marie Le Pen est aussi devenu Youtubeur. Avis aux amateurs.

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