Dessin de Burkhard Mohr (Südeutsche Zeitung, Munich)

Dans le référendum sur le Brexit, on méritait mieux que cette campagne

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3 min readJun 21, 2016

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Par Gian-Paolo Accardo

Le 23 juin, les Britanniques vont faire un des choix les plus importants de leur histoire récente. Appelés à voter pour ou contre le maintien du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne, ils vont déterminer l’avenir de leur pays — et de l’UE — pendant au moins une génération.

C’est pour cela qu’ils étaient en droit de s’attendre à une campagne électorale à la hauteur de l’enjeu, avec un effort de pédagogie de la part des partisans du“Remain” — le maintien dans l’UE — comme de ceux du Brexit . Chacune de ces positions est légitime et les arguments en faveur de l’une ou l’autre ne manquent pas.

Pour notre part, nous préfèrerions que le “Remain” l’emporte, et avec une marge importante, à la fois pour des raisons symboliques (un Brexit serait un rude coup pour une construction européenne déjà passablement mise à mal et un terrible signal politique à l’extérieur) et parce que le Brexit entraînerait une série de conséquences négatives tant du point de vue économique que des libertés pour les Britanniques et les Européens.

Loin d’assister à un débat digne de ce nom, nous avons assisté à un déchaînement de passions qui a frôlé l’irrationnel, notamment dans le camp du “Leave”, dominé par la figure et l’ambition politique de l’ancien maire de Londres Boris Johnson. Les “Brexiters” n’ont pas hésité à utiliser des arguments fallacieux ou mensongers — comme la contribution du Royaume-Uni au budget de l’UE ou l’immigration intra-communautaire ou encore la promesse d’une indépendance et d’une grandeur retrouvées — pour faire prise sur une opinion publique et une presse globalement peu ou mal informées.

Face à cela, le camp du “Remain”, qui voyait le Premier ministre David Cameron — jadis grand pourfendeur de Bruxelles — et le chef de l’opposition Jeremy Corbyn réunis (un argument de plus pour ceux qui accusent l’UE d’être “au service des élites”), n’a pas été capable de dicter l’agenda de la campagne, d’insuffler un élan qui aille au-delà du pur pragmatisme, de défendre la vocation européenne du Royaume-Uni et le destin commun qui le lie à l’Europe. De là à affirmer que c’est justement la preuve du peu d’attachement des Britanniques, toutes couleurs politiques confondues, il n’y a qu’un pas.

Ce climat délétère a culminé dans l’assassinat, le 16 juin, de la députée travailliste Jo Cox, 41 ans, devant sa permanence de Birstall, dans le Yorkshire. Elle avait fait campagne activement pour le maintien de son pays dans l’Union. Son meurtrier présumé, un militant d’extrême droite, a revendiqué le caractère politique de son geste.

Après le meurtre de Jo Cox, les deux camps ont suspendu leur campagne pendant trois jours et ont semblé se ressaisir. On peut espérer qu’ils vont mettre à profit les quelques jours qui restent pour être à la hauteur de l’enjeu et des attentes. Les Britanniques et les Européens méritent en effet mieux que le spectacle indigne auquel nous avons assisté jusqu’à présent. Comme l’ont souligné certains twittos britanniques, “Come on, Britain. We’re better than that.

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