Usine du futur : les risques de l’inclusion hâtive de nouvelles technologies

Matthieu Laude
WDS en Français
Published in
4 min readDec 12, 2017

Usine du futur. Industrie 4.0.

Ces expressions font référence à une vision d’une transformation de l’industrie par les nouvelles technologies, majoritairement digitales, qui a été comparée aux trois précédentes révolutions industrielles et qui est vu par certains comme la quatrième.

D’origine allemande, le concept s’est rapidement répandu parmi les grandes entreprises industrielles qui sont de plus en plus nombreuses à travailler sur ces nouvelles usines intelligentes : en France, Airbus, Dassault Systèmes, la SNCF, Schneider Electric ainsi que Bosch ont avancé sur ces sujets.

Plusieurs collectifs autour du sujet ont déjà vu le jour pour fédérer les industries et créer des pôles d’influence autour du sujet. C’est le cas de l’Alliance Industrie du Futur (AIF) en France, qui regroupe à la fois des industriels, des organismes de recherche, des acteurs technologiques ainsi que des entités de financement comme la BPI.

Dans son guide Usine du Futur (bien fait et assez complet, à consulter !), l’AIF décrit bien évidemment les enjeux liés aux nouvelles technologies qui sont parfois ceux priorisés en entreprise, mais propose surtout une vision plus complète de l’industrie 4.0 qui se positionne aussi sur les défis économiques, organisationnels, environnementaux et sociétaux à relever pour passer à un nouveau type d’industrie.

Mais le passage à ce nouveau type d’industrie n’en est qu’à ses débuts et comporte son lot de difficultés.

Il est tentant pour les entreprises industrielles d’intégrer en premier lieu l’aspect technologique de l’usine du futur : la composante digitale qui est majeure, mais aussi l’ensemble des nouvelles technologies qui transforment la manière de produire : robotique, nouveaux matériaux, composites, fabrication additive, systèmes de traçabilité, réalité augmentée ou virtuelle, processus industriel économe en ressources.

En effet, l’axe Usine du futur a maintenant été largement abordé par diverses entreprises et organisations et des réalisations concrètes sont présentes dans le paysage de l’industrie. Parmi toutes ces réalisations, la partie la plus visible depuis l’extérieur reste les nouvelles solutions technologiques sur lesquelles il est plus facile de communiquer que sur des changements de fond sur les compétences et l’organisation.

Cette volonté d’intégrer une ou plusieurs nouvelles ressources technologiques peut venir de la volonté d’un décisionnaire de faire un pas dans la direction de l’usine du futur, ou de collaborateurs désireux d’implémenter des nouveautés qu’ils ont pu observer ailleurs.

Que ce soit en top down ou en bottom up, parfois la décision est prise de commencer à intégrer une nouvelle technologie. La découvrir et l’appréhender, monter quelques personnes en compétences sur le sujet sont des tâches qui se déroulent sans trop d’accroc. Mais c’est quand il faut passer à la phase d’industrialisation que les choses se compliquent, comme le présente le livre blanc Industrie 4.0 d’IDC & Dassault.

Faire des tests en conditions réelles demande de la préparation, des opérateurs enthousiastes et des conditions d’utilisation bien définies et recoupant tous les cas d’usage envisageables. Si cette phase difficile n’est pas convaincante, le risque est grand que cette nouvelle brique technologique reste à l’état de prototype et ne soit jamais vraiment intégrée, ou pire, que son intégration soit forcée et qu’elle provoque de l’irritation et n’apporte pas ou peu des gains promis.

L’impact social, la disparition et l’évolution des emplois, la gestion de compétences et de la formation sont des freins majeurs à la mise en place de démarches usine du futur. Ce sont aussi des opportunités si ces aspects sont préparés, concertés, communiqués et surtout budgétés.

C’est donc l’aptitude d’une entreprise à savoir s’adapter, à être habituée à la transformation, qui va lui permettre de progresser et de savoir de mieux en mieux adopter des nouveaux outils et procédés. Cette aptitude s’acquiert peu à peu, projet par projet, et relève presque de la culture d’entreprise. En effet, un vrai enjeu existe dans la sensibilisation des collaborateurs au fait que leur emploi et leurs compétences peuvent et devront se transformer. Et de plus en plus, de manière radicale, au delà de l’amélioration continue, déjà omniprésente dans l’industrie 4.0. Les enseignements du lean start-up, qui se concentrent sur le test et l’apprentissage plus que sur les nouveaux outils comme objectif, peuvent ici apporter beaucoup à des structures industrielles qui sont parfois lourdes à manoeuvrer.

Des entreprises sont sensibles à ce discours et conscientes d’un besoin d’habituation à la transformation et, chez WDS, nous avons la chance d’en accompagner quelques-unes, comme par exemple EDF avec qui nous menons un partenariat méthodologique sur la gestion des projets innovants.

Ainsi, l’important, dans le passage à l’usine du futur, n’est pas seulement l’acquisition des nouvelles technologies mais bien le fait d’adopter une bonne structure organisationnelle pour s’assurer que le changement devient familier et effectuer les transformations qui s’imposent comme la convergence produits/services, l’évolution des modèles d’affaires, la prise en compte de l’expérience client et enfin l’évolution des nouvelles compétences et des organisations nécessaires à ces nouvelles approches.

We Design Services accompagne actuellement AREVA NP dans une démarche collaborative pour explorer avec ses collaborateurs l’usine du futur et des opportunités innovantes dans l’utilisation des nouvelles technologies. Alors maintenant, tous à vos usines !

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