We Are Peers, ou comment se réinventer en temps de crise … Une interview menée par Louange Domingos :
Étudiante du Programme Grande École d’emlyon, il m’a été demandé dans le cadre de la matière « Disrupted Futures » de fournir un rapport final. Il s’agissait de contacter un entrepreneur confirmé pour en apprendre un peu plus au sujet la “désorientation stratégique” imposée par la crise du coronavirus. Articulé autour de 3 questions, l’entretien avait pour but de comprendre comment les organisations agissent dès à présent pour se préparer et construire le monde d’après. Diane, Fondatrice de WAP, a répondu avec beaucoup d’enthousiasme à mon invitation, me permettant de décrocher la note de 18. En voici le résumé.
Q1. Quelles sont les activités que vous avez personnellement décidé de suspendre et que vous ne souhaiteriez pas voir reprendre ?
We Are Peers (WAP) est un système d’apprentissage de pair-à-pair qui favorise le partage de connaissances entre collaborateurs de l’entreprise. Via l’organisation d’ateliers entre pairs visant la collecte et de la transmission du savoir et une plateforme de génération de ressources produites par les pairs.
WAP permet de créer des relations privilégiées pour que la connaissance ne soit plus concentrée au niveau de la direction, mais pour qu’elle circule, qu’elle soit vivante et partagée.
Une grande partie de l’apprentissage se déroule pendant de courtes sessions menées par des facilitateurs, indépendants ou internes. Ces derniers s’assurent de la pertinence des contenus, du rythme de la session, de la bienveillance de l’atmosphère.
Ainsi, avant la crise, ce service était délivré en présentiel, par des ateliers lors desquels un maximum de connaissance est partagé et produit. L’échange se faisait donc en présentiel, entre pairs/managers de proximité, dans un même localité géographique.
Aujourd’hui, avec la crise du coronavirus et les mesures d’éloignement qu’elle a entrainées, ce n’était plus possible. En quelques jours, la startup a trouvé des solutions pour animer en distanciel : ils revoient le format, intègrent leur solution à des outils de visioconférence et testent ces nouveaux formats en accéléré. Très rapidement, ils accompagnent clients et partenaires à animer les formations en distanciel.
La conséquence depuis près de 2 mois est la suivante : avec le distanciel, le partage de connaissances devient inter-site, il va au delà des frontières régionales et même nationales. C’est une opportunité que le présentiel ne permettait pas, tout simplement parce qu’il n’était pas question de faire déplacer les participants plus d’1h hors de leur lieux de travail pour des sessions de moins de 2h30, sans compter le coût.
Cette opportunité a conduit à réfléchir : à l’avenir, le présentiel pourrait bien ne représenter que 50 % de l’activité d’après les estimations de la dirigeante car les conséquences du distanciel sont plus que positives.
En interne, WAP a fermé son bureau situé dans le nord de Paris et l’a revendu. L’équipe (composée de 4 employés en CDI et 10 facilitateurs indépendants) y travaillait 3 fois par semaine mais a décidé de passer en full remote. C’est une décision collective, chacun estimant trouver un meilleur rythme dans cette configuration. A court terme, la startup économise sur certains coûts notamment liés aux bureaux et au transport (abonnement transport supporté par l’entreprise), lesquelles seront reportées sur d’autres : équipements home office, abonnements de coworking …
Q2. Quelles sont les activités que vous avez personnellement décidé de suspendre et que vous souhaiteriez voir reprendre sous une forme nouvelle ?
Ainsi, une grande réflexion sur l’apport du distanciel a été engagée. Les avantages des deux méthodes de diffusion d’informations (présentiel ou distanciel) ont été analysés. Conclusion :
Le présentiel sera réservé aux activités de célébration ou la rencontre prime. Ainsi, les séminaires en présentiel seront amenés à reprendre dès que possible.
Pour le moment, l’animation distancielle est préférée, notamment pour la formation. Pour l’instant cela se fait par l’application Zoom avec un paramétrage qui assure la sécurité, et l’utilisation de fonctionnalités telles que les rooms pour permettre un rassemblement entre membres présentant un même intêret. Les rooms sont organisées grâce à l’algorithme de matching conçu par WAP.
La dirigeante; Diane et son équipe ont remarqué cela: en distanciel, la qualité de contenu est meilleure. Chacun est à son poste de travail, et peut plus facilement prendre des notes et contribuer en ligne, ainsi que partager son écran. On se rend compte que les contraintes techniques obligent les pairs à échanger à tour de rôle, il y a moins de digressions entre membres du groupes, il devient possible d’inviter des participants qui sont éloignés géographiquement. Enfin, les échanges en visioconférences peuvent être enregistrées, on peut créer des replays rendus disponibles sur la plateforme et rattrapables pour les absents, ce qui n’existait pas avant.
L’idée est maintenant d‘enrichir les tutos et fiches consultables sur la plateforme, par du contenu vidéo live, c’est un nouveau chantier qui s’ouvre. On espère ainsi plus de consultation sur la plateforme après les ateliers.
Les coûts liés au transports de facilitateurs, qui sont indépendants et non des employés de WAP, ont aussi diminué car il n’y a moins de déplacements.
Aussi et stratégiquement, le distanciel a considérablement augmenté les possibilités de la solution et ainsi son marché. Avant, le distanciel était très peu considéré, la solution fonctionnait localement : il n’était pas question de faire déplacer les participants plus d’1h hors de leur lieux de travail pour des sessions de moins de 2H30. L’entreprise se voyait contrainte de refuser certains clients qui avaient besoin de faire partager les connaissances dispersées en France et dans le monde. Aujourd’hui la question est résolue, l’activité de manière générale revêt une forme nouvelle, révélée par la crise.
Q3. En quoi chacune des activités réinventées sera essentielle pour votre organisation dans le monde d’après ?
À l’avenir, et dans le but de sortir de la crise, la dirigeante pense aussi à lancer une nouvelle rubrique « Retours d’expérience ». En effet, les entreprises réalisent qu’il est nécessaire de se réinventer (hausse du télétravail par exemple); WAP espère pourvoir intervenir en créant des sessions de capitalisions de gestion de crise où les entreprises consultent sur leur expérience de la crise, en tirent des enseignements et des solutions.
C’est aussi un nouveau marché dans une économie déstabilisée: une nouvelle thématique s’ouvre, alors qu’elle n’était pas non considérée avec la crise.
Ensuite, face à des activités de télétravail qui se généralisent, les collaborateurs gagnent en autonomie, l’animation de la communauté apprenante de l’entreprise devient une absolue priorité.
Nouveau marché certes, mais nouvelle problématique aussi. Il est très probable que les clients, par réflexe, préfèrent placer leurs ressources dans des éléments plus tangibles (repenser la localisation, repenser les process pour diminuer les coûts, ect). Il va dont être essentiel pour WAP de communiquer sur l’importance de capitaliser ces expériences, de consulter pour trouver des solutions de sortir de la crise grâce au learning proposé. Le but devient alors que maintenir sa clientèle, si possible de l’étendre, le tout en s’incarnant dans un nouvelle thématique. Dans le monde d’après, WAP entend bien jouer un rôle primordial.
Attirer la demande en proposant d’apporter une solution « soft » au entreprise au vue de la crise qui se prépare: c’est le nouveau défi de WAP dans le monde d’après. La dirigeante est déjà sur le coup: elle pense notamment à comment augmenter son attractivité. Dernier projet en date: elle travaille avec plusieures écoles du supérieur et leur propose des solutions afin de leur permettre d’effectuer l’intégration de leur élèves à la rentrée de septembre à distance.
Nous souhaitons évidemment à WAP encore beaucoup de succès !
