Cours 4 : Tout contenu web est le début d’un parcours utilisateur

Benjamin Berut
Web content : theorie et stratégie
10 min readSep 28, 2015

--

C’est bon, les élèves cernent de mieux en mieux leur projet web, reste maintenant à penser au différents points de contact qui relieront leur marque à l’internaute, le feront venir et lui proposeront toutes sortes de parcours utilisateurs.

La série d’articles “Mettre en place une stratégie de communication transmédia” est en fait le texte d’accompagnement du cours du même nom que je tiens à l’école de la communication à Sciences Po. De quoi donner aux élèves les moyens de revenir sur le cours, d’échanger avec eux et avec tous ceux que ça intéresse.

Et pour aller plus vite, à voir la présentation du cours 3 et celle du cours 4.

Dans le cours 3, le but était de mieux connaître son usager ou en tout cas de se mettre à sa place, de l’imaginer pour comprendre ses besoins, sa réalité ne pas faire une marque web seulement pour se faire plaisir. Oui, ça arrive plus souvent que l’on ne croit. Ces sites web qui se limitent à être là pour dire que l’institution ou la marque existe… D’ailleurs on les reconnaît souvent au fait que, justement, il se contente de porter seulement le nom de l’institution qui les a mis en ligne. Mais bon passons.

Ce que l’on a vu dans le cours 3, c’est qu’il faut penser la relation qu’une marque a avec un internaute comme une expérience. Ce que vous proposez à travers une marque web (quel que soit votre point de contact (oui, on va revenir sur cette notion au cœur du cours)), c’est un moment à vivre. Moment qui peut être très court. Votre marque peut seulement proposer un petit tweet drôle, un snap sympathique à recevoir et rien de plus. C’est déjà une expérience qui peut renforcer la relation que l’on a avec la marque.

Là, Dominos Pizza ne répond pas seulement à Phil, la marque crée toute une relation avec les plus de 2.600 personnes qui ont partagé ou mis en favori.

Voilà, votre marque doit proposer, peu importe le point de diffusion qu’elle utilise, une expérience qui entre en résonance avec le besoin utilisateur. Tout ça c’est à revoir dans le cours 3 et maintenant, ce qu’il faut penser c’est la manière dont vous allez pouvoir guider l’utilisateur sur vos différents contenus, de votre point de contact à la tâche que vous souhaitez lui faire accomplir.

Tout commence avec un point de contact

En UX design, un point de contact est le début du parcours d’un utilisateur, c’est le moment où il croise votre marque. Pas forcément pour la première fois, il la connaît peut-être déjà mais en tout cas, là il va suivre un parcours sur les différents contenus que vous pouvez proposer.

Il peut s’agir d’un achat. Vous savez quel livre vous souhaitez acheter et vous aller sur Amazon dont la home page est le point de contact, ce qui suit c’est tout le parcours utilisateur jusqu’à l’achat. Idem, si l’on vous parle d’un nouveau site génial pour tout savoir sur l’éducation et que vous décidez d’aller le voir, alors le point de contact c’est… la discussion que vous avez avec votre ami.

La notion est déjà très intéressante, mais pour ma part j’y ajoute l’idée que, d’un point de vue éditorial, un point de contact est également un contenu que vous maîtrisez. Pour, à la fois, préciser la définition de ce qu’est un point de contact et également en faire le cœur d’une stratégie de marque transmédia. En effet, au fond votre stratégie transmédia ce ne sont que les valeurs de votre marque déclinées selon les caractéristiques de vos points de contact justement sélectionnés pour ces caractéristiques (Twiter sert de veille, Facebook d’espace d’échange, les flux RSS servent résumer toutes vos publications…).

Un exemple très simple et obligatoire pour une marque : vous souhaitez créer une relation privilégiée avec certains clients, alors vous allez sur Facebook pour échanger avec eux. Ou encore, autre exemple difficilement contournable, vous souhaitez intégrer toutes les discussions autour de votre sujet, alors vous allez sur Twitter. Mais, quelles que soient vos valeurs (fun, sérieux, pratique, très politisé ou non…) vous ne devez pas faire de Twitter sur Facebook ou inversement. Vous exploitez les caractéristiques de l’espace où vous avez décidé d’être pour illustrer les valeurs de votre marque.

Voilà, c’est pour cela que lorsque l’on fait passer le concept de point de contact de l’UX design vers la stratégie de contenu et de marque il faut forcément préciser qu’un point de contact c’est un contenu que l’on maîtrise, ou en tout cas au moins partiellement.

Autre élément qui caractérise un point de contact, c’est qu’il est le départ d’un parcours utilisateur sur vos contenus. C’est peut-être étrange à dire, mais tout ce que vous mettez en ligne n’a pas pour but de déclencher un parcours utilisateur. Vous ne souhaitez pas toujours que votre contenu, surtout sur les réseaux sociaux, mène vers votre site ou n’importe lequel de vos autres contenus.

Non, parfois vous faites également soit de l’image de marque, soit de la curation. Dans le premier cas, vous tentez de renforcer l’image que vous souhaitez donner aux internautes ; dans le second vous vous placez au centre de l’écosystème en suivant et commentant ce qui s’y dit. En tout cas, dans aucune des deux situations vous n’appelez pas véritablement à l’action. Vous ne tentez pas d’engager l’internaute dans un processus qu’il va pouvoir suivre sur vos contenus.

Voilà, juste de l’image de marque, rien de plus pour Coca qui n’appelle pas à acheter une canette mais qui se contente de répondre à une pub de Pepsi.

Et donc, les points de contact sont…

Alors voilà une liste des points de contact au sens éditorial du terme avec ce problème que, finalement, on n’en maîtrise pas toujours la totalité du contenu.

  1. Tout d’abord tout ce qui est “réel” et que l’on ne va pas traiter ici puisque l’on parle de web mais que l’on met en premier pour ne pas les oublier. Ce sont les événements, les productions print, les goodies, les affiches, toutes les pubs… Ils peuvent être autant de point de contact mais ici on parle de web.
  2. Votre et vos sites web bien-sûr et chacune des pages qui les constituent. Avec cette idée que plus chacune de vos page et chacun de vos sites proposent une tâche concrète à réaliser, mieux c’est.
  3. Les réseaux sociaux également avec toutes les stratégies SMO (Search media optimization)qui existent et qui feront l’objet d’un cours.
  4. Le social selling, qui est une partie bien précise de l’utilisation des réseaux sociaux et qui ne correspond pas aux mêmes logiques que le SMO puisqu’il s’agit surtout d’accompagner le client dans sa démarche.
  5. Google… ou disons plutôt tous les moteurs de recherche qui constituent bien-sûr un point essentiel dans les arrivées sur vos autres contenus. Et là il y a deux grandes manières de faire : le SEA (Search engine adverstising) où vous maîtrisez le contenu que vous souhaitez afficher et le SEO (Search engine optimization) où là il va falloir, en plus d’essayer d’apparaître en premier, faire en sorte que la page de résultat remonte au mieux vos contenus. Il s’agit donc bien d’un point de contact, sauf que vous ne maîtrisez pas totalement le contenu.
  6. En dehors du SEA, toute la publicité que vous pouvez faire sur d’autre sites.
  7. Les flux RSS, qui restent très techniques et un peu “backoffice” mais extrêmement utiles et même fondamentaux.
  8. Tous les mailings et newsletters que vous pouvez imaginer.
  9. Les applications mobiles qui vont viser une des procédures concrètes de votre marque.
  10. Les ambassadeurs que vous pouvez trouver et qui relaient vos contenus. Même si vous ne maîtrisez pas directement les contenus qu’ils produisent, vous tentez de les orienter.

Voilà, la liste peut sans doute être complétée et on la précisera au fur et à mesure du cours, mais voilà déjà de quoi voir quels sont les points de contact si l’on suite la définition éditoriale du terme : un contenu que vous maîtrisez et qui sert de début à un parcours utilisateur.

Le voyage de l’utilisateur dans vos contenus

Voilà, nous avons tous les points de départ possibles (du point de vue d’une stratégie éditoriale sur le web). Votre internaute vient de quitter son chez lui, son quotidien, pour s’engager dans un voyage sur vos contenus, sur votre territoire. À vous de le guider pour qu’il ne se perde pas et qu’il atteigne bien le but que vous lui avez fixé.

Alors, c’est quoi ce parcours utilisateur ? Il se définit selon moi par trois choses :

  1. Il commence toujours par un point de contact ;
  2. Il vise à faire remplir à l’utilisateur un but précis (simplement dire, je veux qu’il vienne chez moi n’est pas un but, ni je veux qu’il se balade sur le site) ;
  3. Et, il doit permettre de générer un plus grand engagement chez l’internaute, c’est-à-dire représenter une expérience positive de votre marque.

L’exemple Starbucks

Sortons un moment du web pour prendre l’exemple d’un passage chez Starbucks. Vous êtes dans la rue avec des amis et vous avez soif. Vous êtes dans une grande ville, dans un quartier avec des commerces et des magasins, on est le week-end, vous avez entre 20 et 35 ans et vous avez grandi avec l’image de Friends et du Central Perk comme l’incarnation de ce qu’est véritablement un groupe d’amis cool et donc, vous cherchez un Starbucks. Et voilà comment Strabucks pense votre parcours utilisateur depuis l’entrée du café (un point de contact puisqu’ils en maîtrisent le contenu) jusqu’à votre sortie.

Voilà votre expérience, jusqu’au passage aux toilettes. Voilà votre parcours utilisateur avec toutes les étapes et à chaque fois un moyen de résoudre chacune de ces étapes. Et bien vos contenus web vont devoir faire la même chose. Chacun va avoir pour but de faire remplir à l’internaute une tâche précise.

Type and task… ou pitié faites des pages utiles

Bon, vous avez compris le principe. Dans le parcours utilisateur chaque contenu doit avoir un rôle spécifique.

Reprenons l’exemple d’Amazon et du livre à acheter. Disons que Amazon a pour but de vous faire acheter un livre : le point de contact va être un mailing sur les dernières sorties, ensuite vous allez arrivée sur une page qui liste ces sorties et qui met en avant les promotions, à partir de cette page vous sélectionnez un livre que vous mettez dans votre panier, commence ensuite le processus de paiement qui est, lui-même divisé en plusieurs étapes…

Ce qui veut dire que chaque contenu a un type et une tâche précise à faire accomplir à l’internaute :

  1. Le mail est un contenu de type mailing dont le but est de faire venir l’internaute sur le site ;
  2. La première page est une page catalogue dont le but est de faire sélectionner à l’internaute son ou ses livres ;
  3. Le panier est également un contenu propre où l’utilisateur doit confirmer sa volonté d’acheter ;
  4. Puis chaque page du processus d’achat a également un type précis qui doit faire accomplir à chaque fois à l’internaute un tâche unique (remplir ses coordonnées bancaires, confirmer son adresse…)
  5. Le tout se termine avec un dernier mail, un contenu de type mailing donc, dont le but est de rassurer l’internaute, de bien lui confirmer que ça commande est prise en compte.

Chaque page est une part du parcours utilisateur

Que faut-il en conclure donc ? Et bien que vos pages doivent être utiles et que pour cela elles doivent se concentrer sur une tâche précise à faire accomplir à l’utilisateur.

Par exemple, si vous voulez qu’ils téléchargent quelque chose, inutile de le mettre en pied de page. Après, vous pouvez ajouter des éléments sur votre page, mais en tout cas elle doit avoir une fonction précise qui doit pouvoir se faire quasiment les yeux fermés (télécharger un document, regarder une vidéo, écouter un podcast, lire un long texte, remplir un questionnaire…) Fonction précise qui doit également être compréhensible dans son titre.

Autre élément à retenir c’est que, au fond, même si je dis depuis le début que le site web n’est que l’un des contenus d’une marque transmédia, c’est sûr que lorsque vous souhaitez emmener l’utilisateur dans un parcours complet il faut souvent vous appuyez sur un site. Bien-sûr vous pouvez par exemple utiliser Instagram pour vendre vos produits, mais d’une manière générale, il va vous falloir développer un site qui aura pour but d’être au cœur de la plupart de vos parcours utilisateur.

There and back again… l’expérience

Bon pour conclure ce cours, on peut dire que tous les parcours utilisateur que vous pouvez imaginer, même les plus courts (post sur Facebook vers une vidéo ; page pour visionner la vidéo) doivent être clairs et, comme pour une file d’attente, comme pour Starbucks être pensés comme une expérience réussie. Car c’est la mémoire de cette expérience que l’internaute va garder.

Souvenez vous, on ne va pas chez Starbucks pour le café, on va chez Starbucks pour déguster un Mokafrappoquelquechosechino dans un fauteuil avec des amis pendant que le voisin consulte son Mac.

Un parcours utilisateur doit donc également générer ce que l’on pourrait appeler le “+1 engagement”. C’est-à-dire que l’internaute doit adhérer un peu plus à votre marque après son passage. Au point de se sentir suffisamment investi pour avoir l’impression de vous tromper quand il va chez le concurrent (cf le tweet de Phil au début de l’article).

De manière concrète, il faudrait, en termes de stratégie éditoriale, que votre internaute fasse quelque chose en plus comme, vous suivre sur Twitter, partager la page sur Facebook, mettre la page en favori ou l’indexer sur Evernote parce qu’elle lui sera vraiment utile par la suite… Peu importe, mais en tout cas renforcer le rôle de votre marque dans son quotidien, dans ces 86.400 secondes qu’il a à consacrer à toute l’information qu’il peut croiser aujourd’hui.

--

--

Benjamin Berut
Web content : theorie et stratégie

Le #web, les nouveaux #médias, le #storytelling #mooc et le #gamedesign aussi et, ah, aussi le #jdr