Coup de gueule en sortie

Les parents et les professeurs sont-ils des alliés?

Weeprep
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8 min readJul 10, 2017

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Parents volontaires

La loi Haby (1975) stipule que : « Tout enfant a droit à une formation scolaire qui, complétant l’action de sa famille, concourt à son éducation ». Les parents ont donc une part à jouer dans la scolarité de leurs enfants. L’école doit les inclure et les écouter.

Cette fameuse loi dit aussi que « Les parents d’élèves élisent leurs représentants qui constituent un comité des parents, réuni périodiquement par le directeur de l’école ». Elle organise donc des élections et met à disposition des représentants de parents d’élèves.

On remarque que des articles de cette loi ont été modifiés en 1989, dont un (article 13) concernant les relations parents/écoles et leur justifications, nous précisant que « Des relations d’information mutuelle sont établies entre les enseignants et chacune des familles des élèves, au moins jusqu’à la majorité de ces derniers ». Ces prises de contact sont là pour « permettre à chaque famille ou, s’il est majeur, à chaque élève d’avoir connaissance des éléments d’appréciation concernant celui-ci ».

Toujours en 1989, la loi d’orientation est décrétée (loi Jospin), par laquelle les parents d’élèves deviennent « membres à part entière de la communauté éducative » et « partenaires permanents de l’école ou de l’établissement scolaire ».

Grâce à cette loi, l’école a le devoir d’inclure les parents en son sein.

Le code de l’Education de Juillet 2000 ainsi que la circulaire du 3 mai 2001, redéfinissent « le rôle et la place des parents à l’école », notamment l’importance de leur « droit d’information et d’expression » dans la scolarité de leur enfant, leur « droit de réunion » et leur « droit de participation ». Des « conseils pratiques » sont également dispensés sur le site du Ministère de l’Education Nationale à destination des parents d’élèves.

On a donc dû légiférer pour permettre aux parents de mettre un pied dans les écoles et pouvoir ainsi collaborer avec les équipes pédagogiques.

Cela montre qu’auparavant, la présence des parents à l’école n’était pas nécessairement désirée.

Cette coopération parents/enseignants à l’école primaire reste aujourd’hui un sujet central.

En 2004, la fondation de France organise les journées de rencontres et d’échanges sur le thème relation parents/ école. Au cours de ces journées, des experts se sont exprimés face à des parents d’élèves, des enseignants et des directeurs d’école.

Selon Pierre Charbonnel, docteur en sociologie et chercheur à l’Observatoire de l’enfance (France) l’école ne laisse que très peu de place aux parents “puisque depuis que l’enfant a un statut d’élève, nous sommes face à un « combat » pour avoir le plus d’emprise sur celui-ci.”

Distribuer des rôles aux parents reste une affaire difficile dans ces conditions.

Daniel Gayet, enseignant-chercheur au sein de l’équipe Éducation familiale et interventions sociales en direction des familles, quant à lui, évoque une « concurrence éducative entre les parents et les enseignants à l’école primaire ».

L’école n’aime pas avoir les parents dans ses pattes et les parents se méfient de plus en plus des enseignants. On est souvent pas très proche quand bien même on aimerait que cela se passe mieux.

Le problème entre ces deux entités éducatives c’est le manque de confiance, et de reconnaissance.

Parents volontaires, bonnes poires, ou juste perturbateurs de l’équilibre des équipes pédagogiques?

Voici, un témoignage que nous avons recueilli à ce sujet d’une maman d’un enfant en classe de CE1. Cette dernière s’est portée volontaire plusieurs fois pour accompagner ses enfants en sortie scolaire mais aussi sur d’autres aspects de la vie scolaire de son enfant (élections de parents, implication dans les fêtes de fin d’année…)

Nous verrons qu’à travers son témoignage, les lois sensées légiférer les rôles des parents au sein des écoles sont parfois bafouées, et les parents volontaires, soucieux du bien-être des enfants mais aussi des enseignants, sont “laissés pour compte”, tout juste bons à faire les besognes que les enseignants n’aiment pas faire, en tout cas dans l’exemple que nous allons présenter.

Weeprep a voulu faire entendre cette voix, non pas pour généraliser ces comportements mais pour montrer qu’il existe encore quelques écoles qui ne jouent pas le jeu de la coopération, et qui ne veulent pas des parents pour les sujets qui comptent mais juste pour alléger leur travail, et prendre une petite récréation.

Nous sommes conscients que toutes les écoles ne fonctionnent pas ainsi, et heureusement d’ailleurs, mais nous voulions montrer celles qui fonctionnent encore à l’ancienne, à l’ère où la coopération entre les parents et les enseignants est plus que jamais de mise.

“Je suis un parent volontaire parce que l’éducation de mes enfants compte beaucoup et ce même si j’ai une vie professionnelle, personnelle relativement chargée.

Avant de relater ce dont j’ai été témoin en cette fin d’année scolaire, je tiens à préciser que l’école primaire que fréquente mon fils est publique et n’est pas classée REP, qu’il n’y pas de problèmes majeurs, qu’il y règne une mixité relativement faible, que les parents ne sont pas intrusifs, mais plutôt impliqués dans la scolarité de leurs enfants.

  1. le concert de fin d’année

Les écoliers de la ville de Paris ont la chance de recevoir dès le CP une éducation musicale une fois par semaine. Ils chantent, jouent des instruments, et préparent un concert pour la fin d’année scolaire. Chaque année nous sommes très heureux de voir le travail accompli de nos enfants. Le jour J, pas un mot du directeur pour féliciter les enfants, ni un mot de l’enseignante de musique pour présenter le choix des chansons et le travail avec les percussions, non rien n’a été dit, ni commenté. Nous sommes arrivés dans le gymnase de l’école, il faisait bien 40°, on s’est installé comme on a pu, et on a vu, écouté nos enfants, nous les avons ovationnés, puis nous sommes repartis avec nos enfants, en silence. De toutes mes années d’enseignement, (oui car avant j’étais prof!) je n’ai jamais rencontré une telle froideur des équipes pédagogiques vis-à-vis des enfants mais aussi des parents. Les enseignants se sont mis en retrait, n’exprimant qu’ennui et impatience. Je me demande comment tout ce beau monde arrive à s’entendre et travailler ensemble et comment nos enfants vivent leur scolarité entourés d’adultes blasés. Ils ont loupé l’occasion de valoriser les enfants, dommage.

2. La kermesse de fin d’année

Ah oui, parlons de la Kermesse, une petite armée de parents délégués et de parents volontaires comme moi se sont battus cette année pour organiser quelque chose. En effet, l’année dernière, les enfants n’ont pas eu droit à une fête de fin d’année et les parents n’ont pas eu l’opportunité de rencontrer d’autres parents, un truc utile qui permet de se rendre des services mutuellement, connaître les familles des amis de nos enfants, discuter avec les enseignants tranquillement un verre à la main, les remercier pour le travail accompli. Ces moments de convivialité et de rencontre restent à mes yeux importants et notamment dans les grandes agglomérations, où l’on court le matin après son métro et/ou rentre tard du travail le soir. L’école que fréquence mon fils, apparemment n’en tient pas compte, et c’est bien dommage. Les enseignants, n’ont pas voulu prendre part à l’organisation et sont venus en invités, pourtant, je n’en ai croisé que très peu... Les parents ont avancé eux-mêmes les dépenses liées à l’événement : gâteaux, barbapapas, apéro, barbecue, ateliers maquillage, tatouage etc. L’argent récolté sera au bénéfice de la coopérative de l’école. Plus de 500 personnes étaient présentes ce soir-là, y compris un groupe de musiciennes. C’était sympa, mais si les enseignants avaient brillé de leur présence, cela aurait eu meilleur goût.

3. La sortie scolaire

Lundi dernier, j’ai participé à la sortie scolaire de fin d’année de mon fils aîné. Alors, première remarque à faire, le choix de la sortie: nous sommes allés au jardin des plantes et à la ménagerie, un endroit superbe au demeurant mais souvent fréquenté par de nombreuses familles parisiennes. En effet, notre école se situe en plein centre de Paris, à seulement quelques stations de métro de là. On peut donc dire “peut mieux faire” niveau originalité…

La deuxième remarque: le pique-nique. On nous apprend dans les cahiers de correspondance que la sortie est prise en charge par la Mairie mais pas le pique-nique. Tiens, pourtant la cantine est payée par les parents qui doivent prévoir un repas pour leur enfant. Au détour d’une conversation j’apprends que, comme les paniers repas sont immangeables, on demande aux parents de s’en charger. Alors là je dis, c’est le monde à l’envers, non?!

Après avoir avalé ces deux couleuvres, je n’étais pas au bout de mes surprises… Les parents se sont retrouvés par deux, avec un petit groupe de 6 enfants, le luxe! A mon grand étonnement, les maîtresses n’avaient pas de groupe, bizarre…Serait-ce parce qu’elles avaient préparé quelque chose d’extraordinaire, une surprise pour les enfants ? Qu’elles allaient apparaître déguisées au détour d’une allée pour nous effrayer ou nous donner des indices pour résoudre les énigmes du jeu?

Pas du tout: elles sont restées à deux, toute la journée, sans groupe, à vérifier en début et en fin d’activité que nous n’avions pas perdu d’enfant… Un comble !

Nous étions censés faire un de jeu de piste, qui s’est réduit à un vague questionnaire, complètement obsolète auquel nous avons répondu tant bien que mal et qui n’a eu aucune suite, ni correction, ni mise en commun. On se demande quel était l’intérêt pédagogique à part tuer le temps…

Petite anecdote en passant, les gardiens du parc nous ont appris que la statue que nous recherchions avaient été déplacée plusieurs années auparavant. “Non mais Allô”, comme dirait l’autre!

Le but n’est pas ici de généraliser et de dire que toutes les enseignants sont démotivées mais je m’interroge sur ce cas particulier. Comment se fait-il que ces personnes qui représentent l’école soit si peu impliquées et que tout ce qui leur est demandé en plus du strict minimum soit de trop?

Pour moi, c’est l’équipe éducative qui fait l’école et montre l’exemple aux enfants. Je déplore qu’aujourd’hui nos enfants aient assisté à un total manque d’implication de leurs maîtresses et au désarroi de leurs parents, qui ont dû participer à ce fiasco.

Julie O.

Légiférer autour de la coopération parents/enseignants ne suffit pas, il faut sans doute aller plus loin:

  1. Comprendre les raisons des démotivations des enseignants: sont-ils heureux au travail, l’équipe pédagogique s’entend-elle? Quelles sont les querelles intestines qui les tiraillent?
  2. Quels ont été les problèmes rencontrés avec les parents antérieurement?
  3. Quelles sont les peurs et les séquelles?
  4. Que peuvent faire les parents d’utile et de valorisant auprès des enfants et des enseignants?
  5. Comment l’école peut-elle devenir un lieu de rencontre, mais pas uniquement un lieu académique?
  6. Comment valoriser au mieux le travail des enfants?

Ce témoignage reste un témoignage mais permet de réfléchir à la relation parents/enseignants et montre aussi que les parents ne sont pas uniquement de mauvaise volonté, au contraire, ils font battre le coeur de l’école de leurs enfants, ils sont indispensables. Pourrait-on imaginer un médiateur spécialisé dans les relations parents/enseignants?

Weeprep vous souhaite de très bonnes vacances!

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