Extra Épuisement pour le bien des Enfants (E³)
Ceux qui me connaissent savent mon choix, fort définitif, de ne pas avoir d’enfants. Non seulement parce que je ne m’en cache pas et vis très bien avec cette décision, mais aussi parce que je me suis souvent faite l’avocate de cette cause au sein de sociétés qui poussent encore trop souvent les femmes dans un rôle exclusif de génitrice. Alors que l‘envie d’avoir ou de ne pas avoir d’enfants devrait en principe relever de l’appréciation personnelle de chacun, forts nombreuses sont les pressions qui sont exercés par l’entourage plus ou moins immédiat sur celles d’entre nous qui n’ont pas encore ou ne souhaitent pas enfanter. Le droit des femmes de disposer de leurs corps et de leurs vies est une lutte qui reste à mener.
Nonobstant cette réalité, il n’existe pas de contradictions particulières entre ne pas avoir d’enfants et se préoccuper du sort et de l’avenir de ceux des autres. Il n’est pas nécessaire que la perpétuation de mes gènes soit assurée pour que le futur de l’Humanité dans son ensemble me tienne à cœur comme il n’est pas nécessaire pour moi de vivre au sein d’un conflit armé pour m’inquiéter de ceux qui s’y trouvent. Mais cette inquiétude n’aurait aucun sens en l’absence d’actions concrètes pour y remédier. Je me suis donc un jour demandée comment venir en aide aux enfants malades à qui une enfance normale n’a pas été donnée.
Pourquoi cette cause en particulier? C’est fort simple. Ma mère a été victime d’un cancer du sein à la fin de sa trentaine, auquel elle a fort heureusement survécu. Mon père est mort d’un cancer du pancréas à l’âge de 49 ans alors que j’en avais 23. Cette maladie a hanté mon existence et ruiné ma famille (ou ce qu’il en restait) à un moment de ma vie où j’en aurais eu le plus besoin. Elle a finit de me convaincre de l’injustice du monde et de la petitesse de nos existences et m’a révélé la fragilité de nos corps et de nos esprits. C’est une menace qui pèse en permanence au dessus de ma tête (3 membres de ma famille sont morts d’un cancer du pancréas) et un sujet de tristesse pour tous ceux qui en sont affligés.
C’était donc une raison comme une autre de sauter sur l’occasion qui m’a été donné de défendre la cause et le bien être des plus petits tout en me livrant à une des plus grandes passions de ma vie: jouer aux jeux video. Et c’est donc ainsi qu’est née l’aventure Extra Life Montreal Dev 2019 à laquelle des amis du travail ont généreusement accepté de participer. 24 heures de jeu ininterrompues durant lesquelles tout unchacun était invité à faire des dons sur la page de notre équipe afin de collecter de l’argent pour l’association enfant soleil.
Maintenant, j’entends déjà les critiques. Ce genre d’activités relève d’une forme de charité qui, en plus de n’être qu’une cautère sur une jambe de bois, sert avant tout de caution morale à ceux qui s’y livrent. Oui. There is no way denying it. Pour une analyse plus poussée de la chose, me rejoindre un soir au Yer’Mad pour discuter autour d’une bière.
Pour en revenir à l’évènement proprement dit, ce fut l’occasion de beaucoup d’apprentissages. Y ayant déjà participé par le passé, j’avais une bonne idée de ce que tout cela impliquait mais je n’avais pas eu jusqu’ici l’occasion de l’organiser. Fort heureusement, trouver des amis prêts à embarquer dans l’aventure fut beaucoup plus simple que ma paranoïa habituelle ne l’aurait crû possible. Avec leur aide, Extra Life Dev 2019 a pris des dimensions qui auraient été inconcevables si j’avais été seule à tout mettre sur pied. LP nous a généreusement ouvert son logis et mis à disposition ses consoles; Améliane est parvenu à nous set-up en ligne comme une pro; Ugo, Arnaud et Jaden sont restés debout tout le long de ces 24 heures sans flancher; Flavie a sauvé notre partie de Overcooked en deux coups de cuillère à pot. Tous ont suggéré des titres et pris de leur temps pour rendre cette expérience possible et je suis à jamais reconnaissante à chacun d’entre eux.
Ce qui ne veut pas dire que tout ait été parfait. Je n’ai pas su organiser le potluck que nous aurions dû avoir ce jour là, nous avons commandé de la pizza trop tard, notre liste de jeux étaient trop longue et nous n’avions pas toujours grand chose à dire à ceux qui nous regardaient jouer. J’ai également eu le moins d’endurance de tout le groupe, au point de devoir me coucher à trois reprises durant la nuit. Autant de choses à améliorer pour notre prochaine itération, qui est déjà en préparation. Créer de l’intérêt pour un évènement demande du temps et un travail de long terme qui nous ont aussi fait défaut cette année mais qui seront au rendez-vous en 2020.
Malgré ces écueils, nous sommes parvenus à lever plus de 1000$CAN ce qui est plus qu’honorable pour une première tentative et donne de la motivation pour la suite. Ultimement, il fut plus difficile d’intéresser les gens à notre évènement sur les réseaux sociaux et au travail que de tout mettre en place le jour dit. La communication et le PR sont un art qui ne s’improvisent pas!
De tout ceci, je retire à la fois le plaisir d’avoir pu aider une bonne cause, mais aussi celui d’avoir partagé un moment précieux avec des gens que cette occasion m’a permis de mieux connaître et qui se sont révélés fantastiques, chacun à leur façon. En cette année de profondes divisions politiques, de recrudescence de la haine et de montée des violences sociales, Extra Life fut un petit cocon de réconfort qui est parvenu à briser pour un temps le cynisme qui m’engloutis de plus en plus. Nous ne sommes rien seuls.