House

GloomyMarie
Weirdos
Published in
4 min readOct 6, 2019
House — Criterion Channel

« Voici que la saison décline,
L’ombre grandit, l’azur décroît,
Le vent fraîchit sur la colline,
L’oiseau frissonne, l’herbe a froid. »

  • Victor Hugo, Dernière gerbe.

Octobre, mois charnière entre la chaleur étouffante de l’été et la froideur mordante de l’hiver. Seuil des ténèbres, entre monde dans lequel vivants et morts se croisent avec plus ou moins de bienveillances et s’observent mutuellement. Quel moment plus propice pour jouer à apprivoiser ses peurs que les jours déclinants et les longues soirées d’automne? Quel meilleurs moyen de conjurer l’angoisse que le rire? Fût-il nerveux?

House — Obayashi

Car au royaume des œuvres horrifiques, la comédie d’épouvante est reine ; comme l’ont démontré avec assiduité festivals de série B (Fantasia), rétrospectives d’œuvres cultes (Rocky Horror Picture Show) et soirées canapé aussi inoubliables que renouvelées. Des œuvres de Sam Rami, aux livres chair de poule jusqu’à la série fais-moi peur, nombreuses sont les occasions pour l’amateur de frissons d’exorciser ses angoisses dans la sécurité d’un groupe ou dans la franche hilarité solitaire. De fait, en plaçant l’individu comme spectateur de lui-même, ce type de comédies ouvre la porte à une introspection que ne rend pas toujours possible l’horreur traditionnelle, sous cette forme du moins, et qui s’avère plus riche que d’apparence.

Evil Dead II — Sam Raimi

Ce qui ne signifie pas que les représentants du genre trouvent toujours leur public ni que celui-ci ait toujours la chance de pouvoir se procurer ses plus fins spécimens (pour des questions relevant souvent de moyens économiques ou de préférences régionales). C’est ainsi qu’il aura fallu attendre 32 ans avant que House (Housu en japonais) ne se fasse connaître en Amérique du Nord, à l’occasion du New York Asian Film Festival de 2009, malgré un large succès dans son pays d’origine. Surréel est un terme qui s’applique à merveille tant à cette situation qu’à ce long métrage.

Des œuvres de Sam Rami, aux livres chair de poule jusqu’à la série fais-moi peur, nombreuses sont les occasions pour l’amateur d’exorciser inconnu et inavouable dans la sécurité d’un groupe ou dans la franche hilarité solitaire.

Chronologiquement, House voit le jour à la fin d’une période pivot du cinéma hollywoodien dont il s’inspire. En effet, de 1967 à 1977 alors que cette industrie commençait à faire face à la concurrence de la télévision et perdait son monopole de diffusion en raison de divers changement législatifs, le cinéma américain connu une période de grâce artistique destinée à prendre fin avec l’invention par Lucas, puis Spielberg, du concept de Blockbuster. De fait, encouragés par le succès de films tels que les dents de la mer, les studios Toho confièrent au réalisateur Obayashi le mandat de produire un film d’horreur destiné au public adolescent japonais (2).

Il aura fallu attendre 32 ans avant que House (Housu en japonais) ne se fasse connaître en Amérique du Nord

Savant mélange de folklore nippon et de clichés horrifiques, House ne se compare en rien au thriller aquatique qui a motivé son existence. Partagé entre le kitsch rose-bonbon d’une histoire aux accents juvéniles, le surréalisme des expérimentations visuelles propres aux années 70 et le gore le plus absolu de scènes joyeusement absurdes, ce film est avant tout une expérience sensorielle. Les personnages y occupent une place si faible et le film se prend si peu au sérieux que chacune des jeunes filles servant de protagoniste porte un pseudonyme cocasse censé résumer sa fonction et son caractère (Gorgeous, Fantasy, Melody, Sweet, Mac, and Kung-fu). Il en va également ainsi de son scénario, qui prend pour vague prétexte la visite par Gorgeous de sa tante isolée, pour assassiner avec humour et effets spéciaux délirants ces victimes désignées.

House — Obayashi

House est truffé de trouvailles visuelles astucieuse et d’expérimentations en tous genres (le démembrement d’une adolescente par un piano, l’assassinat d’une autre par une tête vengeresse). Il représente, au même titre qu’Evil Dead II ou Shaun of the Dead, une expérience tout droite destinée aux amoureux de l’horreur absurde mais de qualité et est désormais disponible aux éditions du Criterion(3) pour tous les cinéphiles accomplis qui souhaitent enrichir leur culture ou la faire connaître à leurs amis. Alors que le cinéma d’épouvante post-moderne bat actuellement son plein avec des œuvres comme Get Out, the Death of a White Dear ou It Comes at Night, il est bon de se replonger dans le passé et de redécouvrir les classiques qui en ont permis l’émergence.

Source:

(1) https://thefederalist.com/2017/07/06/star-wars-killed-american-cinema-creating-blockbuster/

(2) https://366weirdmovies.com/house-hausu-1977/

(3) https://www.criterionchannel.com/videos/house

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