Oser la croissance ou comment ne pas céder aux mirages de l’influence.

Quiterie Barreau
WITH We are the dots
9 min readFeb 6, 2020

Avec des prévisions 2020 qui voient double en termes de budgets alloués*, le marketing d’influence n’est pas près d’être désinvesti des équipes marketing. Pour autant, l’influence reste largement sous-potentialisée. Bien souvent traitée en silo dans les entreprises, l’influence siège encore trop loin des préoccupations business, cantonnée à des KPIs de premier niveau. Plutôt que d’énumérer les tendances de l’année, voici un éclairage sur la façon d’opérer l’influence, et dont les bénéfices — nombreux et complémentaires — peuvent en faire un levier relutif du marketing.

*AdAge.com, Janvier 2020.

Evaluer la contribution de l’influence à l’ensemble de la chaîne marketing.

1- Influence : ne pas confondre technologie et stratégie.

Agences d’influence aux viviers de profils prêts à répondre, outils de social listening dédiés, plateformes automatisées — tous les acteurs spécialisés tendent à se transformer en marketplaces d’influence, comme nous les appelons. Là où se rencontrent marques et influenceurs via une communication facilitée. La tentation est grande pour les marques, qui y voient la possibilité d’opérer l’influence en quasi-autonomie ; encore faut-il que les équipes aient du temps à y consacrer, le management de la relation étant plus que crucial si l’on veut poser les jalons d’une relation à long terme et sortir d’un mode d’échange « à la commande ».

Le terrain de jeu est là, certes : des influenceurs déjà candidats (voire demandeurs), un accès aux metrics et la possibilité de tracker les performances en temps réel. On ne pourra cependant jamais faire l’économie d’une analyse humaine de ces comptes, qu’aucune IA pour le moment ne peut assurer. La quantité est évaluable, mais la qualité, les signaux faibles, l’évolution, le “cool” restent pour le moment des critères que seul un humain peut quantifier. La marque n’a pas le droit de se tromper sur le choix de ses influenceurs. C’est l’étape n°1 à ne pas rater. Se baser uniquement sur des metrics, sur des outils serait une erreur stratégique. La coolness ne se mesure pas en chiffres mais en attitude, en impression dégagée, en ressenti émotionnel.

Pour le moment, les machines ressortent bien souvent des profils évidents, aimés par le tout-venant qui ne sont ni de niche, ni authentiques et qui ne vont présenter que peu d’intérêt qualitatif pour l’univers précis de la marque. Je ne dis pas qu’il faut se détourner de ces outils, certainement pas. Ces derniers doivent faire partie intégrante de l’exécution de la stratégie d’influence, mais ne doivent pas la supplanter pour autant.

J’y vois un avantage à deux niveaux. En amont, pour confirmer ou infirmer la portée des profils scrupuleusement sélectionnés au préalable (autrement dit, vérifier le reach et le taux d’engagement). En aval, pour suivre et mesurer la performance en real-time. L’outil aide à rationaliser les choix, pas à les définir.

Le management de la relation est plus que crucial si l’on veut poser les jalons d’une relation à long terme et sortir d’un mode d’échange « à la commande ».

2- Un pour tous, tous pour un !
Quand la diversité crée l’identité.

L’influence doit se penser en squad. J’estime qu’avoir un collectif d’influenceurs est plus intéressant car chacun pourra activer une facette de la marque qui, mises bout à bout, vont projeter le purpose de la marque dans son ensemble. Chaque influenceur pourra incarner une couleur de la marque, et porter un produit — ou segment de produits — spécifique, pour adresser un segment de consommateurs spécifique lui aussi.

J’aime beaucoup l’image que Damien Viel, Directeur Général de Twitter France, utilisait pour décrire l’influence : « l’influence, c’est comme une barrière de corail ». Chez WITH nous parlons des influenceurs comme des alliés de la marque. Appliquée à la marque en tant qu’entreprise, l’influence agit en effet comme un bouclier protégeant la marque des commentaires envoyés de plein fouet, mais elle vise surtout à créer un brouhaha positif — et constant (si possible !) — autour de la marque, dans des colorations différentes. Je crois beaucoup à cette idée de maillage. Nous accompagnons nos clients à le tisser, à l’architecturer, à le faire grandir, mais aussi à définir le chapeau commun qui viendra englober ce pool de social friends.

3- L’influence au service de la stratégie de contenus.

Le cadre de la relation marque/influenceurs se réduit souvent à ce qu’une marque paie un influenceur pour obtenir des posts. Posts qui vont vivre leur vie sur les réseaux de l’influenceur et, au mieux, republiés sur les comptes social media de la marque.

Je suis ravie de lire ces articles récents qui annoncent comme tendance phare de l’influence en 2020, la ré-exploitation des contenus influenceurs au sein des campagnes de marques. Enfin ! Pourquoi s’en être privé jusqu’ici ? Cela va faire près de deux ans que nous sensibilisons nos clients sur l’expertise fabuleuse que recèlent les influenceurs en qualité de producteurs de contenus. On entend souvent dire que les influenceurs coûtent cher pour un seul post. Mais cela remet très vite en perspective le coût des collaborations influenceurs si on leur délègue aussi le travail traditionnellement confié à l’agence de pub ou à la boîte de production.

Pourquoi ne pas tirer parti de leur expertise pour directement pousser leurs contenus au sein des campagnes médias de la marque ? L’influenceur gagne une visibilité rarement atteinte — à tel point qu’on se demande si ce n’est pas lui qui s’offre un plan média unique, mais quel trade-off fabuleux pour lui ! Un peu comme si on starifiait un influenceur en lui offrant une campagne média. C’est précisément cela qui permet d’engager les audiences avec authenticité et d’augmenter le pouvoir de conviction.

Un courage que l’un de nos clients Luxe a démontré l’an passé lors d’une activation Travel Retail que nous avons opérée à Dubaï pour l’une des plus iconiques de leurs marques skincare. La collaboration — que dis-je ! — la co-création étroite avec une KOL chinoise Mode & Beauté à chaque étape de son voyage, a permis d’atteindre des résultats bien au-delà des standards habituels. Des enseignements riches qui vont nous permettre de réitérer.

La ré-exploitation des contenus influenceurs au sein des campagnes de marques, enfin ! Pourquoi s’en être privé jusqu’ici ?

4- Exister pour exister : quelle perte de temps !
Le cas de la marque qui n’avait pas de compte Instagram (ou peu de followers) : il faut se décomplexer.

Une marque doit-elle attendre d’avoir un compte Instagram pour se lancer dans l’influence ? Pas nécessairement. L’influence aussi a le droit d’être agile. Certes, disposer d’un écosystème social media solide permettra d’agir en caisse de résonance pour valoriser les collaborations influenceurs, ou — avant ça — de leur donner une première coloration de l’univers auquel on propose de les associer.

Pour autant — et nous en avons fait l’expérience avec l’un de nos clients — pas besoin d’un compte Instagram pour exister à leurs yeux. Au contraire, ceux-ci apprécient d’autant plus la confiance qui leur est accordée et l’autonomie vis-à-vis d’un compte qui n’existe pas encore. L’impression « d’en être », de participer à une aventure collective dès le premier jour ajoutera une dimension émotionnelle forte à la relation avec la marque.

En vérité, la vraie question à se poser ne réside pas là. Si ce n’est pas sur un compte Instagram de marque, où rediriger les audiences que l’on aura réussi à engager via le post de l’influenceur (sur son compte à lui) ? Hors de question de publier des posts qui resteraient « en suspension ». Imaginez une bannière sans call-to-action ! C’est-à-dire sans la possibilité pour le consommateur d’en savoir plus. Pourquoi pensez-vous qu’Instagram a intégré une tonne de fonctionnalités E-com directement cliquables au sein de ses posts ?

Une marque doit-elle attendre d’avoir un compte Instagram pour se lancer dans l’influence ? Pas nécessairement. L’influence aussi a le droit d’être agile.

5- L’influence doit se penser en expérimentation.
— Influence et conversion.

Chaque collab doit être considérée comme une occasion de convertir, comme une porte d’entrée dans le purchase funnel. Nous invitons nos clients à travailler l’influence en consumer journey. Et surtout, à se donner les moyens de mesurer ses actions d’influence au-delà des metrics de première ligne que sont les likes ou l’engagement sur une publication « sèche ».

N’ayons pas peur de corréler influence et impact business ! Je dirais même qu’il le faut. C’est quand même le nerf de la guerre, non ? La bonne nouvelle, c’est que cet impact est totalement mesurable. Et qui dit mesurable, dit comparable. Autrement dit, mettons en regard la performance des influenceurs entre eux. C’est le seul moyen d’identifier la contribution réelle d’un influenceur dans l’atteinte des objectifs business de la marque.

L’objectif ? Apprendre des collaborations passées pour rendre chaque nouvelle, meilleure que la précédente (= un meilleur ROI). On quitte l’idée de collab one shot pour entrer dans une nouvelle ère : tirer parti du test & learn pour créer de véritables business models d’influence, en end-to-end.

— Influence et mix-marketing.

Mais comment créer une relation pérenne entre influence et business ? C’est tout l’enjeu. Pour cela, il faut cesser de considérer l’influence en silo, comme un volet à part. Ce serait dommage de la penser comme une simple somme d’actions parallèles, ou « en bonus ». J’invite nos clients à comprendre — et surtout à évaluer — la contribution de l’influence au sein du mix-marketing global.

L’influence peut servir d’autres aspects du marketing, en commençant par la stratégie média. On peut considérer les contenus « influence » moins comme un moyen de faire de l’image ou de la notoriété, mais comme un “piège” intelligent pour engager les audiences, et en ça nourrir la stratégie data & precision media de la marque (création des audiences en média). Il s’agit là d’opérer un changement de paradigme vis-à-vis de l’influence : délaisser la négociation de ce bon vieux package de posts — dont l’existence est limitée à l’écosystème Facebook/Instagram — en faveur d’une stratégie de contenus collaboratifs et décloisonnés.

Encore une fois, n’ayons pas peur d’évaluer l’impact de l’influence sur l’ensemble de la chaîne marketing. Testons, mesurons, itérons, ajustons et optimisons si cela montre des effets positifs.

J’invite nos clients à comprendre — et surtout à évaluer — la contribution de l’influence au sein du mix-marketing global.


CHEZ WITH…

Quoi qu’il en soit, il n’existe pas UN schéma d’influence qui soit applicable ou vrai pour toutes les marques. C’est bien ce qui rend ce champ du marketing si passionnant.

Comme toute nouvelle entreprise, la stratégie d’influence doit se séquencer, et doit trouver sa place au sein d’une vision marketing plus large.

Tester d’abord, commencer petit (apprendre de ses actions) pour viser plus grand (libérer le potentiel et le connecter à l’écosystème de marque). Toute première action est bonne — aussi petite soit-elle — si tant est qu’on se donne les moyens de mesurer son impact réel — donc quantifiable — sur l’ensemble de la chaîne marketing.

Chez WITH, nous concevons des plans d’influence sur-mesure, en phase avec le contexte de la marque sur son marché, la taille du business, les conventions du secteur en la matière, mais aussi en fonction de cette composante si précieuse à toute équipe marketing : le temps.

Les équipes de WITH interviennent en prolongation de l’équipe clients en charge, pour établir le lien avec ses influenceurs, et le maintenir, sans jamais perdre de vue la road map marketing globale dans laquelle évoluer.

Ce sur-mesure s’inscrit néanmoins dans un framework WITH que nous avons pensé à double détente : cartographier les centres d’intérêts des cibles d’une part, écrire le socle de marque d’autre part. C’est à la croisée des chemins que se trouve le terrain de jeu pour sélectionner les influenceurs.

Nous soulageons aussi nos clients sur ce travail — souvent chronophage — d’identification, d’évaluation et de sélection des experts nécessaires. Nous les briefons, puis orchestrons leurs opérations de façon continue.

Je rappelle souvent à nos clients que l’influence est une affaire de patience. Certes, du placement produit donnera du visible dans l’immédiat, mais ce n’est pas ce genre de quantifiable que nous briguons. Nous accompagnons nos clients à ne pas céder aux mirages de l’influence, à ces actions considérées comme tactiques — au succès “feu de paille” — mais à co-construire, avec un pool d’influenceurs bien choisi, un modèle qui permettra de créer de la valeur dans la durée.

Les 4 grands enjeux de l’influence :

1- Quel équilibre entre tech et humain ?
Bon dosage entre automatisation et intuition.

2- Quel attelage d’influenceurs ?
Gestion crescendo et relation horizontale avec la marque.

3- Quelle porosité avec les autres leviers de la stratégie marketing ?
Création de passerelles pour décloisonner l’impact de l’influence.

4- Quelle combinaison de partenaires ?
Sélection, définition des rôles et orchestration continue.

Mais d’ailleurs, et si les influenceurs faisaient partie des populations proches de votre core-business ? Bon, vous parler de stratégies d’advocacy mériterait de faire l’objet d’un autre article… Mais qui dit structurer sa stratégie d’influence, dit considérer l’exhaustivité de ses alliés potentiels. Un territoire que nous avons commencé à initier avec bon nombre de nos clients déjà. C’est ça déployer le plein potentiel de l’influence chez WITH : adopter une vision holistique.

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Quiterie Barreau
WITH We are the dots

Senior Client Partner at WITH Paris. Leading Influence & Advocacy + Data & Precision strategies.