Aujourd’hui à la cantine, c’est saka saka !

Du bio et du local, un tournant majeur est en cours pour les cantines scolaires en République du Congo.

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Luria est l’une des cuisinières de l’école Matsoua à Mindouli. Photo : WFP/Alice Rahmoun

Luria est en train de découper des dizaines de chikwangue, ces “pains” de manioc, forme la plus consommée du manioc en République du Congo. Ce matin très tôt, elle est allée au marché de Mindouli faire ses achats, coupons du PAM à la main, afin de trouver de quoi cuisiner pour les 600 élèves de l’école Matsoua de Mindouli. Car Luria, mère d’une des élèves de l’école, fait partie tous les lundis du comité de gestion des cantines scolaires. Avec d’autres parents et membres de la communauté, elle est chargée de préparer le repas de ce midi.

De nouvelles perspectives émergent au Congo : manger local !

Depuis novembre 2019, le Programme alimentaire mondial au Congo a mis en place une nouvelle version des cantines scolaires. Alors que depuis 2015 le bureau pays distribue du riz, des pois, de l’huile et du sel, parfois également des sardines, dans maintenant près de 400 écoles grâce à de nombreux contributeurs (Département de l’Agriculture des Etats-Unis — USDA, le gouvernement du Japon, etc.), de nouvelles perspectives émergent : manger local !

Après le riz et les pois, le manioc et les haricots

En effet, depuis novembre 2019, 5 écoles (soit 3 500 élèves) expérimentent des repas de cantines scolaires basés sur la production locale. En plus de correspondre davantage aux habitudes alimentaires des élèves, et de réduire l’impact écologique de l’apport des denrées alimentaires (circuits locaux utilisés moins polluants au lieu d’acheminer les denrées provenant d’un autre continent par cargo), ce nouveau système permet de valoriser le travail des producteurs et productrices locales et ainsi de soutenir l’économie locale.

Désormais, les comités de gestion des cantines scolaires reçoivent chaque semaine des “coupons” d’une valeur unitaire de 1000 FCFA pour acheter les produits locaux de leur choix aux vendeurs et vendeuses du marché. Avec cela, elles cuisinent des légumes locaux, du manioc, des haricots, du saka saka…

Le haricot au menu des cantines scolaires était déjà évoqué dans le Projet d’Appui du Petits Producteur de Haricot. Photo : WFP/Alice Rahmoun

Une initiative qui fait directement écho au Projet d’Appui aux Petits Producteurs de Haricot (PAPPH), un programme lancé en 2016 qui permet d’améliorer la qualité et la quantité de la production de haricot de producteurs et productrices de la Bouenza. D’ailleurs, le PAM s’est engagé dès l’origine du projet à acheter 30% de leur production (et ce pourcentage est en constante progression vu l’augmentation de la production et de la demande !) à destination des cantines scolaires situées à proximité des lieux de production. Un projet similaire autour du manioc pourrait d’ailleurs émerger dans les prochains mois.

Après de nombreuses étapes, le manioc râpé est émietté avant sa torréfaction pour le manger sous sa forme de gari. Gari qui pourrait se retrouver au menu de cantines locales prochainement. Photo : WFP/Eva Gilliam

Diversifier les sources de revenus pour assurer la pérennité des cantines scolaires

Cette diversification de l’offre alimentaire aux élèves de Mindouli ces derniers mois, a été possible grâce à une nouvelle source de revenus : la contribution de milliers de personnes anonymes via l’application Share the Meal pour des repas locaux dans les cantines scolaires du Congo. Entre avril et septembre 2019, 300 000 $US ont été collectés avec succès grâce à des micro-dons (l’équivalent de 1 repas, 1 semaine de repas pour un élève, etc.) et au partenariat avec des entreprises privées, comme la marque allemande Share, qui a apporté un montant conséquent pour la réalisation de ce programme pilote.

Dans cette école, des poissons dits “ceintures” seront mélangés aux légumes avant d’être servis à 1000 élèves. Photo : WFP/Alice Rahmoun

Fait intéressant : un repas local, cuisiné avec des produits frais du marché, coûte 12 centimes $US, soit la moitié d’un repas traditionnel avec les denrées fournies par le PAM (25 centimes $US). Voilà donc une opportunité non négligeable à saisir pour amorcer la transition des cantines vers une consommation locale, progressivement indépendante de l’assistance du Programme alimentaire mondial, en facilitant les relations entre comités des cantines scolaires et producteurs et productrices locales.

Au-delà des 5 écoles ayant participé au programme pilote, ce sont à terme 17 écoles sélectionnées du Pool et de la Bouenza qui bénéficieront de ces nouvelles cantines dans les prochaines semaines… en attendant de nouveaux fonds pour pérenniser et étendre l’initiative pour permettre à Edith, Aboyo, Berliche, Chérubin et d’autres centaines d’enfants de manger “ya buala” !

Bon appétit ! Photo : WFP/Alice Rahmoun

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