Cameroun : voyage dans le sac d’Halimatou
Pour notre curiosité, l’humanitaire en service dans la Région de l’Est du Cameroun, nous détaille les outils essentiels pour son travail
Par Mayramou Madaki
Qu’y a-t-il vraiment dans les sacs des travailleurs humanitaires ? C’est par cette question, que l’on pourrait résumer l’excursion dans le sac d’Halimatou Saadia, depuis deux ans assistante de suivi des activités de terrain (Field Monitor) au Programme alimentaire mondial des nations unies (PAM) au bureau de Bertoua.
Appelée à passer le plus clair de son temps dans les sites de distribution (accompagnée de partenaires gouvernementaux et d’agences sœurs), Halimatou quitte le bureau à 7h du matin, afin de parcourir les deux heures de route qui lui sont nécessaires afin de rejoindre, le site de distribution. Et l’humanitaire — loin de s’en aller en guerre contre la faim, sans ses armes — est munie pour cela : d’un ordinateur, un smartphone, un bloc note et de son plan de distribution, et d’une gourde à thé. « Ma journée d’activité sur le terrain est la meilleure partie de mon travail au PAM », nous confie le peuhl originaire du Nord Cameroun.
Le début de la distribution des vivres aux personnes vulnérables fixée à 9h, à l’aide du bloc note et du calendrier de distribution, Halimatou vérifie la quantité des vivres et le nombre de bénéficiaires planifiés. Après le décompte des vivres, et tout en utilisant les messages de sensibilisation préalablement préparés, elle et les membres de son équipe informent à nouveau les bénéficiaires sur la quantité à recevoir ; et de toute autre information importante liée à la distribution : « Je me rassure que les personnes à besoin spécifique soient servies prioritairement tout au long de la distribution, et que les quantités reçues par les bénéficiaires sont celles planifiées ».
Le selfie du bonheur
Son smartphone à portée de main, Halimatou effectue une enquête de satisfaction auprès des bénéficiaires et des partenaires sur le déroulement de la distribution, la qualité et la quantité des denrées, le temps d’attente ainsi que le temps passé entre le site et leur domicile. Avec l’appui des leaders et des partenaires, elle s’attèle à résoudre la quasi-totalité des plaintes des allocataires de l’aide fournie par le PAM. « Avec l’aide du smartphone, je prends les bénéficiaires en photos et certaines mamans en selfies car elles adorent se voir en image sur un écran », nous affirme Halimatou avec un sourire aux lèvres. Et une bénéficiaire sexagénaire de s’écrier à la vue de sa photo : « je ne savais pas que j’étais aussi belle sans mes dents ! C’est ton miroir qui m’a changé ou je suis comme ça ma fille ? ».
Sur le chemin de retour, Halimatou utilise son ordinateur pour rédiger le rapport de l’activité. Et elle le fait, tout en buvant le thé qui lui permet de rester éveillée : le sourire apporté sur le visage de chaque bénéficiaire et la satisfaction dans leurs yeux, lui procurent la force de se lever chaque matin et d’aller au travail ; ceci afin de contribuer d’une façon ou d’une autre au changement de leur vie.
Mais du fait de la pandémie de COVID- 19, les descentes sur le terrain ont été suspendues et Halimatou est meurtrie par l’augmentation du nombre de personnes vulnérables non assistées. Toutefois, elle essaie de se consoler en se remémorant le témoignage de cet homme âgé de 79 ans qui un jour, lui avoua que : « le PAM m’a tout donné ! Ma vie a changé grâce à l’assistance, maintenant je mange bien, j’ai la force. J’aimerais que le PAM me donne une femme à épouser pour mourir en paix ». Une nouvelle interpellation qui certainement, constitue un leitmotiv pour Halimatou, qui bientôt enfourchera de nouveau son sac et ses outils, pour une nouvelle croisade contre la faim.
