Croire en ses rêves…jusqu’au bout

Comment Barbara, chauffeur du PAM en République Centrafricaine (RCA), a ébloui toute une communauté

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Barbara Mbroukouzou au volant de sa voiture. PAM/Bruno Djoyo

Ecrit par Bruno Djoyo, PAM/RCA

En RCA, où le contexte sécuritaire est très volatile et la situation d’urgence complexe, il est rare de voir une femme au volant des véhicules des agences humanitaires. Pourtant, le Programme Alimentaire Mondial (PAM)fait l’exception avec ses trois chauffeurs femmes. Voici l’histoire de l’une d’entre elles,Barbara Mbroukouzou avec qui nous avons effectué un parcours de combattant Bangui — Mongoumba — Bétou — Mongoumba– Bangui.

La mission était simple. Se rendre à Mongoumba pour acheminer de l’aide pour des centaines de centrafricains de retour de la République du Congo où ils étaient réfugiés. Toutes les agences concernées devaient effectuer le voyage en convoi. Le PAM a mis à disposition deux de ses véhicules dans le convoi composé de 15 voitures. L’un de ces véhicules était conduit par Barbara Mbroukouzou.

Le long convoi en route pour Mongoumba. PAM/Bruno Djoyo

Mais rien n’est si simple en RCA. Après 45 minutes de voyage, notre voiture a subi un choc qui a endommagé notre climatisation. Ne pouvant plus faire marche arrière, ni quitter le convoi vu le contexte sécuritaire très volatile, nous avons préféré poursuivre notre voyage.

« Je pense que notre climatisation vient de nous lâcher, nous devons descendre nos vitres pour éviter que nous ne suffoquions »lance Barbara. « Nous allons nous refaire une beauté avec un fond de teint très spécial » ironise Barbara, alors que nous nous apprêtions à quitter la voie bitumée au niveau du village de Pissa, pour la route en latérite.

PAM/Bruno Djoyo

Unique femme parmi ces chauffeurs d’un convoi et dotée d’un moral d’acier et d’un sens élevé du devoir, Barbara ne se décourage pas malgré la poussière qu’elle inhale et qui s’incruste dans ses cheveux sous une chaleur accablante. Pour elle, contribuer à sauver des vies prend le pas sur toutes autres considérations.

« J’estime qu’en travaillant pour le PAM, j’apporte aussi ma pierre à l’édifice de la reconstruction de mon pays, » explique cette mère d’une fille âgée de trois ans.

Titulaire d’un Master 1 en Comptabilité Gestion, elle a vu une annonce que le PAM recrutait des chauffeurs, ayant les compétences, elle a postulé et a eu le poste.

PAM/Bruno Djoyo

« Etre au PAM est pour moi l’accomplissement d’un rêve. Durant deux ans, alors que j’étais encore assistante aux finances, pour une ONG internationale située en face du bureau pays, je guettais les avis de postes du PAM » nous témoigne-t-elle.

« Pour mes anciens collègues, c’était de la folie de quitter mon poste d’Assistante aux Finances pour devenir chauffeur. Alors que dans une agence comme le PAM, c’est possible de commencer comme chauffeur et finir sa carrière comme Chargé de Finances. » dit-elle.

PAM/Bruno Djoyo

Tandis que nous arpentons cette route en latérite, truffée de cratères rendant difficile la conduite, nous réalisons que l’accès aux populations dans le besoin, est un défi majeur et déterminant dans la mise en œuvre de l’assistance humanitaire.

PAM/Bruno Djoyo

Sur cette distance de 200 Km environ, il nous a fallu quasiment 6H de route, pour atteindre à 17H45 Mongoumba, commune située dans la préfecture de la Lobaye.

Une fois arrivé, en dépit de la fatigue, Barbara nettoie son véhicule, sous l’œil admiratif de Moussa Syndoko Wilfried Azer, chauffeur depuis quatre ans au PAM, qui ne tarit pas d’éloges à son sujet « je suis frappé par le professionnalisme de Barbara, j’ai dû mal à croire qu’elle n’a que trois mois au PAM. ».

Barbara Mbroukouzou et Moussa Syndoko Wilfried Azer, chauffeur depuis quatre ans au PAM. PAM/Bruno Djoyo

Mongoumba — Bétou — Mongoumba: Le lendemain, 11H45 a sonné le départ pour Bétou, la frontière avec le Congo où nous devions récupérer les 335 retournés. A 15H07, nous étions à nouveau à Mongoumba. Durant les 3H22 de trajet aller-retour, y compris les arrêts, les villageois n’ont cessé de saluer ou de féliciter Barbara.

Elle n’a cessé de susciter l’intérêt des usagers de la route qui scandent sans cesse « Wali a kpè na kota auto » en Sango, langue nationale de la RCA, ce qui se traduit par « une femme est au volant d’un 4X4 ». En RCA, on assimile toujours la conduite automobile au travail d’un homme.

« Voir une femme comme Barbara au volant, pourrait inspirer d’autres jeunes femmes Centrafricaines à briser l’idée selon laquelle la conduite automobile est un travail d’homme » affirme Ngoubou Jos chauffeur UNHCR du Congo qui a tenu à faire une photo avec notre héroïne à Bétou.

Ngoubou Jos chauffeur UNHCR du Congo Brazzaville qui a tenu à faire une photo avec notre héroïne Barbara à Bétou. PAM/Bruno Djoyo

Mongoumba — Bangui: Sur le chemin du retour, dame nature a été clémente en nous envoyant de la pluie tout au long du tronçon poussiéreux jusqu’à notre arrivée sur la nationale asphaltée. Cependant, Barbara a dû redoubler de vigilance de sorte que notre 4X4 ne patauge ni dans la boue, ou ne glisse dans les ravins.

C’est d’ailleurs dans cette perspective, que des missions d’exploration ont été menées par le PAM pour évaluer la praticabilité de certaines routes et envisager d’autres alternatives. Ces missions évalueront les routes en termes de sécurité, conditions et praticabilité.

PAM/Bruno Djoyo

« Ces missions sont très utiles, pas seulement pour le PAM et les acteurs humanitaires, mais aussi pour les commerçants du pays »nous explique Gian Carlo Cirri Représentant et Directeur Pays du PAM RCA.

Partis de Mongoumba à 10H, nous étions enfin à Bangui près de huit heures après notre départ. Chaque jour en RCA, des humanitaires comme Barbara mettent leur vie en danger, afin de sauver celle des autres.

Barbara Mbroukouzou et ses collègues humanitaires. PAM/Bruno Djoyo

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