Niger, réfugiés maliens : la double peine

Au nord-ouest du Niger, près de la frontière avec le Mali, des milliers de maliens ont fui les violences. Ils se sont réfugiés dans des zones d’accueil au sein desquelles le Programme Alimentaire Mondial (PAM), avec le soutien de l’Union Européenne (ECHO) et du Royaume-Uni (DFID), œuvre pour leur permettre de retrouver des conditions de vie décentes et de retrouver progressivement leur autonomie.

« Lorsque nous sommes arrivés au camp d’Intikane, les autres réfugiés déjà installés nous ont accueillis avec une fête pendant laquelle ils ont partagé leurs rations avec nous ! » se souvient Dima Amaloze, réfugiée malienne et représentante de sa communauté, soulagée d’avoir retrouvé un semblant de sécurité pour elle et sa famille. Dans le camp elle est plus connue sous le nom de Tishindikit et joue le rôle de médiatrice entre les siens et les acteurs de l’assistance humanitaire.

Dima Amaloze, connue sous le nom de Tishindikit — WFP/Katia Oslansky

Ces marques de solidarité, qui ont mis du baume au cœur de Tishindikit et de sa famille, représentent une bien maigre consolation en comparaison du vide laissé par la perte d’un part de leur identité. Éleveurs, ils se déplacent au grès des mouvements de leurs troupeaux. Une vie nomade ancrée profondément dans la culture de ces familles qui connaissent désormais un processus d’adaptation à une vie plus sédentaire dans les camps de réfugiés.

Tishindikit a quitté le Mali en 2013 pour fuir les violences afin de pouvoir mettre sa famille à l’abri. Elle est assise sur une natte, les distributions de vivres donnés par le PAM sont en cours derrière elle. Avec émotion, elle se remémore leur deuxième déplacement vers Intikane après l’attaque du camp de Tazalit, le 6 octobre 2016 :

« Depuis cette date, les choses ont changé. Les gens vivaient dans la peur d’une nouvelle attaque. C’était comme revivre l’angoisse et la terreur du Mali. Le voyage jusqu’à Intikane a été très dur. Non pas en raison de sa durée, après tout il n’a duré qu’une journée, mais parce que nous avons dû laisser la terre qui nous avait accueillis pendant trois ans et sur laquelle nous commencions à nous rétablir. Mais ce qui prime c’est notre sécurité, surtout celle de mes enfants ».

Ce sentiment vient naturellement du fait d’avoir échappé aux violences et aux persécutions, mais également de la sécurité alimentaire qui leur est garantie par le PAM avec le soutien indéfectible de l’Union Européenne et du Royaume Uni. En effet, la Direction générale pour la protection civile et les opérations d’aide humanitaire européennes (ECHO) et le Département du Développement International britannique (UK-DFID) comptent parmi nos principaux partenaires. Grâce à une contribution de 10.7 millions d’euros, ECHO et DFID ont permis au PAM de venir en aide à 566,000 personnes à travers le Niger en 2017, dont plus de 65.000 réfugiés maliens, comme Tishindikit et ses enfants.

WFP/Katia Oslansky

Avec la nourriture qu’elle va recevoir, elle va pouvoir préparer trois repas par jour, du porridge au super-céréal (spécialement conçu pour les besoins des enfants) le matin, au riz avec des haricots, de l’huile et du sel le soir. La viande est rarement au menu pour cette famille qui a perdu son cheptel, essentiel pour produire des produits laitiers et de la viande.

C’est ce que confirment deux autres leaders de la communauté qui prêtaient l’oreille et ont décidé s’asseoir avec elle. « Ce qui nous manque le plus ce sont nos animaux. Nous les avons presque tous perdus lors de la sécheresse » ajoutent Ghaichatou Affiroua et Ghoumar Iguiyaz en pointant les quelques rares bêtes rachitiques qui leur restent.

Ghaichatou Affiroua — WFP/Katia Oslansky
Ghoumar Iguiyaz — WFP/Katia Oslansky

C’est la préoccupation principale de cette communauté qui, à l’instar de beaucoup de nigériens, a beaucoup souffert d’une campagne agro-pastorale très mauvaise en 2016 et 2017. Les conditions météorologiques induites par le changement climatique ont entrainé de graves sécheresses. Au fil de quatre années, ECHO, DFID et le PAM ont pu ensemble construire les bases d’un nouveau type d’assistance qui vise à rendre ces populations plus résistantes et résilientes grâce à des activités multiples de sensibilisation et de renforcement de capacités. Ensemble, nous avons pu accompagner leur adaptation à ces nouvelles conditions de vie.

WFP/Katia Oslansky

« Avant j’avais des chèvres et un mouton » explique Tishindikit « il ne me reste que trois chèvres qui ne produisent plus de lait et ne peuvent pas être consommées pour leur viande ». Elle en a échangé une un jour contre du tissu pour confectionner des vêtements à ses enfants.

Une lueur éclaire son visage lorsqu’elle évoque ses enfants. Ils sont neuf, cinq filles et quatre garçons. Elle montre fièrement la carte qui lui permet d’accéder à la ration du PAM et qui porte leurs photos. « Ils vont tous à l’école, sauf le petit dernier qui est encore trop jeune » dit-elle.

« Maintenant le Niger est une nouvelle terre d’accueil pour nous sur laquelle nous nous sentons bien. Une communauté s’est reformée à Intikane et la vie a repris son cours. » En tant que mère, ses enfants sont la priorité de Tishindikit « j’espère désormais que nous allons pouvoir rester ici et reprendre une vie normale pour pouvoir élever nos enfants sereinement. Je suis certaine qu’ils pourront faire des études et qu’ils connaitront une vie plus heureuse que la mienne ».

Photos et interviews : Katia Oslansky

WFP/Katia Oslansky

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