Transferts d’espèces dans un camp de réfugiés au Tchad : la liberté de choisir
Le camp de réfugiés de Kerfi, situé dans la région de Sila, dans l’est du Tchad, à près de 2 heures de voiture de Goz-Beida, accueille plus de 1 300 réfugiés, la plupart venus du Soudan. Seuls un petit nombre d’entre eux viennent de République Centrafricaine. Le camp a été établi ici en 2014 pour garder les réfugiés à l’écart de la frontière soudanaise. Beaucoup d’entre eux ont fui le Soudan il y a plus de 10 ans.
Durant la saison des pluies, la route vers le camp est impratiquable. Les camions du Programme Alimentaire Mondial ne peuvent pas l’emprunter. La zone située au-delà de cette rivière sera inaccessible pour les prochains mois.
C’est l’une des raisons pour lesquelles le PAM s’engage à développer, au Tchad et dans beaucoup d’autres pays, un moyen plus flexible d’aider les populations: des transferts d’espèces.
Dans le camp de Kerfi, la première distribution de bons d’achat a eu lieu au début de l’année 2017. 410 ménages, qui représentent 1 363 habitants, sont concernés: en échange de ce bon, qui vaut 6 000 francs CFA, les hommes et les femmes qui se sont inscrits au préalable peuvent choisir les produits qu’ils veulent.
Mustapha Amour Ahmat, l’un des premiers à être servi, a un sourire sur son visage: “Lorsque le PAM a commencé à parler de cette nouvelle aide, j’étais, comme beaucoup d’autres, réticent. Mais au final, je crois que ce procédé est vraiment très bénéfique.”
Ce sentiment est partagé par Kada Ahmat Mahamat. Au Soudan, elle était professeur: dans le camp, elle enseigne parfois, et lors des distributions, elle est bénévole et s’assure que tout se passe bien. “C’est très agréable de pouvoir avoir le choix. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais l’atmosphère est différente par rapport à une distribution classique: c’est un peu comme être au marché.”
Mis à part les produits locaux tels que les céréales (sorghum), les haricots et l’huile de cacachuète, d’autres produits comme le sucre et le sel sont importés du Soudan. Mahamat Oumar fait partie des marchands qui ont été sélectionnés pour vendre leur marchandise. Il vit dans le village voisin de Kergi avec ses 4 femmes et 16 enfants: “C’est une très bonne initiative du PAM. Quand la distribution est terminée et que tout le monde est servi, nous comptons les bons et après vérification avec les équipes du PAM et Tigo (l’opérateur téléphonique partenaire du PAM), notre compte mobile est crédité.”
Le site de distribution n’est pas loin du refuge d’Hawai Yaya Issak. Elle a reçu une ration d’un mois pour un ménage de 3 personnes. Les conditions de vie sont difficiles mais elle parvient à les améliorer en vendant des donuts. Son bébé sur le dos, elle a hâte de piler les céréales qu’elle a reçues.
“ Grâce à l’aide reçue aujourd’hui, je serai capable de nourrir ma famille durant un peu moins d’un mois. Je pense que je vais préparer des patties, du porridge ou du boule (des plats traditionnels).”
Ce jour-là, le montant des transactions a dépassé les 7 millions de francs CFA. Une contribution indéniable à l’économie locale.
Les opérations du Programme Alimentaire Mondiale dans le monde sont possibles grâce au soutien financier des donateurs. Parmi eux, ECHO (European Civil Protection and Humanitarian Aid Operations), un des donateurs principaux au Tchad. Le soutien d’ECHO est essentiel pour s’assurer que l’aide atteigne les plus vulnérables. L’aide via les bons d’achat à Kerfi et à Djabal, qui profite à plus de 20 000 réfugiés, a été financée par les contributions d’ECHO.
Photos et texte: PAM/Nathalie Magnien
Initialement publié sur insight.wfp.org le 13 novembre 2017.
