10 prédictions pour les FinTech en 2018

Yeeld
Yeeld
7 min readDec 14, 2017

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Henri Arslanian est le responsable FinTech & RegTech pour la Chine/HK chez PwC. Il est également professeur à l’université de Hong Kong où il enseigne l’entrepreneuriat en finance ainsi que le premier cours universitaire sur les FinTech en Asie.

​Henri Arslanian est également un speaker du TEDx et un auteur qui a publié plusieurs ouvrages. Il a 325,000 followers sur LinkedIn followers.

Nous vous présentons ici ses prévisions pour l’année 2018.

1 — Bitcoin et crypto-monnaies : les investisseurs institutionnels arrivent

Beaucoup de records ont été battus en 2017 avec le Bitcoin et les crypto-monnaies. Elles n’ont pas seulement atteint des records de valorisation. Elles ont aussi généré des niveaux d’intérêt du grand public jamais vue. On peut s’attendre à ce que cela continue en 2018, avec potentiellement des investisseurs institutionnels qui annonceraient des investissements dans ce secteur ou lanceraient des fonds dédiés aux crypto-monnaies. On s’attend également à ce que les intermédiaires habituels, brokers et banques, entrent sur ce marché.

Soyons également attentifs aux innovations dans la distribution de ces monnaies : malgré un concept révolutionnaire, il n’est pas encore aisé d’investir dans les cryptos. Et le stockage sécurisé de ses clés privées nécessite beaucoup d’expérience. Par exemple, alors que vous pouvez toujours retrouver l’accès à vos comptes bancaires si vous perdez vos identifiants, vos crypto-monnaies sont perdus pour toujours si vous perdez vos clés !

Avec l’explosion des crypto-monnaies et notamment de Bitcoin, de nouveaux acteurs comme des brokers, des banques ou des investisseurs institutionnels souhaiteront entrer sur le marché.

2 — Crypto monnaies, bientôt régulées et taxées par les états

Beaucoup de régulateurs ont jusqu’ici adopté une approche pratique et équilibrée vis-à-vis des crypto-monnaies. Mais ils ont bien fait comprendre qu’ils ne laisseraient pas passer les abus. Le rapport d’enquête de la SEC sur DAO en est un bon exemple. Cependant, il faut s’attendre à des actions bien plus retentissantes d’intervention des régulateurs dans le cas des ICO sauvages dans le but de faire des exemples.

Et attendez-vous à ce que les autorités fiscales soient également plus actives, vue l’envolée des prix du Bitcoin. La récente requête de l’IRS aux Etats-Unis pour obtenir les noms des détenteurs de compte chez une des grandes plateformes d’échange américaines de crypto-monnaies est une indication de la tendance à venir.

3 — ICO (Initial Coin Offering) l’émergence d’une nouvelle pratique

Les ICO ont fait couler beaucoup d’encre dans les médias au cours de l’année 2017 avec plus de USD 3 milliards levés via ce vecteur. Et le schéma a rapidement évolué en partant de modèles faits sur des coins de table vers des modélisations très détaillées élaborées par des équipes expérimentées et professionnelles.

Bien que la frénésie des ICO pourrait se calmer en 2018, notamment en terme de nombre et de montant, il faut s’attendre à ce que cette industrie s’institutionnalise, avec davantage de formalisation des best practices.

4 — Les RegTech en phase de consolidation ?

Les startups adressant des problématiques réglementaires (RegTech) vont continuer à intéresser grandement les institutions financières qui ne veulent pas seulement remplir leurs obligations réglementaires mais aussi réduire sensiblement et efficacement les coûts et risques associés à ces sujets.

Cependant, les longs cycles de vente chez ces institutions vont rester une barrière, en particulier dans la mesure où les départements juridiques sont encore relativement peu familier des RegTech. De plus, le manque d’acteur dominant sur ce segment va nécessairement induire un mouvement de consolidation impliquant l’acquisition de startups RegTech par les fournisseurs habituels de technologie qui ne veulent pas rester à la traîne.

5 — Les banques s’emparent des Fintech : la fin de l’innovation ?

Bien que les équipes innovation ont joué un rôle crucial dans les débuts de la FinTech, quand les banques et les startups apprenaient à travailler ensemble, beaucoup ont souffert du manque de budget et ont souvent davantage servi de façade marketing que de réel vecteur de changement au sein de leur organisation.

Avec davantage de connaissance et de compréhension des FinTech par le top management des banques, il faut s’attendre à ce que beaucoup de Fintech traitent directement avec les branches métiers pertinentes sans passer par les fourches caudines des équipes innovations. En plus de faire gagner aux FinTech du temps et de l’énergie, cela poursuivra le mouvement d’intégration de l’innovation comme état d’esprit dans l’organisation entière plutôt que de la limiter aux équipes innovations. Plus facile à dire qu’à faire !

6 — SupTech, dites bonjour aux régulateurs à la pointe de la technologie ?

Supervisory Technology, ou SupTech, est le fait pour le régulateur d’utiliser des nouvelles technologies dans le but de rendre plus efficace son rôle de supervision et de rendre moins lourd son fardeau lié au règles de conformité. Contrairement à ce que beaucoup pourraient penser, de nombreux régulateurs sont déjà en train d’expérimenter ces sujets avec des outils puissants d’analyse de données et d’intelligence artificielle, non seulement pour détecter des manipulations de marché mais aussi pour traiter les milliers de déclarations réglementaires reçues chaque mois.

Il faut s’attendre à ce que les principaux régulateurs continuent d’agir en pionnier dans ce secteur. Par exemple, le Monetary Authority of Singapore cherche à utiliser des formulaires capable d’être lus par des machines pour les reporting réglementaires et réorganise complètement son système de collecte d’information permettant même aux sociétés financières de rembarrer le régulateur s’il demande deux fois la même information.

7 — Ouverture des données bancaires, l’agrégation des données bancaires via les FinTech ?

Les discussions concernant l’ouverture des données bancaires et la mise en place d’API par les banques vont continuer d’être dans les priorités des FinTech en 2018, encouragées par les initiatives réglementaires comme la DSP2 en Europe ou le cadre Open API annoncé par le régulateur à HongKong.

Alors que beaucoup s’accordent à dire que l’ouverture des données bancaires est le chemin que prend l’industrie financière, il sera intéressant de voir comment les banques traditionnelles vont se positionner en 2018 et les progrès que vont faire les grandes sociétés de la tech. Dans un monde de données bancaires ouvertes, le client fera-t-il davantage confiance à une société technologique ou à une banque pour gérer son interface bancaire principale ? La question reste ouverte.

8 — La voix comme interface utilisateur, Alexa est-elle votre nouvelle banquière ?

Bien que le focus soit toujours sur le mobile, la voix comme interface utilisateur devient de plus en plus acceptée et disponible. Les assistants personnels réagissant à la voix comme Echo d’Amazon ou Google Home, ou encore le Baidu de Xiaoyu et le Genie d’Alibaba en Asie, deviennent toujours plus présents dans notre vie quotidienne, avec des études prédisant même une majorité de ménage américain qui en seront équipés d’ici 2022.

Comme c’était le cas avec les chatbot ces dernières années, il faut s’attendre à ce que les sociétés financières continuent d’expérimenter la façon d’intégrer ces solutions dans leur offre client. Bien qu’il y ait encore des problèmes concernant la sécurité et la confidentialité des données, c’est un secteur qui semble prometteur. Alexa pourra-t-elle devenir votre nouvelle banquière ?

9 — Arbitrage chez les FinTech : concevoir à l’Ouest et vendre à l’Est ?

L’Asie est généralement reconnue comme le leader mondial de la FinTech B2C, principalement en raison de l’avance des grands BAT chinois (Baidu, Ant Financial, Tencent) sur la façon de fournir des services au grand public. Mais l’Asie continue aussi d’émerger en tant que leader de la FinTech B2B, pas nécessairement d’un point de vue innovation mais plutôt en terme d’adoption et d’intégration.

Les sociétés financières en Asie sont généralement très désireuses de tester de nouvelles solutions de par la nature de leur clientèle qui est relativement friande de nouvelles technologies et assez exigeante. La plupart des sociétés financières là-bas, ainsi que les branches asiatiques de banques internationales, jouissent maintenant d’une certaine autonomie vis-à-vis des innovations qu’elles peuvent implémenter. Et ce pourrait être l’occasion pour les FinTech avec un focus B2B de développer leur R&D à l’Ouest et de la déployer en Asie, en utilisant des lieux comme Hong Kong ou Singapore comme tremplin.

10 — Fraude et cybersécurité, évitons les brebis galeuses et les Black Swans

L’industrie des FinTech continue de croitre malgré de nombreux obstacles. L’un des plus grand défis, pourraient être un incident majeur, comme une cyberattaque dans laquelle des données sensibles de clients seraient volées. Ou bien un cas de fraude flagrante qui pourrait largement décrédibiliser le bon à priori que les banques et le grand public ont envers les FinTech. L’écosystème du Bitcoin, par exemple, a largement souffert du scandal Mt. Gox en 2014, qui a bien affecté son momentum. Et le secteur prêt entre particulier a été sévèrement impacté par de nombreux scandales et chaine de Ponzi ces dernières années. Plus récemment, des cyber-attaques de banques ont non seulement continué mais ont aussi visé de jeunes ICO qui ont potentiellement des infrastructures moins sécurisées.

Pour que l’ensemble de l’industrie FinTech continue de prospérer, il sera important de s’assurer que tout le monde opère à un niveau de professionnalisme, d’intégrité et de transparence proche de celui d’une institution traditionnelle et que toutes les précautions soient prises pour éviter tout événement imprévu (autant que faire ce peu !).

L’article original est ici

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