MVP, le processus d’apprentissage par la preuve…

Karine Sabatier
LesEclaireurs
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4 min readDec 12, 2019

Le Minimum Viable Product est un concept souvent mal interprété du Lean Startup. Pour comprendre ce qu’il recouvre vraiment il faut revenir à l’essence de la méthode : Lean Startup a été conçue pour aider les porteurs de projets à APPRENDRE avant de manquer de ressources.

L’état d’esprit de la méthode incite à générer, de manière itérative et incrémentale, des apprentissages par l’action et la preuve sur le Business Model du projet (et pas simplement sur la solution technique). Ceci afin de prendre les meilleures décisions dans un monde complexe et incertain.

Le MVP est un processus et non un produit

Le schéma ci-dessus de Henrik Kniberg, tant partagé sur le web, montre clairement cette notion de processus itératif et incrémental : Henrik ne s’est pas arrêté au skateboard mais a bel et bien dessiné une démarche qui fait évoluer le produit de proche en proche, avec au passage, certaines ruptures technologiques.

Seulement voilà, beaucoup s’arrêtent au skateboard. Et lorsqu’on s’arrête au skateboard, on n’a pas fait un MVP mais juste un PoC un peu “cheap”.

Ok mais qu’est-ce que le MVP permet d’apprendre ?

A-t-on a bonne proposition de valeur (pour les bons clients) ?

Pour travailler ses MVP (le pluriel est de mise), il faut déjà être au clair avec sa proposition de valeur (sur le schéma : la voiture). Puis “dégrader” cette proposition de valeur pour trouver un produit (avec un prix donc) minimum qui permet d’exposer cette proposition de valeur au client.

A-t-on le bon modèle de revenus ?

Puisque le MVP est un produit qui a un prix (j’insiste), il permet d’identifier si le modèle de revenus envisagé est viable et colle au contexte client. Par exemple si l’on souhaite que les clients souscrivent à terme à un abonnement, le MVP devrait être un produit disponible par abonnement.

A-t-on les bons canaux ?

Pour mettre son MVP entre les mains des clients et avoir cette boucle de feedback il faut avoir identifié les canaux par lesquels toucher les clients. Amener sa proposition de valeur au travers du MVP à ses clients permet donc aussi de tester ses canaux d’acquisition.

Le pivot est inhérent au MVP

Le feedback génère des apprentissages qui, à leur tour, doivent susciter une réaction et une nouvelle itération : persévérer en améliorant le MVP ou pivoter (modifier les paramètres de mon Business Model).

Le MVP n’est pas un produit mais un processus qui permet d’affiner sa proposition de valeur et son modèle d’affaires en exposant des versions successives du produit aux clients et ce, à moindre effort.

Quand est-ce qu’on arrête ?

Quand on considère avoir atteint le Product Market fit : le moment où, sans beaucoup plus d’effort que d’habitude, le produit se met à ‘décoller’. Il a alors trouvé un/son marché (bien au-delà des Early Adopters) et délivre la proposition de valeur de manière satisfaisante et viable. On l’observe au fait que le produit/service génère tout à coup naturellement plus de traction sans qu’on ait mis beaucoup plus d’énergie à le diffuser.

Alors comment tirer pleinement parti de cette démarche MVP du Lean Startup ?

Pour réellement entrer dans cette démarche itérative et incrémentale il faut

  1. Dégager du temps (beaucoup) et ne pas être drivé par une deadline (sinon vous vous arrêterez au produit que vous aurez su créer à cette date). Les entrepreneurs sont drivés par le product market fit : trouver la traction qu’ils espèrent et qui valide leur modèle économique.
  2. Etre au clair avec sa proposition de valeur (l’outcome). D’abord connaître le résultat à produire à terme — point de départ de la démarche MVP — pour ensuite dégrader l’implémentation et se rapprocher de ce résultat.
  3. Apprendre à trouver de la granularité dans les fonctionnalités et l’exécution (en mode plus ou moins manuel). C’est bien le niveau de fonctionnalité qui doit être dégradé, et non la proposition de valeur qu’on essaie toujours de maximiser.
  4. Etre ok avec les ruptures technologiques entre les MVP successifs. En effet il faut parfois pivoter de manière assez forte techniquement pour monter la prochaine marche vers davantage de traction. On s’enferme trop souvent dans la solution de départ, qu’on va faire évoluer au fil du temps pour la rendre plus sophistiquée, alors que les MVP successifs peuvent véritablement prendre des formes très différentes. On doit donc être ouvert au changement de technologie — et donc d’équipe de réalisation.

Vous l’aurez compris, le MVP n’est ni un prototype ni la version 1 de votre produit. C’est une démarche empirique, itérative et incrémentale qui demande autant de rythme et de discipline que l’agilité. Et beaucoup d’ouverture d’esprit pour tester des pistes très variées tout au long du processus.

Consultante chez Zenika Rennes, j’accompagne les équipes et les dirigeants dans leur conduite de l’innovation et leur transition managériale. Vous pouvez me contacter via karine.sabatier@zenika.com

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Karine Sabatier
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I don't use AI to write about my Product Management and Product Design expertise.