Ces jeux qui parlent d’Histoire : 5 jeux vidéos qui ont l’époque médiévale pour toile de fond

HistOuRien
9 min readSep 29, 2016

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Les jeux vidéos peuvent s’intégrer dans une démarche de “vulgarisation” de l’Histoire (dans le sens positif du terme). En effet, comme je l’avais évoqué dans mon article sur “Comment rendre l’Histoire attractive” une approche dynamique et ludique de l’Histoire peut pousser le public à chercher plus loin que ce qui lui est présenté. C’est pourquoi, nous allons nous intéresser aux jeux qui utilisent l’histoire médiévale comme contexte de jeu et nous allons analyser la manière dont ils présentent cette époque. Cela nous permettra de mettre en exergue leurs points forts et leurs défauts du point de vue de l’historicité.

Il existe de nombreux jeux qui s’inspirent du monde médiéval. Toutefois, la plupart versent dans la fantaisie et il en existe finalement peu qui se penchent vraiment sur le Moyen-Âge historique. Notons aussi que cela n’est évidemment pas garant de qualité tant du point de vue de l’historicité des éléments représentés que du gameplay. Je vous propose ici de nous pencher sur 5 de ces jeux qui placent leur propos à l’époque médiévale. Nous nous pencherons brièvement sur l’expérience que le jeu offre mais nous allons surtout nous concentrer sur l’aspect reconstitutif de l’époque, ce qui témoigne souvent d’un mode de penser l’Histoire médiévale.

1) Age of Empires II, the age of kings :

Ce jeu fut l’un de mes coups de coeur vidéo-ludiques. J’y ai joué étant tout jeune et c’est probablement l’un des vecteurs qui m’ont poussé à m’intéresser plus avant à l’histoire médiévale. C’est un jeu de stratégie développé par Ensemble Studios et Microsoft en 1999 pour la plateforme PC. Dans son mode de jeu “campagne”, il nous permet de diriger des personnages historiques de l’époque médiévale. Ce jeu base essentiellement son gameplay sur la préparation et la gestion des affrontements entre armées. Dans la partie où nous suivons les personnages réels, on voit bien la volonté des développeurs de respecter le niveau d’évolution technologique de l’époque représentée limitant le niveau d’évolution auquel nous avons accès. Toutefois, son arbre de technologie témoigne aussi d’une “facilité scénaristique” que l’on retrouve souvent dans les jeux vidéos, à savoir, l’idée d’évolution linéaire et toujours “positive” de l’Histoire. Dans cet ordre d’idées, les unités du premier âge du jeu sont présentées comme des barbares arriérés tandis que celles du dernier âge d’évolution sont identifiées de manière plus raffinée. Cela témoigne du jugement de valeurs totalement subjectif qui est porté sur les périodes plus anciennes. Concernant cette vision “déterministe” de l’Histoire dans un jeu vidéo, je renvois à la vidéo de Usul “Matière grise et pertes blanches” qui aborde cette question pour Civilisation IV en compagnie d’un historien. Il faut toutefois souligner que cette représentation d’une évolution linéaire au sein même du Moyen Âge permet déjà de donner une image plus nuancée que ce Moyen Âge intemporel et monolithique que l’on peut trouver parfois dans d’autres médias. De plus, respecter à la lettre l’évolution matérielle du temps aurait enlevé toute spontanéité et liberté au joueur. Age of Empires constitue donc un très bon jeu pour commencer à appréhender la période médiévale.

2) Stronghold :

Ce jeu est développé et édité en 2001 par Take-Two Interactive. C’est un jeu de stratégie mais aussi de gestion, en ce sens que, comme Age of Empires, il permet de mener une campagne militaire, dans laquelle il est primordial d’entraîner des troupes pour le combat mais il force aussi le joueur à garder un œil sur les aspects des développements économiques, politiques et judiciaires de la vie civile. De plus, comme un “city builder” il permet aussi de mener des parties qui mettent l’accent sur le développement de votre seigneurie sans nécessairement devoir combattre un ennemi. L’aspect militaire est alors relégué au second plan. Ces deux modes de jeu font aussi partie de deux campagnes différentes. Cela apporte une dimension intéressante à l’approche d’un Moyen Âge de tous les jours, non guerrier. Il faut, cependant, souligner que ce jeu participe à cette fameuse vision d’un Moyen Âge unique et invariable dont je parlais précédemment. En effet, il mélange joyeusement tous les types d’armements ou de technologies au sein d’une période historique indéfinie. Pourtant, le jeu désamorce cette critique en ne plaçant pas son action dans une époque médiévale historique avec de vrais personnages ayant existé et un cadre géographique existant, mais dans un Moyen Âge fictif dépendant plus de notre imaginaire médiéval moderne avec des protagonistes volontairement caricaturaux. Au final, ce jeu permet de s’approcher davantage de notre propre vision fantasmée du Moyen Âge tout en développant les aspects civils.

3) Medieval Total War :

Ce jeu fut publié en 2002 par The Creative Assembly et par Sega pour le PC. Contrairement au jeu précédent, celui-ci va mettre l’accent sur les aspects militaires et stratégiques au Moyen Âge, mettant relativement de côté les aspects de gestion. En effet, Medieval Total War vous plonge principalement dans les batailles médiévales en vous confiant la charge de gérer la tactique et la stratégie. Le mode campagne vous permet de développer votre royaume en conquérant des territoires à la manière d’un “Risk” ou d’un “Diplomacy”. Il vous permet de fabriquer des bâtiments et des troupes militaires afin de faire évoluer vos possessions et de continuer à assujettir le monde. Les batailles de campagne ou de défense peuvent alors être dirigées par vous ou résolues automatiquement par l’ordinateur. Selon le moment où vous décidez de débuter le mode campagne le jeu vous placera dans un contexte géopolitique assez proche de celui de l’époque. La reconstitution des batailles et les stratégies mises en œuvre s’avèrent plutôt proches de la réalité historique. Cependant le jeu pèche par son contexte matériel qui place, encore une fois, des pièces d’armement totalement anachroniques ensemble dans la même action. Oui, certains chevaliers pouvaient hériter de l’armure de leur grand-père mais un écart de 200 ans entre deux équipements sur un même champ de bataille ça semble légèrement hors contexte.

4) Chivalry, Medieval Warfare :

Edité en 2012 par Tom Banner Studio, ce jeu d’action/FPS en ligne vous place dans la peau d’un combattant du Moyen Âge. Son gameplay plutôt dynamique est assez proche de celui d’un “Battlefield” mais avec des armes blanches ou des armes de traits. Ce jeu jouissif permet de faire s’affronter deux “armées” de joueurs pour la destruction de l’équipe adverse ou l’accomplissement de certains objectifs qui permettent de remporter la victoire. Il est plutôt bien fait du point de vue du plaisir que l’on prend à y jouer mais, encore une fois, dans son aspect historique, il rassemble sur un même champ de bataille des équipements d’époques totalement différentes. La reproduction des combats individuels est bien réalisée même si elle ne prend pas en compte dans les dommages causés les pièces d’armure que portent les combattants ou la notion de capture de l’adversaire omniprésente à l’époque médiévale. De plus, le jeu pèche par une vision individualiste de la bataille, comme dans la guerre moderne, alors que le Moyen Âge a davantage connu la force du groupe en formation serrée (comme représenté dans “Medieval Total War”). Cependant, ce mode de combat reste presque impossible à reproduire dans ce genre de jeux qui met en exergue l’héroïsme des personnes qui, par leurs actions individuelles, font triompher l’équipe.

5) Assassin’s Creed 1 :

Fou de Moyen Âge et d’Histoire, je dois admettre que la série des Assassin’s Creed est la raison pour laquelle je me suis décidé à acheter une console nouvelle génération (à l’époque). Le premier opus, développé et sorti par Ubisoft en 2007, se déroule à l’époque de la troisième croisade (fin du XIIe siècle) menée par Philippe Auguste, Frédéric Barberousse et Richard Cœur de Lion contre Saladin. Nous y incarnons le personnage d’Altaïr, membre de la secte des hashashins, un courant dérivé de l’Islam chiite nommé aussi Ismaëlisme. Pour en savoir plus sur l’histoire de la secte des Assassins je vous invite à aller voir la vidéo de Pour la Petite Histoire. Notre héro va être chargé d’assassiner des personnages importants présentés comme faisant partie de l’Ordre du Temple (Templiers) et à l’origine d’un complot visant à soumettre la terre sainte et, à terme le monde entier, à leur autorité. En ce qui concerne la reproduction matérielle et architecturale, le jeu est plutôt respectueux de l’historicité, excepté, encore une fois, dans l’application des attaques en fonction des armures et de certains détails sur lesquels je ne m’attarderai pas. Par contre, un peu comme dans les romans historiques, l’Histoire factuelle et événementielle est, quant à elle totalement pliée pour coller à la narration et au gameplay. En outre, ce premier opus de la série reste considérablement répétitif dans les mécaniques de jeu proposées, ce qui sera correctement rectifié par les développeurs dans les épisodes suivants.

Il faut donc souligner que l’Histoire, et ce compris l’Histoire médiévale, est particulièrement dure à appréhender et, a fortiori, à restituer dans sa complexité politique, économique, sociale, militaire et ce, en gardant à l’esprit le facteur temporel qui rend la chose encore plus brumeuse. Je pense que vouloir à tout prix reproduire l’entièreté de ces éléments dans un jeu vidéo rendrait le gameplay ou le cadre narratif horriblement lourd et fastidieux pour le joueur, ce qui minerait profondément l’aspect “ludique” de l’opus (sauf pour certains oufs guedins). Faire un jeu c’est donc, à un moment donné, faire un choix entre historicité à et jouabilité/compréhensibilité. Pour l’éditeur/développeur il s’agit de trouver l’équilibre entre ces différents éléments afin de s’adresser à la majorité, d’être rentable et de ne pas tomber dans un marché de niche. En effet, le monde du jeu vidéo est un business et il faut faire du bénéfice pour pérenniser son activité. En outre, cela permet de toucher plus de monde et peut-être d’attirer plus de gens vers une démarche de découverte de l’Histoire (même si ça n’est pas l’objectif premier des développeurs). Les jeux vidéos, comme les autres médias non spécifiquement scientifiques, ne doivent évidemment pas être pris comme seul accès à l’Histoire mais comme amorce de l’intérêt pour cette discipline. Malgré leurs défauts, leur approche plus ou moins simpliste, caricaturale ou orientée du monde médiéval, les jeux que nous venons de citer ont permis au grand public de s’intéresser au Moyen Âge parfois superficiellement mais, dans certains cas, plus sérieusement. Par leur approche, ils ont mis l’accent sur différents aspects du monde médiéval et constituent un “premier contact” avec celui-ci. En plus, ces jeux vidéos sont devenus une source qui permet de mieux appréhender notre vision moderne de ce Moyen Âge fantasmé qui continue à vivre en nous.

Que pensez-vous de ces jeux que nous venons de citer? En connaissez-vous d’autres qui vous ont incités à vous pencher davantage sur l’époque médiévale et ce qui l’entoure?

Vous pouvez aussi acquérir ces jeux si vous désirez les tester :

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