Les conseils d’une pro pour réussir la première phase du Design Thinking
Si vous ne vous souvenez plus très bien à quoi correspond la première phase du Design Thinking, (parfois aussi appelée la phase de recherche, de découverte et de compréhension de l’utilisateur), cliquez ici.
Ci-dessous mes extraits préférés de l’épisode 2 du Podcast Les Voix du Design Thinking où j’interview Magdalena Jarvin, Docteur en Sociologie et Business Anthropologist. Dans cet épisode Magdalena Jarvin nous donne ses conseils pour réussir un bon terrain et nous indique comment et pourquoi elle assume sa subjectivité.
Ci-dessous, vous trouverez : les 4 conseils de Magdalena pour réussir la première phase du design thinking, ce qu’elle fait pour casser une dynamique de pouvoir ou de séduction qui commence à s’installer lors des terrains et l’insight majeur qu’elle retrouve sur presque chacun de ses terrains !
NB : En Design Thinking « Le terrain » est un terme utilisé pour parler des interviews et des observations utilisateurs in situ.
LES 4 CONSEILS DE MAGDALENA JARVIN, BUSINESSS ANTHROPOLOGIST, POUR RÉUSSIR LA PREMIÈRE PHASE DU DESIGN THINKING
1. Aller chez les utilisateurs plutôt que de faire des focus groupes
Je pousse beaucoup à aller chez les gens pour qu’ils parlent dans leur milieu naturel. Bien souvent, on peut recueillir, dans le domicile des gens, plein d’informations que ces derniers ne pensent ni à révéler ni à mentionner à l’oral. Évidemment, les gens ne cherchent pas à mentir ou à cacher une information, c’est juste qu’il y a tellement d’évidences invisibles, tellement de pratiques incorporées et d’automatismes qu’on ne pense pas à expliciter ! Le milieu naturel de la personne est un sujet de relance en soi.
2. Vivre l’expérience en tant qu’utilisateur avant de faire le terrain
Dans l’extrait ci-dessous Magdalena Jarvin explique pourquoi elle essaye de vivre l’expérience utilisateur avant de faire le terrain.
Je suis à l’écoute de ce que je ressens et de ce que j’éprouve. Mon expérience peut devenir une boîte à outils de relance. Pendant l’entretien je peux demander : Qu’est- ce que vous êtes en train de faire ? Pourquoi faites vous comme ci et pas comme ça ? Si j’ai fait l’expérience avant, et que je l’ai faite différemment, l’écart entre ce qui m’a paru naturel et ce que la personne fait, devient un sujet de discussion.
L’expérience montre qu’on est différent, et si on ne fait pas pareil c’est qu’il y a une raison et c’est en creusant cette raison ou ces raisons, qu’on touche à des trucs plus profonds comme les valeurs, les croyances, les normes, etc.
3. Impliquer le client dès le début
Ce que j’essaye d’instaurer, et ça il faut le discuter avec le commanditaire, c’est que le client soit d’emblée impliqué sur le terrain. J’aime, autant que possible, amener le client à faire une observation avec moi.
Les résultats d’analyse présentés à un groupe projet qui a participé partiellement au terrain bénéficient d’un accueil et d’une discussion bien supérieurs à ceux qui suivent un Powerpoint même dans l’hypothèse, très optimiste, où ce PowerPoint suscite une écoute attentive pendant 1h 30, ce qui est loin d’être garanti !
4. Surtout Ne PAS croire en sa neutralité
J’étais dans cette croyance que plus j’essayais de jouer la neutralité, moins j’exprimais qui j’étais, le moins j’impacterai la situation. C’est complètement stupide, ce n’est pas parce qu’on dit hum hum, hum hum pendant l’entretien et qu’on ne parle pas de soi, qu’on ne provoque pas une interprétation ou une relation vivante !
Je m’autorise beaucoup plus qu’avant à parler dans les entretiens et à jouer la carte du : Ah bon ? Mais moi, quand j’ai vu ça, j’ai essayé de … Moi j’ai fait comme ci, la dernière fois que j’ai pris le métro, je me suis dit que…. Ce sont là des techniques pour relancer le débat. Parfois j’invente des trucs qui ne sont pas arrivés, mais bon peu importe. Pas que toutes les méthodes soient autorisées, mais tant qu’une méthode est consciemment utilisée pour relancer et tester les idées elle est valide. L’erreur que je faisais à mes débuts était de croire que tant que je n’exprimais rien de personnel je n’altérais pas la situation plus que ça.
LES TECHNIQUES QUE MAGDALENA UTILISE POUR CASSER UNE DYNAMIQUE DE POUVOIR OU DE SÉDUCTION LORS DES INTERVIEWS
Magdalena Jarvin parle des techniques qu’elle a développées pour « gérer les relations de pouvoir ou de séduction dans les entretiens où l’autre joue. »
Parler d’autre chose, changer de ton, changer de posture
Ça peut être de parler d’autre chose, ça peut être de changer de ton justement. Il faut une cassure par exemple, poser le crayon et le papier et changer de posture, se ré-asseoir autrement, se pencher en arrière. Moi, en entretien, je suis assise et j’écris penchée en avant, si je pose mon stylo et me mets en arrière, je me mets en mode passif. Ç’est une façon très basique, dans le sens de très physique, physiologique, de changer la dynamique.
Réexpliquer le but de l’étude :
Si je sens que l’autre est sur la réserve — ce qui arrive très souvent, ou que l’autre ne parle pas et fait hum hum ou se contente de dire oui, non — là je trouve l’excuse pour reprendre toute la démarche et expliquer pourquoi je fais l’étude pour qu’il se sente plus investi dans la mission.
L’INSIGHT MAJEUR QUE MAGDALENA RETROUVE SUR PRESQUE TOUS LES TERRAINS
Le premier insight est tout simple, il consiste à rappeler au commanditaire que son produit ou son service, n’est pas central dans la vie des gens. Il y a très peu de choses qui sont essentielles à la vie quotidienne, à part juste la survie. La survie, au stress, aux peurs et aux contraintes. Ça peut paraître déprimant de dire ça mais ce n’est pas forcément pessimiste, c’est juste qu’on vit sous contrainte.
C’était une sélection de mes extraits préférés de ma conversation avec Magdalena Jarvin ! Si vous avez aimé cet article, écoutez l’interview complet ici sur Les Voix du Design Thinking.
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Inès Béatrix
