COVID-19 et quartiers populaires : rester en veille

Laurent Barelier
4 min readApr 9, 2020

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Un constat s’est rapidement imposé : la pandémie et ses conséquences frappe plus durement les quartiers populaires. Comme dans bien d’autres domaines, la crise sanitaire semble amplifier des inégalités pré-existantes. Les défaillances des dispositifs de droit commun sont claires. Comment en est-on arrivés là et quelles réponses apporter à ces quartiers très hétérogènes ? Les équipes d’Auxilia et de Chronos, qui travaillent sur de nombreux projets dans les quartiers dits “politiques de la ville”, proposera une revue de presse régulière sur ce sujet.

Retrouvez le reste de notre veille ici.

Semaine du 6 avril — Le temps d’un constat : une injustice criante

Cette semaine, les articles sélectionnées reviennent sur un constat majeur : les quartiers populaires sont plus durement touchés que les autres par le COVID-19, on ne peut même pas parler de « double peine » tant les inégalités (préexistantes à la pandémie) sont nombreuses, et se renforcent les unes avec les autres. On manque encore de don-nées précises, mais les témoignages des professionnel.le.s et des habitant.e.s sont déjà nombreux. Déjà, la solidarité s’organise : nous tâcherons de la documenter elle aussi dans les prochaines éditions, sans idéalisme naïf.

Télérama — Pour les jeunes des quartiers populaires, c’est difficile de rester confiné

Avoir 16 ans, vivre dans un petit appartement, avec une famille nombreuse … Pour les plus jeunes, le confinement est particulièrement difficile. Mais les jeunes sont aussi parmi les premiers à avoir organisé la solidarité dans les quartiers, notamment en se portant volontaires pour porter les courses pour les personnes âgées.

Mediapart — Quartiers populaires, la double peine

A retenir :
> Dès le départ, l’épidémie s’est construire sur des biais racistes, en particulier envers les asiatiques, biais qui continuent de frapper les quartiers populaires,

> Des ressources s’inventent, notamment une application avec des vidéos en plusieurs langues et des outils pour faciliter l’entraide alimentaire, sur https://enmodeconfine.org/ (en cours de construction),

> Femmes précaires, personnes âgées isolées victimes de maladies chroniques … sont les profils les plus « à risque » dans ces quartiers.

Le Monde — Coronavirus : dans les quartiers populaires, l’incompréhension face aux mesures de confinement

Quelques explications aux difficultés du confinement dans les quartiers populaires : exiguïté des logements, population jeune, difficulté d’accès au numérique, et il faudrait rajouter la forte présence d’emplois impossibles à réaliser en télétravail. Les travailleurs sociaux s’adaptent en recourant aux outils numériques réellement utilisés par les habitants.

« Les adolescents et les jeunes adultes sont le public le plus difficile à confiner », observe Christelle Leroy, directrice de deux centres sociaux, Belencontre et Phalempins, à Tourcoing (Nord).
« Le médiateur privilégie les contacts par le biais des réseaux sociaux et martèle son message sur Facebook, Snapchat, Instagram et Twitter : « Vous n’avez peut-être pas de symptômes mais vous êtes des vecteurs de transmission. »
« Ils sont très nombreux, illettrés ou éloignés du numérique, à ne pas savoir ou ne pas pouvoir remplir les attestations », confirme Florian Soudain, coordinateur des Centres sociaux connectés de la métropole lilloise.

The New York Times — A Month of Coronavirus in New York City: See the Hardest-Hit Areas

A New York, les données publiques de santé montrent bien que ce sont les quartiers les plus pauvres qui sont les plus affectés par le coronavirus, notamment parce que les famille y sont souvent “nombreuses” et confinées dans de petits appartements. Pour l’heure, difficile de trouver des données aussi précises en France.

Challenges — Face au coronavirus, système D et solidarité dans une cité marseillaise

Chronique de la vie au temps du coronavirus dans une des cités les plus pauvres de Marseille, où l’on voit bien que même avant la crise, les habitant.e.s n’avaient pas accès aux biens et services de base : la crise ne vient qu’amplifier une situation pré-existante, avec des effets très concrets (perte de revenus, déscolarisation …). Mais aussi des phénomènes de solidarité — en l’absence de réponse concrète des pouvoirs publics.

“ Or, certains enfants qui avaient la quasi-gratuité de la cantine sont aujourd’hui privés d’un repas; les parents qui pour beaucoup arrondissent leur fin de mois par des petits boulots au noir ne peuvent plus le faire et les prix flambent, sans compter la promiscuité et les devoirs à la maison”. Michèle Cros, pédopsychiatre

Le marché de Noailles à Marseille. Photo : Laurent

Chez soi ou chez nous ? Matthias Lecoq

Comment “rester chez nous” plutôt que de “rester chez soi” ? Si l’on ne peut pas sortir, n’est-ce pas parce que l’on nous a privé, nous piétons et cyclistes, d’espaces suffisants pour être “ensemble à distance” ? et comment rendre possible l’organisation citoyenne dans le respect des mesures de protection ? L’auteur imagine des “zones autonomes temporaires” pour continuer à se rencontrer sans se mettre en danger.

« Peut-être d’abord comme des zones autonomes temporaires qui permettraient, sous la contrainte des 2 mètres et des réunions à moins de 5 personnes, de repenser notre fonctionnement et d’expérimenter sous la contrainte sanitaire. » Matthias Lecoq

Le compte Twitter à suivre ?

Taha Bouhafs

@T_bouhafs
Un journaliste de terrain qui couvre les contestations sociales, les violences policières et la vie dans les quartiers populaires.

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Laurent Barelier

Travaille chez Auxilia et Chronos / veille sur quartiers populaires & COVID19