№2. Quel rôle peuvent jouer les transferts d’espèces dans la prévention de la malnutrition ?

Carla Lopez
The Airbel Impact Lab
5 min readAug 20, 2018

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En tant que concepteurs et exécutants des interventions conçues pour soutenir les personnes vulnérables, nous essayons en permanence de comprendre la valeur (et le coût) de nos efforts par rapport à une référence, qui consiste simplement à donner de l’argent à des gens.

Bien que ce ne soit pas une étude expérimentale de comparaison des dispositifs d’intervention, il est toujours utile de comprendre comment les gens priorisent de l’utilisation des espèces sans condition et comment les différentes composantes interagissent entre elles. Pour cette raison, nous prévoyons un prototype légèrement différent pour chacune des 3 communautés. Toutes les communautés recevront un transfert d’espèces sans condition mais la Communauté A ne recevra que des espèces.

Avant de commencer, lisez notre premier article afin de connaître le contexte et les raisons pour lesquelles nous élaborons trois prototypes différents.

Voyons cela en détails.

Pourquoi des transferts d’espèces sans condition ?

Plusieurs raisons nous font choisir cette voie :

  1. Les remises d’espèces sans condition aux femmes, qui sont majoritairement chargées de prendre soin des enfants, leur permettent de les nourrir et de cuisiner, d’investir dans ce qui à leur avis est le plus important pour leurs foyers.
  2. Il est possible que l’argent soit le premier frein à l’adoption par les foyers de mesures de prévention de la malnutrition aiguë sévère (MAS). Toute programmation supplémentaire, par conséquent, devra apporter une valeur supérieure à celle du simple transfert d’espèces.
  3. Les transferts d’espèces sous condition impliquent des mécanismes de vérification qui ne sont pas toujours faciles à mettre en place (comment pouvez-vous vérifier de façon empirique l’allaitement exclusif, par exemple ?).

Que se passera-t-il pendant les 5 mois du prototype ?

Le prototype commencera au moment de la récolte lorsque les familles sont en mesure de vendre leurs récoltes et de payer leurs dettes. La valeur des transferts d’espèces augmentera au fur et à mesure que nous nous éloignerons du moment de la récolte ; nous avons donc choisi une durée de prototype inhabituellement longue afin de voir comment l’utilisation des espèces changera dans le temps.

Combien d’argent les personnes vont-elles recevoir et à quelle fréquence ?

Nous avons d’abord consulté une documentation bibliographique afin de répondre à cette question. Cependant, les concepts d’études portant sur la façon dont l’argent affecte les résultats nutritionnels varient grandement en termes de montant des espèces, de fréquence des transferts, de durée du programme de remise des espèces, de critères d’éligibilité et d’indicateur de nutrition (amaigrissement ou retard de croissance, différents groupes d’âge). Ce degré de variation fait que les bonnes pratiques sont difficiles à évaluer.

Il existe plusieurs façons dont nous pouvons définir le montant et la fréquence les plus adaptés aux foyers. Le total des transferts d’espèces remis à chaque foyer participant sera probablement un pourcentage de ses dépenses mensuelles en nourriture. Nous déterminerons ces montants lors de la consultation des chefs de la communauté et de nos collègues dans le pays. La fréquence des transferts d’espèces peut être présentée sous forme de choix aux foyers. Nous pouvons les suivre et voir s’ils sont satisfaits de leur choix dans le temps et aussi comparer l’utilisation de l’argent entre les foyers qui ont choisi des fréquences de transferts d’espèces différentes.

Des petits exploitants de Tanzanie ont exprimé leur préférence pour des versements uniques, qu’ils peuvent consacrer à l’achat d’intrants agricoles, comme des fertilisants, des graines de meilleure qualité, ou des outils agricoles. Si nous espérons que l’argent sera utilisé par exemple pour diversifier l’alimentation des enfants ou acheter du savon pour se laver les mains, les intrants agricoles peuvent permettre d’obtenir des rendements plus élevés et par conséquent une plus grande sécurité alimentaire pour les foyers, ce qui réduit à son tour le risque de MAS.

Qui recevra de l’argent ?

Dans chacune des 3 communautés dans lesquelles nous allons travailler, les chefs de communauté identifieront 20 foyers comprenant une femme enceinte et/ou des personnes prenant soin d’enfants de moins 3 ans, pour qu’ils participent au prototype. Comme notre objectif consiste à comprendre les préférences et la faisabilité, nous en apprenons plus lorsque nous travaillons en profondeur avec un petit nombre de femmes qu’en ayant des interactions superficielles avec beaucoup de gens. Si et quand nous aurons atteint la phase de pilotage, nous mesurerons l’impact de façon plus rigoureuse, sur un nombre plus grand de participants.

Comment saurez-vous ce que les gens vont faire de l’argent ?

Nous voulons utiliser des outils qui nous permettent à la fois de saisir la diversité de ce que chaque femme peut faire de son argent, mais aussi de comprendre les tendances de ses dépenses dans le temps. Notre plan de prototype nécessite un ou deux mois de préparation intégrée afin d’affiner les outils et de mettre en place notre logistique avant de nous mettre en action au moment de la récolte.

Pendant cette phase de préparation du prototype, nous présenterons quelques jeux et outils que notre équipe de contact de la communauté utilisera avec les 20 femmes de la Communauté A qui ont été choisies pour recevoir de l’argent. Nous souhaitons comprendre les catégories actuelles de dépenses des foyers et leur fréquence (par ex. la nourriture peut être une dépense quotidienne ou hebdomadaire tandis que les frais scolaires et les intrants agricoles ont un coût plus important mais bien moins régulier) ; À partir de ces catégories de coûts nous développerons des hypothèses sur la façon dont un revenu plus important peut modifier les dépenses d’une façon qui peut avoir des conséquences à court ou long terme sur la nutrition. Si nous ne savons pas encore à quoi vont ressembler les outils, nous savons qu’ils seront interactifs et auront pour but de ne pas prendre plus de 30 minutes du temps de chaque femme.

Comment l’argent sera-t-il distribué ?

La façon la plus simple de remettre de l’argent est le transfert d’argent par téléphone mobile vers le téléphone d’un participant. Cela évite qu’un membre du personnel de l’IRC manipule de grosses sommes d’argent ou fasse un long trajet pour remettre l’argent en personne. Cependant, l’argent par téléphone mobile n’est possible que si les femmes ont des téléphones et là où il y a un réseau. Comme cela n’est pas le cas au Niger, nous travaillerons par l’intermédiaire d’institutions de microfinance pour remettre les espèces.

Ceci fait partie d’une série décrivant un prototype de prévention de la malnutrition aiguë sévère au Niger. Nous pensons faire le lancement début juillet et nous attendons votre avis dans les commentaires ci-dessous ou par e-mail à airbel@rescue.org.

À venir : L’identification et l’optimisation des pratiques positives

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Carla Lopez
The Airbel Impact Lab

Health Design Innovation Lead for the Airbel Impact Lab at the International Rescue Committee