LECTURES ANTHROPOCENES #2022

berenice gagne
Anthropocene 2050
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33 min readDec 8, 2022

Sélection

“Pilares” (2014) © Ishmael Randall Weeks

Retrouvez les veilles anthropocènes mensuelles de l’Ecole urbaine de Lyon : toute l’actualité du changement global pour comprendre ce qui nous arrive et le monde qui vient. Découvrez également les veilles thématiques sur les limites à la croissance, l’eau, les nouveaux outils économiques et les sols urbains ainsi que des chroniques originales. Et bien sûr, ne manquez pas la veille spéciale sur l’œuvre de Bruno Latour — anthropologue, sociologue, philosophe des sciences et des techniques — mort le 9 octobre dernier.

Encore plus d’articles et de références au fil de l’eau sur mes comptes Twitter et Instagram.

AGRICULTURE & ALIMENTATION

Bertrand HERVIEU, François PURSEIGLE, Une agriculture sans agriculteur (Presses de Sciences-Po, 2022).

« La France se vit toujours comme un pays de petites et moyennes exploitations agricoles autonomes. Ce modèle, voulu de longue date et renforcé durant la période de modernisation de l’après-guerre, vole en éclats, laissant place à des formes nouvelles et très diverses d’organisation du travail et du capital agricoles. L’agriculture est devenue un sujet de débat dont chacun s’empare en ignorant la révolution indicible en cours. Cet ouvrage s’applique à la mettre en mots afin de permettre une réflexion sur l’avenir qui ne laisse pas de côté les principaux intéressés ».

Dusan KAZIC, Quand les plantes n’en font qu’à leur tête. Concevoir un monde sans production ni économie (La Découverte, 2022).

L’anthropologue « nous initie aux côtés des paysans et paysannes à un monde où se tissent des liens qui donnent naissance à des familles multispécifiques. Il ne s’agit pas d’arrêter de nourrir les humains mais de commencer à penser une agriculture au travers des rapports coévolutifs que les humains entretiennent avec les plantes, une agriculture des relations. Dans l’héritage de Pierre Clastres, James Scott et Donna Haraway, l’auteur propose de rompre avec le paradigme de la production issu du savoir économique, qui mène à la destruction des paysans et de cette Terre, pour concevoir une agriculture et plus largement un monde sans production et sans économie ».

LES GRENIERS D’ABONDANCE, Qui veille au grain ? Sécurité alimentaire : une affaire d’Etat (Editions Yves Michel, 2022).

« Une stratégie politique pour garantir notre sécurité alimentaire dans un monde sous tension : l’intervention de l’État est en effet nécessaire pour lever les obstacles structurels qui dépassent l’échelon territorial ».

ARTS & CULTURE

Danièle MÉAUX, Photographie contemporaine et anthropocène (Filigranes Editions, 2022).

« L’«anthropocène» signe une crise civilisationnelle profonde. Les assises, sur lesquelles les sociétés occidentales se sont senties pendant longtemps solidement établies, paraissent désormais précaires. La confiance accordée au progrès technique et aux acquisitions scientifiques est ébranlée. Nombreuses sont les œuvres photographiques contemporaines qui s’attellent à problématiser et à penser les évolutions de nos modes de vie, de nos valeurs, de nos relations au vivant, au temps ou au progrès. Il s’agit dans cet ouvrage d’analyser la façon dont ces travaux donnent à réfléchir, s’inscrivant de façon féconde dans le débat public.

Liste des photographes présents : Peter Fischli & David Weiss, Mishka Henner, SMITH, Ignacio Acosta, Mathieu Asselin, Richard Misrach, Yves Marchand & Romain Meffre, Carlos Ayesta & Guillaume Bression, Guillaume Herbaut, Robert Polidori, Céline Clanet, Françoais Delderrière, Petra Stavast, Jan Stradtmann, Marina Caneve, Céline Duval, Batia Suter, Arno Gisinger, Catherine Poncin, Agnès Geoffray, Jan Fontcuberta, Mathieu Pernot, Jean-Marie Donat, Bernard Plossu, Jean-Luc Mylayne, Michel Séméniako, Thomas Struth, Jürgen Nefzger, Bertrand Stofleth, Julien Guinand, Joel Sternfeld, Éric Dessert, Thierry Girard, Beatrix von Conta, Brigitte Bauer, Guillaume Bonnel, Marc Deneyer, Anne-Marie Filaire, Olivier de Sépibus, Geoffroy Mathieu, Ianna Andréadis, Bruno Goosse ».

Bénédicte RAMADE, Vers un art anthropocène. L’art écologique américain pour prototype (Les presses du réel, 2022).

« Comment un mouvement artistique entièrement consacré à l’écologie et apparu aux États-Unis au cours des années 1960 a-t-il pu passer pratiquement inaperçu jusqu’à aujourd’hui ? Telle est la question au cœur de cet ouvrage qui retrace les conditions d’émergence et le développement de corpus entièrement dédiés à la cause environnementale ».

BD - ROMANS GRAPHIQUES

Philippe DESCOLA, Alessandro PIGNOCCHI, Ethnographies des mondes à venir (Seuil, 2022).

« Au cours d’une conversation très libre, Alessandro Pignocchi, auteur de BD écologiste, invite Philippe Descola, professeur au Collège de France, à refaire le monde. En puisant son inspiration dans les données anthropologiques, les luttes territoriales et les combats autochtones, ce livre esquisse la perspective d’une société hybride qui verrait s’articuler des structures étatiques et des territoires autonomes dans un foisonnement hétérogène de modes d’organisation sociale, de manières d’habiter et de cohabiter ».

Joël GUIOT, MACHA, Voyage en anthropocène (Le Bord de l’Eau, 2022).

« Elpise, une jeune fille inquiète pour son futur, s’interroge sur le changement climatique et ses conséquences ». Avec son grand père paléoclimatologue, « elle embarque pour un voyage à travers le temps et l’espace, à la découverte… de l’Anthropocène ! Au cours de cette expédition initiatique, les femmes, les hommes et les territoires lui réserveront de nombreuses surprises certaines négatives et d’autres positives pour l’aider à envisager, et peut être proposer, un futur désirable ».

“Pilares” (2015) © Ishmael Randall Weeks

BIODIVERSITE

Rob DUNN, Une histoire naturelle du futur. Ce que les lois de la biologie nous disent de l’avenir de l’espèce humaine (La Découverte, 2022). Traduction par Christophe Jaquet.

« Le biologiste Rob Dunn affirme que nous avons beau nous considérer comme les maîtres de la vie, nous sommes au contraire à sa merci. Dans l’évolution de la résistance aux antibiotiques, la capacité de la sélection naturelle à créer la biodiversité, et même la vie surprenante du métro de Londres, Dunn trouve des lois de la vie qu’aucune activité humaine ne peut annuler. L’épanouissement futur de la vie n’est pas remis en question. Le nôtre l’est ».

Olivier HAMANT, La Troisième voie du vivant (Odile Jacob, 2022).

« Le culte de la performance conduit notre société à mettre en avant les valeurs de la réussite et de l’optimisation permanente dans tous les domaines. La lenteur, la redondance, l’aléatoire sont alors perçus négativement. Olivier Hamant, dans ce livre, tente de les réhabiliter en s’appuyant sur sa connaissance des processus du vivant. Que nous apprennent les sciences de la vie ? S’il existe bien des mécanismes biologiques remarquablement efficaces, des progrès récents mettent surtout en avant le rôle fondamental des erreurs, des lenteurs, des incohérences dans la construction et la robustesse du monde naturel. Le vivant serait-il alors sous-optimal ? En quoi une sous-optimalité d’inspiration biologique peut-elle constituer un contre-modèle au credo de la performance et du contrôle dans l’Anthropocène? ».

Kinji IMANISHI, La Liberté dans l’évolution. Le vivant comme sujet (Wildproject, 2022). Traduction par Augustin Berque.

« Pour sortir de la vision mécanique moderne de la nature, il faut aussi sortir d’une théorie de l’évolution qui repose sur le hasard (des mutations génétiques) et la nécessité (de la sélection naturelle). L’évolution repose pour Imanishi non pas sur un mécanisme de « sélection » par l’environnement, mais sur une initiative du vivant. Le vivant ne subit pas l’évolution : il en est l’agent, le sujet — avec son milieu. Pour Imanishi, le sujet de l’évolution est en effet la société que chaque espèce forme avec son milieu — dans une unité concrète qu’il appelle « écospécie » ».

DROIT

Laurent FONBAUSTIER, Environnement (Anamosa, 2021).

« L’impression tous les jours plus nette que nous vivons dans un monde diversement abîmé se cristallise particulièrement bien quand il est question d’environnement. La conscience des enjeux et des risques a beau croître, la notion d’environnement est toujours plus fuyante, le sentiment d’impuissance s’intensifiant au rythme de notre consommation vorace du monde. La crise écologique majeure que nous traversons (et qui finira par nous traverser) est pourtant une occasion inespérée d’explorer de nouvelles pistes, notamment celle d’une démocratie écologique prenant appui sur une conception repensée, inclusive et pacifiée, de nos relations avec la Nature. Entre politique, droit et éthique, une nouvelle vision doit contribuer à remettre en cause les liens d’une domination délétère qui caractérisent nos rapports avec ce (et donc ceux) qui nous entourent. Le moment est venu de faire monde autrement ».

Isabelle MICHALLET, Faire face à l’anthropocène. Les voies du droit (Collection À partir de l’Anthropocène, Éditions deux-cent-cinq & École urbaine de Lyon, 2022).

« Autour de six propositions permettant de relever les défis de l’anthropocène, notamment personnifier la nature et criminaliser les destructions, l’autrice propose d’encadrer les questions environnementales par le droit. Elle montre comment l’instrument juridique pourrait répondre à l’urgence écologique ».

Marta TORRE-SCHAUB, Blanche LORMETEAU, Aglaé JEZEQUEL, Agnès MICHELOT (dir.), Dictionnaire juridique du changement climatique (mare & martin, 2022).

« À partir d’une approche lexicale, cette somme donne une vision claire et accessible du phénomène complexe qu’est le changement climatique. Présenté sous la forme d’un dictionnaire, le livre offre une double finalité : établir une première nomenclature interdisciplinaire du changement climatique, à dominante juridique, tout en favorisant sa portée au grand public pour une meilleure compréhension des enjeux posés par l’urgence climatique ».

ECONOMIE

Fabrice BARDET, Lucia SHIMBO, Huana CARVALHO (dir.), Valua Terra. Faire la valeur des environnements. Perspectives croisées françaises et brésiliennes (Collection À partir de l’Anthropocène, Éditions deux-cent-cinq & École urbaine de Lyon, 2022).

« Quelle est la valeur de la planète Terre ? Celle d’un glacier ou d’un arbre ? Ceux qui se sont penchés sur cette question de la valeur des environnements ont notamment contribué à l’élaboration de différentes comptabilités environnementales : celles qui reposent sur un principe d’évaluation environnementale, et celles qui chargent le marché de réaliser l’évaluation de la valeur de la nature. Derrière cette controverse scientifique dans laquelle s’est notamment engagée la Banque Mondiale, il y a justement la dimension géopolitique et démocratique du problème : qui doit participer au choix du calcul à retenir ? Et quelle autorité pourrait être chargée de le faire respecter ? Les chercheurs et les chercheuses françaises et brésiliennes du Projet de recherche international Valua Terra du CNRS ont imaginé rassembler 20 textes de diverses disciplines et influences pour reprendre la réflexion sur les racines de la crise écologique planétaire et sa dimension financière mondialisée ».

Lucas CHANCEL, Thomas PIKETTY, Emmanuel SAEZ, Gabriel ZUCMAN (dir.), Rapport sur les inégalités mondiales 2022 (Seuil, 2022).

« Le rapport sur les inégalités mondiales 2022 propose une radiographie inédite des inégalités mondiales, avec la présentation des dernières données sur les écarts de revenu et de patrimoine à travers le monde, ainsi que de nouveaux résultats sur les injustices liées au genre et les inégalités environnementales. Ce travail, mené par une équipe de chercheurs franco-américains et reposant sur les efforts d’une centaine d’économistes à travers le monde, démontre avec force que les inégalités extrêmes qui caractérisent nombre de nos sociétés sont le résultat de choix politiques et n’ont rien d’une fatalité ».

Timothée PARRIQUE, Ralentir ou périr. L’économie de la décroissance (Seuil, 2022).

« Nous n’avons pas besoin de produire plus pour atténuer le changement climatique, éradiquer la pauvreté, réduire les inégalités, créer de l’emploi, financer les services publics, ou améliorer notre qualité de vie. Au contraire, cette obsession moderne pour l’accumulation est un frein au progrès social et un accélérateur de l’effondrement écologique. Entre produire plus, et polluer moins, il va falloir choisir. Choix facile car une économie peut tout à fait prospérer sans croissance, à condition de repenser complètement son organisation. C’est le projet de ce livre. Explorer le chemin de transition vers une économie de la post-croissance ».

Alexandre RAMBAUD, Jacques RICHARD, Philosophie d’une écologie anticapitaliste : pour un nouveau modèle de gestion écologique (Presses de l’Université Laval, 2022).

« Cet ouvrage dépasse la simple question de la technique comptable, en offrant une réflexion à la fois historique, économique, politique, juridique, philosophique et éthique, qui débouche à la fin sur un modèle original de gestion écologique à partir d’une redéfinition du modèle comptable ».

EDUCATION

Jean-Michel LOURTIOZ, Jane LECOMTE, Sophie SZOPA, Catherine EVEN, Guillaume ROUX (dir.), Enjeux de la transition écologique. Enseigner la transition écologique aux étudiants de licence à l’université (Université Paris-Saclay, EDP Sciences, 2021). En libre accès sur HAL.

Fruit d’une collaboration entre 40 chercheurs et enseignants-chercheurs de toutes les disciplines, « cet ouvrage, aux nombreuses illustrations, donne une vision transversale des changements environnementaux d’échelle mondiale que connaît notre planète aux limites finies. Son objectif est, en particulier, de faire comprendre les mécanismes et conséquences du réchauffement climatique et de l’érosion de la biodiversité ainsi que leurs relations avec nos modes de vie et de consommation. La dernière partie de cet ouvrage offre un cadre de réflexions pour une transition vers un développement soutenable. Cette transition peut être une opportunité pour rembourser nos façons de produire, de travailler, de consommer, de nous déplacer, tout en visant l’équité sociale pour un « bien vivre ensemble » partagé sur la planète ».

Peter SUTORIS, Educating for the Anthropocene. Schooling and Activism in the Face of Slow Violence (MIT Press, 2022). En libre accès.

« S’appuyant sur un projet ethnographique mené dans des écoles et des groupes militants en Inde et en Afrique du Sud, Peter Sutoris explore les pratiques éducatives dans le contexte de communautés pauvres et marginalisées où les crises environnementales se mêlent à l’histoire coloniale et raciste et aux pratiques non durables. Il expose les effets dépolitisants de la scolarisation et examine le transfert de connaissances entre les générations au sein et au-delà de l’éducation formelle. Il met en avant une méthodologie de recherche innovante (le tournage de films d’observation participatifs) en décrivant comment les films réalisés par les enfants ouvrent une fenêtre sur la manière dont les jeunes donnent un sens à l’avenir de l’Anthropocène. C’est grâce à leur capacité à imaginer le monde différemment, affirme Sutoris, que l’éducation peut se réinventer ».

ENERGIES

GROUPE D’ETUDES GEOPOLITIQUES, Michel DERDEVET (dir.), Dans l’urgence climatique. Penser la transition énergétique (Gallimard, 2022).

« Souvent perçue comme trop technique ou complexe, la transition énergétique est pourtant au cœur des solutions et nécessite des données, des analyses et des interprétations étayées. Cet ouvrage collectif vise à jouer cartes sur table en croisant les éclairages fournis par l’économie, l’histoire, les relations internationales et la science politique. En douze chapitres, des universitaires français et européens, de générations et de disciplines différentes, proposent une synthèse des réflexions actuelles sur la transition énergétique en France et dans le monde ».

Mikaa MERED, Hydrogène. Enjeux économiques et géopolitiques (Puf, 2022).

« De l’Arctique à la Lune (et Mars !), en passant par les espaces insulaires et les zones tempérées, le développement de l’hydrogène-énergie est au cœur de la transition énergétique mondiale. Au carrefour des enjeux du “monde d’après”, l’hydrogène s’impose comme l’une des solutions les plus prometteuses pour se rapprocher des objectifs de l’Accord de Paris. Encore très mal connu, victime à la fois de préjugés anciens (sécurité, explosivité, rendements faibles, coûts élevés) et de campagnes de dénigrement venant tant du secteur des hydrocarbures que du secteur de la batterie électrique, ce vecteur énergétique monte pourtant en puissance ».

“Pilares” (2015) © Ishmael Randall Weeks

ENJEUX POST & DECOLONIAUX

Christine CHIVALLON, L’humain-L’inhumain. L’impensé des nouveaux matérialismes (Matérialité, ontologie, plantationocène) (Atlantiques déchaînés, 2022).

« En faisant intervenir « l’inhumain », comme pratique au coeur de la modernité occidentale dès l’établissement de l’esclavage, le texte propose une approche par laquelle sont rétablis les rapports de pouvoir que semble perdre de vue le tournant ontologique ».

Arturo ESCOBAR, Ashish KOTHARI, Ariel SALLEH, Federico DEMARIA, Alberto ACOSTA (dir.), Plurivers. Un dictionnaire du post‑développement (Editions Wildproject, 2022).

« Vandana Shiva, Rob Hopkins, Silvia Federici, Satish Kumar, Michael Löwy, Arturo Escobar, Ariel Salleh… : 124 auteur·rices du monde entier donnent à voir une myriade d’initiatives qui esquissent les sociétés écologiques, féministes et décoloniales de demain. Agroécologie, Amour queer, Buen vivir, Communalisme, Ecoféminisme, Sentir-penser… Chacune des 100 entrées de ce dictionnaire ouvre des mondes, et leur assemblage constitue un paysage intellectuel et politique inédit ».

GEOGRAPHIE

Cartographier l’anthropocène. Changer d’échelle pour pouvoir agir (IGN, 2022).

« Par ce premier Atlas, qui a vocation à devenir un rendez-vous annuel, l’IGN présente ses cartes de l’anthropocène et décrit les enjeux technologiques pour les produire et cartographier les changements. Dans sa mission d’appui aux politiques publiques, l’IGN s’est engagé en 2021 à développer une capacité d’observation en continu. L’enjeu : produire des cartes thématiques sur un nombre limité d’enjeux écologiques majeurs qui rendent compte des changements rapides du territoire et des conséquences sur l’environnement ».

Jean ESTEBANEZ, Humains et animaux. Une géographie de relations (CNRS Editions, 2022).

« Symbiose, exploitation, amour, destruction, collaboration, prédation, représentations tissent des relations contrastées avec les vivants. De l’élevage aux productions industrielles, de l’abattage rituel au bien-être animal, des animaux d’expérimentation aux antispécistes, de la zoophilie à l’extermination, la question animale fait l’objet de controverses violentes. Pour mieux comprendre ce débat crucial au jour de la sixième extinction de masse et du réchauffement climatique, ce dossier présente les liens, parfois paradoxaux et toujours situés, qui nous unissent aux animaux. Une mise au point éclairante sur notre devenir humain et des façons différentes d’être au monde ».

Philippe PELLETIER, Écologie et géographie. Une histoire tumultueuse (XIXe-XXe siècle) (CNRS Editions, 2022).

« Les réflexions savantes autour du rapport économique, éthique et esthétique que les êtres humains entretiennent avec la nature mobilisent plusieurs champs, au premier rang desquels la géographie et l’écologie. Si ces deux disciplines s’intéressent à l’interface entre nature et société, elles ne la traitent pas de façon identique. En Europe occidentale, en Amérique du Nord, en Russie ou au Japon, leurs penseurs n’ont jamais cessé de questionner leurs conceptions et travaux réciproques sur des bases philosophiques variées, parfois opposées. L’analyse de cette histoire croisée depuis le début du XIXe siècle jusqu’à nos jours permet de découvrir aussi bien leur relation, souvent tumultueuse, que leur fonction sociale ou politique. Elle fait comprendre pourquoi, à partir de la seconde moitié du XXe siècle, l’écologie a pris le pas sur la géographie dans l’approche environnementale, signant le triomphe du « vivant » sur le « social » ou le « spatial » ».

HISTOIRE

Christophe BONNEUIL, Jean-Baptiste FRESSOZ, Jean-Robert VIALLET, Nous avons mangé la Terre. L’événement anthropocène (Seuil, 2022).

« De l’espace notre Terre est blanc et bleu. Des continents et des mers. En bas… un paradis. La douceur de l’air, l’odeur de l’iode et la fraîcheur de l’eau. Là, entre zéro et quinze kilomètres au-dessus du niveau de la mer, tout autour du globe, il y a ces 1 400 milliards de tonnes de dioxyde de carbone. Le CO2 que nous avons émis depuis le début de l’industrialisation. Des milliards de tonnes prisonnières de la basse atmosphère ».

Stéphane FRIOUX, Renaud BECOT (dir.), Écrire l’histoire environnementale au XXIe siècle. Sources, méthodes, pratiques (PUR, 2022).

« Les contributions réunies par le Réseau universitaire de chercheurs en histoire environnementale (RUCHE) offrent un panorama international et pluridisciplinaire de cette révolution historiographique que représente l’histoire environnementale, en partant d’un état des lieux inédit dans quelques champs impactés par l’émergence d’une approche environnementale (telles l’histoire des mondes du travail et l’histoire maritime) ».

François JARRIGE, On arrête (parfois) le progrès. Histoire et décroissance (L’Échapée, 2022).

« Saviez-vous qu’au siècle de la machine à vapeur, on s’inquiétait déjà de la surconsommation d’énergie et des limites à la croissance ? Contrairement au fameux adage selon lequel « on n’arrête pas le progrès », le recours à l’histoire démontre qu’il n’y a pas de fatalité technologique. L’humanité n’est pas vouée à s’adapter, résignée, à l’implacable règne des machines. La course à la puissance a toujours fait face à de profondes remises en cause. Les textes réunis ici s’appuient sur la mémoire de ces résistances pour nourrir la réflexion actuelle autour de la nécessaire décroissance ».

Alexis VRIGNON, France grise, France verte. Une histoire environnementale depuis 1945 (Armand Colin, 2022).

« Cet ouvrage se propose de revisiter l’histoire récente de la France, de 1945 à nos jours, à la lumière des enjeux environnementaux. Ainsi, la période de croissance économique et d’industrialisation qui a transformé les sociétés industrielles, les «Trente Glorieuses», est analysée sous un jour nouveau pour comprendre les ressorts et les implications de la « grande accélération » dont nous sommes les héritiers et, à bien des égards, les perpétuateurs ».

JEUNESSE

Ophélie DAMBLE, Roca BALBOA, Opération bye bye béton (la ville brûle, 2022).

« Camomille et ses ami·es aimeraient plus de verdure dans leur cour d’école, dans leur ville… et dans leurs vies. Mais comment faire ? Un incident survenu à l’école va les aider à convaincre tout le monde de la beauté et de l’utilité de faire une plus grande place à la nature. C’est parti pour l’opération bye bye béton ! ».

Diana SEMASKA, Guillaume REYNARD, Après la catastrophe. Quand la nature renaît (Actes Sud Junior, 2022).

« Découvrez l’écologie des milieux sous l’angle des perturbations, à l’aide d’exemples concrets d’écosystèmes ayant traversé de petits ou de grands changements, et de concepts tels que la stratégie adaptative, de résistance et de résilience. Du récif corallien à l’île de la Réunion en passant par la mangrove, ce documentaire dévoile les conséquences des perturbations, qu’elles soient destructrices ou créatrices, sur notre planète ».

“Pilares” (2014) © Ishmael Randall Weeks

LITTERATURE

Alice CARABEDIAN, Utopie radicale. Par-delà l’imaginaire des cabanes et des ruines (Seuil, 2022).

« Des événements qui, il y a peu, relevaient de l’improbable, de scénarios du pire, ou de la dystopie, sont désormais notre quotidien. La science-fiction est devenue notre réalité. Nous vivons dans un chaos qui s’intensifie même si, ici ou là, fleurissent sur les ruines du capitalisme des utopies concrètes, localistes et réalisables, des cabanes et des refuges. Mais ces utopies ne sont-elles pas souvent concédées, dans les marges, par ceux-là mêmes qui promettent la colonisation de l’espace et les cités autosuffisantes pour milliardaires ? Il y a urgence à revendiquer des lieux où se déploieraient en totale liberté nos imaginaires. L’utopie radicale peut répondre à l’extrémité des désastres actuels et à venir. Nous pouvons et devons rêver de technologies et de rencontres intergalactiques émancipatrices et ne pas laisser ce pouvoir aux seuls capitaines des vaisseaux capitalistes ».

Hélène COLLONGUES, Uyaïnim, mémoires d’une femme Jivaro (Actes Sud, 2022).

« “Ils ne voyaient pas les forêts, les rivières, les oiseaux et les poissons, et encore moins nous, les indigènes. Ils voyaient seulement l’argent”, témoigne Albertina Nanchijam Tuwits, représentante du peuple awajun (jivaro) en Amazonie péruvienne. Ce profond récit de vie nous plonge entre deux mondes, sous le regard lucide d’une femme éprise de liberté. Marqué par l’histoire coloniale, les discriminations, les violences, l’expropriation des terres, l’exploitation des ressources et l’avidité, le peuple awajun subit les affres de la globalisation. Dans cette tourmente, Albertina résiste. Même au sein de sa communauté, où la violence envers les femmes sévit. Sans angélisme, elle mène un combat sur tous les fronts. Avec passion et détermination. Sa force ? Elle la tire de la nature. Au cœur d’une cosmologie vivante, gravée dans sa mémoire, incarnée dans ses actes. Car tout est vie. Très jeune, Albertina choisit d’être Uyaïnim, un petit palmier aux branches remplies de fruits, parce qu’il ne se casse pas : “Je ne me briserai pas. Même si on me fait du mal, je ne me tuerai pas.” De l’enfance à l’âge adulte, de l’intime au social, de la poésie au politique, du local au global, son chemin n’aura de cesse de défendre le vivant ».

Sybille GRIMBERT, Le dernier des siens (Anne Carrière, 2022).

« 1835. Gus, un jeune zoologiste, est envoyé par le musée d’histoire naturelle de Lille pour étudier la faune du nord de l’Europe. Lors d’une traversée, il assiste au massacre d’une colonie de grands pingouins et sauve l’un d’eux. Il le ramène chez lui aux Orcades et le nomme Prosp. Sans le savoir, Gus vient de récupérer le dernier spécimen sur terre de l’oiseau. Une relation bouleversante s’instaure entre l’homme et l’animal. La curiosité du chercheur et la méfiance du pingouin vont bientôt se muer en un attachement profond et réciproque.

Au cours des quinze années suivantes, Gus et Prosp vont voyager des îles Féroé vers le Danemark. Gus prend progressivement conscience qu’il est peut-être le témoin d’une chose inconcevable à l’époque : l’extinction d’une espèce. Alors qu’il a fondé une famille, il devient obsédé par le destin de son ami à plumes, au détriment de tout le reste. Mais il vit une expérience unique, à la portée métaphysique troublante : qu’est-ce que veut dire aimer ce qui ne sera plus jamais ?

À l’heure de la sixième extinction, Sibylle Grimbert interroge la relation homme-animal en convoquant un duo inoubliable. Elle réussit le tour de force de créer un personnage animal crédible, de nous faire sentir son intériorité, ses émotions, son intelligence, sans jamais verser dans l’anthropomorphisme ou la fable. Le Dernier des siens est un grand roman d’aventures autant qu’un bouleversant plaidoyer dans un des débats les plus essentiels de notre époque ».

Claudie HUNZINGER, Un chien à ma table (Grasset, 2022 — Prix Femina).

« Un soir, une jeune chienne, traînant une sale histoire avec sa chaîne brisée, surgit à la porte d’un vieux couple : Sophie, romancière, qui aime la nature et les marches en forêt et son compagnon Grieg, déjà sorti du monde, dormant le jour et lisant la nuit, survivant grâce à la littérature. D’où vient cette bête blessée ? Qu’a-t-elle vécu ? Est-on à sa poursuite ? Son irruption va transformer la vieillesse du monde, celle d’un couple, celle d’une femme, en ode à la vie, nous montrant qu’un autre chemin est possible.

Un chien à ma table relie le féminin révolté et la nature saccagée : si notre époque inquiétante semble menacer notre avenir et celui des livres, les poètes des temps de détresse sauvent ce qu’il nous reste d’humanité ».

Hélène LAURAIN, Partout le feu (Verdier, 2022).

« Laetitia est née trois minutes avant sa soeur jumelle Margaux et trente-sept minutes avant l’explosion de Tchernobyl. Malgré des études dans une grande école de commerce, elle grenouille au Snowhall de Thermes-les-Bains, au désespoir de ses parents. Elle vit à La Cave où elle écoute Nick Cave, obsédée par les SUV et la catastrophe climatique en cours. Il faut dire que Laetitia vit en Lorraine où l’État, n’ayant désormais plus de colonie à saccager, a décidé d’enfouir tous les déchets radioactifs de France. Alors avec sa bande, Taupe, Fauteur, Thelma, Dédé, elle mène une première action spectaculaire qui n’est qu’un préambule au grand incendie final ».

Nastassja MARTIN, À l’est des rêves. Réponses even aux crises systémiques (La Découverte, 2022).

« En 1989, juste avant la chute de l’Union soviétique, une famille even aurait décidé de repartir en forêt, recréer un mode de vie autonome fondé sur la chasse, la pêche et la cueillette. Était-ce une légende ? Comment un petit collectif violenté, spolié, asservi par les colons avant d’être oublié de la grande histoire s’est-il saisi de la crise systémique pour regagner son autonomie ? Comment a-t-il fait pour renouer les fils ténus du dialogue quotidien qui le liait aux animaux et éléments, sans le secours des chamanes éliminés par le processus colonial ? Quelles manières de vivre les Even d’Icha ont-ils réinventées, pour continuer d’exister dans un monde rapidement transformé sous les coups de boutoir de l’extractivisme et du changement climatique ? »

Corinne MOREL DARLEUX, La Sauvagière (Dalva, 2022).

« Une fable onirique qui nous invite à repenser le lien qui nous unit au monde, loin des constructions et des contingences modernes. Page après page, Corinne Morel Darleux nous plonge dans un univers puissamment poétique où les sens deviennent maîtres et où notre humanité se métamorphose au contact du bois humide et sous les caresses du vent ».

Wilfried N’SONDE, Héliosphéra, fille des abysses (Actes Sud, 2022).

« Héliosphéra et Xanthelle, deux êtres microscopiques en mal d’amour, se cherchent dans les profondeurs de l’océan Pacifique ; un bout de plastique erre indéfiniment dans les eaux du monde entier ; Ollanta, une jeune chercheuse, embarque pour une expédition océanographique au large du Chili : voilà les personnages singuliers qui animent ce roman tendre et déroutant, empreint de la poésie et de la beauté de la vie marine.

Héliosphéra, fille des abysses est un récit né de l’expérience de Wilfried N’Sondé à bord de la mythique goélette Tara. Bercé par les aléas de la navigation et alimenté par le savoir des scientifiques, l’auteur signe un roman à la facture inédite où des héros minuscules osent des fusions symbiotiques extravagantes et démontrent que les êtres les plus différents peuvent trouver à s’accorder ».

NUMERIQUE & TECHNOLOGIE

James BRIDLE, Un nouvel âge des ténèbres. La technologie et la fin du futur (Allia, 2022). Traduction par Benjamin Saltel.

« Aux antipodes d’une critique réactionnaire de la technologie, Bridle démontre comment la technologie échoue à répondre aux grands défis de notre modernité et nous enferme dans des schémas de pensée qui brident notre intelligence et notre créativité. Alors que nous disposons d’un savoir immense à portée de clic, nous sommes, paradoxalement, incapables de penser ».

Arthur GRIMONPONT, Algocratie. Vivre libre à l’heure des algorithmes (Actes Sud, 2022).

« L’histoire de l’humanité ressemble de plus en plus à une course entre l’éducation et la catastrophe », remarquait en 1920 l’écrivain britannique H. G. Wells. E, 2022, jamais l’humanité n’a atteint un tel niveau d’interconnexion, l’information n’a irrigué nos sociétés en de tels volumes, nous n’avons eu autant de temps libre. Cela aurait dû nous permettre d’atteindre un sommet dans notre capacité à communiquer, à coopérer et à nous éduquer. Mais nous avons délégué aux réseaux sociaux la charge d’organiser notre vie sociale, politique et culturelle. La guerre de l’attention exploite nos pulsions, déchaîne les passions et éclipse la raison. Nul déterminisme technologique ne nous condamne au pire. Bâtir une démocratie de de l’information est vital et la clé d’un formidable progrès humain ».

Fanny LOPEZ, A bout de flux (Editions Divergences, 2022).

« Le rapport immédiat aux objets connectés invisibilise le continuum infernal d’infrastructures qui se cachent derrière : data centers, câbles sous-marins, réseaux de transmission et de distribution d’électricité. Alors que le numérique accompagne une électrification massive des usages, le système électrique dépend lui-même de plus en plus du numérique pour fonctionner. Pour comprendre ce grand système et imaginer comment le transformer, il nous faut aller au bout des flux, là où se révèle la matérialité des machines et des câbles ».

“Pilares” (2014) © Ishmael Randall Weeks

PHILOSOPHIE - SOCIOLOGIE - ANTHROPOLOGIE - IDEES

Clara BRETEAU, Les vies autonomes, une enquête poétique (Actes Sud, 2022).

« Alors que les appels à déserter le système se multiplient et que l’urgence de trouver d’autres manières d’habiter se fait toujours plus prégnante, Clara Breteau éclaire d’un jour nouveau les lieux autonomes et leurs pouvoirs poétiques capables, comme des plantes, de pousser à travers nos maisons et de les réanimer. Par son enquête hors norme, ce livre réussit alors à circonscrire l’un des points faibles majeurs du capitalisme colonial : ce lien organique et vernaculaire au territoire qui, refaisant de l’habitat un corps tissé de signes, contient la clef de nos émancipations poétiques et politiques ».

Matthieu DUPERREX, La rivière et le bulldozer (Premier Parallèle, 2022).

« Alors qu’on souligne avec de plus en plus d’insistance la nécessité de faire davantage de place au vivant, le parti pris ici est de nourrir la pensée écologique à l’aide d’une description attentive de l’essence géologique de l’être humain, en commençant par suivre à la trace un galet de rivière. Des civilisations, nous savions qu’elles étaient mortelles, ce dont des ruines et autres héritages attestent pour l’archéologie. Mais qu’elles deviendront fossiles et seront léguées comme telles, c’est ce que ce petit essai enlevé et érudit entreprend de décrire ».

Amaena GUENIOT, Terre brisée. Pour une philosophie de l’environnement (Double Ponctuation, 2022).

« Face à la catastrophe environnementale, Amaena Guéniot estime qu’il est indispensable d’ancrer notre pensée dans la tradition philosophique. D’une façon très claire et abordable, elle nous montre comment Platon, Aristote, Rousseau, Kant ou encore Weil et Arendt peuvent nous aider à penser ce défi historique sans précédent. L’enjeu est de taille, car il nous faut revoir entièrement les conditions et les finalités de l’activité humaine dans ce nouveau contexte — celui d’une Terre brisée qu’il nous faut reconstruire ».

Byung-Chul HAN, La Fin des choses. Bouleversements du monde de la vie (Actes Sud, 2022). Traduction par Olivier Mannoni.

« “Nous n’habitons plus la terre et le ciel, nous habitons Google Earth et le Cloud. Le monde devient de plus en plus insaisissable, nuageux et spectral.” Tel est le constat de Byung-Chul Han : le monde des choses est en voie de disparition ; le monde concret et durable est érodé au profit d’un univers éphémère où le travail accompli par la main a laissé place au glissement des doigts sur l’écran du smartphone et à une “intelligence” artificielle, qui “pense à partir du passé”, est “aveugle à l’événement” ».

Aliocha IMHOFF, Kantuta QUIRÓS, Qui parle ? (pour les non-humains) (puf, 2022).

« Poser la question « Qui parle ? » signifie désormais élargir la scène des savoirs et de la politique à tous ceux qui, parce qu’ils ne disposaient pas de la parole, ne pouvaient y être inclus — animaux, végétaux, objets ou machines. Aliocha Imhoff et Kantuta Quirós répondent à cette question par un manifeste pour une politique du silence qui est aussi bien une cartographie de ses moyens possibles : celle des procédés de traduction, des formes nouvelles de citoyenneté, d’écodiplomatie, d’attention ou de porte-parolat avec lesquels militants, artistes et penseurs cherchent à donner une voix à ce qui n’en a pas »

Eric KLINENBERG, Canicule. Chicago, été 1995 : autopsie sociale d’une catastrophe (Éditions deux-cent-cinq, collection “A partir de l’Anthropocène”, 2022). Traduction par Marc Saint-Upéry.

« La grande vague de chaleur de Chicago est l’une des plus meurtrières de l’histoire américaine ». Le sociologue « entreprend l’« autopsie sociale » d’une métropole, examinant les organes sociaux, politiques et institutionnels de la ville. Il y étudie les raisons de la surmortalité marquée dans certains quartiers et découvre qu’un certain nombre de formes surprenantes et inquiétantes de rupture sociale y ont contribué ».

Baptiste LANASPEZE, Nature (Editions Anamosa, 2022).

« En redéfinissant la nature comme la société des vivants, les pensées de l’écologie nous invitent à penser nos organisations sociales non pas comme une prérogative spécifiquement humaine, mais comme des prolongements des sociétés animales et végétales. Nos sociétés humaines ne transcendent pas les autres sociétés terrestres, mais y sont intégrées, en découlent, et lui sont redevables. Adossé à un sens immémorial de la nature comme ”un monde vivant dont nous faisons partie“, ce livre ranime la notion grâce aux apports des luttes écoféministes et des luttes décoloniales — et constitue aussi la synthèse provisoire d’un cheminement intellectuel, professionnel et politique ».

Bruno LATOUR, Nikolaj SCHULTZ, Mémo sur la nouvelle classe écologique. Comment faire émerger une classe écologique consciente et fière d’elle-même (La Découverte, 2022).

« À quelles conditions l’écologie, au lieu d’être un ensemble de mouvements parmi d’autres, pourrait-elle organiser la politique autour d’elle ? Peut-elle aspirer à définir l’horizon politique comme l’ont fait, à d’autres périodes, le libéralisme, puis les socialismes, le néolibéralisme et enfin, plus récemment, les partis illibéraux ou néofascistes dont l’ascendant ne cesse de croître ? Peut-elle apprendre de l’histoire sociale comment émergent les nouveaux mouvements politiques et comment ils gagnent la lutte pour les idées, bien avant de pouvoir traduire leurs avancées dans des partis et des élections ? »

Paul B. PRECIADO, Dysphoria Mundi (Grasset, 2022).

« Puisque mon désir de vivre en dehors des prescriptions normatives de la société binaire hétéro-patriarcale a été considéré comme une pathologie clinique caractérisée sous le vocable de « dysphorie de genre », il m’a paru intéressant de penser la situation planétaire actuelle comme une dysphorie généralisée. Dysphoria mundi : la résistance d’une grande partie des corps vivants de la planète à être subalternisés au sein d’un régime de savoir et de pouvoir patriarco-colonial ».

POLITIQUE & GEOPOLITIQUE

Myriam BAHAFFOU, Des paillettes sur le compost. Écoféminismes au quotidien (le passager clandestin, 2022).

« Tout à la fois récit, essai, mais aussi témoignage d’une époque et d’un engagement, l’ouvrage est une exploration sensible et politique du quotidien. L’autrice dynamite les codes et jongle avec les concepts, comme elle navigue dans la vie entre recherche et militantisme. Elle explore, dissèque, raconte des histoires décoloniales, antispécistes, queer et magiques ».

Sébastien CHAILLEUX, Sylvain LE BERRE, Yann GUNZBURGER (dir.), Ressources minérales et transitions. Trajectoires politiques du sous-sol français au 21ème siècle (Peter Lang, 2022).

« Comment le projet de renouveau minier a-t-il vu le jour et quelle en est la trajectoire politique ? Quelles coalitions d’acteurs se sont mobilisées sur ce sujet ? Dans quels espaces en ont-ils débattu ? Quels effets a-t-il eu, au-delà du constat d’échec partagé par une majorité d’acteurs ? Voici quelques questions auxquelles cet ouvrage collectif se propose de répondre ».

Pierre CHARBONNIER, Culture écologique (Presses de Sciences-Po, 2022).

« Les préoccupations écologiques viennent ouvrir des brèches dans les conceptions dominantes du progrès, du développement, de la richesse et, plus largement, dans l’idée même que l’on se fait de la coexistence sociale. L’ouvrage se fixe pour objectif de porter à la connaissance du plus grand nombre les débats qui organisent aujourd’hui la question écologique. Ces débats convoquent les sciences de la Terre, l’anthropologie, la sociologie, l’histoire, la géographie et l’économie, ainsi que la philosophie. Leur contenu met en question l’organisation des savoirs, les normes politiques et l’encadrement technique de la nature ».

Nicolas REGAUD, François GEMENNE, Bastien ALEX, La guerre chaude. Changement climatique et politiques de défense (Presses de SciencesPo, 2022).

« Les militaires doivent anticiper les impacts du changement climatique sur le paysage stratégique international (migrations, aires géopolitiques les plus impactées). Ils doivent aussi analyser la façon dont leurs grandes missions de défense vont être affectées par la hausse des températures : opérations militaires, sécurité sanitaire, contribution aux politiques publiques d’atténuation, sécurité énergétique, adaptation des équipements et des infrastructures de défense ».

Joëlle ZASK, Écologie et Démocratie (Premier Parallèle, 2022).

« Cet essai entreprend de démontrer que non seulement il n’y a pas de contradiction entre l’écologie et la démocratie, mais que l’une ne va pas sans l’autre. Le citoyen au sens fort participe activement à la création de ses propres conditions d’existence. Il transforme le monde en le préservant. Il jardine, construit, aménage, s’associe à d’autres, inventant avec la nature comme avec autrui des formes de vie communes. Pour que notre monde ne devienne pas un monde de désolation, nous devons introduire dans l’idée de citoyenneté la production, l’entretien, la préservation et la transmission d’espaces concrets partageables — en somme, la juste occupation de la terre ».

SANTE

Sébastien GARDON, Amandine GAUTIER, Gwenola LE NAOUR, Serge MORAND (dir.), Sortir des crises. One Health en pratiques (Quae, 2022).

« En associant plusieurs disciplines — philosophie, anthropologie, sciences politiques, sociologie, économie, géographie, écologie, sciences médicale et vétérinaire, etc. — et à partir de nombreux exemples de terrain, du local à l’international, l’ouvrage présente à la fois une lecture des enjeux et des problèmes sanitaires dans un monde globalisé, des retours d’expérience de gestion de crise, des innovations dans la gestion du sanitaire s’appuyant sur le social et sur les communautés, mais également une mise en discussion des normes et des régulations à tous les niveaux politiques ».

“Soñar para mañana” (2015) © Ishmael Randall Weeks

SCIENCE

Kevin LALAND, La symphonie inachevée de Darwin. Comment la culture a façonné l’esprit humain (La Découverte, 2022).

« La théorie de l’évolution s’est longtemps heurtée à une énigme qui, pour les créationnistes plus ou moins déclarés, avait valeur d’objection : comment les exceptionnelles capacités cognitives, sociales et culturelles des humains sont-elles apparues, démarquant notre espèce de toutes les autres ? Ce récit captivant de l’origine de notre espèce renverse la perspective de la psychologie évolutionniste, qui envisage les phénomènes culturels seulement comme des réponses adaptatives à des circonstances extérieures. Il montre que la culture n’a pas simplement émergé à partir de l’intelligence, mais qu’elle a constitué le principal moteur de l’évolution dans notre lignée. Autrement dit, l’esprit humain n’est pas façonné pour la culture, mais véritablement par la culture ».

Lynn MARGULIS, Microcosmos. 4 milliards d’années de symbiose terrestre (Editions Wildproject, 2022). Traduction par Gérard Blanc et Anne de Beer, révisée par Clément Amézieux.

« La vie sur Terre est avant tout une affaire de bactéries, de virus et de micro-organismes. C’est là l’essentiel de son histoire et c’est là sa structure profonde. Articulant toutes les échelles du vivant, du microscopique au planétaire, Margulis montre que la symbiose est au cœur de l’évolution, et offre ici un nouveau tableau de la vie terrestre ».

Mary-Jane RUBENSTEIN, Astrotopia. The Dangerous Religion of the Corporate Space Race (University of Chicago Press, 2022).

La « philosophe des sciences et des religions, lève le voile sur les mythes pas si nouveaux que ça que ces barons de l’espace colportent : celui de la croissance sans limite, de l’énergie sans culpabilité et la quête du salut dans un nouveau monde. Comme elle le révèle, nous avons déjà vu les effets destructeurs de ce fanatisme de la frontière dans l’histoire séculaire du colonialisme européen. Tout comme le projet impérial sur Terre, cet effort renouvelé de conquête de l’espace est présenté comme ayant une vocation religieuse : face à l’apocalypse à venir, quelques messies très riches offrent à quelques élus une échappée vers l’autre monde. Mary-Jane Rubenstein propose une autre conception de l’exploration spatiale qui ne reproduise pas les atrocités du colonialisme terrestre, nous encourageant à trouver et même à créer des histoires qui privilégient le soin cosmique au profit ».

SOCIETE

Flore BERLINGEN, Permis de nuire. Sous le règne des pollueurs-payeurs (Rue de l’Echiquier, 2022).

« Le principe pollueur-payeur autorise surtout les industriels à polluer en toute impunité — moyennant finance ! Face à l’appauvrissement démocratique auquel nous condamne le principe pollueur-payeur, l’autrice nous invite à faire le choix de la délibération et à nous inspirer plutôt du principe hippocratique primum non nocere (« d’abord ne pas nuire ») pour prendre soin de nos communs environnementaux ».

Laurent CASTAIGNEDE, Airvore ou le mythe des transports propres. Chronique d’une pollution annoncée (écosociété, 2022).

« L’omniprésence des transports dans nos sociétés a imposé une telle culture de la mobilité motorisée qu’il est tentant de considérer ces machines comme une nouvelle génération de dinosaures énergivores et polluants. Dans une enquête historique et sociologique inédite et minutieuse, Laurent Castaignède retrace l’épopée de leur ascension et expose leurs impacts environnementaux et sociaux. L’expansion du parc motorisé ne donnant aucun signe d’essoufflement, l’auteur passe au crible les innovations en vogue pour en faire ressortir les limites. Il propose aussi un ensemble de mesures radicales mais pragmatiques qui permettraient de relever le double défi sanitaire et climatique ».

Jérôme DENIS, David PONTILLE, Le soin des choses. Politiques de la maintenance (La Découverte, 2022).

« Contrepoint de l’obsession contemporaine pour l’innovation, moins spectaculaire que l’acte singulier de la réparation, cet art délicat de faire durer les choses n’est que très rarement porté à notre attention. Ce livre est une invitation à décentrer le regard en mettant au premier plan la maintenance et celles et ceux qui l’accomplissent. Parce que s’y cultive une attention sensible à la fragilité et que s’y invente au jour le jour une diplomatie matérielle qui résiste au rythme effréné de l’obsolescence programmée et de la surconsommation, la maintenance dessine les contours d’un monde à l’écart des prétentions de la toute-puissance des humains et de l’autonomie technologique. Un monde où se déploient des formes d’attachement aux choses bien moins triviales que l’on pourrait l’imaginer ».

Mathieu QUET, Flux. Comment la pensée logistique gouverne le monde (La Découverte, 2022).

« Des politiques migratoires aux pratiques culturelles, de la conservation de l’environnement aux relations humaines, il n’existe plus guère de domaines de la vie qui ne soient soumis à la gestion des flux, ce principe fondamental d’intendance. Il est grand temps de se demander comment le royaume logistique régit nos existences ; de montrer combien les conséquences de ses manquements sont dramatiques pour le vivant ; de raconter les multiples luttes qui lui font face. Et surtout, comme s’y emploie ce livre, il est urgent d’inventer d’autres imaginaires de la circulation et du transport, d’autres sujets collectifs pour un monde dans lequel les circulations ne seraient pas un instrument mortifère au service de la valeur marchande ».

Sofi THANHAUSER, Worn. A People’s History of Clothing (Pantheon, 2022).

« Thanhauser montre clairement comment l’industrie de la confection est devenue l’un des pires pollueurs de la planète et comment elle s’appuie sur des travailleurs et travailleuses régulièrement sous-payés et exploités. Mais elle nous montre aussi comment, aux quatre coins du monde, des micro-communautés, des entreprises textiles et des fabricants de vêtements redécouvrent des méthodes ancestrales et éthiques pour fabriquer ce que nous portons ».

URBAIN

Matthieu ADAM, Nathalie ORTAR (dir.), Becoming Urban Cyclists: From Socialization to Skills (University of Chester Press, 2022).

« Devenir un cycliste urbain nécessite une diversité de compétences et de connaissances acquises grâce à différentes formes de socialisation ». Anthropologues, géographes, linguistes, sociologues et urbanistes analysent les pratiques cyclistes au regard des parcours de vie individuels et des inégalités sociales et de genre à travers l’usage de méthodes qualitatives, quantitatives et mixtes et d’enquêtes de terrain menées en Australie, en France, en Allemagne, en Suisse et au Royaume-Uni « pour aider à comprendre les facteurs susceptibles de faciliter ou de freiner les pratiques cyclables urbaines ».

Peter S. ALAGONA, The Accidental Ecosystem. People and Wildlife in American Cities (University of California Press, 2022).

Un ouvrage qui explique pourquoi et comment les villes des États-Unis se sont remplies d’animaux sauvages jusqu’à en compter plus qu’à aucun autre moment au cours des 150 dernières années. « Pourquoi tant de villes — l’écosystème le plus artificiel et le plus dominé par l’humain de tous les écosystèmes de la Terre — se sont-elles enrichies en faune sauvage, alors que celle-ci a diminué dans la plupart des autres régions du monde ? Que signifie ce paradoxe pour les humains, la faune et la nature sur notre planète de plus en plus urbaine ? » Et comment créer des écosystèmes urbains dynamiques ?

Philippe BIHOUIX, Clémence DE SELVA, Sophie JEANTET, La ville stationnaire. Comment mettre fin à l’étalement urbain? (Actes Sud, 2022).

« Et si les villes n’avaient pas vocation à grandir éternellement ? Plus tôt nous protégerons nos terres agricoles, naturelles et forestières de l’artificialisation, plus grande sera notre résilience face aux risques et aux crises écologiques à venir. Au plus vite, les villes doivent — et peuvent — devenir stationnaires. Il ne s’agit pas de les figer, mais de les transformer et les embellir, d’exploiter l’immense patrimoine déjà bâti. Surtout, c’est notre rapport aux territoires qu’il faut faire évoluer, en favorisant la redistribution des services et des emplois, en œuvrant à une nouvelle attractivité des villes moyennes, des bourgs, des villages et des campagnes. Désormais les métropoles ne doivent plus attirer et grandir, mais essaimer ».

Ludovic DUHEM (dir.), CRASH METROPOLIS : Design écosocial et critique de la métropolisation des territoires (T&P Publishing, 2022).

« L’ouvrage rassemble des chercheurs, des designers, des architectes, des urbanistes, des artistes, tous engagés dans les enjeux fondamentaux de la transformation urbaine contemporaine. Ils étudient et critiquent en particulier ceux liés à la métropolisation qui concentre les lieux de pouvoir, d’activités et de vie, créant de fait un déséquilibre avec les territoires non inclus. Le processus de métropolisation minore l’interaction des éléments écologiques et sociaux ».

Antoine GUIRONNET, Au marché des métropoles. Enquête sur le pouvoir urbain de la finance (éditions les étaques, 2022).

« En nous plongeant dans les allées et les coulisses du Marché international des professionnels de l’immobilier (MIPIM), Au marché des métropoles donne à voir comment la financiarisation de la ville se joue à travers « l’accréditation » des territoires par les investisseurs. Cette enquête menée entre Cannes, Paris, Londres et Lyon dévoile le rôle de la finance dans la transformation de pans entiers de nos villes. Elle constitue une contribution inédite à la critique des rouages par lesquels le capital étend son pouvoir sur nos vies quotidiennes ».

Leslie KERN, Ville féministe. Notes de terrain (les éditions du remue-ménage, 2022). Traduction par Arianne DesRochers.

« Kern s’attarde à la manière dont les relations de genre, de classe, de race et d’âge se déploient dans la ville. Elle nous invite à redéfinir et à nous réapproprier les espaces urbains. Comment rendre nos villes plus féministes ? Partant de son expérience quotidienne de citadine à différentes époques de sa vie (enfant, adolescente, étudiante, travailleuse, militante et mère), elle s’appuie sur les théories d’urbanisme, des travaux de géographes féministes et des références à la culture pop pour montrer comment une ville genrée qui s’embourgeoise exclut les populations marginalisées, mais également pour évoquer les possibles configurations d’une ville plus inclusive »

Christine LECONTE, Sylvain GRISOT, Réparons la ville ! Propositions pour nos villes et nos territoires (Editions Apogée, 2022).

« Puisque l’essentiel de la ville de 2050 est déjà là, il est temps d’en assumer l’héritage et d’engager sa transformation. Comment faire ? En réparant la ville pour la rendre adaptable à nos envies et nos besoins. En bâtissant une ville qui donne envie d’y vivre ». En proposant « une vision courageuse de la ville, à la hauteur des enjeux du siècle. Une vision qui tienne compte de ses habitants comme du ménagement de la planète ».

Solène MARRY (dir.), Intégrer l’économie circulaire. Vers des bâtiments réversibles, démontables et réutilisables (Editions Parenthèses, 2022).

« Cet ouvrage collectif, coordonné par l’Ademe, présente un « benchmark » des initiatives européennes et met en lumière les grands enjeux de la circularité dans le secteur de la construction, en même temps qu’il pose un cadre de définition et d’indicateurs. Il a pour ambition de capitaliser les expériences pionnières et de les diffuser afin d’encourager ces pratiques d’avenir ».

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berenice gagne
Anthropocene 2050

🔭Veille & valorisation scientifique - Changement global, habitabilité, Anthropocène, justice sociale et environnementale