Job out : ‘J’aurais mieux fait’

Chloe Conscience
Sur la route du Must
4 min readJun 23, 2015

--

Choisir une direction, consacrer plusieurs mois à soi et se donner du temps, est une bonne décision.

Cette décision permet souvent de s’affranchir d’un cadre et d’un quotidien, et de laisser de l’espace à ce que l’on pense vraiment, à ce que l’on veut vraiment.

Les engagements personnels, professionnels, les contraintes financières, humaines, rendent plus compliqué le temps pour soi. À cela s’ajoute le fait que le travail est un catalyseur. Rester dans un rythme de productivité professionnelle est donc important, voire primordial pour beaucoup d’entre nous.

Je reformule alors.

Choisir une direction, consacrer plusieurs mois à soi et se donner du temps, est un luxe.

Un luxe dont je pense, certains matins, ne pas avoir fait bon usage. Simplement car je n’ai pas mené à son terme un projet qui m’a donné envie de s’inscrire dans le temps. Une crise de culpabilité. Deux mots à bannir dans la même phrase. Ces matins, le constat est le suivant : “j’aurais mieux fait”.

Pourquoi ? Pourquoi mieux ? Comment éloigner ce sentiment de culpabilité ?Comment ne pas le justifier, mais se l’expliquer et s’en défaire ?

C’est l’urgence des questions auxquelles j’ai du répondre.

Avec recul, ces 18 mois hors d’un contexte professionnel stable et défini ont été 18 mois de projets personnels. Les bénéfices ont été si humainement enrichissants qu’ils ont gommé les initiatives professionnelles. Pourtant, il y en a eu.

Il y a eu un job out pour un autre job. Puis des essais. Plusieurs contrats en free lance dans des startups, entourée d’individus qui créent, qui bousculent et qui innovent. Tout ce que j’aime.

En résumé, j’ai passé 18 mois à travailler pour et avec des entrepreneurs qui m’ont insufflé une telle énergie que j’ai instantanément pensé et voulu faire… ce que je voulais. Sauf que, je n’ai pas su ce que je voulais.

Pourquoi ?

Comme un article paru dans Libération, “Les hipsters c’est fini, voici les Yuccies”, on note de plus en plus de jeunes créatifs urbains : “Ils veulent du sens. Ils veulent être et travailler à la fois. Ils veulent de la créativité, mais une carte Gold aussi.”

Voilà. Être libre m’a mis face à ces sujets. J’ai donc consacré beaucoup de temps à déchiffrer ces exigences :

Qu’est-ce qui fait sens pour moi ? Qui suis-je ? Qu’est-ce que je recherche dans le travail ? En quoi suis-je créative ? Et comment me donner une chance de lâcher ma visa premier pour la gold ?

J’ai donc confondu les sujets, en les traitant tous en même temps, à différents niveaux.

Pourquoi mieux ?

Pendant ces mois pour moi, je me suis sentie capable. Je me sentie capable d’entreprendre sans peur, d’aller à la rencontre des gens, de voyager, de prendre des risques. J’avais passé le cap de m’affranchir de tout ce qui peut potentiellement me retenir. Je pars donc du constat que j’aurais pu créer. J’aurais pu développer un projet et en faire quelque chose.

Comment éloigner ce sentiment de culpabilité ?

Comprendre. Comprendre la raison pour laquelle cela ne s’est pas fait. Au fil des mois j’ai cherché à rassembler une activité qui regroupe ce que j’aime faire, ce que je sais faire et ce qui pourrait générer des revenus. La conscience de ce triptyque n’est arrivé que les 6 derniers mois. Avant ça j’ai consacré un an à continuer à travailler et à mettre en première ligne ce qui me permettrait de gagner un peu de sous pour ne pas me retrouver contrainte de reprendre un CDI par dépit, et non par choix. Assumer que je ne pouvais pas arriver au constat de pouvoir entreprendre différemment, sans avoir vécu ces mois qui précisément m’ont permis de savoir comment entreprendre, est une façon de le faire.

Comment ne pas le justifier, mais se l’expliquer et s’en défaire ?

Aller de l’avant. Constater qu’aujourd’hui je sais répondre au 2/3 de la problématique : je connais ce que j’aime faire et ce que je sais faire. Je réalise aussi que valoriser personnellement et financièrement ces deux choses requiert de la patience et s’apprend par étapes.

Aujourd’hui, un collègue m’a offert un livre dont il a pensé me correspondre : “L’Amérique des écrivains”, écrit par Pauline Guénat et Guillaume Binet. L’histoire de sa conception est une histoire en soi. Une femme qui aime écrire et qui part avec son compagnon photographe et ses 4 enfants faire le tour de l’Amérique pour aller à la rencontre de ces écrivains et raconter leur histoire.

J’ai vibré. C’est une mission qui rassemble exactement les 2/3 d’un futur projet : l’écriture et l’humain.

J’écris donc. J’ai toujours su, toujours aimé, souvent cherché la meilleure façon de le faire.

Ce midi, je disais à une amie que j’ai pas mis l’écriture au centre de mon projet plus tôt, car je ne pense pas que cela soit utile aux gens, et elle a eu cette réflexion. Cette réflexion juste qui m’a déculpabilisé :

“Ecrivain n’est pas un métier utile, c’est un métier qui fait plaisir.”

Peut être que je n’aurais pas été capable de mieux faire, sans avoir compris cela.

Si vous avez aimé, appuyez sur le ❤ si le ❤ vous en dit…

Si vous avez aimé, vous aimeriez, sur le même sujet :

La leçon de mon job out

--

--