No mad ?

Antony Legrand
Disconnect Collection
12 min readOct 12, 2016
© Max Muench pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Depuis longtemps, la Mongolie me fascine. Ses immenses steppes verdoyantes, ses chevaux en totale liberté, ses yourtes blanches qui paraissent si conviviales, son histoire autour de l’empire de Gengis Khan, ses costumes traditionnels qui me rappelle la culture japonaise du Samouraï et bien évidemment, l’essence même du pays : sa culture nomade.

Vivre loin de la folie des villes, sans attache à un lieu spécifique et pouvoir tout quitter du jour au lendemain, ne serait-ce pas ça la vraie liberté ?

Figés dans nos vies sédentaires, on a du mal à concevoir que ce mode de vie est encore possible aujourd’hui. Notre aventure au cœur d’une famille mongole nous a apporté certaines réponses bien enrichissantes et pas forcément celles auxquelles on s’attendait.

Connect or disconnect ?

Nous sommes donc partis début septembre avec l’excellent photographe Allemand Max Muench pour la collection Disconnect de Fotolia by Adobe.

Le survol de la capitale, Oulan Bator, rend compte du passé historique et culturel de la Mongolie. Entre la Russie et la Chine, cet immense pays aux steppes infinies a été, jadis, le plus grand empire de tous les temps.

Aujourd’hui, perdu entre modernité et tradition, le pays est en crise. La moitié des 3 millions d'habitants qui y vivent sont nomades. Certains prennent le chemin de la ville avec l’espoir d’une vie moins rude, d’autres retournent vivre comme leurs aïeux et quittent les ghettos de la capitale, déçus par l’égoïsme de cette société. Un retour à la terre nécessaire.

La famille avec laquelle nous avons vécu durant une semaine a clairement fait son choix : les steppes ! Il nous aura fallu pas moins de 30 heures pour arriver chez eux dans l’une des parties les plus reculées de Mongolie. Plus qu’un voyage, un périple.

© Max Muench pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Notre première rencontre avec Zula et sa famille était épique !

À peine arrivés, nous étions chaleureusement accueillis par quelques verres de vodka… Neuf en tout : trois par tradition, trois autres pour soulager nos corps et nos esprits et trois autres… pour euh… pourquoi pas :) ?

Ce petit rituel de base a le mérite de réchauffer les corps et de délier instantanément les langues. Précisons que nous n’avions pas le choix, au risque de manquer de respect à nos hôtes dès le départ.

Au petit matin, le premier pas (légèrement chancelant) en dehors de la yourte nous laissait sans voix. La brume se dissipait doucement, la nature se réveillait… Zula, en tee-shirt sur sa moto, malgré le pauvre degré au-dessus de zéro, était déjà au travail depuis les premières lueurs.

#WinterIsComing, le temps est donc compté, l’hiver sera long et rude.

© Max Muench pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Dans les steppes, l’argent compte peu

Ici, la richesse ne se compte pas en billets ou en biens, mais en nombre de bêtes acquises lors de divers trocs ou héritages familiaux. Pour la petite anecdote, en Mongolie, on compte plus de chevaux que d’hommes !

Chèvres, yaks, vaches… ces animaux sont toute la vie des nomades. Ils se chauffent grâce à leur fourrure, se nourrissent de leur viande et de leur lait et se déplacent à dos de cheval ou de chameau.

Dans la famille, tout le monde aide comme il peut, les jeunes réunissent les bêtes, les plus âgées les traient puis transforment le lait pour le stocker et le transformer.

Fromage, lait fermenté, graisse, vodka au lait de chèvre… Un savoir-faire transmis de génération en génération permet aux familles de tirer le maximum de chaque bête et de survivre dans des conditions extrêmement difficiles.

Mais le défi c’est aussi de respecter cet environnement qui fourni l’indispensable pour survivre. Il s’agit de ne pas polluer les cours d’eau qui alimentent les hommes comme les bêtes et de ne pas détruire la forêt qui les chauffe. Tout ceci implique de comprendre la nature qui les entoure.

© Max Muench & What The Film pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Libre avec son temps

Beaucoup de gens pensent que les nomades mongols fuient la technologie et la modernité. C’est clairement une idée reçue.

Malgré leur mode de vie traditionnel et extrêmement simple, ils ont emprunté au monde moderne quelques commodités. Un panneau solaire alimente une batterie qui illuminera la yourte une fois la nuit venue, un téléphone de secours attaché à un poteau symbolise le seul lien au reste du monde, des motos bricolées du régime soviétique les conduisent de nuit (sans phares) dans les ténèbres des steppes mongoles et une camionnette leur permettra de transporter le bois et l’herbe pour se chauffer et nourrir les bêtes.

Cette fusion entre tradition et modernité n’est pas sans charme. Je me rappelle notamment, ce moment où Zula est venu nous déposer une tête de chèvre, fraîchement tuée dans notre yourte (entre les bidons de lait qui fermentent et les estomacs de chèvres qui sèchent) afin de nous porter chance…

Le lien étroit qu’entretient la famille avec le monde moderne se manifeste également une fois par mois lorsque Baata, la femme de Zula, se rend à Karakurum, l’ancienne capitale Mongole, pour y troquer le peu de fromage et de viande qu’ils peuvent se permettre de céder contre quelques légumes qui agrémenteront leurs plats quotidiens et de l’essence pour les véhicules.

© Max Muench & What The Film pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

L’importance de l’éducation

Autre preuve de modernité, les Mongols sont très instruits. Zula et Baata sont nés dans une famille nomade et comme la plupart des enfants, ils sont allés à l’école en ville, à l’âge de 10 ans.

Zula y est resté jusqu’à ses 25 ans. Il a d’abord obtenu un diplôme d’économie avant de devenir Ranger, à s’occuper des forêts et des animaux. L’appel de la nature était trop fort pour lui, il est donc revenu au nomadisme. Aujourd’hui, tout comme lui, ses enfants vont à l’école la semaine en internat et ça, malgré le trajet interminable qui les séparent de la ville.

Cette expérience est essentielle dans la culture mongole, car elle permet aux enfants de choisir plus tard ce qu’ils souhaiteront faire : rester en ville pour essayer de se construire dans une société moderne en crise ou revenir à la nature.

J’avoue que pour un jeune de 20 ans, ce choix est vraiment cornélien. La Mongolie souffre d’un fort taux de chômage qui s’aggrave encore un peu plus durant l’hiver. En ville, on retrouve une jeunesse dynamique qui n’en n’a que faire des problèmes de pollution, de chômage… Elle s’éclate dans les bars et partage tout ça sur les réseaux sociaux (oui, tout comme nous en fait). Parlez-leur d’abandonner cette vie pour aller “s’isoler” au fin fond des steppes et ils vous riront au nez.

En même temps, on peut les comprendre, pas simple de s’imaginer dans une yourte totalement perdue durant l’hiver (qui peut atteindre les -50°) le tout, sans voir grand monde durant plusieurs mois.

© What The Film pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Mi-nomade, mi-sédentaire

Aussi incroyable que cela puisse paraître, les nomades bougent finalement assez peu sur de longues distances. Dans ma tête, je les imaginais changer de lieux chaque année et parcourir des centaines de kilomètres mais non, quand ils trouvent un lieu propice à leur élevage, ils s‘installent, tout simplement.

Si les nomades changent régulièrement de lieu de vie, c’est pour une seule simple et bonne raison : les pâturages. Les bêtes doivent constamment avoir de quoi se nourrir. Ainsi, au fil des saisons, les nomades s’installent un peu plus loin dans les terres jusqu’à atteindre leur “winter-camp” dans lequel ils passeront l’hiver.

Ici, on vit en communion avec la nature, en bénéficiant de ses bienfaits, mais également en se soumettant aux menaces qui rodent. Durant notre séjour, deux moutons et une chèvre ont été tués par des loups. Zula, en tant qu’ancien Ranger, n’hésite pas à les pister pour préserver ses ressources.

Ce qui a l’apparence d’un jeu lorsqu’il nous montre ses talents de sniper est en réalité une chasse permanente et une pression invisible qui plane chaque nuit sur le plateau.

Bien qu’isolés, les nomades ne sont pas seuls. Ils se connaissent tous et s’entraident. Ils n’hésitent pas à donner une journée de travail pour aider une famille voisine à ramasser l’herbe pour l’hiver. Une journée récompensée par le prêt d’un tracteur qui soulagera Zula et sa femme de quelques jours de dur labeur. C’est un échange de bons procédés.

Finalement, ce qui s’apparente pour nous à de la survie est simplement la vie. Les tâches sont simples et diverses, difficiles mais gratifiantes. Comme lors de notre voyage aux Philippines pour Disconnect, nous nous sentons reconnectés et conscients de l’équilibre fragile qui régit notre monde.

© What The Film pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Designer nomade ?

Souvent, avec mes proches, quand on s’amuse à débattre des problèmes de nos sociétés modernes, on arrive au même constat, nous sommes trop attachés à nos appartenances.

Notre société pousse pour remettre des frontières qui délimitent clairement notre pays, on s’endette à vie pour devenir propriétaire d’une maison qu’on aura du mal à quitter malgré les problèmes, on devient totalement tributaire et addict à nos petits objets du quotidien pour souvent en oublier l’essentiel, on se refuse des choix de vie par peur de perdre ses avantages, on suit des règles imposées par un système qu’on critique en permanence…

Oui, je sais, le tableau paraît bien sombre. Je grossis volontairement le trait car, même si j’ai tendance à toujours rester optimiste et à profiter de la vie en permanence, j’en suis moi-même le pire exemple.

Du coup, pour lutter face à ce système qui me bouffe, je voyage de plus en plus. C’est le seul moyen qui me donne une réelle impression de liberté mais même là, j’avoue que j’adore revenir chez moi pour apprécier à nouveau ma zone de confort.

Là où la culture nomade m’impressionne, c’est que ce concept est appliqué de manière pérenne. Je reste persuadé que c’est la clef pour vivre une vie épanouie. Au moment où j’écris cet article, je découvre cette étude réalisée à l’Université de Cornell qui va parfaitement dans mon sens !

© What The Film pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Après, il ne faut pas non plus se mentir, la vie de nomade est difficile. Par défaut pour certains, par envie pour d’autres, c’est surtout par dépit que nombre de Mongoles reviennent au nomadisme. Les conditions précaires de la vie en ville et le très fort taux de chômage incitent de nombreuses familles à quitter les ghettos d’Oulan Bator pour revenir à une vie simple.

C’est marrant mais, quand je demande dans mon entourage où ils aimeraient vivre idéalement, la réponse qui revient le plus souvent : “dans plusieurs endroits du monde selon la saison.”

Personnellement, quand je pense à mon avenir en tant que “Designer indépendant” c’est exactement vers ça que je souhaite aller. J’ai la chance de pratiquer un métier qui me permet de travailler de n’importe où dans le monde, alors pourquoi pas ?

En attendant, j’ai opté pour rejoindre l’armée de Gengis Khan ;) !

J’ai écrit cet article avec le “fréro” Axel qui s’occupe également de la voix off et des musiques de nos vidéos chez What The Film.

© Max Muench & What The Film pour la collection Disconnect — Fotolia by Adobe

Ce que nous retiendrons de la Mongolie

  • Une aventure humaine passionnante avec des gens super accueillants, toujours souriants et adorables au quotidien
  • Des paysages à couper le souffle et des animaux partout qui donnent l’impression d’une liberté totale
  • Une déconnexion complète, pas d’électricité (ou très peu) pas de téléphone mobile, pas d’internet, pas de douche, pas de toilettes…
  • Le besoin essentiel d’un “fixer” sur place pour organiser le tournage. Si vous souhaitez partir en Mongolie, je vous conseille vraiment nos amis !
  • Une culture ancestrale passionnante
  • Des repas mémorables dans la yourte avec obligation de goûter les mets locaux par respect :)
  • Mon costume de Guerrier mongol qui les aura bien fait marrer

Téléchargez gratuitement 3 Photos et une vidéo durant 24h

Sachez que vous pouvez acheter la plupart des photos de Max Müench présentes dans cet article en vous rendant ici (30 photos) et 15 Footages vidéos réalisées par nos soins, le tout en 4K.

Pour promouvoir ce 4e Pack Disconnect, nous mettons à disposition
gratuitement 3 photos de Max et une vidéo de Pavlé durant 24h.

Sachez que les trois autres séries avec Sonia Szostak, Brice Portolano et Théo Gosselin sont toujours disponibles sur le site de Fotolia.

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