Toi, je vais t’Ubériser !

Benjamin Berut
En français
Published in
5 min readOct 5, 2015

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Néologisme, néo concept, néo truc…

Dans la grande liste des néologismes conceptuels qui peuplent le domaine de la communication et encore plus celui de la communication quand elle concerne le web, on voit de maintenant ressortir l’expression “Ubériser”.

Bon, on comprend assez vite la logique Ubériser ça doit être quelque chose comme : ringardiser un secteur entier de l’économie grâce à une nouvelle approche fondée sur le numérique.

Voilà, bon c’est clair. Là où les taxis n’ont que minoritairement réussi à intégrer la mobilité, Uber arrive avec la géolocalisation au cœur de son expérience utilisateur, un prix indiqué à la commande la course (et donc on n’est plus en conflit intérieur pour savoir si l’on doit s’énerver contre le chauffeur qui ralentit à 100 mètres de chaque feu qui est au vert depuis plus de 3 secondes) et une nouvelle vision du travail où l’activité Uber n’est qu’une part de tous les métiers que l’on peut exercer.

Bon très bien. Et pour ce que je pense à titre perso, je trouve dommage que l’on ait été si prompts à tenter d’étouffer le modèle que portent Uber ou Heetch mais ce n’est pas la question ici. Non la question est : quand peut on utiliser le terme Ubériser et pourquoi il faut y faire attention ?

Va te faire Ubériser toi même…

Donc, il faut faire attention à ce néologisme déjà parce que ceux que l’économie du web ubérise en premiers ce sont les marque de… l’économie du web.

Par exemple, arrêtons de dire Ubériser mais plutôt Facebookiser parce que le premier grand exemple d’ubérisation c’est la manière dont Facebook à ringardiser les premiers réseaux sociaux comme MySpace… Si si, MySpace vous vous souvenez, vous devez avoir eu un compte et puis un jour vous avez découvert Facebook.

Hein, c’était tellement moderne. Tellement génial… Hein le mélange du moteur “powered by Google”, de la bannière exclusivité en orange sur fond bleu avec l’intitulé de lien “Clique ici”, ah, et la barre de navigation… Voilà un bel exemple de ce que l’économie du web a ubérisé. Sauf que c’était l’un de ses propres produits.

L’économie du web trouve sans cesse de nouveaux challengers prêts à se lancer dans la bataille. Parfois pour changer le monde, souvent pour simplement changer un usage déjà existant.

Et les gros, du web, parce que quand même il y a des gros qui sont installés, eux ils tentent de s’adapter de deux manières possibles (et en avant les néologismes…) :

  1. En se Snapchatisant, c’est-à-dire en intégrant des fonctionnalités propres à un concurrent. Par exemple, Twitter qui va intégrer des photos et vidéos événementielles qui se détruisent après un temps données… Bref une fonctionnalité au cœur de Snapchat. À voir l’article de Jean-Luc Raymond, plus sérieux que le mien, sur ce terme.
  2. En Instagramisant, c’est-à-dire en intégrant des produits web entiers comme Facebook avec Instagram.

Donc, si on parle d’ubérisation il faut déjà bien voir que les mécanismes de cette ubérisation ont avant tout lieu dans l’économie du web avant de toucher la vieille économie.

C’était quand ton dernier voyage en zeppelin ?

Oui, c’est vrai, vous ne souvenez pas et bien ce n’était sans doute pas après 1938. Et pourtant les zeppelins présentaient toutes sortes d’avantages technologiques (décollage vertical) et économiques par rapport à leurs cousins les avions.

Mais voilà, entre enjeux politiques et économiques, l’image que l’on retient des zeppelins c’est celle du crash du Hinderburg en 1937.

Photo de propagande à plusieurs niveaux mais qui surtout va donner à ces machines l’image d’engins dangereux que l’on ne veut pas prendre et qui vont finalement quitter la scène économique réelle pour devenir l’une des références des univers steampunk où résident toutes les grandes innovations que l’histoire à laissées de côté.

Ce qu’il faut retenir de cela ? C’est tout simplement que les innovations technologiques n’intègrent pas facilement l’économie à long terme. Il y en a plus d’une qui pour des raisons, qui n’ont pas toujours à voir avec leurs capacités à faciliter nos usages voire rarement, ont été abandonnées. Et, maintenant, après une période dorée où tous les acteurs en place semblaient ne pas comprendre le web, même les plus anciens et les plus gros se positionnent en mettant cet enjeu au cœur de leur stratégie.

Donc évitons de sortir à tout bout de champ que un tel va Ubériser un tel. Déjà, entrez dans l’économie du web, ensuite on verra si vous changez le monde.

Allez, quelques définitions…

Bon, pour finir, on peut s’amuser à changer le nom de quelques grands acteurs du web en verbe pour peupler nos chers articles de plein de néologismes, néo concept, néo trucs. Sachant que googliser existe déjà plus ou moins et que tout devient possible.

Ubériser : Ébranler profondément un pan de l’économie en place en proposant une nouvelle pratique résolument orientée numérique. Citation : “Je vais ubériser le monde entier !” Lanceur de startup cherchant des crédits.

Facebookiser : Ringardiser un acteur du web, prendre ses comptes, le laisser sur le bord de la route et devenir le maître du monde. Citation : “Il faudrait trouver un moyen de facebookiser le fonctionnement de notre entreprise.” Nouveau P-DG d’une grande structure en manque de légitimité. Synonyme : Tinderiser (y a encore des gens sur Meetic ?)

Snapchatiser : Intégrer les fonctionnalités d’un concurrent pour conserver son public. Citation : “Si on ne snapchatise pas très vite leurs fonctions de géolocalisation et de sélection on est morts !” Responsable de Meetic à propos de Tinder.

Instagramiser : Racheter un concurrent dangereux pour le mettre au cœur de votre stratégie. Citation : “Il faudrait quand même qu’on finisse par instagramiser Messi si on la veut cette Champions league…” Laurent Blanc, entraîneur du PSG.

Meeticiser : (se prononce meetikiser) Recentrer son offre autour de valeurs fortes pour contrer la concurrence. Citation : “Bon finalement, meeticisons sur notre cible des CSP +++ avec le nouvel Iphone.” Dirigeant d’Apple.

Amazoniser : Faire évoluer l’ensemble des process d’une entreprise existante pour la rendre hyper dominante sur le web. Citation : “On va amazoniser votre poste, vous allez voir ça va être génial !” Responsable RH spécialisé dans la gestion des cas de réticences au changement/licenciements massifs.

Zeppeliniser : Casser l’émergence d’un concurrent issu d’une économie nouvelle et avec une volonté de modifier les usages. Citation : “Je vais te le zeppeliniser moi ce petit c.. d’ubérisateur !” Chauffeur de taxi en colère.

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Benjamin Berut
En français

Le #web, les nouveaux #médias, le #storytelling #mooc et le #gamedesign aussi et, ah, aussi le #jdr