Et si être Designer en 2019, c’était travailler avec des personnes sans réinventer la poudre?

Rémy Saddour
Demain sera bien. Par Haigo.
10 min readJan 10, 2019

Vous considérez les designers comme des exécutants ? Dommage, si vous leur donnez l’espace suffisant, ils pourraient être vos meilleurs alliés pour accélérer et transformer votre business.

Être Designer c’est quoi ?

Quand je regarde la définition Wikipédia pour “designer”, il est écrit : “le designer est un praticien du design, il conçoit des objets de toutes sortes (produits, lieux, messages) qui visent à «maintenir ou accroître l’habitabilité du monde». […] Le travail de designer est souvent mené en collaboration avec d’autres disciplines, pour analyser les problématiques d’un projet et y apporter des solutions”

Quand je regarde autour de moi, le terme design, revient régulièrement dans divers cas d’utilisations, graphique design, UI design, UX design, service design, product design, etc…

Moi-même j’ai eu l’occasion d’avoir plusieurs noms de postes depuis que je suis sorti d’école, UI designer, UX designer, Creative designer, Interaction designer, Prototyper, Motion designer, Directeur Artistique, Créative Tech… Et finalement aujourd’hui chez HAIGO, “Designer”. Lors de mon expérience très française du travail, j’ai constaté que design était souvent associé à graphisme.

Autant de noms, de compétences, de sujets différents. Alors est-il possible d’être designer si tous ces domaines ont en commun le même mot, quelles sont les compétences, les capacités et les valeurs transverses ?

Pour ma part, j’ai le sentiment que mon travail a toujours été sensiblement le même et cela peu importe l’intitulé de poste… J’ai toujours fait de la veille, regardé l’état de l’art, les tendances émergentes. J’ai aussi toujours cherché à résoudre des problématiques et je pense qu’une partie de ma réponse se trouve ici : essayer de simplifier la vie des gens, des utilisateurs finaux.

C’est pour ça que j’ai rejoint HAIGO en tant que Designer. Je cherche à résoudre des problèmes pour les utilisateurs, les clients de nos clients, des humains peu importe le support ou le domaine.

Chez HAIGO nous cherchons à optimiser les usages ou améliorer une expérience plus que les outils. Cela nous mène à faire des sites web, des apps, des espaces, des produit, etc.

Le cœur du sujet est l’humain. La forme que prendra la mise en application dépendra de notre recherche et de l’idéation qui en découle.

Le Designer face aux cultures d’entreprise.

Chez HAIGO, lorsque nous faisons une mission, nous commençons par une phase de recherche utilisateur afin de comprendre le ou les besoins des personnes ciblées. Cette phase nous permet de mieux comprendre les besoins et les usages de ces personnes et il n’y a pas de raccourcis possibles. Le seul moyen de comprendre leurs besoins c’est d’aller les rencontrer régulièrement. Il ne s’agit pas de leur donner la parole une fois et ensuite d’extrapoler pendant plusieurs années derrière.

Je vous invite d’ailleurs à aller lire les articles “User Research : quésaco ?” et “5 faux prétextes pour ne pas faire de User Research” de Marine Antunes Dias sur le sujet de recherche utilisateur pour approfondir le sujet !

L’histoire nous montre qu’un certain nombre d’entreprises ont su tirer leur épingle du jeu en donnant la parole aux utilisateurs finaux, d’une manière ou d’une autre. Par exemple Amazon avec leur service client très fluide proposant des retours et/ou remboursement ultra-fluide ou encore CaptainTrain (devenu TrainLine) intégrant le service client avec l’équipe de conception.

Je vous invite d’ailleurs à lire ceci sur la gestion du service client chez CaptainTrain ou encore la façon dont Jeff Bezos conçoit ce que doit être le service client chez Amazon

Image: Mark Armstrong

Cela montre aussi des changements organisationnels assez forts qui nécessitent un changement d’habitudes et donc de culture, qui parfois peuvent mettre en déroute certaines initiatives pourtant bien senties.

Pour exemple, lors de ma précédente expérience, j’ai participé à la refonte d’Auchan:Direct, qui en un an et demi a changé leurs modes de fonctionnement, a intégré les retours utilisateurs afin d’orienter les choix de conception, de développement et ainsi établir leur nouvelle roadmap.

Il a été très difficile pour le groupe Auchan d’intégrer ces nouvelles pratiques et ces nouveaux modes de travail dans une organisation classique.

Le Designer cherche à comprendre.

Lorsque je commence un projet, l’un de mes premiers réflexes est de faire l’état de la situation, de challenger, d’aller poser des questions, d’essayer d’identifier les contours du problème à résoudre.

Il arrive souvent que le problème soit plus profond qu’il n’y paraît, ou qu’il soit mal formulé. Il est donc important de bien prendre le temps de re-qualifier le sujet avec les membres du projet.

J’ai en tête l’exemple de McDonald’s qui avait pour objectif de vendre plus de Milkshakes. Ils se sont concentrés sur le produit, ont demandé aux utilisateurs leur avis sur le Milkshake, les ont écoutés. Et pour finalement des résultats négligeables.

Le souci n’était pas le produit. C’était le contenant et les conditions d’utilisation de ce dernier, paille trop étroite, gobelet qui ne rentre pas dans le porte-gobelet…

C’est un cas d’étude que Clayton Christensen, professeur à Harvard Business School donne à ses étudiants lors qu’il parle du “Jobs to be done” et de l’importance d’approcher la problématique sous plusieurs angles avant de s’y attaquer.

Je cite Clayton Christensen lorsqu’il parle du principe de Jobs to be done, mais il est important de spécifier qu’il n’y a pas de recette ou de méthodologie miracle.

L’idée c’est vraiment de s’intéresser aux humains derrière les cibles marketing et d’analyser leurs problèmes dans un contexte réel d’utilisation.

Bref, de s’intéresser vraiment à aux utilisateurs, il ne suffit pas de dire qu’on est Agile, Scrum, que l’on fait du Design Thinking pour réussir, tout autant qu’il n’est pas obligatoire d’utiliser une méthode ou d’être certifié.

Le Designer cherche à estimer les bénéfices et les coûts.

La compréhension de la problématique permet aussi de définir les moyens que l’on va mettre en œuvre pour trouver la solution.

Mettez-y trop peu de moyens et vous n’arriverez pas à créer l’impact nécessaire pour résoudre le problème. Au contraire, investissez trop et vous ferez de l’over-delivery (perte de temps et d’argent).

Je dois traverser l’océan Atlantique, pour aller de l’Europe à l’Amérique du nord, je vais y aller à la nage, je vais utiliser une barque, un bateau à moteur, un avion ou investir dans de la R&D pour trouver un moyen de me téléporter ?

c’est partie pour une petite brasse!…

En tant que designer, nous avons pour objectif de trouver la meilleure solution pour l’utilisateur final. Cela ne signifie pas pour autant que nous puissions gâcher les ressources que nous avons à notre disposition. J’ai la responsabilité de concevoir une solution qui répondra aux problèmes avec un minimum de coûts et le principe de Pareto me semble une bonne base.

Si la loi se base sur un constat que 80% des effets découle de 20% des causes, il peut être utilisé pour prioriser un backlog en cherchant 80% d’efficacité sur le problème traité pour 20% d’effort.

Je ne vais pas entrer dans le détail aujourd’hui, car cela mérite un article dédié, néanmoins n’hésitez pas à me contacter je serai ravi d’en parler !

Audrey est en train de prioriser les fonctionnalités à intégrer dans l’app avec l’équipe projet pour délivrer un maximum de valeur le plus rapidement possible.

Chez HAIGO, nous avons tendance à proposer des prototypes ou P.O.C (Proof of concept), afin de vérifier nos hypothèses et éviter des coûts de conception et de développement conséquents. Lors du format design sprint à l’étape de la sélection des fonctionnalités du prototype à tester, nous nous servons d’une grille permettant d’ordonner les fonctionnalités avec le plus de bénéfices et au coût moindre. Cela constitue un autre moyen de sélectionner une solution pertinente au regard de nos ressources.

Une fois encore il ne s’agit pas de copier une façon de faire, il s’agit de prendre le temps de réfléchir au meilleur moyen de faire nos choix en fonction de la situation.

Le Designer amène des ateliers et oriente les réflexions.

Nous (designers) accompagnons les Product Owner et Program Manager (les personnes en charges de spécifier et suivre les projets), ils participent à la recherche utilisateur, la restitution et de tous les outils qui peuvent être utiles pour comprendre la recherche (User Journey, Personae, Stories…) Mais le designer va aussi mettre en place des ateliers d’idéation afin de trouver les idées qui constitueront le cœur de la solution.

Bien que les ateliers suivent généralement une structure similaire, les exercices d’idéations peuvent prendre des formes diverses et variées en fonction du sujet, mais aussi en fonction des personnes qui participent.

cartes d’idéations HAIGO — (http://cartes-brainstorming.haigo.fr/)

Un des exercices que nous utilisons le plus est le “Et si”. Il se révèle très utile pour faire sortir les participants de leur zone de confort pour imagner des solutions créatives différentes auxquelles ils n’auraient pas pensé spontanément.

Il nous arrive aussi parfois de créer des exercices dédiés en fonction des sujets. Lors d’un atelier sur une problématique liée aux revêtements de sol, nous avons pu mettre en place un jeu de rôle qui invitait les participants à se mettre dans la peau des architectes.

Cela leur a permis d’être dans de bonnes conditions, d’avoir plus confiance en eux, de libérer leur créativité lors de l’atelier pour aboutir à une solution pertinente. Le tout dans une situation proche de la réalité et du terrain.

Le Designer décompose, c’est comme cela qu’il conçoit.

Une chose que je fais depuis assez longtemps sans vraiment m’en rendre compte, et qui pourtant est un élément clé de la conception, c’est décomposer. Qu’il s’agisse de disséquer une interface, un mouvement ou encore un usage, je découpe systématiquement les problèmes afin de mieux les comprendre.

Lors de la création d’une interface, il est important de connaître la raison pour laquelle un élément existe. Par exemple, la différence entre une checkbox, un switch button ou un radio button, peut sembler être un détail. Mais les différences sont très importantes et il est nécessaire d’utiliser le bon élément au bon endroit.

Au même titre qu’il existe une syntaxe, une grammaire et une orthographe française que tout le monde emploie pour communiquer, ces éléments graphiques, tout comme la structure de la langue française permettent d’établir un référentiel commun précis qu’il est important de préserver afin de faciliter les interactions.

À mon sens, cela permet de capitaliser sur des usages popularisés par Google, Apple… Qui ont travaillés pendant des années sur la mise en place de standards d’interfaces, sauf cas exceptionnel, aucun utilisateur final ne vous attendra sur l’usage novateur d’un élément d’interface.

Pour illustrer mon propos, il m’est très rarement arrivé de retravailler un menu de navigation parce qu’il n’était pas “joli” ou pas assez “innovant”. A contrario, je vois régulièrement des retours clients sur des menus de navigation qui posent problème, car mal conçus, ne répondant pas aux usages avec des entrées non pertinentes reflétant souvent un souci dans l’architecture d’information du site.

Même si vous souhaitez faire une interface “innovante”, commencez par une interface standard que tout le monde comprendra. Concentrez-vous sur l’amélioration des usages existants et des besoins à combler, vous partirez d’une bonne base afin d’innover.

Chercher à décomposer reste pertinent autant sur la construction de ces interfaces que sur la conception du comportement/animation de ces dernières ; et plus particulièrement des interfaces mobiles.

Material Design (de Google) a notamment beaucoup travaillé sur ce principe avec les logiques de visual continuity permettant aux utilisateurs de comprendre leur position et état d’avancement par le mouvement.

Visual continuity transition exemple — (Source: https://material.io/)

Décomposer les mouvements permet de comprendre finement le comportement des interfaces d’un point de vue technique, mais aussi comment se comportent les éléments dans le cas d’une interface fluide ou responsive.

Elevated UI levels exemple — (Source: https://material.io/)

Cela a aussi le bénéfice d’aider à mieux comprendre le principe de profondeur des éléments dans une interface.

Le Designer, artiste ou pas ?

Finalement, c’est un peu l’histoire de ma vie professionnelle. Bien que j’ai eu des cours d’histoire de l’art, d’art plastique, de photo, etc. Je ne me suis jamais comporté ni considéré comme un artiste.

Je n’ai jamais été à l’aise face à un client pour présenter quelque chose de non technique ou non pragmatique. Je ne suis pas dans le ressenti bien que j’en comprenne l’intérêt, la marque a nécessairement besoin d’une identité forte et d’une zone d’expression qui doit lui être dédiée, et cela quel que soit le projet.

Cependant, dans le rôle de designer, je considère les principes artistiques comme des outils me permettant de rendre plus agréable des solutions qui doivent être avant tout utilisables et utilisées.

Le branding nécessite à mon sens une approche particulière et demande des compétences différents de celles de la conception d‘interface que tout les designers n’ont pas forcément, au même titre qu’un peintre en bâtiment et artiste peintre aurait la peinture comme point commun, mais néanmoins des univers et objectifs très différents.

Le Designer, un partenaire de co-création

Il y a peut-être un dernier point que j’ai en tête. Quelque chose que je vois bien trop régulièrement : le designer n’est pas un exécutant. Il n’est pas votre graphiste qui réalisera ce que d’autres ont demandé.

Chez HAIGO, un designer, même junior, est un partenaire ! Nous travaillons avec nos clients, chez eux pour leurs clients finaux, nous partageons nos réflexions et découvertes avec toutes les parties prenantes du projet. Nous prenons en compte le propos de chacun et nous construisons grâce aux réflexions et au travail commun.

“Designers must be stewards of design rather than dictators.“

Cassie McDaniel

Les décisionnaires n’ont pas à choisir parmi des solutions “présentées” mais contribue à la création de la solution en orientant la co-création. En tant que designer, j’ai ainsi le rôle de concevoir, d’orienter les réflexions et d’assurer la qualité de réalisation de la solution.

Ne limitez pas le designer à un rôle de graphiste produisant des interfaces en fin de chaîne de conception, intégrez-les au plus tôt dans vos projets et laissez les transformer vos réunions en ateliers participatifs, votre entreprise fera un grand pas vers la conception centrée utilisateur.

Chez Haigo, nous recrutons régulièrement des Designers.

Si vous voulez travailler avec moi et résoudre des problèmes, c’est par ici: https://www.welcometothejungle.co/fr/companies/haigo

Rémy Saddour, Designer chez HAIGO.

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Rémy Saddour
Demain sera bien. Par Haigo.

Hello, i solve design problems by designing suitable experiences for the web and the mobile. “Guess, try, check, learn, retry…” is the way how i work.