Le vrai-faux des contrats à impact social

Les contrats à impact social, déclinaison hexagonale des Social Impact Bonds, arrivent en France. Martine Pinville, secrétaire d’Etat à l’Economie sociale et solidaire, a lancé la phase d’appel à projets le 15 mars 2016. De quoi s’agit-il ?

Institut de l'Entreprise
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4 min readMar 17, 2016

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Comment répondre aux besoins sociaux croissants de la société française comme l’exclusion, l’illettrisme ou encore la dépendance ? Comment trouver des financements quand la puissance publique doit réduire toujours davantage ses dépenses ? Comment inciter le privé à investir dans le secteur social ? Comment soutenir et déployer les initiatives portées par nombre d’associations en faveur des populations en difficulté ?

Une solution existe : les Social Impact Bonds (SIB), lancés en France par la secrétaire d’Etat à l’Economie sociale et solidaire, Martine Pinville, sous le nom de « contrat à impact social » – un mécanisme financier qui permet de lever des fonds privés pour financer des actions sociales innovantes et souvent préventives.

À LIRE AUSSI: Les Social Impact Bonds : pour une collaboration (enfin) vertueuse entre le privé et le public

Comme on peut le voir dans la vidéo ci-dessus, le principe est le suivant : l’autorité publique confie à une organisation, par exemple une association, une mission précise avec des objectifs identifiés (faire baisser le taux de récidive de x%, lutter contre l’illettrisme en assurant des cours permettant à x personnes de maîtriser les fondamentaux, etc.). Le privé finance l’action et assume le risque financier dans l’espoir d’un gain en cas de succès du programme. Si l’initiative réussit, l’autorité publique rembourse le privé (avec des intérêts en cas de dépassement des objectifs). En cas d’échec, elle ne doit rien et n’a engagé aucune dépense.

Les contrats à impact social suscitent de vives réactions, enthousiastes pour certaines, épidermiques pour d’autres. Démêlons le vrai du faux.

« On privatise l’action sociale » : FAUX
L’Etat ne se désengage pas, il transfère le risque aux investisseurs privés
.

L’autorité publique fixe les objectifs, et conserve donc la maîtrise des orientations de l’action sociale.

Deux cas. Soit les objectifs ne sont pas remplis : les investisseurs perdent leur mise et le secteur public a traité une problématique sociale d’une manière innovante et sans engager de dépenses. Soit les objectifs sont atteints : l’État (ou la collectivité) a réalisé des économies potentiellement substantielles (en assumant une politique sociale qui a fait ses preuves).

« Le contribuable va financer les banques et les multinationales » : FAUX
Les contribuables ne sont en rien engagés.

Au contraire, ils sont protégés du financement de programmes déficients puisque le risque pèse sur des bailleurs privés.

« On exclut une part croissante de la population » : FAUX
Les actions portées par les Social Impact Bonds dans le monde s’adressent aux populations en difficulté.

Certes les groupes concernés par chaque contrat sont relativement réduits aujourd’hui, notamment car les montants en jeu restent modérés. Cependant, les populations éligibles sont par définition des personnes fragiles : personnes handicapées, âgées, défavorisées, etc. qui peuvent espérer bénéficier d’actions plus performantes, et souvent préventives.

Ex : lutter contre la récidive des détenus, œuvrer pour la réinsertion en luttant contre l’illettrisme, soutenir des familles qui risquent de se voir retirer la garde de leurs enfants…

« Les financeurs (privés ou philanthropes) y trouvent leur intérêt » : VRAI
Il s’agit en effet d’un investissement, et non d’un don.

Les SIB permettent de recycler l’investissement initial dans d’autres projets sociaux, voire de réaliser des profits. S’ajoutent les retombées positives en termes d’image. En contrepartie, ils assument le risque de perdre leur mise.

« On ne peut pas mesurer l’impact de l’action sociale » : FAUX
Il est effectivement plus compliqué de mesurer les performances d’une action sociale que celles d’activités économiques classiques.

Mais la recherche progresse et, grâce à l’appui de nouvelles techniques (comme les essais « randomisés », issus entre autres des travaux d’Esther Duflo), il devient possible de construire des indicateurs de plus en plus fiables.

« Les contrats à impact social ne sont qu’une nouvelle forme de partenariats public-privé » : FAUX
Dans un SIB, la rémunération du financeur n’est pas automatique
, elle dépend des objectifs évalués de manière indépendante.

À l’inverse du PPP qui conduit à une dépense pour les pouvoirs publics, le SIB entraîne une économie budgétaire quel que soit son résultat.

« L’efficacité économique au service de l’intérêt général, c’est possible ! » : VRAI
Les politiques sociales sont mieux pilotées.

Cet outil permet d’introduire, dans le domaine social, une démarche systématique d’évaluation qui, à terme, rend possible la sélection et la diffusion des expérimentations réussies. La démarche permet aussi de rendre le tiers secteur plus sensible à l’efficacité de ses actions.

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Pour en savoir plus :

La note de l’Institut de l’entreprise, par Benjamin Le Pendeven, Yoann Nico et Baptiste Gachet :

Social Impact Bonds : un nouvel outil pour le financement de l’innovation sociale

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