Villes et territoires : pour une innovation au service du bien commun

Entretien avec Jean-Louis Missika — Ville de Paris

Ghislain Delabie
Le Lab OuiShare x Chronos

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5 min readMay 11, 2017

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Cher lecteur, chère lectrice,

Depuis 3 mois vous suivez et partagez nos publications traitant des services urbains, des nouveaux usages et modèles économiques, qui sont le fruit des recherches, des rencontres et de la veille effectués au sein du Lab OuiShare x Chronos. Au nom de toute l’équipe, à l’occasion de la publication d’une interview avec Jean-Louis Missika abordant tous ces enjeux, je souhaitais vous remercier et vous inviter à poursuivre la conversation.

Dans les prochaines semaines de nombreux contenus issus de nos explorations DataCités, Sharitories et Mobility as Networks viendront alimenter cette publication. Pour aller plus loin nous allons progressivement mettre à votre disposition des “Lettres aux lecteurs” régulières pour vous partager des invitations à nos évènements de débat et de restitution de travaux, de la veille internationale et une sélection de nos meilleurs articles.

Amicalement,

Ghislain Delabie — Le Lab OuiShare x Chronos

Notre entretien avec Jean-Louis Missika

Dans un riche entretien que Jean-Louis Missika nous a accordé, l’adjoint à la maire de Paris en charge de l’urbanisme, de l’innovation et de l’attractivité, revient sur la manière dont les villes oeuvrent pour que les innovations qui se développent sur son territoire bénéficient non seulement à une catégorie spécifique d’usagers, mais contribuent à la vitalité de tout l’écosystème urbain, et à celle de ses acteurs, habitants, entrepreneurs, entreprises et opérateurs de service public.

Jean-Louis Missika — Source : Interview Le Lab

Qu’il s’agisse de lutter contre la pollution, de partager l’espace public, de développer des services numériques ou de transformer les mobilités (de personnes et de biens) en utilisant les véhicules autonomes, les villes agissent de plus en plus collectivement, par des alliances mondiales. Elles sont conscientes que si elles ont une connaissance fine et réactive des enjeux de leur territoire, elles ne peuvent apporter des solutions, et peser face à des acteurs privés mondialisés, sans décider en commun de standards, de politiques et d’approches de l’innovation.

Un entretien passionnant finalement car y sont évoqués quelques enjeux clef de la politique d’innovation des territoires pour les prochaines années : la négociation avec les grandes plateformes, la création de plateformes de plateformes locales pour mieux tirer partie des données, les nouvelles formes de coopération avec l’écosystème local et les citoyens, la définition de l’intérêt général, et une nouvelle régulation des mobilités.

Quelques verbatims de Jean-Louis Missika

Hôtel de Ville de Paris

Sur les données, leur statut, et la manière de les gérer

“Il faut voir la donnée comme étant le levier de l’amélioration des déplacements dans une ville comme Paris, mais aussi de l’amélioration de la dépense énergétique, de la gestion de la pollution.”

“Les données [de Waze] peuvent être considérées comme des données d’intérêt général.”

“La donnée d’intérêt général, c’est juger la donnée en fonction de son usage et de l’intérêt qu’elle peut avoir pour la collectivité”

“Cette percée conceptuelle est assez intéressante parce que justement cela va permettre de donner accès ou de contraindre l’accès à un certain nombre de données qui sont privatisées ou privatisable”

“Idéalement une régulation par rapport à Google doit être mondiale. […] Nous [les villes] pouvons négocier, échanger, trouver des modalités de cohabitation ou de coopération mais nous ne pouvons pas les contraindre. Nous sommes […]dans la soft law”

“Uber est en train de s’apercevoir que sa stratégie d’affrontement avec les villes est une stratégie perdante”

“Nous arriverons à créer des plateformes coopératives d’information, et celui qui ne sera pas sur cette plateforme sera perdant”

“C’est une approche de design et d’une Data Science qui serait entièrement consacrée au bien commun”

Sur l’intérêt général et les coopérations entre acteurs locaux

“Pour ces services locaux (livraison par vélo), on se demande pourquoi on a besoin d’une multinationale américaine pour les gérer”

“Le travail de la ville est d’accompagner les initiatives qui lui paraissent aller dans le sens du bien commun et de l’intérêt général”

“Peut être que des nouvelles formes de coopérations peuvent naître, plus horizontales et beaucoup moins verticales. La ville dans tout cela, son boulot, c’est vraiment d’accompagner, d’informer, de former et d’aider les initiatives qui lui paraissent aller dans le sens du bien commun et de l’intérêt général”

Sur les innovations de rupture dans la ville, et le véhicule autonome

Si le régulateur dit clairement “nous n’acceptons pas des véhicules individuels propriétaires autonomes dans notre ville”, cela change complètement le business model de ces véhicules.

“L’île-de-France et Paris vont connaitre une double révolution, celle du Grand Paris Express et celle du véhicule partagé autonome.”

“Il y a une initiative de [Michael] Bloomberg à laquelle la ville de Paris participe pour justement réfléchir collectivement aux règles du jeu que les villes vont essayer d’imposer aux constructeurs et aux gestionnaires de flotte

“La question de “comment faisons-nous en sorte que les mobilités douces et les transports publics ne soient pas violemment impactés par le transport autonome” dépend uniquement de la définition des règles du jeu que nous serons capable d’instaurer de manière majoritaire dans les rues des grandes villes”

“La Maire de Paris, présidente du C40, a lancé une réflexion sur les outils de mesure de la pollution dans le monde réel, et non en laboratoire. Ça s’est passé début avril à Paris avec les maires de Londres et Séoul”

“On va supprimer des dizaines de millions d’emplois […] Il va falloir les former, leur permettre d’inventer”

“Si en on a les 40 ou 100 villes les plus importantes de la planète qui disent aux constructeurs “voilà les règles du jeu communes que nous allons appliquer à chacune de nos villes”, là il est clair que nous aurons un pouvoir de négociation beaucoup plus important pour pouvoir faire en sorte que le véhicule autonome ne soit pas un cauchemar et soit plutôt quelque chose de positif”

Ce sujet sera abordé lors du prochain Ouishare Fest (5 -7 juillet 2017)

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Ghislain Delabie
Le Lab OuiShare x Chronos

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