Suzanne Lee. De BioCouture à …

Sabrina Maroc
Open BioFabrics
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6 min readMar 18, 2019

Puisque la création de BioCouture date d’un peu plus d’une quinzaine d’années, certaines de ses données disparaissent du Web: effacement de site Internet, lien mort … C’est pourquoi je vous propose de (re)découvrir les travaux de Suzanne Lee, pionnière dans le domaine des matériaux vivants appliqués à la mode.

Pour les personnes qui ont cliqué sur cet article afin d’accéder à la recette BioCouture partagée sous licence creative common par Suzanne Lee, scrollez un peu vous y êtes presque!

Images extraite du site Internet BioCouture de Suzanne Lee 2016

Suite au visionnage du documentaire The Next Black — A film about the Future of Clothing d’AEG, j’ai découvert le parcours de Suzanne Lee alors chercheuse seniore à Central Saint Martins, ainsi que son rôle dans l’essor de la biofabrication. Depuis, ce déclic a donné naissance au projet Open BioFabrics en 2015.

Images extraites de ma présentation: Introduction à la biofabrication — 2018 disponible en 🇬🇧et 🇨🇵

Au début des années 2000, le manque de durabilité de l’industrie de la mode et le peu d’ouvrage dans ce sens ont poussé Suzanne Lee a expérimenté des alternatives écologiques à l’intersection du design et des sciences. C’est grâce à des souches de kombucha, symbiote de bactéries (Gluconacetobacter xylinus) et de levures, qu’elle cultiva des tissus en fibre de cellulose bactérienne. Pour améliorer son processus, elle collabora avec Paul Freemont et Alexander Bismarcker, chercheurs à l’Imperial College de Londres.

Puis en 2003, elle fonda BioCouture, un studio de conseil en biocréation avec une vision futuriste de la mode: où les vêtements sont cultivés grâce à des cuves de bactéries. Suzanne Lee a fait pousser une dizaine de vêtements, dont beaucoup ont été exposés, comme au Musée des Sciences de Londres.

Prototypes réalisés par Suzanne Lee avec sa recette BioCouture — Crédits: Suzanne Lee

En même temps, elle publia Fashioning the future — Tomorrow’s wardrobe, un livre qui répertorie des innovations comme: la robe en spray, le manteau invisible, le t-shirt qui parle…

Les différentes couvertures du livre: Fashioning the Future — Tomorrow’s wardrobe de Suzanne Lee, 2015

Cet ouvrage en anglais est toujours disponible en version papier neuf ou d’occasion, et dans certaines bibliothèques.

Le partage en open-source de son procédé de culture de la cellulose bactérienne a largement contribué à la diffusion de ce nouveau mode de fabrication. Les médias se sont aussi emparés du sujet. D’ailleurs, le New York Time classa son concept parmi les 50 meilleures inventions de 2010.

Recette BioCouture de Suzanne Lee sous licence BY NC 4.0

Ces documents sont sous licence creative commons BY NC 4.0 :
Attribution — Utilisation non commerciale 4.0 International
. En cas de réutilisation, vous devez citer la source du document (BioCouture de Suzanne Lee) et ne pas en faire une utilisation commerciale. Pour de plus amples informations, consultez directement le détail de la licence.

En 2011, Suzanne Lee présenta sa vision de la mode lors d’un TED. L’impact fut tel que la vidéo fut visionnée plus de 1 300 000 fois sur la plateforme, traduite dans 39 langues et généra énormément de commentaires de personnes souhaitant s’impliquer dans la recherche et le développement du procédé.

Suzanne Lee: Faites pousser vos propres vêtements — TED 2011

Les sous-titres de la vidéos sont disponibles en français. Pensez à les activer.

En 2013, le court-métrage Shoe Factory Tour transposa sa vision de l’industrie du futur, avec des chaussures conçues et cultivées sur mesure. Cette vidéo fut diffusée lors de l’exposition En vie/Alive, soutenue par la fondation EDF.

Bioforme industries — A Shoes Factory Tour par BioCouture - 2013

La même année, Suzanne Lee fut nommée comme l’un des 10 meilleurs innovateurs sur le focus: matériaux, par l’organisation Launch fondé par Nike, la NASA, l’Agence des États-Unis pour le développement international, et le Département d’État des États-Unis.

Présentation de Biocouture par Suzanne Lee à Launch — 2013

Accès à sa présentation visible en arrière plan de la vidéo ci-dessus.

Avec sa participation au programme d’accélération Launch, Suzanne Lee proposa de développer une communauté de pionniers de l’innovation matérielle open source les «bioneer», pour catalyser le développement de la cellulose bactérienne. Bien que la plateforme initialement présentée n’a pas vu le jour, le travail de Suzanne Lee contribuera grandement à l’émergence de nombreuses communautés qui ont et expérimentent encore le potentiel de la cellulose bactérienne.

D’ailleurs, l’une des toutes premières missions d’Open BioFabrics était de : démocratiser les biofabrics* via l’intelligence collective. Pour répondre à cette nécessité de convergence d’échange, une plateforme de documentation open-source: https://openbiofabrics.github.io/ avait été mise en place par l’un des membres de l’équipe, Xavier Coadic. Cette ressource n’est désormais plus à jour.

Ce que j’appelle biofabrics, ce sont les tissus issus d’un processus de biofabrication. Autrement dit, les tissus cultivés grâce à des micro-organismes, comme des bactéries ou/et des levures, algues, mycélium ou cellules souches.

En 2014, Suzanne Lee fonda le sommet annuel: Biofabricate. Un événement qui met à l’honneur les dernières recherches, les entreprises, et des performances autour de la biofabrication. La dernière édition a eu lieu le 13 décembre 2018 à New York, voici ma synthèse du livestream.

La même année elle est devenue Chief Creative Officer pour Modern Meadow. Cette entreprise américaine utilise les derniers outils biotechnologiques pour construire un nouveau monde de matériaux, à commencer par leur première marque de matériaux biofabriqués grâce à des levures: Zoa.

Vidéo de présentation de ZOA par Modern Meadow — septembre 2017

L’emploi des micro-organismes dépasse largement le cadre du secteur de la mode. Tout comme BioCouture de nombreux projets ont ouvert la voie à des recherches sur le potentiel des bactéries. Dans les années 2000, des équipes scientifiques s’y sont intéressées pour des domaines aussi variés que le génie civil, le médical ou l’art.

En 2007, Victoria S. Whiffin met en évidence dans sa publication le rôle de bactéries dans les processus de renforcement des sols. Actuellement ces travaux servent de référence pour des études sur le bio-ciment. D’ailleurs, son co-auteur Leon A. van Paassen a travaillé avec la bactérie Sporosarcina pasteurii. Ses recherches l’ont mené à des projets de biodesign: BioGrout et BioBricks. Ce dernier est une brique de grès pouvant servir de matériau de construction. Ces expérimentations ont inspiré Damian Palin, artiste/biominéralogiste pour créer A radical means, un procédé de coulée induit par les micro-organismes pour produire des objects, tels que des selles de grès.

En 2012, Helen Fink publie un article sur les nouvelles opportunités qu’offrent la cellulose bactérienne pour créer des vaisseaux sanguins artificiels. Axcelon Dermacare Inc. va prochainement commercialiser les pansements NanoDermMC, constitué d’une pellicule microfibrillaire biosynthétique de cellulose.

Vaisseau sanguin artificiel. Image University of Gothenburg. // A radical means Image Damian Palin . // NanoDermMC. Image Axcelon Dermacare Inc.

Les avancées technologiques ainsi qu’une meilleure compréhension des interactions entre (micro-)organismes permettent des avancées considérables dans notre compréhension du monde et la prospection de nouveau mode de (bio)fabrication.

Pour aller plus loin loin

Toutes les sources de cet article sont disponibles via les liens : mots surlignés et depuis ma présentation: Introduction à la Biofabrication, disponible en 🇬🇧et 🇨🇵. Attention, il s’agit d’un document édité en mai 2018 et non mis à jour depuis.

Good new

[Astuce] Le site internet biocouture.co.uk n’est plus disponible depuis 2016. Cependant il est toujours possible de le consulter grâce à Web Archive, le site qui archive le Web depuis plus de 20 ans .

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Sabrina Maroc
Open BioFabrics

Écris pour Open BioFabrics (biofabrication) , Installation en libéral (médical) et mon propre compte Sabrina Maroc (fashion tech et artisanat)