L’hybridation en Sciences Cognitives

Republication d’une thèse datant de 1995, pour actualisation en mode coopératif

Ay. Poulain Maubant
4 min readMay 8, 2014

De 1992 à 1995 j’ai travaillé ma thèse intitulée “Collaboration entre les réseaux connexionnistes et le traitement symbolique. Mise en œuvre sur une machine parallèle à grain multiple”. C’était une époque très excitante pour un doctorant, le web était en train de naître et nous commençions à échanger entre thésards du monde entier d’une nouvelle manière, celle imaginée dans As we may think 40 ans plus tôt. Avec quelques amis rencontrés sur le réseau ou dans les labos, nous fondions en France la Guilde des Doctorants.

Mon travail de recherche a été fortement multidisciplinaire. Ingénieur Télécom d’origine, j’ai été hébergé par deux laboratoires, l’un en Intelligence Artificielle et Sciences Cognitives, dirigé par Jean-Pierre Barthélemy, et l’autre, en informatique, qui développait une machine hautement parallèle, à base de transputers, de FPGA et de DSP. Je me plongeais alors dans plusieurs disciplines nouvelles pour moi, et notamment la neurobiologie. Le but de ma thèse était de réunir deux courants de l’Intelligence Artificielle qui s’étaient séparées des dizaines d’année plus tôt, et de développer des nouveaux systèmes, hybrides, sur une machine parallèle. Les résultats ont été surprenants et prometteurs, mais pour de nombreuses raisons je n’ai pas pu poursuivre ces recherches et ai effectué un long détour par d’autres voies, cependant jamais très loin de la Recherche.

Les années ont passé, et j’ai toujours gardé un œil sur les Sciences Cognitives. Depuis quelques temps certaines des perspectives que j’avais proposées sont réalisables, et j’ai bien envie de me replonger dans mes travaux. Pour commencer je devais republier ma thèse pour la documenter avec des résultats plus récents, la soumettre à la critique de chercheurs plus jeunes, la mettre à jour avec un nouvel état de l’art. J’en parlais fin avril 2014 dans le groupe HackYourPhD (La science et l’accès à la connaissance comme bien commun), quand le lendemain je reçois un mail du Risc au CNRS, Relais d’information sur les sciences de la cognition, me demandant l’autorisation de publier ma thèse numérisée ! Pure coïncidence, et vous pouvez en trouver le PDF dès maintenant [hélas, lien mort depuis 2017. La voici en auto-hébergement et en PDF aussi, 2Mo].

Il s’agit donc maintenant de la passer de LaTeX à HTML, et je vais tenter de le faire via medium.com.

Résumé de la thèse

Deux paradigmes principaux ont sous-tendu les recherches en Intelligence Artificielle depuis ses débuts : le paradigme cognitiviste, ou approche symbolique, et le paradigme connexionniste, ou approche subsymbolique. Ces paradigmes possèdent tous deux leurs avantages et leurs inconvénients, mais ceux-ci se complètent, et la coopération de systèmes relevant de chacun de ces deux paradigmes permet d’obtenir des artefacts aux capacités cognitives plus élaborées.

Une série de dualités résume l’alternative qui se pose au concepteur d’“artefacts intelligents” pour le choix d’un des deux paradigmes : inné et acquis, savoir-que et savoir-faire, res cogitans et res extensa, dynamique et statique, continu et discret… À l’aide de théories psychologique et neurobiologique, nous montrons qu’il est possible de concevoir des systèmes hybrides (symboliconnexionnistes) fortement couplés dans lesquels ces dualités ne sont plus des duels.

Les algorithmes neuronaux du second paradigme sont gourmands en temps de calcul, mais aisément parallélisables. La machine ArMenX composée d’une série de nœuds, chacun comportant un transputer, un circuit reconfigurable (FPGA) et un processeur de traitement du signal (DSP), reliés par deux anneaux de communication, est idéale pour héberger des applications possédant des grains de parallélisme différents.

Deux applications (robotique et reconnaissance des chiffres manuscrits) ont été développées pour illustrer l’harmonie existant entre ArMenX et les sytèmes hybrides. Ces applications soulignent les relations particulières qui s’établissent entre le système et son environnement (perception et action) et entre le système et son concepteur (processus éducationnel). Une série de principes méthodologiques est proposée au concepteur de tels systèmes.

Republication de la thèse

Je republie donc ma thèse par morceaux (elle fait 330 pages à l’origine), et le lecteur devra garder à l’esprit qu’elle a été rédigée en 1995. N’hésitez pas à commenter en marge pour donner des références plus modernes, poser des questions etc. Je ferai vivre ces bouts de texte republiés en les actualisant régulièrement.

La thèse comportait 3 parties de 3 chapitres. La première partie est intitulée “Intelligence Artificielle : un rêve fou ?” et pose le problème dans ses deux premiers chapitres, avant d’expliquer dans le troisième ce que pourrait être l’hybridation.

Partie I : Intelligence Artificielle : un rêve fou ?

Sinon, l’enfance, qu’y avait-il alors qu’il n’y a plus ? [Saint-John Perse, Éloges]

Chapitre 1 : L’intelligence artificielle en questions

Le retour sur l’Histoire de l’Intelligence Artificielle et des Sciences Cognitives que nous allons effectuer dans ce chapitre n’est pas inutile ; il ne saurait non plus être exhaustif. En cherchant à répondre à la question : “qu’est-ce que l’hybridation ?’’, nous nous sommes aperçus que la réponse ne pouvait être immédiate. Il existe, au delà des éléments de réponse qui nous viennent immédiatement à l’esprit, un corpus de notions qui pourrait conférer un caractère paradigmatique à l’hybridation.

Pour mettre à jour ce corpus de notions, nous dégageons dans cette Histoire les rendez-vous manqués entre les deux paradigmes principaux de l’Intelligence Artificielle, et les différentes batailles qui s’établirent entre eux. Nous montrons ensuite que ces luttes se sont articulées autour d’une série de couples. L’hybridation, une notion qui va peu à peu se préciser dans l’esprit du lecteur, au cours de cette première partie, propose des compromis entre ces différents couples.

Chapitre 1, première partie : une spécialité qui se cherche (republié le 8 mai 2014)

Chapitre 1, seconde partie : dualités ou duels ? (republié le 10 mai 2014)

à suivre, chapitre 2, “à la recherche de lieux de rencontres” (!) première partie…

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Ay. Poulain Maubant

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